Cour d'appel de Poitiers, 3ème chambre, 24 décembre 2014, n° 13/02598
Chronologie de l’affaire
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Sur la décision
Référence : | CA Poitiers, 3e ch., 24 déc. 2014, n° 13/02598 |
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Juridiction : | Cour d'appel de Poitiers |
Numéro(s) : | 13/02598 |
Décision précédente : | Tribunal de grande instance de Saintes, 6 mai 2013 |
Dispositif : | Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours |
Sur les parties
- Président : Michel BUSSIERE, président
- Avocat(s) :
- Cabinet(s) :
Texte intégral
ARRET N°528
R.G : 13/02598
XXX
Z
C/
A
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
3e Chambre Civile
ARRÊT DU 24 DÉCEMBRE 2014
Numéro d’inscription au répertoire général : 13/02598
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 mai 2013 rendu par le Tribunal de Grande Instance de SAINTES.
APPELANTS :
1° Madame P Z épouse Y
née le XXX à XXX
XXX
XXX
2° Madame E Z épouse D
née le XXX à XXX
XXX
XXX
3° Monsieur H Z
né le XXX à XXX
35 Rue AF Emile Victor
XXX
ayant pour avocat postulant Me Edouard POINSON de la SELARL ACTE JURIS, avocat au barreau de POITIERS
ayant pour avocat plaidant Me Vincent HUBERDEAU, avocat au barreau de Saintes
INTIMÉE :
Madame J AX AY A
épouse Z
née le XXX à XXX
XXX
XXX
ayant pour avocat postulant Me Eric ALLERIT de la SCP GALLET ALLERIT, avocat au barreau de POITIERS
ayant pour avocat plaidant Me Benoît DEVAINE, avocat au barreau de Saintes, membre de la SCP ROUDET
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 910 alinéa 1, 785 et 786 du Code Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 24 Septembre 2014, en audience publique, devant
Monsieur Michel BUSSIERE, Président.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Michel BUSSIERE, Président
Madame Danielle SALDUCCI, Conseiller
Monsieur Olivier DE BLAY-DE-GAIX, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Monsieur Lilian ROBELOT,
ARRÊT :
— CONTRADICTOIRE
— Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
— Signé par Monsieur Michel BUSSIERE, Président, et par Monsieur Lilian ROBELOT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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LA COUR
Attendu que par décision contradictoire n° RG 12/00266 en date du 7 mai 2013, le tribunal de grande instance de Saintes a statué ainsi :
— Dit que la donation entre époux en date du 31 mai 2011 reçue par la Scp C Rome Plantive Gilbert Le Brettevillois, notaire à Royan et le testament olographe en date du 31 mai 2011 sont valides et doivent recevoir exécution
— Dit que la reconnaissance de dette en date du 19 décembre 2003 consentie par AE AF Z à J Z née A doit être requalifiée en donation déguisée laquelle est nulle et de nul effet
— Dit que les demandes de production des statuts de la SCI Le Grand Large et de l’acte d’acquisition du logement par le couple formulées par les consorts Z sont devenues sans objet
— Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires
— Dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code procédure civile
— Dit que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens
Attendu que par déclaration électronique reçue et enregistrée au greffe de la cour d’appel le 19 juillet 2013, Mme X Z-Y, Mme E Z-D et M. H Z (les appelants) ont interjeté appel dudit jugement à l’encontre de Mme J A-Z (l’intimée) qui a constitué avocat
Attendu que par dernières conclusions déposées au greffe de la cour le 10 février 2014, les appelants demandent de :
— déclarer Mme P Z épouse Y, Mme E Z épouse D, M. H Z recevables et bien fondés en leur appel.
— Réformer en conséquence le jugement entrepris et statuant à nouveau :
— Dire et juger que M. AE-AF Z était dans un état d’insanité d’esprit lors de la rédaction de l’acte de donation entre époux reçu par Me Gilbert Notaire à Royan le XXXet du testament olographe du XXX.
— Dire et juger en conséquence que l’acte de donation entre époux reçu par Maître Gilbert Notaire à Royan le XXX et le testament olographe du XXX sont nuls et de nul effet.
— Dire et juger que Mme J A Z recueillera le quart en pleine propriété de la succession de M. AE-AF Z.
— CONFIRMER le jugement entrepris pour le surplus et notamment en ce qu’il a requalifié la reconnaissance de dette du 19 décembre 2003 en donation déguisée et dit qu’elle était nulle et de nul effet.
En tout état de cause :
— déclarer Mme J A Z irrecevable en tout cas mal fondée e son appel incident ainsi qu’en toutes ses demandes fins et conclusions, l’en debouter.
— Condamner Mme J A Z à payer à Mme P Z, Mme E Z, M. H Z la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
— La condamner aux entiers dépens d’instance et d’appel dont distraction au profit pour ceux d’appel de Maître AE-AF Bouchon Membre de la Selarl Acté Juris
Attendu que par dernières conclusions déposées au greffe de la cour le 13 décembre 2013, l’intimée demande de :
— Vu le jugement prononcé le 7 mai 2013 par le tribunal de grande instance de Saintes, notamment l’article 901 et l’ancien article 1099 du code civil dans la rédaction applicable à la cause, la jurisprudence citée, les pièces et éléments du dossier,
— CONFIRMER le jugement entrepris en ce qu’il a dit que la donation entre époux reçue le 31 mai 2011 par Maître C, Notaire à Royan, et le testament olographe en date du 31 mai 2011 sont valides et doivent recevoir exécution,
— REFORMER le jugement querellé pour le surplus, notamment en ce qu’il a dit que la reconnaissance de dette en date du 19 décembre 2003 consentie par AE-AF Z à J Z née A doit être requalifiée en donation déguisée, et en ce qu’il l’a déclarée nulle et de nul effet,
Statuant a nouveau,
— T X, E et H Z de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
— Condamner in solidum X, E et H Z à verser à J A la somme de 8.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile,
— Condamner in solidum les mêmes aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction pour ceux qui la concernent au profit de la Scp Gallet- Allerit en application de l’article 699 du Code de procédure civile
Attendu qu’il est expressément référé aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs faits, moyens et prétentions
SUR CE
Attendu que la recevabilité de l’appel n’est pas contestée
Attendu que AE-AF BC Z né le XXX à Royan est décédé le XXX à Vaux-sur-Mer, laissant pour lui succéder ses trois enfants, X, E et H Z nés de son premier mariage ainsi que sa seconde épouse J A, avec laquelle il s’était remarié le 28 juin 1997 à Marcilly en Gault sous le régime de la séparation des biens selon contrat reçu le 19 juin 1997 par Me Pageot, notaire à Royan ; que dans leurs conclusions les enfants indiquent qu’ils étaient très proches de leur père mais qu’effectivement «ne l’étaient pas du tout de leur belle-mère »
Sur la demande d’annulation de la donation entre époux et du testament olographe
Attendu que AE-AF Z arrêt par acte reçu par Me C, notaire à Royan, le 31 mai 2011 soit un mois avant son décès, fait donation au profit de son épouse de l’universalité en usufruit des biens composant sa succession au jour de son décès, ce que Mme A avait accepté ; que par testament olographe daté du 31 mai 2011, il avait déclaré maintenir l’usufruit de la totalité des biens à son épouse, mais la priver du quart en pleine propriété que lui accorde la loi
Attendu que les enfants Z soutiennent la nullité de ces actes en raison de l’état de santé gravement obéré et de l’insanité d’esprit de leur père motivés comme suit :
— il a été hospitalisé à Royan le 28 janvier 2011 en service de réanimation puis transféré à Saintes en soins médicaux puis encore en réanimation ; après son retour à l’hôpital de Royan il a été adressé au service des maladies infectieuses du CHU de Bordeaux avant d’être envoyé au service de dermatologie et de soins palliatifs jusqu’au 16 juin 2011 et il a reçu les soins palliatifs à domicile avant de décéder le XXX d’une leucémie
— il a présenté de multiples complications dues à la maladie telles que la maladie de Sweet, de multiples ulcérations sur le corps, au pied droit, une splénomégalie avec myélofibrose et de nombreux problèmes infectieux cardiaques
— il suivait un traitement médical très lourd avec notamment de l’EPO
— au moment de la signature des actes litigieux, il se trouvait en soins palliatifs à Bordeaux et son état physique était particulièrement dégradé puisqu’il avait une température de 39° et bénéficiait d’une nouvelle antibiothérapie
— il se trouvait donc le 31 mai 2011 dans un état physique de fièvre intense et de fatigue tout aussi intense et sous l’empire de médicaments extrêmement forts et sa vigilance était donc par définition des plus limitées
— son état de santé psychologique était tout aussi dégradé car il était dépressif et se trouvait traité par des médicaments antidépresseurs, anxiolytiques et des antalgiques
— il présentait parfois des états de somnolence pouvant être sous-tendu par la maladie
— il avait dit à l’hôpital de Royan, lors de son admission pour recevoir des soins palliatifs, qu’il avait le moral au plus bas et il était asthénique, triste, anxieux, angoissé, totalement incontinent, nécessitant une aide totale pour se vêtir, se dévêtir et rester propre
— en outre il était délirant ainsi qu’il résulte des témoignages de sa nièce, de ses petit-fils et de son gendre
— surtout, les actes du 31 mai 2011 sont totalement incohérents d’autant que l’écriture était tremblante et qu’il a omis la lettre C de son nom patronymique
Attendu cependant que tous les troubles sont avant tout physiques (température élevée, ulcérations, problèmes cardiaque, leucémie) et que les atteintes psychologiques (dépression, mauvais moral, somnolence) ne caractérisent pas une aliénation mentale ; que ces troubles n’étaient pas de nature à le priver de toute lucidité et ne caractérise nullement une insanité d’esprit au sens de l’article 901 du Code civil ; que les premiers juges ont relevé à juste titre qu’une écriture tremblante et une faute d’orthographe ne sont pas des signes d’insanité d’esprit et que si les comptes-rendus médicaux confirment un affaiblissement général avec somnolence et baisse de vigilance résultant uniquement des traitements administrés et non pas d’une altération des facultés mentales, la dépression nerveuse n’est pas un signe de dérèglement mental pas plus qu’une grande fatigue limitant les échanges verbaux et qu’en conséquence, AE-AF Z avait conservé la capacité de disposer ; qu’en outre le tribunal de grande instance a constaté pertinemment que les actes contestés ne sont pas contradictoires puisque le testament olographe, qui complète la donation par acte authentique, est très favorable aux enfants puisqu’il évite l’indivision avec leur belle-mère et qu’en conséquence le de cujus avait plutôt fait preuve de clairvoyance ; qu’en outre la donation a été reçue par un notaire dont le rôle consiste aussi à vérifier l’état du signataire, d’autant que Me C est l’associé de Me Gilbert, notaire habituel de AE-AF Z, et qu’ainsi c’est bien le même office ministériel qui est intervenu ; que pour toutes ces raisons il convient de confirmer le jugement entrepris sur ce point
Sur la contestation de la reconnaissance de dette du 19 décembre 2003
Attendu que selon acte reçu le 19 décembre 2003 par Me Gilbert, notaire associé à Royan, AE-AF Z, a reconnu devoir à sa seconde épouse une somme de 146.267,06 euros remboursable au bout de trente années, en une seule échéance fixe le 19 décembre 2033, avec un taux annuel d’intérêt nul de même que le taux effectif global annuel et que pour garantir le remboursement de la somme, l’emprunteur a consenti une hypothèque de second rang sur une maison d’habitation dénommée Les Révolins, situé à Vaux-sur-Mer, XXX
Attendu que par des motifs particulièrement circonstanciés en droit et en fait, les premiers juges ont retenu que les termes mêmes du contrat et surtout le remboursement prévu lorsque l’emprunteur aurait atteint l’âge de 94 ans et l’absence d’intérêt, démontraient l’existence d’une intention libérale et que la reconnaissance de dette du 19 décembre 2003 à été requalifiée à bon droit en donation déguisée et en tant que telle annulée ; que pour des motifs identiques, la décision doit être confirmée
Attendu que les appelants qui succombent supporteront les entiers frais et dépens de l’instance avec distraction au profit de la SCP Gallet Allerit, avocats à la cour
PAR CES MOTIFS :
Statuant après en avoir délibéré, publiquement, en matière civile, en dernier ressort et contradictoirement,
Déclare l’appel recevable mais non fondé
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions
y ajoutant
Dit qu’il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile en faveur de l’une ou l’autre des parties
Condamne Mme X Z-Y, Mme E Z-D et M. H Z aux entiers frais et dépens de première instance et d’appel et autorise la SCP Gallet Allerit, avocats à la cour, à recouvrer directement ceux dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision préalable et suffisante
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Textes cités dans la décision