Cour d'appel de Paris, 9 juillet 2015, n° 13/21872

  • Sociétés·
  • Contrats·
  • Commission·
  • Agent commercial·
  • Titre·
  • Transaction·
  • In solidum·
  • Client·
  • Dire·
  • Rupture

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Paris, 9 juill. 2015, n° 13/21872
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 13/21872
Décision précédente : Tribunal de commerce de Paris, 3 octobre 2013, N° 2011017582

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 5

ARRET DU 09 JUILLET 2015

(n° , 12 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 13/21872

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Octobre 2013 – Tribunal de Commerce de PARIS – 9e chambre – RG n° 2011017582

APPELANTES

SARL HELIATIS

ayant son siège XXX

XXX

prise en la personne de son liquidateur amiable domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par et assistée de Me Morgan JAMET de la SELARL Arst Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C0739

INTIMEES

SAS LEYTON ET ASSOCIES

ayant son siège social 146, bureaux de la Colline

XXX

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

SAS CTR

ayant son siège social 146, bureaux de la Colline

XXX

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

SAS Z

ayant son siège social 146, bureaux de la Colline

XXX

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentées par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Assistées de Me Franck BUREL, avocat au barreau de LYON, toque : 2148

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 09 Avril 2015, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Colette PERRIN, Présidente de chambre, chargée du rapport, et Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Colette PERRIN, Présidente de chambre

Monsieur Patrick BIROLLEAU, Président

Madame C D, Conseillère

Greffier, lors des débats : Monsieur Bruno REITZER

ARRÊT :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Colette PERRIN, Présidente et par Monsieur Bruno REITZER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

****

Faits et procédure

La société Dariane aux droits de laquelle vient la société CTR a une activité de conseil en matière d’optimisation des charges sociales et fiscales, intervenant dans l’analyse technique des traitements, juridiques, fiscaux et financiers des coûts et charges de ses clients ;

Par contrat à durée déterminée du 25 octobre 2004, elle a embauché M. X, spécialisé dans ce secteur d’activité depuis 20 ans et qui bénéficiait de contacts privilégiés ;

A l’issue d’une période d’essai renouvelée les parties décidaient de mettre fin au contrat de travail de M. X et de poursuivre des relations commerciales dans le cadre d’une société créée à cette fin par M. X ;

C’est ainsi que le 3 mai 2005 la société Leyton a conclu un contrat à durée indéterminée qualifié de contrat de courtage avec la société Heliatis (société an cours de constitution) confiant à celle-ci la mission de trouver pour la société CTR des clients intéressés par « … les opérations de recherche d’économie dans le domaine des charges sociales et des taxes assises sur les salaires » ;

Le 18 novembre 2005, la société Heliatis a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris et les parties ont régularisé le contrat ;

Le 8 septembre 2006, un avenant a étendu l’objet du contrat aux missions de « ' recherche d’économie des cotisations d’accidents du travail, du recours contre tiers, des subventions en formation, de la TVA/FCTVA, de la fiscalité locale (taxe professionnelle et taxe foncière) et le domaine des achats » ;

Le 21 novembre 2006, un avenant a réduit la commission de la société Heliatis de 25% « … à 22% dans les cas où le rendez-vous à l’origine de la signature proviendrait du centre d’appel » ;

Les relations commerciales se sont en réalité déroulées avec les trois sociétés du groupe, la société Leyton & Associés, la société CTR et la société Z en l’absence de contrat écrit selon les modalités du contrat conclu avec la société CTR ;

Par lettres recommandées avec AR en date du 4 novembre 2009, les trois sociétés ont résilié le contrat de courtage ;

Le 29 avril 2010, une transaction a été signée entre les parties ;

La société Heliatis, estimant que cet accord transactionnel était extrêmement déséquilibré et ne prenait pas en compte des sommes qui lui étaient dues, et les parties n’ayant pu se rapprocher, elle a, par exploit en date du 22 février 2011, fait assigner les sociétés Leyton et associés, CTR et société Z devant le tribunal de commerce de Paris ;

Par jugement rendu le 4 octobre 2013, assorti de l’exécution provisoire à hauteur de 207.949, 93 €, le tribunal de commerce de Paris a :

— débouté la société Heliatis de sa demande de requalification de ses contrats en contrat d’agent commercial ;

— prononcé la nullité du protocole d’accord transactionnel du 29 avril 2010 ;

— condamné in solidum les sociétés Leyton et associes, CTR et Z à payer à la société Heliatis la somme de 40.000 € au titre de l’indemnité de préavis ;

— condamné in solidum les sociétés Leyton et associes, CTR et Z à payer à la société Heliatis la somme de 355.949,93 € TTC au titre de ses honoraires et commissions arriérées ;

— condamne in solidum les sociétés Leyton et associes, CTR et Z à payer à la société Heliatis la somme de 12.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Les parties ont, chacune, relevé appel de ce jugement.

Vu les dernières conclusions signifiées par les Société Leyton et associés, CTR et Z le 16 avril 2014, par lesquelles il est demandé à la cour de :

— dire et juger recevable mais mal fondée la société Heliatis en son appel formé à l’encontre du jugement du tribunal de commerce de Paris du 4 octobre 2013 ;

En conséquence,

— débouter la société Heliatis de sa demande de confirmation du jugement du tribunal de commerce de Paris du 4 octobre 2013 en ce qu’il a :

* prononcé la nullité du protocole d’accord transactionnel ;

* condamné les sociétés LEYTON, CTR et Z, in solidum, à payer à la société Heliatis la somme de 40.000 euros au titre de l’indemnité de préavis ;

* condamné les sociétés LEYTON, CTR et Z à payer à la société HELIATIS la somme de 355.949,93 euros TTC au titre de ses honoraires et commissions impayées ;

* condamné les sociétés LEYTON, CTR et Z à payer à la société HELIATIS la somme de 12.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

* ordonné l’exécution provisoire sans constitution de garantie à hauteur de 207.949,93 euros ;

— réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté la société Heliatis de sa demande de requalification en agent commercial ;

A TITRE PRINCIPAL :

1°) Sur la transaction

— dire et juger que les commissions dues à la société Heliatis au titre des contrats amenés par elle s’établissent à ce jour à la somme de 508.000 euros hors taxes ;

— dire et juger que les sociétés Leyton, CTR et Z ont payé à la société Heliatis, au cours de leurs relations contractuelles, la somme de 484.000 euros au titre de commissions ;

— dire et juger qu’au moment de la transaction, la société Heliatis ne pouvait revendiquer un moins perçu de commissions qu’à hauteur de 24.000 euros ;

— dire et juger que de ces sommes doivent être retirées les commissions nées de l’exécution de contrats qui n’ont pas été amenés par la société Heliatis, tel le contrat Prosegur, signé par les ingénieurs d’affaires du Groupe, et qui a généré plus de 60.000 euros de commissions ;

— dire et jurer qu’en tout état de cause, à date de signature de la transaction, la société Heliatis n’était pas fondée à solliciter un quelconque rappel de commissions ;

— dire et juger que même à défalquer le montant des commissions revendiquées au titre du contrat Monoprix (soit 87.000 euros HT), les 200.000 euros versés à la société Heliatis à titre d’indemnité transactionnelle causent la transaction et en constituent une concession parfaitement valable ;

— dire et juger en conséquence que la transaction conclue le 29 avril 2010 entre les parties était parfaitement valable,

— nommer tel expert qu’il plaira à la Cour, avec pour mission de déterminer le montant de commissions dues à la société Heliatis sur le fondement des contrats signés ensuite de l’intervention de la société Heliatis et à l’exclusion des contrats signés ensuite de l’intervention des ingénieurs d’affaires du groupe, et plus précisément :

* de déterminer le niveau des honoraires factures par les sociétés du groupe sur les dits contrats, – de déterminer le niveau des honoraires encaissés par les sociétés du groupe sur les dits contrats,

* de déterminer le montant total des commissions payées par les sociétés du Groupe à la société Heliatis au cours des relations contractuelles.

En conséquence :

— dire et juger recevable mais mal fondée la société Heliatis en son appel tendant à la confirmation du jugement sur ce point ;

— débouter la société HELIATIS de sa demande de confirmation du jugement sur ce point ;

— réformer le jugement en ce qu’il a prononcé l’annulation de la transaction et condamné in solidum les sociétés Leyton, CTR et Z à payer la somme de 297.814 euros H.T soit 355.949,93 euros à titre de commissions.

2°) Sur l’indemnité de préavis

— dire et juger que la société Heliatis a disposé d’un préavis suffisant au regard de la durée des relations commerciales ;

— dire et juger que la société Heliatis a pu continuer librement et sans aucune restriction à utiliser les matériels et logiciels mis à sa disposition par les sociétés du groupe, qui allaient même plus loin que la lettre du contrat les liant dans la nature des autorisations d’accès donnes à leurs informations internes,

— dire et juger que la société Heliatis ne démontre absolument pas les griefs et restrictions qu’elle invoque.

En conséquence :

— dire et juger recevable mais mal fondée la société Heliatis en son appel tendant à la confirmation du jugement sur ce point ;

— débouter la société Heliatis de sa demande de confirmation du jugement sur ce point ;

— réformer le jugement en ce qu’il a accordé à la société Heliatis la somme de 40.000 € à titre d’indemnité de préavis.

A TITRE SUBSIDIAIRE :

3°) Sur la demande de requalification en agent commercial

— dire et juger que la société Heliatis n’avait aucunement mission de négocier et de signer les contrats des comptes qu’elle présentait aux sociétés Leyton, CTR et Z ;

— dire et juger qu’elle se contentait, conformément aux dispositions contractuelles, à prospecter et à rechercher des clients pour le compte des concluantes ;

En consequence :

— dire et juger la société Heliatis recevable mais mal fondée en son appel tendant à l’infirmation du jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société Heliatis de sa demande de requalification en contrat d’agent commercial ;

— débouter la société Heliatis de sa demande tendant à l’infirmation du jugement en ce qu’il a débouté la société Heliatis de sa demande de requalification en contrat d’agent commercial ;

— confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Heliatis de sa demande de requalification en contrat d’agent commercial.

4°) Sur la demande de rappel de commissions

— dire et juger que les commissions dues à la société Heliatis au titre des contrats amenés par elle s’établissent à ce jour à la somme de 508.000 euros HT ;

— dire et juger que les sociétés Leyton, CTR et Z ont payé à la société Heliatis, au cours de leurs relations contractuelles, la somme de 484.000 € au titre de commissions,

— dire et juger qu’au moment de la transaction, la société Heliatis ne pouvait revendiquer un moins perçu de commissions qu’à hauteur de 24.000 euros ;

— dire et juger que de ces sommes doivent être retires les commissions nées de l’exécution de contrats qui n’ont pas été amenés par la société Heliatis, tel le contrat Prosegur, signe par les ingénieurs d’affaires du groupe, et qui a généré plus de 60.000 euros de commissions ;

— dire et juger qu’en tout état de cause, à la date de signature de la transaction, la société Heliatis n’était pas fondée à solliciter un quelconque rappel de commissions ;

En consequence :

— dire et juger recevable mais mal fondée la société Heliatis en son appel tendant à la confirmation du jugement sur ce point ;

— débouter la société Heliatis de sa demande de confirmation du jugement sur ce point ;

— rejeter comme infondée la demande de la société Heliatis de paiement de la somme totale de 355.949,93 euros TTC au titre de diverses factures et commissions ;

— infirmer le jugement en ce qu’il a condamne les sociétés Leyton, CTR et Z au paiement de la somme de 355.949,93 euros TTC au titre de diverses factures et commissions.

EN TOUTE HYPOTHESE :

— dire et juger que la demande de la société Heliatis relative à l’indemnité pour procédure abusive est infondée ;

En conséquence,

— débouter la société Heliatis de sa demande d’infirmation du jugement sur ce point et de ses demandes de condamnation au paiement de la somme de 400.000 € au titre d’indemnité de rupture et de la somme de 50.000 € pour résistance abusive ;

— condamner solidairement la société Heliatis et Monsieur X à payer aux défenderesses la somme de 15.000,00 euros en indemnisation de leur préjudice consistant dans la perte de temps pour retraiter rétroactivement les éléments de comptabilité ;

— débouter la société Heliatis de sa demande de condamnation in solidum des société Leyton, CTR et Z au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— rejeter l’intégralité des demandes et argumentaires de la société Heliatis comme infondées.

— condamner la société Heliatis à verser la somme de 7.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Les appelantes affirment que la validité du Protocole conclu le 29 avril 2010 ne saurait valablement être remise en cause car, contrairement à ce que soutient a société Heliatis, non seulement ledit accord comporte des concessions réciproques de la part de chacune des parties, mais il a également été conclu avec leur consentement éclairé, sans aucune violence économique exercée sur la société Heliatis.

Elles font valoir que le contrat conclu était un contrat de courtage en ce que la société Heliatis apportait des clients mais était dépourvue de tout pouvoir pour négocier et conclure les contrats.

Elles rappellent que la rupture brutale est celle donnée sans préavis ou avec un préavis insuffisant, compte tenu de la durée de la relation commerciale et qu’en l’espèce, le contrat prévoyait un préavis d’une durée de trois mois, durée qu’elles estiment suffisante.

Elles expliquent que la société Heliatis persiste à leur reprocher une résistance abusive au paiement de factures, alors même que ces dernières ont parfaitement respecté leurs obligations. Elles ajoutent que la société Heliatis poursuit en prétendant que le refus de paiement des factures litigieuses l’aurait placée dans une situation financière difficile, sans pour autant le démontrer en l’absence de lien de causalité entre les prétendues fautes et le préjudice allégué.

Enfin, elles estiment que l’agent commercial perd le droit à réparation s’il n’a pas notifié au mandant dans un délai d’un an à compter de la cessation du contrat, qu’il entend faire valoir ses droits ; que le délai d’un an est expiré ; qu’il en résulte que l’action de la société Heliatis est tardive et donc irrecevable.

Vu les dernières conclusions signifiées par la société Heliatis le 25 mars 2015, par lesquelles il est demandé à la cour de :

— confirmer le jugement rendu le 4 octobre 2013 par le tribunal de commerce de Paris en ce qu’il a :

* prononcé la nullité du protocole d’accord transactionnel du 29 avril 2010 ;

* condamné in solidum les sociétés Leyton et associes, CTR et Z à payer à la société Heliatis la somme de 40.000 euros au titre de l’indemnité de préavis ;

* condamné in solidum les sociétés Leyton et associes, CTR et Z à payer à la société Heliatis la somme de 355.949,93 euros au titre de ses honoraires et commissions arriérées ;

* condamné in solidum les sociétés Leyton et associes, CTR et Z à payer à la société Heliatis la somme de 12.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

* ordonné l’exécution provisoire du présent jugement sans constitution de garantie à hauteur de 207.949,93 euros ;

— infirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société Heliatis de sa demande tendant à la requalification des contrats conclus par la société Heliatis et les sociétés Leyton, CTR et Z en contrats d’agent commercial et à l’indemnisation au titre de la rupture du contrat et de la résistance abusive ;

En conséquence,

— condamner la société Leyton à payer à la société Heliatis la somme de 243.376,03 € TTC au titre des commissions lui restant dues ;

— condamner la société CTR à payer à la société Heliatis la somme de 116.093,05 € TTC au titre des commissions lui restant dues ;

— condamner in solidum les sociétés Leyton, CTR et Z à payer à la société Heliatis une indemnité de rupture à hauteur de la somme de 1.209.624,12 €condamner in solidum les sociétés Leyton, CTR et Z à payer à la société Heliatis la somme 50.000 € à titre de dommages intérêt pour résistance abusive ;

— condamner in solidum les sociétés Leyton, CTR et Z à payer à la société Heliatis la somme de 15.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

La société Heliatis expose que la transaction doit être déclarée nulle pour défaut de concessions de la part des sociétés Leyton, CTR et Z. Elle estime de surcroît avoir subi une violence économique, ayant vicié son consentement à la conclusion de l’accord transactionnel en cause.

Elle fait valoir que l’ensemble des circonstances mettent en évidence que la société Heliatis a uniquement eu vocation à être une personne morale sous couvert de laquelle Monsieur A X avait vocation à exercer les mêmes missions que celles qui étaient les siennes en tant que salarié, à savoir des missions d’agent commercial et non celles d’un courtier.

Elle ajoute que l’accomplissement de telles missions pour le groupe Leyton par la société Heliatis doit être qualifié comme ayant été exercé dans le cadre d’un contrat d’agent commercial et non de contrat de courtier, le groupe Leyton ayant recouru à une telle qualification pour échapper aux obligations en découlant.

Elle prétend que la décision de cessation des relations implique le paiement à l’agent commercial d’une indemnité de rupture, laquelle est fixée, selon les usages, à 2 années de commissions.

Elle estime que les conditions dans lesquelles s’est déroulée la rupture des contrats démontrent le caractère abusif et dépourvu de motif de celle-ci. Elle expose qu’à l’expiration du délai de préavis, dont les sociétés Leyton, CTR et Z ont rendu impossible l’exécution, elles lui ont proposé de poursuivre leur collaboration, mais à des tarifs de commissionnement inférieurs de moitie à ceux appliqués aux cours des 5 dernières années.

Enfin, la société Heliatis insiste sur le préjudice qu’elle a subi puisqu’elle exerçait à titre exclusif son activité au profit des sociétés du groupe Leyton et que la rupture des contrats a naturellement conduit à sa cessation d’activité.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la qualification du contrat liant les parties

Considérant que la société Heliatis soutient que le contrat qui la liait à la société Leyton est un contrat d’agent commercial. alors que celle-ci affirme qu’il s’agit d’un contrat de courtage, la société Heliatis ayant eu seulement pour mission de trouver des clients pour le compte des sociétés du groupe sans aucun pouvoir de négociation des contrats ;

Considérant que « l’agent commercial est un mandataire qui à titre de profession indépendante, sans être lié par un contrat de louage de service, est chargé, de façon permanente de négocier et éventuellement de conclure des contrats de vente, de location ou de prestations de service au nom et pour le compte de producteurs, d’industriels, de commerçants ou d’autres agents commerciaux. Il peut être une personne physique pou une personne morale » ;

Considérant que, si la société Heliatis qui revendique la qualité d’agent commercial n’était pas inscrite au registre du commerce en cette qualité et si le contrat liant les parties était qualifié de contrat de courtage, ces circonstances sont en elle-même inopérantes pour déterminer la qualité de la société Heliatis qui ne peut résulter que de l’activité de cette dernière ;

Considérant que les missions confiées à la société Heliatis ont été définies dans le préambule du contrat à savoir « aider le donneur d’ordre à trouver des opportunités auprès de la clientèle pour la commercialisation et la diffusion de ses prestations dans le domaine de la recherche d’économies des charges sociales et des taxes assises sur les salaires », champ d’activité qui sera étendu notamment aux cotisations d’accident du travail et de la TVA , aux subventions de formation, à la fiscalité locale et au financement de l’innovation ;

Considérant que l’article 2 du contrat liant la société Heliatis aux sociétés du groupe Leyton stipule que « Le donneur d’ordre charge le courtier de trouver des clients intéressés par les opérations de recherches d »économies dans le domaine des charges sociales et des taxes assises sur les salaires.

Il peut éventuellement le charger de négocier les conditions propres à une ou plusieurs commandes. La négociation devra alors porter sur le périmètre de l’intervention du donneur d’ordre et sa rémunération » ;

Considérant que le contrat liant les parties prévoyait donc expressément une activité de négociation sur deux points, d’une part le périmètre d’intervention de l’agent, d’autre part la rémunération du donneur d’ordre donc sur le prix de la prestation ; que si la société Leyton prétend que la société Heliatis n’a pas réalisé une activité de négociation des contrats et n’a eu pour seule activité que de rechercher des clients, la signature des contrats relevant de ses ingénieurs d’affaire, il convient de relever que M. X avait, avant de créer la société Heliatis, été embauché en cette même qualité par la société CTR en raison de son activité antérieure pendant plus de vingt ans et qu’à l’issue d’une période d’essai il avait créée sa société pour reprendre les activités qui étaient les siennes ; que la société CTR ne l’ignorait pas puisqu’elle a engagé une relation commerciale alors que la société Heliatis était seulement en cours de création ;

Considérant que les sociétés du groupe Leyton affirment que la société Heliatis ne négociait aucun contrat en ce qu’il ne pouvait y avoir aucune négociation notamment sur le mode de rémunération car était mis en 'uvre un mode de rémunération aux résultats destiné à permettre d’une part, une valorisation du savoir faire, d’autre part à rémunérer la prise de risque puisqu’en l’absence de résultats, les sociétés du groupe ne percevaient aucune rémunération ; que toutefois M. X avait aussi une parfaite connaissance de ce secteur d’activité et partageait le risque, la société Heliatis étant, au terme de l’article 8 du contrat rémunérée par une commission se décomposant à hauteur de « 15% lors de la facturation par le donneur d’ordre et 10% lors de l’encaissement des fonds par le donneur d’ordre de sorte que le mandataire était soumis au même aléa de succès que son mandant ;

Considérant que par avenant du 21 novembre 2006, les missions de la société Heliatis ont été étendues à la gestion des rendez vous provenant du centre d’appel de la société CTR ce qui démontre que l’activité de la société Heliatis n’était pas limitée à l’apport de clients ;

Considérant que la société Leyton affirme qu’elle a mis au point des contrats type sans pour autant démontrer que ceux-ci couvraient tout le champ d’activité de la société Heliatis, ni qu’ils excluaient toute marge de négociation ;

Considérant que M. X, dirigeant de la société Heliatis produit des photocopies de contrats sur lesquels il figure comme représentant des sociétés du groupe, certains comportant au surplus sa signature, démontrant ainsi qu’il avait le pouvoir d’engager ses mandants tant sur la prestation, son étendue et son prix ce qui exigeait une négociation préalable ; que, si les sociétés du groupe Leyton font valoir que, pour certains sans les préciser, le rapprochement avec les originaux met en évidence une autre signature, elle ne prétend pas pour autant que les pièces produites par la société Heliatis seraient des faux ; que la Cour observe par ailleurs qu’au regard, d’une part, de l’importance de l’activité des clients apportés par M. X et sa société, d’autre part, de la variété des prestations offertes par les sociétés du groupe Leyton, la signature d’un contrat pour la réalisation d’une prestation par la société Heliatis n’empêchait pas les autres ingénieurs d’affaire des sociétés du groupe Leyton de conclure dans le même temps un autre contrat pour une autre prestation ;

Considérant que la société Leyton ne démontre, ni n’allègue que la société Heliatis n’aurait pas exercé son activité dans les termes mêmes de son contrat lesquels correspondent à une activité d’agent commercial alors même que la société Heliatis justifie par ses pièces qu’elle agissait de façon indépendante pour négocier et conclure des contrats pour le compte de son mandant, caractérisant ainsi une activité d’agent commercial ; qu’il y a lieu de réformer le jugement entrepris sur ce point ;

Sur l’accord transactionnel

Considérant que la société Heliatis soutient que le protocole transactionnel établi entre les parties le 29 avril 2010 était disproportionné puisqu’elle a accepté le paiement d’une somme de 200 000€ alors, d’une part, que les factures qu’elle avait émises n’avaient pas été contestées et que, d’autre part, elle pouvait prétendre à des commissions sur les contrats récurrents d’année en année ; qu’elle ajoutait qu’elle était en droit d’obtenir des commissions supplémentaires sur le client Monoprix car elle n’avait perçu que 12,5% et non 25% comme stipulé contractuellement, des commissions sur les contrats qui auraient pu être conclus pendant sa période de préavis si elle n’avait pas été empêchée de l’exécuter et enfin une indemnité au titre de la rupture de son contrat d’agent commercial ;

Considérant que les sociétés Leyton, CTR et Z font valoir que certains contrats apportés par la société Heliatis n’ont pu générer d’honoraires soit parce que les propositions d’économie au client final n’ont pas prospéré, soit parce que le client a refusé de régler, soit parce qu’un remboursement ou un avoir a dû être mis en place ;

Considérant qu’elles produisent des éléments nouveaux concernant le calcul des rémunérations auxquelles pouvait prétendre la société Heliatis, à savoir des extraits de compte sur la période allant de la rupture des relations commerciales entre les parties au 30 juin 2012 dont il ressort du solde comptable un montant encaissé de 935 058,17€ soit un taux de commissionnement de la société Heliatis de 233 764€ ; qu’en partant du document recensant les encaissements réalisés sur les mêmes dossiers pendant la même période, le total encaissé s’établit à la somme de 957 731,92€ soit une somme de 239 423€ en application du taux de commissionnement de sorte que ces montants sont proches de la somme convenue par le protocole ; que la résiliation étant intervenue le 2 novembre 2009, M. X ne démontre pas qu’il aurait été stipulé au profit de sa société des commissions récurrentes au titre des clients apportés puisque les contrats ont été conclus par d’autres ingénieurs d’affaire ;

Considérant que par ailleurs la somme convenue de 200 000€ était immédiatement liquidable alors que ce n’est que fin 2012 soit plusieurs années après la fin des relations commerciales que M. X aurait pu bénéficier d’une telle somme ;

Considérant que, comme il a été vu précédemment la société Heliatis est intervenue en qualité d’agent commercial de sorte qu’elle ne peut, en l’absence de toute stipulation contractuelle, demander des commissions au titre de contrats conclus avec les clients apportés après la rupture de son contrat d’agent commercial, la clientèle apportée appartenant au mandant ;

Considérant qu’en revanche au titre de cet apport elle a droit à une indemnité compensatrice de rupture que les usages chiffrent à deux ans de commissions ; qu’au titre des sommes perçues en 2008 et 2009, elle chiffre ce montant à la somme de 400 000€ ; que, si ce montant est le double de l’indemnité transactionnelle convenue, l’accord transactionnel ne peut priver la société de son droit à cette indemnité prévue par le statut des agents commerciaux qui est d’ordre public et que, dès lors, ce montant ne saurait être pris en compte pour apprécier le caractère disproportionné ou non de la transaction, la société Heliatis formulant une demande de paiement de cette indemnité ;

Considérant que les éléments chiffrés apportés par les sociétés Leyton et quand bien même seraient retenues les commissions dues au titre du client Monoprix retenues par les premiers juges mettent en évidence que la somme de 200 000€ était supérieure aux sommes auxquelles pouvait prétendre la société Heliatis ;

Considérant que lors de la négociation de cet accord et de sa signature la société Heliatis était accompagnée de son conseil ; que le fait qu’elle était alors l’objet d’un redressement fiscal ne saurait être imputé aux sociétés du groupe Leyton et caractériser une dépendance économique l’ayant contrainte à accepter cette transaction ; qu’il y a lieu de réformer le jugement entrepris ;

Sur la demande de la société Heliatis au titre de ses commissions

Considérant que la société Heliatis soutient que la société Leyton lui doit une somme de 243 376,03€ et la société CTR une somme de 116 093,05€ ; sommes contestées par ces deux sociétés ;

Considérant que les parties ayant convenu d’un accord sur le paiement des commissions dues et la Cour ayant rejeté la demande d’annulation de celui-ci, il n’y a pas lieu d’examiner la question des commissions qui étaient dues, les parties ayant convenu d’un accord sur ce point ;

Sur la demande au titre de l’indemnité de rupture

Considérant que la société Heliatis estime le montant de cette indemnité à la somme de 1 209 624,12€, faisant valoir que depuis 2005 elle a consacré son activité au développement de la clientèle des trois sociétés Leyton, CTR et Z ;

Considérant qu’il n’est allégué aucune faute à l’encontre de la société Heliatis de sorte que celle-ci est fondée à demander paiement d’une indemnité de rupture que les usages fixent habituellement à deux ans de commissions ; qu’elle n’apporte pas d’élément qui justifierait qu’il soit dérogé à cette pratique dès lors que s’il ne saurait être contesté son apport de clients, la durée de la relation n’a été que de 4 ans ;

Considérant qu’elle fait état de commissions perçues en 2008 et 2009 de 400 000€, chiffre qui n’est pas contesté, réclamant néanmoins que cette indemnité soit fixée à la somme de 1 209 624,12€ faisant valoir d’une part que les contrats qui ont été communiqués le 11 mars 2015 ont généré un chiffre d’affaires de 1 349 373,54€ soit un montant de commissions de 809 624,13€, d’autre part que l’intégralité des documents contractuels et comptables n’ont pas été communiqués ;

Considérant que, pour parvenir au montant réclamé, la société Heliatis se fonde sur des commissions récurrentes que la Cour a écartées ; que la société Heliatis a accepté un protocole transactionnel fixant à 200 000€ le montant des commissions qui lui restait dues ; que dès lors les parties s’étant entendues sur ce montant, il y a lieu de le prendre en compte pour fixer l’indemnité de rupture et l’ajouter au montant de 400 000€ ; qu’en conséquence la Cour en fixe le montant à 600 000€ ;

Sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive

Considérant que la société Heliatis fait état d’une résistance abusive des sociétés Leyton, CTR et Z ; que toutefois elle avait librement signé une transaction de sorte que sa demande au titre des commissions n’est pas fondée et qu’elle ne pouvait réclamer qu’une indemnité de rupture en sa qualité d’agent commercial, qualité qui était discutée ; que par ailleurs ses demandes étaient largement supérieures au montant que la Cour a retenu de sorte qu’elle ne peut alléguer d’une résistance abusive de ses mandants à faire droit à ses exigences ; qu’il y a lieu de la débouter de sa demande ;

Sur la demande des sociétés Leyton, CTR et Z en indemnisation de leur préjudice

Considérant que les sociétés Leyton, CTR et Y font valoir un préjudice résultant du temps passé pour retraiter rétroactivement les éléments de comptabilité ;

Considérant que le mandant doit remettre à son mandataire des éléments fiables concernant les chiffres d’affaire réalisés de sorte que si elles ont dû procéder à cette fin à un travail comptable, elles ne démontrent pas que la société Helaitis aurait commis une faute en lien avec celui-ci ; qu’il y a lieu en conséquence de rejeter leur demande à ce titre ;

Sur l’article 700 du code de procédure civile

Considérant que la société Heliatis a dû engager des frais non compris dans les dépens qu’il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge, qu’il y a lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

INFIRME le jugement déféré,

CONDAMNE in solidum les sociétés Leton, CTR et Z à payer à la société Heliatis la somme de 600 000€ à titre d’indemnité de rupture.

CONDAMNE in solidum les sociétés Leyton, CTR et Z à payer la somme de 8 000€ à la société Heliatis au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

REJETTE toute autre demande, fin ou conclusion plus ample ou contraire.

CONDAMNE les sociétés Leyton, CTR et Y aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier La Présidente

B.REITZER C.PERRIN

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
Extraits similaires à la sélection
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, 9 juillet 2015, n° 13/21872