Cour d'appel de Grenoble, 19 mai 2016, n° 14/03511

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, 19 mai 2016, n° 14/03511
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 14/03511
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Grenoble, 16 juin 2014, N° F12/01616

Sur les parties

Texte intégral

PS

RG N° 14/03511

N° Minute :

Notifié le :

Copie exécutoire délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

XXX

ARRÊT DU JEUDI 19 MAI 2016

Appel d’une décision (N° RG F 12/01616)

rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de GRENOBLE

en date du 17 juin 2014

suivant déclaration d’appel du 09 Juillet 2014

APPELANTE :

SARL COGEPART 38 prise en la personne de son représentant légal et dont le siège se situe au :

XXX

XXX

représentée par Me Nicolas FALQUE, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIME :

Monsieur B A

XXX

XXX

XXX

comparant en personne, assisté de Me Laure GERMAIN-PHION, avocat au barreau de GRENOBLE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Gilberte PONY, Président

Madame Magali DURAND-MULIN, Conseiller,

Monsieur Philippe SILVAN, Conseiller,

DÉBATS :

A l’audience publique du 17 Mars 2016,

Monsieur Philippe SILVAN chargé du rapport, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, assisté de Madame Chrystel ROHRER, Greffier, conformément aux dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, les parties ne s’y étant pas opposées ;

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 19 Mai 2016, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L’arrêt a été rendu le 19 Mai 2016.

RG 14/3511 PS

Selon contrat à durée indéterminée du 25 novembre 2009, M. A a été embauché par la société Cogepart Toulouse en qualité d’agent de transport. Le 31 mai 2010, il a été muté au sein de la SARL Cogepart 38.

Entre le 27 avril 2010 et le 5 octobre 2012, il a fait l’objet de diverses sanctions disciplinaires (avertissements et mises à pied).

Le 9 novembre 2012, M. A a été licencié pour faute grave.

Le 27 novembre 2012, M. A a saisi le conseil de prud hommes de Grenoble et demandé de :

' La condamnation de la SARL Cogepart 38 à lui payer la somme de 2 000 € à titre de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité de résultat en raison du défaut de visite médicale d embauche,

' L’annulation des avertissements des 27 avril 2010, 6 juin 2011, 24 octobre 2011 et 6 décembre 2011,

' La condamnation de la SARL Cogepart 38 à lui payer 1 000 € à titre de dommages et intérêts par avertissement annulé,

' L’annulation des mises à pied des 27 mars 2012, 2 juillet 2012 et 5 octobre 2012,

' La condamnation de la SARL Cogepart 38 à lui payer, pour chaque mise à pied, la somme de 2 000 € à titre de dommages et intérêts, 387,24 € à titre de rappel’de salaire et 38,72 € au titre des congés payés afférents,

' De dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

' De condamner la SARL Cogepart 38 à lui payer les sommes suivantes :

' 1092 € à titre d’indemnité de licenciement,

' 3640 € à titre d’indemnité de préavis,

' 364 € au titre des congés payés afférents,

' 20 000 € à titre de dommages et intérêts sans cause réelle et sérieuse,

' 6 000 € en raison de son manquement à la mise en place des délégués du personnel,

' 1524,40 € à titre de prime BEPLD,

' 516,73 € à titre de rappel’de salaire,

' 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 17 juin 2014, le conseil de prud hommes de Grenoble a :

' Prononcé l’annulation de l’avertissement du 6 juin 2011 et des mises à pied des 2 juillet 2012 et 5 octobre 2012,

' Dit que le licenciement de M. A était dépourvu de cause réelle et sérieuse,

' Condamné la SARL Cogepart 38 à payer à M. A les sommes suivantes :

' 387,24 € à titre de rappel de salaires pour la mise à pied du 2 juillet 2012,

' 38,72 € au titre des congés payés afférents,

' 154,90 € à titre de rappel de salaires pour la mise à pied du 5 octobre 2012,

' 15,49 € au titre des congés payés afférents,

' 1 092 € à titre d’indemnité de licenciement,

' 3 640 € à titre d’indemnité de préavis,

' 364 € au titre des congés payés afférents,

' 1 524,40 € au titre de la prime BEPVD,

' 516,73 € à titre de rappel’de salaires,

' Ces sommes avec intérêts de droit à la date du 18 décembre 2012,

' 500 € à titre de dommages et intérêts pour l’avertissement du 6 juin 2011,

' 1 000 € à titre de dommages et intérêts pour la mise à pied du 2 juillet 2012,

' 1 000 € à titre de dommages et intérêts pour la mise à pied du 5 octobre 2012,

' 13 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' 1 200 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

' Ces sommes avec intérêts de droit à la date du jugement,

' Débouté M. A du surplus de ses demandes,

' Ordonné à la SARLCogepart 38 de rembourser à Pôle Emploi les indemnités chômage versées à M. A dans limite de 6 mois,

' Débouté la SARLCogepart 38 de sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Cette décision a été notifiée aux parties le 17 juin 2014.

La SARLCogepart 38 a fait appel de ce jugement le 9 juillet 2014.

A l’issue des débats et de ses conclusions du 30 octobre 2015, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la SARLCogepart 38 demande de :

' Réformer le jugement déféré,

' Débouter M. A de ses demandes,

' Condamner M. A à lui payer la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle indique que M. A a été embauché en qualité d’agent de transport et que compte tenu de son activité professionnelle, son contrat de travail visait spécialement la nécessité de respecter le code de la route.

Elle expose qu’elle était fondée à sanctionner M. A à plusieurs reprises en raison d’accidents de la circulation engageant sa responsabilité, du refus de restituer le véhicule de livraison pendant ses congés, du refus de porter les chaussures de sécurité ou de scanner les ordres de retour, d’insultes à l’égard de son supérieur hiérarchiques qui lui avait demandé d’enlever des autocollants ou autres décorations placées sur le véhicule qu’il utilisait, de la disparition de deux pneus qu’il était censé avoir livrés, de l’indication erronée de la livraison d’un colis, de déclarations journalières d’activités mensongères, de l’abandon d’un colis, de menaces physiques vis-à-vis d’un autre salarié et de propos inadmissibles à l’égard d’un client.

Elle soutient que les faits commis en octobre 2012, compte tenu des 7 sanctions disciplinaires antérieures, justifient le licenciement pour faute grave de M. A.

Concernant la demande en dommages et intérêts formées du chef du défaut d’élection de délégué du personnel, elle fait valoir que M. A n’a pas réclamé l’organisation d’élection des délégués du personnel’et qu’il ne justifie d’aucun préjudice de ce chef.

Concernant la demande de rappel de la prime BEPVD, elle indique que cette prime est la contrepartie du respect par le salarié d’engagements, dont le respect du code de la route, que son non-paiement ne constitue pas une sanction disciplinaire mais résulte du constat que ses conditions d’attribution ne sont pas remplies.

Elle s’oppose à la demande en rappel de salaire présentée par M. A aux motifs que les méthodes de calcul avancées par M. A sont erronées en ce quelles intègrent une journée de travail antérieure à son embauche et comptent deux fois la même journée de travail.

Elle soutient enfin que M. A a fait l’objet d’une visite médicale d’embauche le 9 novembre 2010.

Au terme des débats et de ses conclusions du 4 novembre 2015 auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, M. A demande de :

' Réformer les dispositions du jugement du conseil de prud’hommes le déboutant d’une partie de ses demandes,

' Dire que la SARLCogepart 38 a manqué à son obligation de sécurité de résultat au titre de la visite médicale d’embauche,

' Condamner la SARLCogepart 38 à lui payer la somme de 2 000 € nets de dommages et intérêts, outre intérêts au taux légal,

' L’annulation des avertissements des 27 avril 2010, 6 juin 2011, 24 octobre 2011 et 6 décembre 2011,

' La condamnation de la SARLCogepart 38 à lui payer 1 000 € à titre de dommages et intérêts par avertissement annulé,

' L’annulation des mises à pied des 27 mars 2012, 2 juillet 2012 et 5 octobre 2012,

' La condamnation de la SARLCogepart 38 à lui payer, pour chaque mise à pied, la somme de 2 000 € à titre de dommages et intérêts, 387,24 € à titre de rappel de salaire et 38,72 € au titre des congés payés afférents,

' De dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

' De condamner la SARLCogepart 38 à lui payer les sommes suivantes :

' 1092 € à titre d’indemnité de licenciement,

' 3640 € à titre d’indemnité de préavis,

' 364 € au titre des congés payés afférents,

' 13 000 € à titre de dommages et intérêts sans cause réelle et sérieuse,

' 6 000 € nets en raison de son manquement à la mise en place des délégués du personnel,

' 1524,40 € à titre de prime BEPLD,

' 516,73 € à titre de rappel’de salaire,

' 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il indique qu’il a été embauché le 25 novembre 2009, qu’il n’a fait l’objet d’une visite médicale d’embauche que le 9 novembre 2010 et que le manquement de son employeur à lui faire passer une visite médicale d’embauche pendant sa période d’essai lui a nécessairement causé un préjudice.

Il conteste les griefs retenus à l’appui des sanctions disciplinaires prononcées à son encontre aux motifs que sa responsabilité n’est pas engagée dans les accidents fondant ceux-ci, que la suppression de la prime BEPVD pour l’accident du 19 avril2010 constitue une seconde sanction et ne pouvait donc être prononcée, qu’ il n est pas démontré que les salariés doivent restituer leur véhicule pendant les jours de repos ni qu’il en a été informé, que le grief tiré du défaut de scannage des produits et du port des chaussures de sécurité n’est pas daté ni démontré et que la procédure de traçabilité des produits n’est pas versée aux débats, qu’ il n’est pas démontré qu’ il a insulté son supérieur hiérarchique, que la disparition de pneus lors d’une livraison ne lui est pas imputable, qu’il n a pas rédigé de fausse déclaration journalière d’activité ou encore affirmé de manière mensongère avoir livré un colis.

Il dénie en outre avoir commis les faits invoqués par la SARLCogepart 38 à l’appui de son licenciement pour faute grave.

Il fait valoir que compte tenu de son effectif, la SARLCogepart 38 aurait dû mettre en place des délégués du personnel, que, malgré la demande du contrôleur du travail, elle a manqué à cette obligation et qu’il a nécessairement subi de ce chef un préjudice en raison de l’impossibilité d’être représenté ou défendu.

Il indique qu’il a été privé à plusieurs reprises du paiement de la prime BEPVD, que le non-paiement de cette prime par la SARLCogepart 38 en raison des infractions commises au code de la route constitue une amende ou sanction pécuniaire qui est prohibée par le code du travail, qu’ aucune infraction n’est rapportée à son encontre et que ni le contrat de travail ni tout autre document ne prévoient la suppression de cette prime pendant 6 mois suite à un accident de la route.

Il expose enfin qu’il justifie d’heures supplémentaires impayées pour 516,73 €.

SUR CE :

Sur la visite médicale d’embauche :

L’article R. 4624-10 du code du travail prévoit que le salarié bénéficie d’une visite médicale avant l’embauche ou au plus tard’avant l’expiration de la période d’essai par le médecin du travail.

En l’espèce, M. A a été embauché le 25 novembre 2009 par la société Cogepart Toulouse. Selon avenant du 31 mai 2010, il a été transféré à la société Cogepart 38. Il a été soumis à une visite médicale le 9 novembre 2010, soit postérieurement à l’expiration de la période d’essai. Le préjudice qu’il a nécessairement subi de ce chef sera justement indemnisé en lui allouant 300 € à titre de dommages et intérêts.

Sur les sanctions disciplinaires :

L’article L. 1333-1 du code du travail prévoit qu''en cas de litige en matière de sanction disciplinaire, la juridiction apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction, que l’employeur fournit au conseil de prud’hommes les éléments retenus pour prendre la sanction, qu’au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l’appui de ses allégations, le conseil de prud’hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles et que si un doute subsiste, il profite au salarié.

M. A a été embauché en qualité d’agent de transport. Dans le cadre de ses attributions, il assurait quotidiennement la conduite d’un véhicule. Son contrat de travail stipulait expressément son engagement à respecter le code de la route et à avoir une attitude exemplaire.

L’avertissement du 27 avril2010 :

Le 27 avril2010, M. A a été sanctionné d’un avertissement à la suite d’un accident de la circulation survenu le 19 avril2010 à l’occasion duquel, en virant à droite en sortant d’un chemin privé après avoir franchi un panneau « stop » pour s’engager sur la voie publique, il a heurté un véhicule venant de sa droite.

M. A, débiteur de la priorité, ne verse aux débats aucun élément permettant de démontrer que l’accident du 19 avril 2010 trouve sa cause dans une vitesse excessive du véhicule percuté. Par ailleurs, la circonstance que l’accident n’ait entraîné que des dégâts matériels pris en charge par les compagnies d’assurances, ne saurait l’exonérer de la faute commise dans le cadre de la conduite de son véhicule. En sa qualité de professionnel de la route, il lui appartenait de veiller au respect de la priorité prescrite par l’article R. 415-6 du code de la route. Dès lors, M. A ne peut conclure à l’annulation de cette sanction. Le jugement déféré sera en conséquence confirmé de ce chef.

L’avertissement du 6 juin 2011 :

Le 6 juin 2011, M. A a été sanctionné d’un avertissement en raison d’un accident de la circulation survenu le 9 mai 2011. Il ressort du procès-verbal de constat amiable dressé à cette occasion que M. A, qui circulait dans un rond-point, a été heurté par un autre véhicule au niveau de l’arrière droit. Par ailleurs, il résulte des observations sur le constat amiable rédigées par le conducteur de l’autre véhicule impliqué que l’accident est imputable au changement de voie de circulation de M. A qui lui a coupé la route. Dans ces conditions, il apparaît que M. A a changé brutalement de voie de circulation en violation de l’article R. 412-9 du code de la route. Son employeur était par conséquent fondé à sanctionner cette erreur de conduite. Le jugement déféré, en ce qu’ il a annulé cette sanction et condamné la SARLCogepart 38 à payer à M. A des dommages et intérêts de ce chef sera en conséquence infirmé.

Sur l’avertissement du 24 octobre 2011 :

Le 24 octobre 2011, M. A a été sanctionné d’un avertissement pour avoir refusé de restituer son véhicule de service pendant ses congés.

Contrairement aux allégations de M. A, son contrat de travail prévoit expressément que le véhicule mis à sa disposition était uniquement destiné à un usage personnel et ne pouvait être utilisé à des fins personnelles. Dès lors, son employeur était en droit de solliciter de ce dernier la restitution du véhicule en question pendant ses congés. Le jugement déféré, en ce qu’il a débouté M. A de sa demande d’annulation, sera en conséquence confirmé.

L’avertissement du 6 décembre 2011 :

M. A a été sanctionné le 6 décembre 2011 d’un avertissement aux motifs que ses ordres de mission n’étaient pas scannés et qu’il ne portait pas systématiquement ses chaussures de sécurité. Cependant, il convient de relever que la date des faits reprochés à M. A n’est pas mentionnée dans cette sanction et que la SARLCogepart 38 ne produit pas aux débats la procédure interne applicable au traitement des ordres de mission. L’imprécision pesant sur les faits sanctionnés ne permet pas d’en établir la réalité. Il conviendra en conséquence d’en prononcer l’annulation et de condamner la SARLCogepart 38 à payer à M. A la somme de 200 € à titre de dommages et intérêts de ce chef.

La mise à pied du 27 mars 2012 :

Le 27 mars 2012, M. A a été sanctionné d’une mise à pied de cinq jours pour avoir traité de « PD » et « d’enculé » M. Y son supérieur hiérarchique qui lui avait demandé de procéder au retrait des drapeaux, fanions et autocollants ornant le véhicule de service mis à sa disposition. Ces insultes sont contestées par M. A. En l’absence de tout témoignage de M. Y confirmant la réalité de ces insultes, il existe sur l’existence de la faute reprochée à M. A un doute qui devra lui profiter. Cette mise à pied devra en conséquence être annulée et la SARLCogepart 38 sera condamnée à payer à M. A la somme de 387,24 € à titre de rappel de salaire, outre celle de 38,72 € au titre des congés payés afférents ainsi que la somme de 300 € à titre de dommages et intérêts pour sanction injustifiée.

La mise à pied du 2 juillet 2012 :

Le 2 juillet 2012, M. A a été sanctionné d’une mise à pied de cinq jours en raison de la disparition de deux pneumatiques de marque Uniroyal à l’occasion d’une journée de livraison du 12 juin 2012. Cette sanction, fondée sur la disparition de deux pneumatiques confiés à M. A et la recherche vraisemblable d’un profit personnel par M. A, n’ est étayée par aucun élément de preuve tel que relevé informatique, bordereau de livraison, attestation du personnel de la SARLCogepart 38 ou témoignage des garages livrés, de nature à en rapporter la preuve. Il existe en conséquence sur la réalité de ces faits un doute qui devra profiter à M. A. Le jugement déféré, en ce qu’ il a fait droit à la demande d’annulation formée par M. A et en paiement du rappelde salaire et des congés payés afférents sera par conséquent confirmé. Par ailleurs, le préjudice subi par M. A en raison de cette sanction injustifiée sera indemnisé en lui allouant 300 € à titre de dommages et intérêts.

La mise à pied du 5 octobre 2012 :

Le 5 octobre 2012, M. A a été sanctionné par la SARLCogepart 38 d’une mise à pied de deux jours pour avoir scanné en statut « livré » un colis destiné à un client, générant ainsi du temps de travail de manière erronée et établi une fausse déclaration journalière d’activité (DJA) de manière à obtenir un paiement d’heures non-réalisées. Les listings informatiques ou autres pièces afférentes à l’opération de livraison litigieuse ne sont pas versés aux débats. De même, la DJA falsifiée par M. A n’est pas produite à l’instance. Il existe en conséquence un doute sur la réalité de la faute reprochée à M. A. Le jugement déféré, en ce qu’il a fait droit à la demande d’annulation formée par M. A et en paiement du rappel de salaire et des congés payés afférents sera par conséquent confirmé. Par ailleurs, le préjudice subi par M. A en raison de cette sanction injustifiée sera indemnisé en lui allouant 300 € à titre de dommages et intérêts.

Sur le licenciement de M. A :

Conformément à l’article L 1232-1 du code du travail tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Par ailleurs, conformément à l’article L 1235-1 du même code, le doute profite au salarié en cas de contestation du licenciement.

Par ailleurs, Il est de principe que la faute grave justifiant le licenciement résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations du travail d’une telle importance qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

En l’espèce, M. A a été sanctionné le 9 novembre 2012 pour faute grave. Cette rupture du contrat de travail est fondée sur les griefs suivants :

— 

Le 11 octobre 2012 : le défaut de livraison d’un colis au profit d’un client de Valence,

— Le 18 octobre 2012 : le dépôt d’un message de menace laissé à destination de ses collègues de travail dans son véhicule de service,

— Le 25 octobre 2012 : l’établissement d’une déclaration journalière d’activité erronée,

— Le 25 octobre 2012 : l’émission de propos désinvoltes devant un client.

Le premier grief reproché à M. A n’est étayé que par le témoignage de Mme X qui atteste avoir constaté la présence dans la cour voisine du dépôt de Domène d’un colis destiné à un client de Valence et devant être livré par M. A. Il n’est pas justifié de la remise de ce colis à M. A et de l’existence de la faute ainsi commise par ce dernier. De même, la déclaration journalière d’activité erronée remplie par M. A n’est pas produite aux débats. Ces reproches ne peuvent en conséquence valablement fonder le licenciement de M. A.

M. A ne conteste pas avoir laissé dans son véhicule de service un mot rédigé en ces termes « touche à quelque chose dans mon fourgon, je t’arrache la tête ». Il explique avoir laissé ce mot en raison de l’attitude irrespectueuse de ses collègues envers le matériel de la société, notamment le véhicule de service mis à sa disposition. Cependant, il convient de relever qu’il n est pas démontré que les collègues de M. A laissaient après usage le véhicule de service de M. A dans un état déplorable. Par ailleurs, la violence des termes employés excède très notablement les limites de la liberté d’expression dans l’entreprise. Par ailleurs, il ressort très clairement des termes du courriel de M. Z du 26 octobre 2012 que le 25 octobre 2012, M. A a eu des propos déplacés devant un client sensible de son employeur en lui indiquant que, n’entendant pas modifier ses habitudes, il ne respecterait pas la modification de la tournée de livraison mise en place par son employeur.

Il en ressort ainsi clairement que M. A a laissé, sans aucun motif légitime, un mot menaçant à l’égard de ses collègues dans le véhicule de service mis à sa disposition et qu’ il a eu des propos déplacés vis-à-vis d’un client sensible de l’entreprise indiquant son refus de respecter les nouveaux horaires de livraison.

Il a été retenu que M. A avait déjà été sanctionné à deux reprises en raison de son implication dans deux accidents de la circulation due à la violation du code de la route et d’un avertissement en raison de son refus de restituer son véhicule de service pendant ses congés. Ainsi que le relève sa lettre de licenciement, M. A a observé vis-à-vis de son employeur une attitude d’insubordination intolérable en raison de menaces à l’encontre d’un collègue et d’un comportement désinvolte à l’égard d’un client. Ces faits, qui sont de nature à porter gravement atteinte aux relations entre salariés et à l’image de la société à l’extérieur, justifiaient le licenciement de M. A. Le jugement déféré, en ce qu’il a dit que le licenciement de M. A ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse et condamné la SARLCogepart 38 à payer à M. A diverses sommes à titre d’indemnité de licenciement, d’indemnité de préavis et des congés payés afférents sera en conséquence infirmé.

Sur les dommages et intérêts en raison de l’absence de délégués du personnel :

L’article L. 2312-2 du code du travail prévoit que la mise en place des délégués du personnel est obligatoire si l’effectif de l’entreprise est d’au moins onze salariés pendant douze mois, consécutifs ou non, au cours des trois années précédentes.

En l’espèce, la SARLCogepart 38 admet sa défaillance dans l’exécution de son obligation de mettre en place des délégués du personnel. Cependant, l’assistance du salarié par une personne de son choix à l’occasion de la procédure de licenciement n’est pas limitée aux délégués du personnel. Dès lors, M. A ne peut se plaindre d’un préjudice personnel subi à raison du défaut de mise en place par la SARLCogepart 38 des délégués du personnel. Le jugement déféré, en ce qu’ il a rejeté ce chef de demande sera en conséquence confirmé.

Sur la prime BEPVD :

Le contrat de travail de M. A prévoit l’obligation pour ce dernier de respecter le bon entretien de son véhicule, les vérifications hebdomadaires et la prévention des vols et dégradations. Il stipule en outre le paiement au profit du salarié respectant ces obligations d’une prime dite « BEPVD ». Il n est pas contesté que M. A n a pas perçu cette prime pour les mois de janvier, février, mars, octobre et décembre 2010, janvier à juin 2011 et février à septembre 2012.

En l’espèce, les sanctions disciplinaires prononcées à l’encontre de M. A portent sur des infractions routières commises les 19 avril2010 et 9 mai 2011. Il n’est justifié d’aucun manquement commis par M. A pour les mois de janvier à mars 2010, janvier à avril 2011 ni pour les mois de février à septembre 2012. Par ailleurs, les conditions de retrait de cette prime, notamment leur durée, ne sont pas précisées dans le contrat de travail, laissant ainsi indûment la suppression de cet élément de rémunération à la libre discrétion de l’employeur. Le jugement déféré, en ce qu’ il a condamné la SARLCogepart 38 à payer à M. A les primes BEPVD retenues sera par conséquent confirmé.

Sur le rappel de salaire :

L’article L3171-4 du code du travail énonce qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, qu’au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu''il estime utiles et que si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable. En outre, il est de principe que le salarié qui engage une action au titre du temps de travail doit étayer sa demande.

En l’espèce, M. A produit ses déclarations journalières d’activités, des tableaux récapitulatifs et ses bulletins de paie permettant de relever des heures supplémentaires impayées pour les mois de novembre 2009, juillet et octobre 2012. La SARLCogepart 38 ne verse aux débats aucun élément de preuve de nature à remettre en cause les éléments produits aux débats par son ex-salarié. Le jugement déféré, en ce qu’ il a condamné la SARLCogepart 38 à payer à M. A la somme de 516,73 € de ce chef sera en conséquence confirmé.

Sur le surplus des demandes :

Il a été partiellement fait droit aux demandes de M. A, la SARLCogepart 38, partie perdante qui sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile, sera condamnée à lui payer 1 000 € au titre des frais irrépétibles qu’il a exposés pour la défense de ses intérêts.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Déclare la SARLCogepart 38 recevable en son appel,

Infirme le jugement du conseil de prud’hommes de Grenoble du 17 juin 2014 en ce qu’ il a :

— Prononcé l’annulation de l’avertissement du 6 juin 2011,

— Condamné la SARLCogepart 38 à payer à M. A la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts pour l’avertissement du 6 juin 2011,

— Dit que le licenciement de M. A était dépourvu de cause réelle et sérieuse,

— Condamné la SARLCogepart 38 à payer à M. A les sommes de 1092 € à titre d’indemnité de licenciement, 3640 € à titre d’indemnité de préavis, 364 € au titre des congés payés afférents et 13 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— Condamné la SARLCogepart 38 à payer à M. A la somme de 1 000 € à titre de dommages et intérêts pour la mise à pied du 2 juillet 2012,

— Condamné la SARLCogepart 38 à payer à M. A la somme de 1 000 € à titre de dommages et intérêts pour la mise à pied du 5 octobre 2012,

— Débouté M. A de sa demande en annulation de l’avertissement du 6 novembre 2011,

— Débouté M. A de sa demande en annulation de la mise à pieddu 27 mars 2012,

— Débouté M. A de sa demande en dommages et intérêts au titre de la violation par l’employeur de son obligation de sécurité de résultat,

— Ordonné à la SARLCogepart 38 de rembourser à Pôle Emploi les indemnités chômage versées à M. A dans limite de 6 mois,

Confirme le surplus de la décision déférée,

Statuant à nouveau sur les chefs d’infirmation,

Prononce l’annulation de l’avertissement du 6 novembre 2011 et condamne la SARLCogepart 38 à payer M. A la somme de 200 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

Prononce l’annulation de la mise à pied du 27 mars 2012 et condamne la SARL Cogepart 38 à payer à M. A les sommes suivantes : 387,24 € à titre de rappelde salaire,

38,72 € au titre des congés payés afférents et 300 € à titre de dommages et intérêts pour sanction injustifiée,

Condamne la SARL Cogepart 38 à payer à M. A la somme de 300 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par la mise à pied injustifiée du 2 juillet 2012,

Condamne la SARL Cogepart 38 à payer à M. A la somme de 300 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par la mise à pied injustifiée du 5 octobre 2012,

Condamne la SARL Cogepart 38 à payer à M. A la somme de 300 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice en raison de la violation de son obligation de sécurité de résultat,

Dit que le licenciement de M. A repose sur une faute grave,

Déboute M. A du surplus de ses demandes,

Y ajoutant,

Condamne la SARL Cogepart 38 à payer à M. A la somme de 1 000 € Au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute la SARL Cogepart 38 de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL Cogepart 38 aux dépens.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame PONY, Président, et par Monsieur MAHBOUBI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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Cour d'appel de Grenoble, 19 mai 2016, n° 14/03511