Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 8, 25 octobre 2019, n° 19/06743

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 1 - ch. 8, 25 oct. 2019, n° 19/06743
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 19/06743
Décision précédente : Tribunal d'instance de Nogent-sur-Marne, 21 février 2019, N° 18/000296
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 8

ARRÊT DU 25 OCTOBRE 2019

(n° 325 , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/06743 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B7TOU

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 22 Février 2019 -Tribunal d’Instance de NOGENT SUR MARNE – RG n° 18/000296

APPELANTS

M. E Y

[…]

[…]

Mme X, F G épouse Y

[…]

[…]

Représentés par Me Bruno REGNIER de la SCP SCP REGNIER – BEQUET – MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050

INTIMÉE

Mme H A

[…]

[…]

Représentée et assistée par Me Sophie LOUIS- PALISSE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 367

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 20 Septembre 2019, en audience publique, rapport ayant été fait par Mme Sylvie KERNER-MENAY, Présidente conformément aux articles 785, 786 et 905 du code de procédure civile, les avocats ne s’y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Sylvie KERNER-MENAY, Présidente

Thomas VASSEUR, Conseiller

Isabelle CHESNOT, Conseillère

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Lauranne VOLPI

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Sylvie KERNER-MENAY, Présidente et par Lauranne VOLPI, Greffière.

EXPOSE DU LITIGE

Mme H A a donné à bail à M. E Y et Mme X G épouse Y un appartement sis Le Hameau des roses, rez-de-chaussée droite, ville des Roses au Perreux sur Marne (94170).

Des loyers demeurant impayés, Mme A a fait délivrer le 3 janvier 2018 un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au bail daté du 2 décembre 2013 pour un montant en principal de 12.250 euros (décompte arrêté au 2 février 2018). Ce commandement a été dénoncé à M. J B en qualité de caution, par acte d’huissier de justice du 16 février 2018.

Par acte d’huissier de justice du 3 mai 2018, Mme A a fait assigner M. E Y et Mme X G épouse Y ainsi que la caution devant le juge des référés du tribunal d’instance Nogent sur Marne aux fins de :

— constater l’acquisition de la clause résolutoire et en tant que de besoin prononcer la résiliation du bail ;

— ordonner l’expulsion des époux Y et celle de tous occupants de leur chef avec si besoin le concours de la force publique ;

— autoriser le transport et la séquestration des meubles et objets mobiliers se trouvant dans les lieux ;

— obtenir leur condamnation solidaire et à titre provisionnel à lui payer :

— la somme de 18.612,61 euros à valoir sur l’arriéré locatif à l’échéance du mois de mai 2018 avec intérêts de droit à compter du 6 juillet 2018 ;

— une indemnité d’occupation égale au montant du loyer et des charges qui auraient été dus si le bail s’était poursuivi ;

— la somme de 200 euros à titre de dommages-intérêts ;

— la somme de 533 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens de l’instance comprenant notamment le coût du commandement de payer, de sa dénonciation, des actes de saisies conservatoires et de dénonciation.

Au terme du jugement, il résulte qu’à l’audience, le bailleur a actualisé le montant de sa dette locative à la somme de 29.050 euros. Les défendeurs ont soulevé l’existence de contestations sérieuses et notamment soutenu que l’acte de cautionnement était nul pour non respect des dispositions de l’article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989 et que le contrat de bail annexé à l’assignation n’était pas le même que celui détenu par eux et que leurs signatures avaient été imitées. Les époux Y n’ont pas contesté le montant de la dette et ont sollicité des délais de paiement à hauteur de 36 mois.

Par ordonnance en date du 22 février 2019, le juge des référés du tribunal d’instance de Nogent sur Marne a :

— constaté que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire figurant au bail étaient réunies à la date du 4 mars 2018 et que le bail s’est trouvé résilié à cette date ;

— ordonné à M. E Y et Mme X G épouse Y de libérer les lieux et de restituer les clés ;

— dit qu’à défaut pour eux d’avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés, Mme A pourra, deux mois après la signification d’un commandement de quitter les lieux, faire procéder à leur expulsion ainsi qu’à celle de tous occupants de leur chef ; y compris le cas échéant avec le concours d’un serrurier et de la force publique ;

— fixé à titre provisionnel le montant de l’indemnité d’occupation due par M. E Y et Mme X G épouse Y à compter de la résiliation du bail à la somme de 1.400 euros ;

— condamné solidairement M. E Y et Mme X G épouse Y à payer à Mme A à titre provisionnel la somme de 29.050 euros au titre des loyers, charges et indemnités d’occupation impayés au mois de janvier 2019 inclus avec intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2018 sur la somme de 17. 850 euros et à compter du 11 janvier 2019 pour le surplus, outre les indemnités d’occupation postérieures;

— rejeté la demande de dommages-intérêts formée par Mme A ;

— dit n’y avoir lieu à référé s’agissant des demandes formées à l’encontre de M. B ;

— condamné solidairement M. E Y et Mme X G épouse Y à payer à Mme A la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné solidairement M. E Y et Mme X G épouse Y aux dépens qui comprendront notamment le coût du commandement de payer et de l’assignation ;

— dit que les frais occasionnés par les mesures conservatoires des 1er et 15 mars 2018 sont à la charge M. E Y et Mme X G épouse Y ;

Par déclaration en date du 26 mars 2019, les époux Y ont relevé appel de cette décision.

Dans leurs dernières conclusions en date du 11 septembre 2019, les appelants demandent à la cour de bien vouloir :

— infirmer en totalité l’ordonnance rendue par le tribunal d’instance de Nogent sur Marne le 22 février 2019 ;

Statuant à nouveau

— dire que le bail du 2 décembre 2013 est un faux ;

— dire que le montant de la dette, mois de janvier 2019, est de 22.400 euros ;

Par conséquent :

— constater l’existence de contestations sérieuses ;

— dire n’y avoir lieu a référé ;

— débouter Mme A de l’ensemble de ses autres demandes, fins et conclusions ;

A titre subsidiaire :

— dire qu’ils pourront se libérer de la dette en 36 mensualités égales et que les effets de la clause résolutoire seront suspendus jusqu’au parfait paiement de la dette et qu’après le dernier règlement, elles seront réputées ne jamais avoir joué ;

En tout état de cause :

— condamner Mme A à leur verser la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner Mme A aux entiers dépens de la présente instance, ainsi qu’aux dépens de première instance.

Les appelants soutiennent essentiellement que :

— la procédure est basée sur un bail faux ; le bail annexé à l’assignation en référé est en date du 2 décembre 2013 alors qu’ils sont en possession d’un bail du 27 février 2014 ;

— ils ont déposé plainte pour faux, usage de faux et tentative d’escroquerie au jugement ;

— les deux baux ne sont pas identiques, l’un d’eux prévoyant l’obligation pour le propriétaire de faire réaliser des travaux ;

— le commandement de payer vise un bail non signé par eux de sorte qu’il est nul ;

— ils ne sont redevables que des loyers et charges à hauteur de 22.400 euros ;

— M. Y a rencontré des difficultés financières justifiant l’octroi de délais de paiement;

— Mme A n’est pas opposée à un accord puisqu’elle leur a adressé un projet de protocole d’accord ;

Dans ses dernières conclusions en date du 28 août 2019, l’intimée demande à la cour de bien vouloir :

— débouter les époux C de leur appel ;

— confirmer l’ordonnance de référé rendue sauf à actualiser la dette ;

— les condamner à la somme de 41.050 euros à titre d’arriérés sur les loyers, provisions surcharges et indemnités d’occupation terme de septembre 2019 intégré, avec intérêts au taux légal à compter du 6

juillet 2018 sur la somme de 17 850 euros et à compter du 11 janvier 2019 pour le surplus ;

— les condamner au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’en tous les dépens d’appel outre les dépens de première instance et les frais exposés pour les mesures conservatoires et d’exécution.

L’intimée soutient que :

— les signatures sur les différents baux invoqués sont les mêmes ; le second bail n’est pas un faux mais un bail subséquent signé le 27 février 2014 ; qu’elle a subi un incendie au cours duquel la copie de ce dernier document dont elle n’avait plus le souvenir, a disparu; qu’elle avait conservé celui du 2 décembre 2013 sur son ordinateur ; qu’elle n’a jamais eu d’intention délictuelle ; que le premier bail n’est pas un faux mais issu d’un premier bail que les locataires ont voulu modifier suite à un retard dans leur déménagement ; que les deux baux sont identiques ;

— les époux Y contestent le décompte des arriérés sans fournir aucune pièce justificative et sollicitent des délais sans davantage de justificatifs ;

— elle souhaite récupérer son logement afin d’y loger son fils qui a terminé ses études et a délivré un congé pour revente à ses locataires le 8 avril 2016 qui n’ont pas donné suite malgré des appels téléphoniques en ce sens ; qu’elle a tenté de sortir du litige de manière amiable en proposant un accord ; que ses locataires sont manifestement insolvables.

SUR CE, LA COUR,

Sur l’existence de contestations sérieuses quant à la validité du commandement de payer

Il est constant que le commandement de payer délivré aux époux Y le 3 janvier 2018 vise un contrat de bail du 2 décembre 2013 ayant pris effet le 27 février 2014 ainsi que la clause résolutoire prévu au dit bail et qui y est reproduite in extenso.

Les locataires soutiennent qu’ils n’ont pas signé ce bail du 2 décembre 2013 et qu’il ne peut dès lors être opposé la clause résolutoire y figurant. Ils ne contestent pas avoir signé le bail du 27 février 2014. Le bailleur a indiqué que, de bonne foi, il ne s’en souvenait plus et avoir perdu le document écrit à la suite d’un incendie et de bonne foi.

La cour, comme le premier juge, constate que les paraphes et signatures figurant sur les deux baux sont identiques. Elle relève encore qu’il s’agit exactement du même document comprenant les mêmes articles. La seule différence consistant dans l’ajout d’une mention manuscrite de travaux à faire effectuer par le bailleur sur la dernière page du bail du 27 février 2014. En outre, il est encore constaté que la date de prise de possession des lieux est identique. Enfin, la contestation du caractère fictif de ce bail est tardive. Elle n’a pas été réalisée lors de l’envoi par le bailleur d’une lettre de mise en demeure de payer les loyers en date du 19 novembre 2017 alors qu’était visé le premier bail du 2 décembre 2013, pas plus que dans le délai de deux mois ayant suivi la signification du commandement de payer. Le dépôt d’une plainte pour faux le 11 septembre 2019 à quelques jours de l’audience d’appel, confirme le caractère dilatoire du moyen avancé.

De ces éléments il résulte qu’il n’existe pas de contestation sérieuse quant à la validité du commandement de payer qui vise un bail du 2 décembre 2013 contenant une clause résolutoire qu’ils ont signé et réitéré le jour de leur entrée dans les lieux soit le 27 février 2014.

Il n’est pas contesté par le époux Y qu’ils n’ont pas réglé la somme de 12.250 euros visée dans le commandement de payer du 3 janvier 2018, de sorte que par l’effet du mécanisme de la clause résolutoire, le bail s’est trouvé résilié à la date du 4 mars 2019 avec tous les effets de droit s’y

rattachant.

La décision en ce sens du premier juge doit être confirmée.

Sur le montant de l’arriéré locatif

Les locataires admettent une dette locative d’un montant de 22.000 euros à la fin de l’année 2018 selon le décompte qu’ils produisent. Le bailleur produit un décompte différent duquel il résulte une dette locative à hauteur de 41.050 euros à la date du 28 septembre 2019.

De l’analyse de ces décomptes, il résulte que les parties s’accordent pour admettre qu’aucun loyer (1.400 euros mensuel) n’a été versé pour les années 2018 et 2019 jusqu’au 20 septembre 2019. Le décompte des locataires ne porte pas mention de la situation des paiements pour l’année 2019 qui doit pourtant être prise en compte dans le calcul des sommes à tout le moins jusqu’au loyer de septembre 2019 inclus. Les sommes dues au titre de ces années s’élèvent donc respectivement à la somme de 16.800 euros pour 2018 et 12.600 euros pour l’année 2019, terme de septembre 2019 inclus.

Des contestations demeurent sur les soldes des années 2014, 2016, 2017. La cour constate que le bailleur a fait sommation aux locataires de justifier des sommes prétendument payées au vu du décompte et notamment celles correspondant aux mois de mars 2016, avril et juillet 2017. Cette sommation est restée sans effet et aucun document n’est produit permettant d’attester que le différentiel des décomptes a été réglé par les locataires comme ceux-ci se contentent de l’affirmer. Il en résulte que le montant de la dette locative à retenir pour les années 2014 à 2017 correspond aux sommes réclamées par le bailleur dans son décompte précis et détaillé et se porte à la somme totale de 10.250 euros.

Le montant non sérieusement contestable de la dette locative, loyers, charges et indemnités d’occupations s’élève ainsi à la somme de 39.650 euros.

Les époux Y seront condamnés à payer cette somme à titre provisionnel. La décision de première instance sera infirmée sur ce montant au regard de l’évolution du litige.

Sur la demande de délais de paiement et de suspension des effets de la clause résolutoire

L’article 24 V de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 dispose que le juge peut, même d’office accorder des délais de paiement dans la limite de trois années au locataire en situation de régler sa dette locative.

Force est de constater, comme le premier juge que tel n’est pas le cas en l’espèce.

Les locataires ne produisent aucun élément relatif à leur situation familiale, professionnelle et financière rendant impossible d’examiner les possibilités de remboursement d’une dette devenue très importante. La simple évocation dans leurs conclusions de difficultés financières importantes et d’une situation en voie de rétablissement sans autre document justificatif s’assimile à une déclaration d’intention insuffisante à justifier l’octroi de délais de paiement.

L’insolvabilité des locataires est encore établie par les résultats négatifs de l’ensemble des voies d’exécution qui ont été entreprises par le bailleur pour obtenir paiement de sa créance.

La production d’un document émanant du bailleur faisant état d’un accord possible que ce dernier admet avoir établi pour tenter un rapprochement amiable dans un contexte très conflictuel, n’est pas de nature à remettre en cause le constat de l’absence totale de perspective réelle de payer des loyers courants et de remboursement de la dette.

Dès lors, c’est à bon droit que le premier juge a rejeté la demande de délais et sa décision sera confirmée sur ce point.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Le premier juge a parfaitement réglé le sort des dépens et des frais irrépétibles pour la première instance et sa décision sera confirmée de ces chefs. A hauteur d’appel, les appelants qui succombent seront condamnés à payer à Mme A une somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens d’appel.

Les frais d’exécution des décisions de justice sont, par principe, à la charge du débiteur qui ne s’est pas exécuté volontairement. Ils ne relèvent pas de la présente juridiction mais du contrôle, le cas échéant, du juge de l’exécution.

PAR CES MOTIFS,

Confirme en toutes ses dispositions l’ordonnance du juge des référés du tribunal d’instance de Nogent-sur-Seine en date du 22 février 2019 sauf à réactualiser le montant de la dette locative ;

Infirme de ce seul chef,

Statuant à nouveau,

Condamne solidairement M. E Y et Mme X G épouse Y à payer à Mme H A, la somme provisionnelle de 39.650 euros au titre des loyers, charges et indemnités d’occupation impayés au mois de septembre 2019, avec intérêts au taux légal à compter du 6 juillet 2018 sur la somme de 17.850 euros et à compter du 11 janvier 2019 pour le surplus ;

Y ajoutant,

Condamne solidairement M. E Y et Mme X G épouse Y à payer à Mme A une somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel ;

Condamne solidairement M. E Y et Mme X G épouse Y aux dépens d’appel.

La Greffière, La Présidente,

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