Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 26 novembre 2020, n° 20/02415

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 3e ch. a, 26 nov. 2020, n° 20/02415
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 20/02415
Décision précédente : Tribunal de commerce de Saint-Étienne, 22 février 2017, N° 2016l680
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 20/02415 – N° Portalis DBVX-V-B7E-M6HF

Décision du :

— Tribunal de Commerce de Saint Etienne

Au fond du 23 février 2017

RG : 2016l680

S.A.S. D E F

S.E.L.A.R.L. AJ PARTENAIRES

C/

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE CHALON SUR SAONE

S.A.S. TRANSPORT Y

S.E.L.A.R.L. Z A

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

3e chambre A

ARRET DU 26 Novembre 2020

APPELANTES :

S.A.S. D E F

[…]

[…]

S.E.L.A.R.L. AJ PARTENAIRES ès qualités d’administrateur judiciaire de la société D E F

[…]

[…]

Représentées par Me Hubert MORTEMARD DE BOISSE de la SELARL SELARL LEXCASE, avocat au barreau de LYON, toque : 851

INTIMÉES :

UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE CHALON SUR SAÔNE ès qualités de contrôleur de la procédure collective

[…]

[…]

Représentée par Me Charles CROZE de la SCP DEYGAS PERRACHON & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, toque : 757

S.A.S. TRANSPORT Y

[…]

[…]

Défaillante

S.E.L.A.R.L. Z A ès qualités de liquidateur judiciaire de la société D E F

[…]

Le Century

[…]

Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475

Assistée de Me G-Aline MENIERGALLO, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTERVENANTE :

S.E.L.A.R.L. AJ UP ès qualités d’administrateur judiciaire de la société D E F en remplacement de la société AJ PARTENAIRES, par ordonnance du Tribunal de commerce de Saint Etienne en date du 12 janvier 2017, puis désignée ès qualités de commissaire à l’exécution du plan de redressement de la société D E F suivant le jugement du Tribunal de commerce de Saint Etienne du 17 mai 2017

[…]

[…]

Représentée par Me Hubert MORTEMARD DE BOISSE de la SELARL SELARL LEXCASE, avocat au barreau de LYON, toque : 851

* * * * * *

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 15 Octobre 2020

Date de mise à disposition : 26 Novembre 2020

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

— G-H I, président

— Catherine CLERC, conseiller

— Hélène HOMS, conseiller

assistés pendant les débats de Elsa MILLARY, greffier placé

A l’audience, G-H I a fait le rapport, conformément à l’article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par G-H I, président, et par Elsa MILLARY, greffier placé, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSE DU LITIGE

La société D E F a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Saint-Etienne du 17 février 2016.

L’un des créanciers dénommé la société X Y a, le 29 février 2016 et sur la base de 4 factures, procédé à une déclaration à titre privilégié d’un ensemble de créances pour 66.026,40 € TTC relatives à des prestations de transport au bénéfice de D E F.

Sur requête de la SELARL AJ Partenaires représentée par Me Etienne-Martin ès qualités d’administrateur judiciaire de D E F, le juge-commissaire a, par ordonnance du 10 mai 2016, autorisé le règlement en 5 échéances à X Y de la somme de 68.458,14 € dite représenter 95'% de sa créance alors dite de 72.061,40 €, pour solde de tout compte, contre renoncement de la part de X Y à se prévaloir des dispositions de l’article L.132-8 du code de commerce.

La SELARL Z A représentée par Me Chrétien ès qualités de mandataire judiciaire de D E F, qui s’était déclarée défavorable à la proposition de l’administrateur judiciaire, a formé opposition à cette ordonnance le 20 mai 2016 au contradictoire de l’administrateur judiciaire, de D E F, de X Y et de l’AGS-CGEA.

Par jugement du 23 février 2017, le tribunal de commerce a :

• déclaré recevables et fondées les demandes de la SELARL Z A ès qualités,

• dit que la SELARL AJ Partenaires ès qualités ne disposait pas de la qualité pour agir seul aux lieu et place de D E F,

• annulé l’ordonnance du juge-commissaire du 10 mai 2016,

• dit en conséquence qu’il n’y a pas lieu de se prononcer sur les autres demandes et notamment sur les conditions d’application de l’article L.622-7 II du code de commerce, sur l’absence de concession réciproque et sur l’opposabilité ou non du surplus de la somme non déclarée,

• débouté la SELARL AJ Partenaires ès qualités de toutes ses demandes,

• condamné X Y à payer à la SELARL Z A ès qualités la somme de 2.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

• mis les dépens à la charge de X Y,

• et dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

L’administrateur judiciaire et D E F ont interjeté appel par acte du 10 mars 2017 (RG 17/1839) et le dossier a été fixé à plaider à l’audience du 15 février 2018.

Par arrêt de défaut du 5 avril 2018, la cour a ordonné la radiation de la cause pour régularisation de la procédure à l’égard du commissaire à l’exécution du plan en raison d’un plan de redressement autorisé au bénéfice de D E F par jugement du 17 mai 2017 et de la nécessité de signification à X Y intimé non constitué de l’intervention volontaire de la SELARL AJ UP représentée par Me Etienne-Martin, ès qualités de commissaire à l’exécution du plan opérée la veille de l’audience le 14 février 2018 sur avertissement de la chambre, étant aussi précisé que suite à un précédent jugement du 12 janvier 2017, AJ UP avait été désignée en remplacement de AJ Partenaires.

Sur déclaration de cessation des paiements de D E F, le tribunal a par jugement du 9 janvier 2019 prononcé sa liquidation judiciaire sur résolution du plan de redressement en nommant la SELARL Z A et la SELARL AJ UP en qualité respective de mandataire et d’administrateur judiciaires, puis, par jugement du 20 mars 2019, il a été mis fin à la poursuite d’activité à défaut d’offre de reprise dans le délai imparti.

Le 19 mars 2020, la SELARL Z A intimée ès qualités de liquidateur judiciaire de D E F a déposé des conclusions en reprise d’instance. En raison de la crise sanitaire liée à la Covid 19, l’affaire a été enregistrée le 22 avril 2020 (RG n°20/2415).

Puis, l’affaire a été inscrite dans le circuit de l’article 905 du code de procédure civile pour être plaidée à l’audience du 3 septembre 2020 par avis de fixation du 19 mai 2020.

Les parties ont conclu comme suit, étant précisé que la société X Y, à qui la SELARL Z A a fait signifier ses conclusions de reprise d’instance par acte du 25 mai 2020 remis à personne habilitée, n’a pas constitué avocat.

Par conclusions déposées le 25 août 2020, au visa des articles L.132-8, L.622-7, L.631-9, L.631-14, R.622-6, R.631-19, R.662-1 du code de commerce, 2044 du code civil, 446-1 et 860-1 du code de procédure civile, la société D E F et la SELARL AJ UP ès qualités d’administrateur judiciaire de cette société désignée en remplacement de la société AJ Partenaires par ordonnance du 12 janvier 2017 puis désignée ès qualités de commissaire à l’exécution du plan de redressement de D E F suivant jugement du 17 mai 2017 demandent à la cour de :

• constater qu’elle a été désignée par ordonnance du 12 janvier 2017 du tribunal de commerce en lieu et place de la société AJ Partenaires ès qualités d’administrateur judiciaire de D E F,

• constater qu’elle a été désignée par jugement du 17 mai 2017 ès qualités de commissaire à l’exécution du plan de redressement de D E F,

• constater que l’article L.622-7 du code de commerce oblige l’administrateur à solliciter l’autorisation du juge-commissaire avant toute transaction avec des créanciers antérieurs à la procédure,

• constater que le dirigeant de D E F a comparu à l’audience du juge-commissaire,

• constater que l’article L.622-7 prévoit la faculté de transiger sans distinguer sur l’objet de la transaction,

• constater que l’avis du ministère public n’est pas obligatoirement requis,

• constater qu’est caractérisée l’existence d’une contestation née ou à naître entre D E F et X Y,

• constater l’existence de concessions réciproques,

• en conséquence,

• infirmer le jugement déféré et statuant à nouveau,

• confirmer l’ordonnance du juge-commissaire du 10 mai 2016 dans toutes ses dispositions,

• juger que les dépens seront passés en frais privilégiés de procédure.

Par conclusions n°2 déposées le 27 août 2020 et fondées sur les articles 122 du code de procédure civile, L.622-7, L.631-14, R.622-6, L.622-24, L.622-24 II, L.631-14 du code de commerce, ainsi que 6, 1382, 2044 et 2045 du code civil, la SELARL Z A ès qualités de liquidateur judiciaire de D E F demande à la cour de :

• sur la nullité de l’ordonnance du juge-commissaire en raison de l’irrecevabilité de la requête présentée par l’administrateur judiciaire, confirmer le jugement déféré qui a retenu que ce dernier ne disposait pas de la qualité à agir en lieu et place de D E F aux fins de soutenir la requête et annulé l’ordonnance du 10 mai 2016,

• sur la nullité de l’ordonnance du juge-commissaire pour non-respect des conditions d’application de l’article L.622-7 II du code de commerce et absence de concessions réciproques':

infirmer l’ordonnance du juge-commissaire dans toutes ses dispositions en raison de l’inapplicabilité de ces dispositions aux présents faits de l’espèce, et en raison de l’absence d’avis du ministère public dans le cas contraire de leur applicabilité, enfin pour absence de concessions réciproques,

en tout état de cause, juger que les dérogations au principe d’interdiction du paiement des créances antérieures sont limitativement énumérées à l’article L.622-7 II du code de commerce,

juger que la mise en jeu par un créancier du débiteur des dispositions de l’article L.132-8 du code de commerce à l’encontre d’un client du débiteur ne constitue pas une cause de dérogation au principe de l’interdiction du paiement d’une créance antérieure,

juger que le paiement de la créance de X Y n’était pas nécessaire à la poursuite de l’activité de D E F,

juger en conséquence que le juge-commissaire ne pouvait valablement autoriser D E F à transiger avec X Y aux fins de s’acquitter du paiement d’une créance antérieure en contrepartie de l’abandon de 5'% du montant de ladite créance et d’un échelonnement sur 5 mois,

en conséquence, rejeter les demandes, fins et conclusions de D E F et de la SELARL AJ UP ès qualités d’administrateur judiciaire de D E F et confirmer l’annulation de l’ordonnance du juge-commissaire,

juger encore au surplus que le montant déclaré par X Y auprès du mandataire judiciaire dans le délai légal de production s’élève à la somme de 66.026,40€ TTC de telle manière que le surplus de la somme qui n’a pas été déclaré est manifestement inopposable à la procédure collective,

rejeter toute autre demande qui serait formulée par l’appelante,

• condamner X Y ou qui mieux le devra à lui payer ès qualités la somme de 6.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile en sus de celle allouée en première instance,

• avec charge des entiers dépens qui seront tirés en frais privilégiés de la procédure.

Par conclusions déposées le 10 juin 2020 fondées sur les articles 122 du code de procédure civile, L.622-7, R.622-6 du code de commerce et 2044 du code civil, l’UNEDIC Délégation AGS CGEA demande à la cour de':

• à titre principal,

• juger que l’administrateur judiciaire ne disposait pas de la qualité à agir,

• en conséquence, confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a considéré que la requête était

• irrecevable et annulé l’ordonnance du juge-commissaire, à titre subsidiaire,

• juger que les conditions d’application de l’article L.622-7 du code de commerce n’ont pas été respectées en ce que l’autorisation sollicitée ne correspond à aucune des hypothèses visées,

• juger que l’avis du ministère public aurait dû être sollicité,

• juger que l’autorisation sollicitée ne constituait pas une transaction en ce qu’il n’existe aucune contestation née ou à naître mais également aucune concession réciproque,

• juger que le surplus non déclaré de la créance est inopposable à la procédure collective,

• en conséquence, débouter D E F, AJ UP et X Y de leurs demandes et prononcer la nullité de l’ordonnance du 10 mai 2016,

• en toute hypothèse,

• condamner X Y ou qui mieux le devra à lui payer une somme de 2.000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

• ainsi qu’aux entiers dépens.

Par arrêt avant-dire droit du 17 septembre 2020, la cour a invité les parties sans révocation de la clôture à communiquer, au plus tard le 7 octobre 2020, leurs observations écrites sur le fait que l’instance n’a plus d’objet en l’état de la liquidation judiciaire affectant la société D E F par suite des jugements des 9 janvier et 20 mars 2019 ayant respectivement prononcé sa liquidation judiciaire sur résolution du plan de redressement et la fin de sa poursuite d’activité, dit que l’affaire sera à nouveau appelée à l’audience du 15 octobre 2020, sans renvoi possible et réservé les demandes des parties ainsi que les dépens.

La SELARL Z A mandataires judiciaires représentée par Me Chretien ès qualités de liquidateur judiciaire de D E F a, seule, conclu à nouveau le 25 septembre 2020, par écritures signifiées à X Y le 29 septembre 2020 (à personne habilitée), pour ajouter à ses précédentes prétentions [reprises aux termes de conclusions récapitulatives] celles tendant à':

• la constatation que la présente procédure a pour objet de rendre définitif le jugement déféré du 23 février 2017 annulant l’ordonnance du juge-commissaire du 10 mai 2016 afin de pouvoir recourir à l’exécution forcée à l’encontre de X Y aux fins de restitution de la somme de 68.458,14€ qui sera réintégrée dans la procédure collective au bénéfice de la masse des créanciers,

• en conséquence, condamner X Y à lui restituer cette somme de 68.458,14€ outre les intérêts à compter du jugement du 23 février 2017.

A noter que par message RPVA du 7 octobre 2020, le conseil de D E F a indiqué que le présent litige doit être placé dans son contexte passé pour apprécier l’opportunité de la transaction sollicitée et que l’objet du litige existe puisqu’une transaction a été conclue et exécutée. Par message RPVA du 5 octobre 2020, le conseil de l’UNEDIC a fait valoir que l’instance a toujours un objet au vu de l’exécution de la transaction et qu’il est nécessaire que la cour statue pour réformer l’ordonnance du juge-commissaire afin que le liquidateur judiciaire dispose d’un titre exécutoire à l’encontre de X Y.

MOTIFS

Aux termes de ses écritures, AJ UP sollicite l’infirmation du jugement déféré pour obtenir la confirmation des dispositions de l’ordonnance du juge-commissaire, à savoir l’autorisation de règlement en 5 échéances à X Y de la somme de 68.458,14 € dite représenter 95'% de sa créance de 72.061,40 € pour solde de tout compte [en réalité, le mandataire liquidateur justifie que la créance n’avait été déclarée qu’à hauteur de 66.026,40 € TTC], contre renoncement de la part de X Y à se prévaloir des dispositions de l’article L.132-8 du code de commerce et du surplus de sa créance.

Z A sollicite au contraire la confirmation du jugement déféré pour voir annuler l’ordonnance du juge-commissaire eu égard au défaut de qualité pour agir de l’administrateur judiciaire, en demandant de plus à la cour sur le fond de dire l’impossibilité d’une telle transaction qui viole les dispositions d’ordre public interdisant le paiement des créances antérieures, et en dernier lieu, de condamner X Y à restituer la somme objet de la transaction à réintégrer dans la procédure collective de D E F.

L’UNEDIC vient également à la confirmation du jugement déféré pour voir annuler l’ordonnance du juge-commissaire pour défaut de qualité de l’administrateur judiciaire et non-respect des conditions de fond de la transaction.

Etant désormais constant de l’avis unanime des parties que la transaction a été effectivement exécutée au profit de X Y qui a perçu la somme de 68.458,14 €, et alors que le jugement déféré n’était pas assorti de l’exécution provisoire, l’objet de l’instance est en définitive, au regard des règles juridiques applicables à une telle transaction, de la valider ou non, même s’il est acquis qu’actuellement, en l’état de la liquidation judiciaire de D E F, l’administrateur judiciaire n’a aucun pouvoir pour solliciter un tel acte.

La cour doit donc se placer en l’état antérieur à la liquidation judiciaire de D E F pour apprécier la validité de la transaction, pour ensuite, tirer de cette décision la conséquence juridique au regard de la procédure collective de D E F actuellement en liquidation judiciaire.

Sur la recevabilité de la requête

Cette question de la recevabilité de la requête présentée au juge-commissaire par le seul administrateur oblige à préciser au préalable le cadre juridique dans lequel cette requête a été présentée, et donc le fondement juridique de celle-ci.

Le fondement de la demande en autorisation de transaction

L’article L.622-7 du code de commerce dispose':

"I.-Le jugement ouvrant la procédure emporte, de plein droit, interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d’ouverture, à l’exception du paiement par compensation de créances connexes. Il emporte également, de plein droit, interdiction de payer toute créance née après le jugement d’ouverture, non mentionnée au I de l’article L.622-17. Ces interdictions ne sont pas applicables au paiement des créances alimentaires.

De même, il emporte, de plein droit, inopposabilité du droit de rétention conféré par le 4° de l’article 2286 du code civil pendant la période d’observation et l’exécution du plan, sauf si le bien objet du gage est compris dans une cession d’activité décidée en application de l’article L.626-1.

Il fait enfin obstacle à la conclusion et à la réalisation d’un pacte commissoire.

II.-Le juge-commissaire peut autoriser le débiteur à faire un acte de disposition étranger à la gestion courante de l’entreprise, à consentir une hypothèque, un gage ou un nantissement ou à compromettre ou transiger. Néanmoins, si cet acte est susceptible d’avoir une incidence déterminante sur l’issue de la procédure, le juge-commissaire ne peut statuer qu’après avoir recueilli l’avis du ministère public.

Le juge-commissaire peut aussi l’autoriser à payer des créances antérieures au jugement, pour retirer le gage ou une chose légitimement retenue ou encore pour obtenir le retour de biens et droits transférés à titre de garantie dans un patrimoine fiduciaire, lorsque ce retrait ou ce retour est justifié par la poursuite de l’activité. Ce paiement peut en outre être autorisé pour lever l’option d’achat d’un contrat de crédit-bail, lorsque cette levée d’option est justifiée par la poursuite de l’activité.

III.-Tout acte ou tout paiement passé en violation des dispositions du présent article est annulé à la demande de tout intéressé ou du ministère public, présentée dans un délai de trois ans à compter de la conclusion de l’acte ou du paiement de la créance. Lorsque l’acte est soumis à publicité, le délai court à compter de celle-ci."

En l’espèce, la requête présentée au juge-commissaire par l’administrateur est fondée sur les dispositions de l’article L.622-7- II précité, visant à l’autorisation d’une transaction avec le transporteur X Y qui dispose d’une créance antérieure, acte devant aboutir au paiement de 95% de cette créance (72.061,40 €) sur 5 mois en contre-partie du renoncement de ce créancier à diligenter des actions fondées sur l’article L.132-8 du code de commerce -action directe notamment à l’encontre des clients- ainsi qu’au paiement des 5% restants.

Le juge-commissaire qui a autorisé cet acte par son ordonnance du 10 mai 2016 a fait une mauvaise application de la loi.

En effet, une telle opération qui priverait la procédure collective d’un actif de plus de 72.000 €, échappant ainsi au gage commun des créanciers, n’entre pas dans la «'transaction'» visée à L.622-7- II, ce qui au demeurant, écarte la nécessité d’un avis préalable du ministère public.

Le texte du premier alinéa du § II de l’article L.622-7, visant les actes que peut autoriser le juge-commissaire, ne comprend pas la transaction sur une créance antérieure qui est soumise au seul principe visé au § I du texte légal à savoir l’interdiction de paiement préférentiel de tout créancier antérieur, principe fondamental du droit des procédures collectives.

Cette interdiction de toute transaction relative à une créance antérieure est aussi confirmée in fine par le texte légal, visant l’impossibilité de tout pacte commissoire («Le jugement ouvrant la procédure … fait enfin obstacle à la conclusion et à la réalisation d’un pacte commissoire'»).

Les seules dérogations au principe d’interdiction de paiement de créance antérieure sont visées, expressément et sans possibilité d’interprétation extensive, par l’alinéa 2 du § II, à savoir retrait ou retour de gage ou de biens, option d’achat d’un contrat de crédit-bail, et parfois encore, sous condition que ces actes soient justifiés par la poursuite de l’activité.

La transaction litigieuse visée par la requête déposée par l’administrateur, à laquelle D E F croit pouvoir s’associer en vertu de l’effet dévolutif de l’opposition déposée devant le tribunal puis de l’appel soumis à la présente cour, est étrangère aux actes visés à l’article L.622-7- II portant dérogation à la règle d’interdiction des paiements des créances antérieures.

AJ Partenaires devenue AJ UP et D E F ne peuvent pas dans leurs écritures prétendre que «'la requête ' sollicitait l’autorisation de transiger avec un transporteur, et non de payer une quelconque créance antérieure'», ce qui n’est pas sérieux, dès lors que le but affiché de la transaction était d’assurer en 5 mensualités consécutives le paiement de 95% de la créance de X Y.

Les appelants sont encore moins sérieux lorsqu’ils évoquent «'l’opposition systématique d’un mandataire judiciaire à l’égard des ordonnances autorisant la conclusion de transactions'» ce qui porterait «'gravement atteinte à l’exploitation'», alors que ce mandataire en la personne de Z A soutient une action visant au respect de la règle de droit par l’administrateur judiciaire.

Il ne peut non plus être soutenu que ladite transaction comportait des concessions réciproques, dès lors que X Y bénéficiait d’un paiement préférentiel à hauteur de la quasi-totalité de sa créance soit 95%, au lieu de voir sa créance faire partie d’un plan de continuation potentiel, de sorte que sa concession ne portait, même au visa d’une courte marge pour l’activité de transporteur, que sur

une faible portion (5%) de sa créance et que l’étalement du paiement sur 5 mois n’est nullement significatif.

Surtout, il manque la preuve de l’existence de contestations nées ou à naître, fondement même de toute transaction, puisqu’en l’espèce, la créance du transporteur est liée à l’ouverture de la procédure collective et qu’ensuite, l’action directe qui lui est accordée par la loi repose sur un mécanisme légal justement créé pour faire face à de telles situations d’impayés qu’il y ait ouverture ou non de procédure collective pour la société bénéficiaire des prestations de transport.

Ainsi, la volonté de l’administrateur d’éviter l’application de l’action directe de l’article L.132-8, au motif prétendu de permettre la sauvegarde du fonds de commerce premier actif du gage commun des créanciers, n’a pu justifier la requête, ne pouvant pas éluder un principe directeur du droit des procédures collectives (interdiction du paiement préférentiel), sans compter qu’un tel renoncement avait pour objet une action hypothétique.

Quant à l’opportunité de la transaction au regard de la poursuite d’activité, elle n’est pas avérée en terme de nécessité pour assurer la poursuite de l’activité de D E F, ce qui est confirmé par le fait que, en l’absence même de transaction, justement refusée par le tribunal, D E F a été en mesure de présenter un plan de redressement, même voué à la non-réussite ultérieure.

En tous cas, la transaction litigieuse ne pouvait pas être autorisée par le juge-commissaire, étant exclue des actes dérogatoires pouvant lui être soumis et étant soumise au régime de plein droit des créances antérieures.

En conséquence, la requête de l’administrateur judiciaire du 6 avril 2016, tout comme celle présentée conjointement par D E F d’abord devant le tribunal puis en cause d’appel, est non fondée, eu égard au cadre juridique dans lequel elle était présentée.

Elle était en tous cas irrecevable devant le juge-commissaire eu égard à l’absence de qualité à agir de celui qui l’a présentée.

Sur la qualité à agir de l’administrateur

Il est constant que seule AJ Partenaires devenue AJ UP a présenté la requête au juge-commissaire en vue d’autorisation de la transaction à conclure avec X Y.

Il est également constant que AJ Partenaires devenue AJ UP a été chargée d’une mission d’assistance de D E F, ce qui ne correspond ni à une mission de surveillance, ni à une mission de représentation.

Eu égard à cette mission d’assistance, en respect des dispositions de l’article L.631-14 alinéa 3 in fine du code de commerce, applicable à la cause en combinaison avec l’article L.622-7 précité, l’administrateur exerce les prérogatives conférées au débiteur «'concurremment'» avec ce dernier.

Ce terme «'concurremment'» ne revêt qu’une acception unique, insusceptible d’interprétation, exigeant le concours de l’administrateur et du débiteur, ne permettant pas un acte présenté par le seul administrateur.

Les appelants sont mal fondés à soutenir que la requête pouvait être présentée par le débiteur seul ou bien par l’administrateur seul, ce qui correspond à une acception juridiquement erronée du terme «'concurremment'».

L’article R.631-19 du code de commerce, qui permet à l’administrateur seul de présenter une requête,

est inapplicable en l’espèce car cette disposition ne joue que dans l’hypothèse de l’autorisation des actes dérogatoires de l’article L.622-7- II, dont la transaction litigieuse ne fait pas partie ainsi qu’il a été précédemment jugé.

Il importe peu que le débiteur, certes présent devant le juge-commissaire, ait pu oralement donner un accord présumé à l’acte envisagé (la transaction), ce qui est d’ailleurs contesté par Z A et ce qui ne résulte pas des pièces du dossier, dès lors que la requête a été déposée par l’administrateur seul.

Il importe peu également que la doctrine, telle que présentée inexactement par AJ UP et D E F, ait pu accepter un exercice par l’administrateur de certaines prérogatives du débiteur, ce qui n’est pas démontré s’agissant d’une transaction qui avait l’effet de contourner la règle de l’interdiction des paiements préférentiels à des créanciers antérieurs.

Il importe peu encore que la transaction portée par l’administrateur ait été présentée comme favorisant la poursuite d’activité de D E F, l’objet d’une requête ne pouvant pas la valider si elle fait échec à un principe d’ordre public.

De ces éléments conjugués, est tirée la conclusion que l’administrateur judiciaire s’est érigé en représentant du débiteur, qualité qui ne lui avait pas été conférée.

Par voie de conséquence, eu égard au défaut de qualité de AJ Partenaires devenue AJ UP, la requête présentée au juge-commissaire était irrecevable, enlevant à ce dernier tout pouvoir pour statuer sur la requête.

Par ces motifs partiellement substitués, le jugement déféré est confirmé en ce qu’il a annulé l’ordonnance du juge commissaire du 10 mai 2016 en toutes ses dispositions eu égard au défaut de qualité de AJ Partenaires devenue AJ UP pour agir à fin d’autorisation de transaction et débouté la SELARL AJ Partenaires devenue AJ UP ès qualités d’administrateur judiciaire de la société D E F de toutes ses demandes.

Sur la condamnation de X Y

La transaction conclue avec X Y est dépourvue de fondement juridique.

Elle a néanmoins été exécutée par 5 paiements intervenus entre le 24 juin et le 24 octobre 2016 comme en justifie le liquidateur.

Aucun moyen contraire n’étant développé par les parties, ce transporteur doit, sur la juste demande de la part du liquidateur judiciaire de D E F, être condamné à restituer la somme perçue de 68.458,14€, qui sera réintégrée dans la procédure collective au bénéfice de la collectivité des créanciers.

Les intérêts moratoires sont dus à compter de la notification du présent arrêt qui fixe la dette de restitution de X Y et non pas depuis le jugement comme le liquidateur judiciaire le demande à tort.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens':

Les dépens de première instance et d’appel sont tirés en frais privilégiés de procédure collective comme requis par le mandataire judiciaire, et, en sus de l’indemnité de procédure allouée en première instance au bénéfice de Z A (2.000€) à charge de X Y, il est prévu en cause d’appel une indemnité à charge de l’appelant AJ UP au profit de Z A ainsi que de UNEDIC.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,

Recevant l’intervention volontaire de la Selarl AJ UP en remplacement de AJ Partenaires ès qualités d’administrateur judiciaire de D E F,

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a annulé l’ordonnance du juge-commissaire du 10 mai 2016 en toutes ses dispositions eu égard au défaut de qualité de AJ Partenaires devenue AJ UP pour agir à fin d’autorisation de transaction et débouté la SELARL AJ Partenaires devenue AJ UP ès qualités d’administrateur judiciaire de la société D E F de toutes ses demandes,

Y ajoutant,

En l’absence de fondement juridique à la transaction, condamne la société X Y à restituer à la SELARL Z A ès qualités de mandataire liquidateur de la société D E F la somme de 68.458,14€, avec intérêts moratoires à compter de la notification du présent arrêt,

Condamne la SELARL AJ UP ès qualités d’administrateur judiciaire de D E F à verser à la SELARL Z A ès qualités de mandataire liquidateur de la société D E F une indemnité de procédure de 3.500€ pour la cause d’appel,

Condamne la SELARL AJ UP ès qualités d’administrateur judiciaire de D E F à verser à l’association UNEDIC Délégation AGS CGEA une indemnité de procédure de 2.000€,

Dit que les dépens de première instance et d’appel sont tirés en frais privilégiés de procédure collective.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

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Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 26 novembre 2020, n° 20/02415