Cour d'appel de Paris, Pôle 1 chambre 8, 20 décembre 2019, n° 19/10338

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 ch. 8, 20 déc. 2019, n° 19/10338
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 19/10338
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal de commerce de Bobigny, 29 avril 2019, N° 2018R00190
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 15 octobre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 8

ARRÊT DU 20 DÉCEMBRE 2019

(n° 389, 11 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/10338 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B76ZQ

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 30 Avril 2019 -Président du TC de BOBIGNY – RG n° 2018R00190

APPELANTE

SAS HYDROPTION, prise en la personne de son représentant légal domicilié en

cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Assistée par Me Etienne GOUESSE de Viguié Schmidt & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : R145

INTIMÉES

Société ÉLECTRICITÉ DE FRANCE (EDF), représentée par son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 1]

Société EDF TRADING LIMITED (EDFT)

[Adresse 3]

[Localité 3]

Société EDF TRADING MARKETS LIMITED (EDFM)

[Adresse 3],

[Localité 3]

Représentées et assistées par Me Michel GUÉNAIRE de l’AARPI GIDE LOYRETTE NOUEL AARPI, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 21 Novembre 2019, en audience publique, rapport ayant été fait par Mme Sylvie KERNER-MENAY, Présidente conformément aux articles 785, 786 et 905 du CPC, les avocats ne s’y étant pas opposés.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Sylvie KERNER-MENAY, Présidente

M. Thomas VASSEUR, Conseiller

Mme Isabelle CHESNOT, Conseillère

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Anaïs SCHOEPFER

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Sylvie KERNER-MENAY, Présidente et par Anaïs SCHOEPFER, Greffière.

EXPOSE DU LITIGE

La société Electricité de France (ci-après : 'EDF') gère le parc nucléaire national et assure à ce titre l’entretien, la maintenance et l’exploitation des centrales nucléaires françaises. Elle est également fournisseur d’électricité, marché récemment ouvert à la concurrence, et approvisionne les fournisseurs du marché de gros sur lequel les sociétés EDF Trading Limited et EDF Trading Markets Limited (ci-après : 'EDFT’ et 'EDFM') effectuent des transactions de vente et d’achat d’électricité.

Depuis 2015, la SAS Hydroption (ci-après : 'Hydroption') est également fournisseur d’électricité. Cette société formate ses offres commerciales à partir d’algorithmes permettant de corréler la consommation d’électricité avec les capacités de production afin de déterminer un niveau de prix à court et moyen terme.

Faisant état d’anomalies sur le marché de gros de l’électricité en 2016, Hydroption a saisi le président du tribunal de commerce de Bobigny sur requête, afin d’obtenir une mesure probatoire destinée à déterminer si EDFT et EDFM avaient bénéficié d’une information anticipée inconnue du public et en conséquence avaient adopté une stratégie tendant à alimenter artificiellement la hausse des cours.

Par ordonnance non contradictoire du 15 février 2018, au visa de l’article 145 du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce de Bobigny a fait droit à la requête introduite par Hydroption. Le 28 février 2018, maître [K] [S], huissier de justice, a exécuté l’ordonnance. Les données saisies au siège social d’EDF ont alors été placées sous séquestre.

Par acte du 20 mars 2018, EDF, EDFT et EDFM ont assigné Hydroption en référé rétractation de l’ordonnance du 15 février 2018. Par une ordonnance du 28 juin 2018, le juge des référés du tribunal de commerce de Bobigny statuant en formation collégiale et en l’absence du magistrat ayant rendu l’ordonnance sur requête a :

— Débouté la SA Electricité de France, EDF Trading limited et EDF Trading markets limited de leurs demandes tendant à la rétraction de l’ordonnance sur requête rendue le 15 février 2018 ;

— Débouté les parties de toutes leurs prétentions incompatibles avec la motivation retenue ou le dispositif ;

— Laissé les dépens à la charge de la SA Electricité de France, EDF Trading limited et EDF Trading markets limited ;

— Liquidé les dépens à recouvrer par 1e greffe à la somme de 84,04 euros TTC (dont 14,01 euros de TVA).

Par déclaration du 11 juillet 2018, les sociétés EDF, EDFT et EDFM ont interjeté appel de cette ordonnance en ce qu’elle les a déboutées de leurs demandes tendant à la rétractation de l’ordonnance sur requête rendue le 15 février 2018 et laissé les dépens à leur charge.

Suivant un arrêt n° RG 18/17333 du 20 février 2019 devenu définitif, la cour d’appel de Paris a infirmé cette décision et ordonné la rétraction de l’ordonnance sur requête du 15 février 2018 et ordonné la restitution de l’ensemble des documents saisis et placés sous séquestre par Maître [K] [S] le 28 février 2018.

Parallèlement à cette procédure en rétractation, et suivant un acte d’huissier du 27 avril 2018, la société Hydroption a assigné EDF, EDFT et EDFM devant le juge des référés du tribunal de commerce de Bobigny aux fins d’obtenir la levée de ce séquestre et ordonner aux sociétés EDF, EDF Trading et EDF Trading Markets de communiquer sous astreinte 'des éléments manquant’s afin de satisfaire aux termes de l’ordonnance de 15 février 2018, à savoir :

— l’intégralité des transactions effectuées de gré a gré sur les produits à terme et sur les périodes suivantes :

— future Q4 2016 et Q1 201 7 entre le 1er juillet et le 31 août 2016 ;

— future Q1 2017 entre le 1er septembre et le 31 octobre 2016 ;

— future Week-45 2016 entre le 24 octobre et le 3 novembre 2016 ;

— future Week-3 2017 entre le 2 et le 13 janvier 2017 ;

— l’intégralité des transactions spot effectuées sur la bourse EEX et de gré a gré pour les périodes visées par l’ordonnance, a savoir :

— entre le 1er juillet et le 31 août 2016 ;

— entre le 1er septembre et le 31 octobre 2016 ;

— entre le 24 octobre et le 3 novembre 2016 (sur le contrat de la semaine 452016);

— entre le 2 et le 13 janvier 2017 (sur le contrat de la semaine 3-2017) ;

A la suite de l’arrêt du 20 février 2019, la société Hydroption a limité sa demande à la communication des pièces susvisées au regard de l’existence d’un motif légitime et du caractère proportionné de cette demande.

Par une ordonnance en date du 30 avril 2019, le président du tribunal de commerce de Bobigny a :

— ordonné, si ce n’est déjà fait, la restitution aux sociétés EDF, EDF Trading et EDF Trading Markets limited, de l’intégralité des documents saisis par 1'huissier et conservés par lui en séquestre ;

— débouté Hydroption de sa demande de communication de pièces ;

— débouté les parties de leurs demandes au titre de 1'article 700 du code de procédure civile;

— dit que les entiers dépens sont à la charge de la société Hydroption ;

— liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 79, 87 euros TTC (dont 13,31 euros de TVA).

Le premier juge a retenu que l’autorité de la chose jugée de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 20 février 2019 devenu définitif rétractant l’ordonnance du 15 février 2018 interdisait qu’il soit jugé sur les mêmes faits ; que les éléments demandés par Hydroption dans ses conclusions du 13 mars 2019 sont les mêmes que ceux demandés dans la requête initiale; que ces éléments font partie de l’ordonnance rendue par le président du tribunal, ordonnance qui a été finalement rétractée ; que les documents sollicités sont très généraux et qu’ils se heurtent au secret des affaires.

Par déclaration en date du 14 mai 2019, la société Hydroption a relevé appel de l’ensemble des chefs de cette décision.

Dans ses dernières conclusions en date du 6 septembre 2019, la société Hydroption demande à la cour de bien vouloir :

Vu les articles 122,145,488 et 700 du code de procédure civile, l’article 1355 du code civil, l’article 131-1 du code des procédures civiles d’exécution, l’ordonnance sur requête du 15 février 2018, l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 20 février 2019,

— constater qu’elle a sollicité une mesure d’instruction autorisée par M. le Président dans son ordonnance du 15 février 2018 ;

— constater que cette mesure a été accordée mais que EDF, EDF Trading et EDF Trading Markets ont fait obstacle à l’exécution de la mesure d’instruction ordonnée en ne communiquant pas une partie des éléments ;

— constater que cette mesure a été rétractée ;

— constater que les éléments de contexte relevés par Hydroption caractérisent un motif légitime d’ordonner une mesure d’instruction ;

— constater que la demande de production s’entend d’une mesure d’instruction légalement admissible ;

— constater que le périmètre de la mesure sollicitée est proportionné et préserve les intérêts d’EDF, EDF Trading et EDF Trading Markets, en particulier le secret des affaires ;

Dès lors,

— réformer l’ordonnance en ce qu’elle a opposé à Hydroption l’autorité de la chose jugée dès lors que le juge des référés en a fait une application erronée ;

— juger son action recevable et sa demande d’une mesure d’instruction fondée sur un motif légitime et proportionnée à l’objectif poursuivi, sans qu’elle ne se heurte au secret des affaires ;

— ordonner à EDF, EDF Trading et EDF Trading Markets de lui communiquer la copie de:

— l’intégralité des transactions effectuées de gré à gré et sur la bourse EEX sur les produits à terme et sur les périodes suivantes :

— future Q4 2016 et Q1 2017 entre le 1er juillet et le 31 août 2016 ;

— future Q1 2017 entre le 1er septembre et le 31 octobre 2016 ;

— future Week-45 2016 entre le 24 octobre et le 3 novembre 2016 ;

— future Week-3 2017 entre le 2 et le 13 Janvier 2017 ;

— l’intégralité des transactions spot effectuées de gré à gré et sur la bourse EEX pour les périodes visées par l’ordonnance rendue initialement, à savoir,

— entre le 1er juillet et le 31 août 2016 ;

— entre le 1er septembre et le 31 octobre 2016 ;

— entre le 24 octobre et le 3 novembre 2016 (sur le contrat de la semaine 45-2016);

— entre le 2 et le 13 Janvier 2017 (sur le contrat de la semaine 3-2017) ;

— dire que cette injonction de communiquer sera assortie d’une astreinte de cinquante mille euros (50.000 euros) par jour et courra à compter du prononcé de l’ordonnance à intervenir;

En tout état de cause,

— condamner EDF, EDF Trading et EDF Trading Markets à lui verser la somme de cinq mille euros (5.000 euros) sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner EDF et EDF Trading aux entiers dépens.

L’appelante soutient que :

— l’ordonnance rendue en référé n’a pas l’autorité de la chose jugée au principal et peut être modifiée dans des circonstances nouvelles ; qu’ a fortiori l’ordonnance sur requête étant dépourvue de l’autorité de la chose jugée, une partie peut former une demande en référé fondée sur les mêmes éléments et entre les mêmes parties ; qu’en toute hypothèse, les conditions de l’autorité de la chose jugée ne sont pas réunies ;

— il appartenait au juge des référés de constater que si les parties à la cause étaient les mêmes, il n’y avait pas identité des demandes formulées, ni identité de cause (sur requête en première demande / dans un cadre contradictoire dans la seconde ; demande d’autoriser l’intervention d’un huissier dans la première/ demande de condamnation de EDF à communiquer sous astreinte dans la second) ; qu’en outre, le périmètre des éléments à appréhender est plus étendu dans la seconde procédure que dans la première ; qu’il n’y a donc en outre pas identité d’objet comme exigé par l’article 1355 du code civil ;

— l’autorité de la chose jugée ne pouvait exister qu’à l’égard du seul point tranché par la cour d’appel à savoir la motivation, en l’espèce insuffisante, à la dérogation au principe du contradictoire ; qu’elle en a tiré les conséquences en saisissant le juge des référés dans un cadre contradictoire ;

— le motif légitime exigé par l’article 145 du code de procédure civile s’apprécie en considération du procès dans la perspective duquel la mesure d’instruction est sollicitée ; elle peut avoir pour objectif de conserver les preuves ou de les établir ; l’existence d’une contestation sérieuse ne constitue pas un obstacle à la saisine du juge sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ;

— en l’espèce, le motif légitime est caractérisé par 'les éléments de contexte, en particulier le détail de l’information fournie par EDF dans le cadre de REMIT mais également les anomalies constatées sur le marché de gros de l’électricité sur cette période, avec l’analyse détaillée d’un expert des marchés sur les fluctuations alors observées et les bénéfices exceptionnels d’EDF sur le trading à la même période’ qu’il est d’autant plus caractérisé qu’il doit être mis en perspective avec le préjudice corrélatif qu’elle a subi et qu’elle évalue à la somme de 14 millions à parfaire ;

— il s’agit donc pour elle de déterminer si EDF (et/ou ses démembrements) est à l’origine des mouvements suspects que l’expert a observés en analysant les éléments du marché, la mesure de communication ayant pour objet de déterminer le comportement d’EDF sur la période suspecte, avant et après la publication d’une information dans le Canard Enchaîné qui a, selon elle, précipité une hausse des cours, en mettant en évidence les opérations réalisées avec les informations données par ailleurs dans le cadre du REMIT ;

— la mesure sollicitée a pour finalité d’établir avant tout procès l’imputabilité éventuelle des anomalies constatées aux acteurs qui disposaient de la meilleure information sur la disponibilité du parc nucléaire ;

— la mesure sollicitée est légalement admissible et proportionnée : les informations dont la communication est sollicitée portent sur des opérations intervenues en 2016 et début 2017 sans indication de l’identité des fournisseurs et des acheteurs ; qu’il est seulement question de connaître les opérations réalisées, leurs objets (quantité et échéance), leurs dates, leurs valeurs ; que la mesure est donc proportionnée et ne se heurte aucunement au secret des affaires ;

— la demande porte sur des copies des transactions listées et sur des éléments relatifs à une période passée dont les cours sont aujourd’hui bloqués ; que la communication ne présente aucun caractère préjudiciable pour la société EDF ;

— afin d’assurer la bonne exécution de la communication des éléments, une astreinte est nécessaire.

Dans leurs dernières conclusions en date du 31 octobre 2019, les sociétés EDF, EDF Trading et EDF Trading Markets Limited demandent à la cour de bien vouloir :

Vu les articles 122,145,488 et 700 du code de procédure civile,

Vu notamment l’article 1355 du code civil,

Vu l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 20 février 2019,

Vu l’ordonnance sur requête du 15 février 2018,

Vu l’ordonnance de référé du 30 avril 2019,

— confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance de référé du 30 avril 2019 rendue par le Président du tribunal de commerce de Bobigny ;

En conséquence,

— débouter Hydroption de l’intégralité de ses demandes ;

En tout état de cause,

— condamner Hydroption au paiement de la somme de 7.000 euros à chacune des sociétés intimées au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner Hydroption aux entiers dépens.

Les intimées soutiennent que :

— les demandes formulées par la société Hydroption se heurtent à l’autorité de la chose jugée de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 20 février 2019 ;

— il résulte des dispositions des articles 122, 488 alinéa 2 du code de procédure civile et 1355 du code civil et de la jurisprudence qu’un arrêt de référé, en l’absence de toute circonstance nouvelle justifiant qu’il soit modifié ou rapporté, a l’autorité de la chose jugée; en l’espèce, l’assignation en référé introduite par la société Hydroption le 27 avril 2018 est fondée sur l’ordonnance non contradictoire du 15 février 2018 comme cela résulte du libellé de cette assignation en référé, de ses motifs et de son dispositif ; qu’il en va de même des conclusions de son adversaire ; qu’il est incontestable qu’il existe entre l’ordonnance du 15 février 2018 et la présente procédure, une identité d’objet (des documents cherchant à établir le même comportement d’EDF, d’EDFT et d’EDTM), de fondement juridique (article 145 du code de procédure civile) et de parties ; qu’il en résulte en application des articles susvisés, l’irrecevabilité des demandes formées par Hydroption dans la présente instance ;

— en outre, la solidarité et la continuité entre l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 20 février 2019 et la présente sont indiscutables et ne peuvent donc prospérer ;

— les demandes formulées 'ont pour fondement’ l’ordonnance du 15 février 2018 ; que cette ordonnance a été rétractée ; qu’il s’agit de demandes, complémentaires à celles ayant donné lieu à l’ordonnance sur requête du 15 février 2018 qui en est le fondement ; que cette ordonnance a été rétractée par l’arrêt de la cour d’appel ;

— la société Hydroption a justifié sa demande d’une nouvelle mesure d’instruction au motif qu’EDF, EDFT et EDFM «ont fait obstacle à l’exécution de la mesure d’instruction ordonnée en ne communiquant pas une partie des éléments» alors que les transactions de gré à gré ne correspondent pas à la définition des contrats «Future», et donc à la demande initiale de Hydroption ; que n’étant pas visées dans l’ordonnance sur requête, elles n’avaient pas à être communiquées ; que l’huissier ne pouvait donc pas, sans outrepasser sa mission, communiquer copie des données qui correspondent à la définition des contrats 'Future’ et n’avaient donc pas à être communiqués ;

— en tout état de cause, les conditions de l’article 145 du code de procédure civile ne sont pas réunies en l’absence de motif légitime ; que les considérations figurant dans la requête du 15 février 2018 sont d’ordre général ; que les demandes formées par Hydroption sur le terrain de l’article 145 s’articulent autour de postulats inexacts et d’une argumentation trompeuse excluant tout indice sérieux ;

— la société Hydroption fait état d’un préjudice hypothétique, variant considérablement selon les années et résultant en tout état de cause de son propre chef ; qu’il lui appartenait en effet en tant qu’acteur avisé du secteur de l’électricité de sécuriser l’ensemble de son approvisionnement bien avant l’hiver 2016-2017, plutôt que d’attendre la fin du mois d’octobre pour chercher à couvrir auprès d’EDF ses besoins sur la période d’hiver à partir du mois de novembre ; qu’elle avait notamment la possibilité de sécuriser son approvisionnement ainsi que son coût par exemple en recourant à des achats à terme sur les marchés de gros ou à l’ARENH (dispositif d’Accès à l’électricité nucléaire historique) ;

— les mesures sollicitées excèdent les mesures légalement admissibles puisqu’elles touchent à des informations commercialement sensibles relevant du secret des affaires ; que par ailleurs, le risque de destruction ou de déperdition des éléments dont l’appréhension est sollicitée est totalement inexistant puisque l’ensemble de ces éléments fait précisément l’objet d’une obligation de conservation.

En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie aux écritures des parties pour un plus ample exposé des faits et moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.

SUR CE, LA COUR,

A titre liminaire, il sera rappelé que les demandes de constat ne sont pas des prétentions au sens de l’article 5 du code de procédure civile qui dispose que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé. Il en résulte qu’il n’y aura pas lieu de statuer sur les demandes de constat formulées par la société Hydroption.

Sur la fin de non recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée

L’article 122 du code de procédure civile dispose que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

L’article 1355 du code civil dispose que l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formées par elles et contre elles en la même qualité.

La cour constate qu’il ne s’agit pas d’apprécier l’autorité de la chose jugée de l’ordonnance rendue sur requête le 15 février 2018 mais celle résultant de l’arrêt de la cour d’appel de Paris statuant sur l’appel de l’ordonnance du juge de la rétractation chargée de vérifier les conditions de mise en oeuvre des dispositions 493 et 145 du code de procédure civile, arrêt qui a bien autorité de la chose jugée.

Cette autorité de la chose jugée ne s’attache qu’au dispositif de la décision même s’il est admis que la motivation peut éclairer la portée du dispositif (Civ. 2ème. 7 juillet 2011, n°10-20.557).

En l’espèce, la cour d’appel de Paris aux termes du dispositif de son arrêt du 20 février 2019, sur les demandes hors celles relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile, énonce qu’elle :

— infirme l’ordonnance entreprise,

— rejette le moyen de nullité de l’ordonnance rendue le 28 juin 2018,

— rétracte l’ordonnance rendue sur requête le 15 février 2018,

— ordonne la restitution de l’ensemble des documents saisis et placés sous séquestre par Maître [K] [S] le 28 février 2018.

De ce dispositif, il résulte que la cour n’a pas statué sur une demande de communication de pièces identique à celle formulée dans le cadre de la présente instance en référé. La demande formulée et obtenue devant le juge des requêtes concernant les transactions passées par les sociétés EDF consistait à obtenir la désignation d’un huissier de justice avec mission de se rendre à l’adresse des défenderesses et de rechercher les transactions définies dans tous les documents (livres, registres, messages, comptabilité, études, analyses ou autres) et sur tous supports (papier ou informatique). Les moyens d’investigation sollicités et par suite la chose demandée sont différents, désignation d’un huissier de justice missionné pour procéder à des mesures d’investigation dans la procédure sur requête et demande de communication de pièces dans la procédure en référé.

Au demeurant, il n’est pas discuté par les parties que la cour d’appel a rétracté l’ordonnance sur requête au seul motif de la non justification de la dérogation au principe du contradictoire, de sorte que l’introduction d’une instance en référé, rétablissant le contradictoire, d’une demande ayant un objet différent ne se heurte pas à l’autorité de la chose jugée attaché à cet arrêt.

La décision du premier juge sera sur ce point infirmée.

Les conditions de l’article 145 du code de procédure civile

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.

La mise en 'uvre de l’article 145 du code de procédure civile ne suppose aucun préjugé sur les chances de succès de celui-ci. Il suffit que le demandeur justifie d’éléments rendant crédibles ses allégations et que les preuves recherchées soient de nature à alimenter un procès qui ne serait pas manifestement voué à l’échec, ce demandeur n’ayant pas à démontrer l’existence des faits qu’il invoque, puisque la mesure réclamée est justement destinée à les établir.

La société Hydroption sollicite la condamnation de ses adversaires à lui communiquer sous astreinte copie des documents suivants :

— l’intégralité des transactions effectuées de gré à gré et sur la bourse EEX sur les produits à terme et sur les périodes suivantes :

— future Q4 2016 et Q1 2017 entre le 1er juillet et le 31 août 2016 ;

— future Q1 2017 entre le 1er septembre et le 31 octobre 2016 ;

— future Week-45 2016 entre le 24 octobre et le 3 novembre 2016 ;

— future Week-3 2017 entre le 2 et le 13 Janvier 2017 ;

— l’intégralité des transactions spot effectuées de gré à gré et sur la bourse EEX pour les périodes visées par l’ordonnance rendue initialement, à savoir,

— entre le 1er juillet et le 31 août 2016 ;

— entre le 1er septembre et le 31 octobre 2016 ;

— entre le 24 octobre et le 3 novembre 2016 (sur le contrat de la semaine 45-2016) ;

— entre le 2 et le 13 Janvier 2017 (sur le contrat de la semaine 3-2017);

Elle indique, en page 21 de ses écritures, que caractérisent le motif légitime ' les éléments de contexte-en particulier, le détail de l’information fournie par EDF sur la période critiquée (pièce n°6) mais également les anomalies constatées sur le marché de gros de l’électricité sur cette période, avec l’analyse détaillée d’un expert sur les fluctuations observées (pièce n° 8) et les bénéfices exceptionnels d’EDF sur le trading à la même période (pièce n°9).

Elle ajoute qu’il est d’autant plus caractérisé si, a fortiori, ces éléments sont mis en perspective avec le préjudice corrélatif qui est résulté pour Hydroption évalué, sauf à parfaire, à 14 millions d’euros à ce stade. Elle précise que sa démarche tend à déterminer si EDF est à l’origine de ces mouvements suspects qu’elle, ainsi que son expert, a constatés, la mesure sollicitée devant permettre de déterminer si le comportement d’EDF sur la période suspecte avant et après l’information du canard enchaîné qui a précipité une hausse importante des cours, en mettant en perspective les opérations réalisées avec les informations données par ailleurs dans le cadre du REMIT.

Les sociétés EDF soutiennent que la société Hydroption en démontre pas la présence de fluctuations de prix anormales ou inhabituelles pour une période hivernale au cours de laquelle les prix varient en fonction de la météo outre que ne sont pas pris en compte la production et la demande des pays voisins, le marché de gros étant un marché européen interconnecté. Elles ajoutent qu’il n’est pas davantage démontré un manquement d’EDF à son obligation de transparence considérant les événements ayant affecté l’exploitation de son parc nucléaire pendant la période considérée. Elles contestent l’existence d’une manipulation du marché soutenue par des postulats fantaisistes et diffamatoires à l’instar d’un article des Echos du 7 avril 2018 faisant suite à une étude publiée par UFC Que Choisir, association à l’encontre de laquelle plainte a été déposée pour diffamation.

Elles expliquent que ces affirmations ne sont pas étayées par des éléments probants, que la communication des pièces demandées ne saurait éclairer sur aucun des points visés.

Elles ajoutent que le préjudice allégué est purement hypothétique et résulte du choix fait par Hydroption elle-même de ne pas recourir à des achats à terme sur les marchés de gros ou à l’ARENH de sorte qu’elle ne peut être considérée comme responsable ni des activités spéculatives ni des risques pris par cette dernière.

La cour rappelle que sur le marché désormais ouvert à la concurrence et extrêmement réglementé de l’électricité, coexiste avec le marché de gros de l’électricité et un dispositif d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH). Sur le marché de gros de l’électricité, les échanges se réalisent sur des bourses, de gré à gré, via des intermédiaires ou de gré à gré directement. On distingue les produits spots ou au comptant dont le prix est fixé sur la bourse EPEX SPOT. Il est admis que ces prix de court terme sont très volatiles, l’équilibre offre-demande pouvant varier brutalement comme les conditions climatiques ou des événements prévus ou non sur le parc électrique. Les contrats à terme sont moins volatiles et portent sur des ventes ou des achats pour une fourniture dans plusieurs semaines ou plusieurs mois (Bourse à terme EEX).

Les parties s’accordent à retenir que les prix de l’électricité sur le marché de gros a connu une augmentation très importante à la fin de l’année 2016, 'par rapport aux conditions qui prévalaient jusqu’alors’ comme précisé par EDF.

Un communiqué de la commission de régulation de l’énergie (CRE) en date du 18 octobre 2016 fait état 'd’une hausse brutale’ des prix de gros de l’électricité au cours des derniers quinze jours du mois de septembre 2016, le produit calendaire 2017 passant de 32 euros/MWh début septembre à 40 euros/MWh début octobre.

Il était encore indiqué au terme de ce communiqué que 'cette hausse intervient dans un contexte de faible disponibilité effective de la filiale nucléaire et d’informations relatives au prolongement d’arrêt de tranches nucléaires’ et que 'les incertitudes actuelles sur la disponibilité du parc nucléaire expliquent la remontée des prix de gros. Cette évolution compte tenu de son ampleur et de sa rapidité, est susceptible d’avoir un impact important sur les marchés de l’énergie. La CRE sera dans ces conditions particulièrement attentive aux conditions de cette évolution des prix et notamment au respect des obligations de transparence du REMIT’ (pièce n°6 Hydroption).

Il est constant qu’EDF, acteur prépondérant sur ce marché de l’électricité, est soumis dans le cadre du Règlement n°1227/2011 du 25 octobre 2011 concernant l’intégralité et la transparence du marché de l’énergie (dit Règlement REMIT) à une obligation de communiquer toutes les informations de nature à influer sur la détermination du prix de cette énergie de même qu’elle est soumise à une obligation de déclaration des transactions effectuées sur le marché de gros à l’agence de coopération des acteurs de l’énergie.

La société Hydroption ne démontre pas en quoi la communication des transactions intervenues pendant la période considérée serait de nature à éclairer le respect ou pas par la société EDF de son obligation de communiquer des informations.

L’ensemble des communications intervenues a été publié et l’analyse du caractère adapté de celles-ci ne peut être déduite de l’analyse des documents dont il est demandé la communication s’agissant de copies de transactions.

Au demeurant, et antérieurement à la publication de l’article du Canard Enchaîné le 28 septembre 2016, point de départ de la flambée des prix selon Hydroption, la société EDF avait fait publié des communiqués de presse le 19 juillet 2016 et le 21 septembre 2016 intitulés 'Actualisation des objectifs 2016' et 'perspective de production nucléaire 2017' annonçant un objectif revu à la baisse en matière de production nucléaire.

Les documents sollicités, au regard du caractère public de toutes les communications intervenues dans ce secteur fortement réglementé, ne sont pas de nature à éclairer sur l’existence d’une atteinte à l’obligation de transparence de sorte que le motif légitime exigé par l’article 145 du code de procédure civile n’est pas caractérisé.

La société Hydroption ne démontre pas davantage le motif légitime d’obtenir communication de ces documents au regard de l’accusation de manipulations des cours par l’anticipation par certains acteurs de l’achat de grandes quantités d’électricité sur la période de juillet 2016 soit avant que les difficultés d’EDF ne soient mentionnées et après la publication des informations, des opérations à la hausse pour soutenir artificiellement le marché.

En effet, il doit d’abord être constaté que les affirmations de Hydroption reposent sur ce point exclusivement sur le contenu et les conclusions d’un rapport rédigé, à sa demande, par M. [R] [B]. Il s’agit d’un rapport de 18 pages établi le 2 février 2018, ne comportant aucune annexe si ce n’est le curriculum vitae de l’auteur dont il résulte qu’il est consultant, conseiller pour la rechercher du Groupe la Française et membre du conseil des experts de conviction AM. Il ne s’agit pas d’un expert judiciaire. Par ailleurs, ce rapport n’a pas été établi de manière contradictoire. Surtout, il ne contient à aucun moment mention de la nécessité de procéder à des investigations complémentaires. Il n’explicite pas plus en quoi l’analyse des transactions opérées pendant les périodes litigieuses serait de nature à établir les malversations alléguées entre EDF, EDF Trading et EDF Trading Markets Limited, cette question demeurant cependant de l’appréciation du juge du fond sur la portée des arguments développés à l’appui des demandes des parties.

Il se déduit ainsi de ce qui précède que le motif légitime exigé par l’article 145 du code de procédure civile n’est pas établi sur ce point non plus.

L’article paru dans les Echos le 7 avril 2018 titré 'Polémique sur l’utilisation du parc nucléaire d’EDF’ et reprenant une étude publiée par l’association UFC Que Choisir qui accuse EDF de 'moduler l’utilisation de parc nucléaire en fonction du prix de l’électricité sur le marché de gros à son propre avantage’ fait l’objet d’une plainte avec constitution de partie civile auprès du tribunal de grande instance de Paris. Il ne peut en être déduit un quelconque élément ne nature à établir le motif légitime.

Force est encore de constater que la société Hydroption invoque mais ne démontre nullement l’existence d’un préjudice qu’elle évalue en dernier lieu à 14 millions d’euros sans fournir de démonstration permettant d’étayer ses affirmations.

Elle ne s’explique pas sur le choix, critiqué par EDF, d’intervenir sur le marché spot du marché de gros soumis à une fort volatilité plutôt que sur le marché à terme ou à l’ARENH même si elle admet dans un mail adressé par son président à M. [U] pour EDF dans lequel elle formule déjà la critique de ne pas publier les bonnes informations sur les plannings de maintenance et sur la disponibilité de ses centrales nucléaires, qu’elle souhaite entreprendre une démarche amiable pour obtenir une commande de gré à gré pour novembre et décembre 2016 à un prix raisonnable et ajoute qu’elle pourra réserver de l’ARENH pour le premier trimestre 2017.

Enfin, la société Hydroption sollicite la communication de plusieurs pièces par les trois sociétés EDF, EDF Trading et EDF Trading Markets sans expliciter le rôle précis de chacune de ces trois sociétés dans les malversations précises alléguées sauf à définir leur activité générale pour le compte d’EDF et même si le rapport de M. [B] sur lequel elle se fonde ne fait aucune référence à ces différentes sociétés.

Par ailleurs, les transactions dont la copie est sollicitée concernent les marchés à terme et spot mais aussi les transactions effectuées de gré à gré sur des périodes visées et, pour certains produits, sans que soit précisé par elle son niveau d’intervention sur ces marchés et en quoi ces copies portant sur un ensemble très général d’opérations sans limitation de l’identité des contractants sont susceptibles de lui être utiles dans la démonstration de la réalité de faits dont elle s’estime victime.

Le caractère général des demandes formulées même si la société Hydroption précise qu’elle ne sollicite pas la communication des cocontractants, noms et vendeurs et des acheteurs fait également obstacle à la demande de communication de pièces.

Il se déduit de l’ensemble de ce qui précède que le motif légitime prévu par l’article 145 du code de procédure civile n’est pas établi par la société Hydroption qui dispose en outre d’éléments qu’elle peut soumettre à la contradiction devant le juge du fond le cas échéant et qu’elle ne démontre pas plus le caractère légalement admissible des mesures sollicitées.

Ainsi, la décision du juge des référés qui a rejeté sa demande sera confirmée.

Les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

La société Hydroption qui succombe sera condamnée aux dépens de l’instance d’appel. L’équité commande de dire qu’il n’y aura pas lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme l’ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de 30 avril 2018 en ce qu’il a retenu l’existence de l’autorité de la chose jugée de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 20 février 2019 ;

Statuant à nouveau de ce chef ;

Rejette la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée de l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 20 février 2019 ;

Confirme pour le surplus ;

Y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Hydroption aux dépens de la présente instance.

La Greffière, La Présidente,

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Cour d'appel de Paris, Pôle 1 chambre 8, 20 décembre 2019, n° 19/10338