Cour d'appel de Versailles, 3ème chambre, 18 décembre 2008, n° 07/07348

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 3e ch., 18 déc. 2008, n° 07/07348
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 07/07348
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nanterre, 13 septembre 2007
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 50D

3e chambre

ARRET N°

REPUTE CONTRADICTOIRE

DU 18 DECEMBRE 2008

R.G. N° 07/07348

AFFAIRE :

Z A


C/

S.A.S.

ETABLISSEMENTS C ET FILS


Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Septembre 2007 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° chambre : 2

N° RG : 06/09036

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

SCP FIEVET-LAFON

SCP JUPIN & ALGRIN

SCP LEFEVRE TARDY & HONGRE BOYELDIEU

SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE DIX HUIT DECEMBRE DEUX MILLE HUIT,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

1/ Madame Z A

née le XXX à XXX

de nationalité Française

XXX

XXX

XXX

LE PELISSIER

XXX

XXX

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par la SCP FIEVET-LAFON, avoués – N° du dossier 270977

ayant pour avocat Me Albert GOLDBERG au barreau de PARIS

APPELANTES

****************

1/ S.A.S. ETABLISSEMENTS C ET FILS

XXX

XXX

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par la SCP JUPIN & ALGRIN, avoués – N° du dossier 0024055

plaidant par Me Brigitte BEAUMONT, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

2/ S.A.R.L. DE LONGHI

XXX

XXX

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

3/ S.A. XXX

XXX

XXX

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentées par la SCP LEFEVRE TARDY & HONGRE BOYELDIEU, avoués – N° du dossier 280036

plaidant par Me Emmanuelle DEVIN, avocat au barreau de PARIS (R.66)

INTIMEES

4/ S.A. D E INTERNATIONAL

XXX

XXX

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentée par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD, avoués N° du dossier 0744654

plaidant par Me CRET de la SCP NORMAND, SARDA ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS (P.141)

INTIMEE

5/ CPAM de PARIS

XXX

XXX

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

INTIMEE DEFAILLANTE

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 13 Novembre 2008, Madame Joëlle BOURQUARD, Président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Joëlle BOURQUARD, Président,

Monsieur Marc REGIMBEAU, Conseiller,

Madame Ingrid ANDRICH, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Claire THEODOSE


FAITS ET PROCEDURE

Le 1er mars 2000, Mme Z A, alors qu’elle utilisait la friteuse de marque KENWOOD qu’elle avait acquise au magasin C le 21 février précédent, a été brûlée par brûlures au visage et sur le haut du corps par projection d’huile de cet appareil dont le bac a pris feu entraînant un début d’incendie et l’intervention des sapeurs pompiers. Son assureur, la MAIF, a mandaté le Docteur X, en qualité d’expert amiable.

Mme Z A a sollicité et obtenu le 28 avril 2003 la désignation d’un expert en référé afin de déterminer l’éventuelle défectuosité de la friteuse litigieuse et les opérations d’expertise ont été étendues le 28 août 2003 au fabricant de cet appareil, la société D E INTERNATIONAL S.A.

Ensuite du dépôt le 25 décembre 2003 du rapport d’expertise, Mme Z A et la MAIF ont, par actes des 28 et 31 mars 2006, assigné la société ETABLISSEMENTS C ET FILS S.A.S. et la société DE LONGHI S.A.R.L., venant aux droits de la société KENWOOD, en déclaration de responsabilité et allocation de dommages et intérêts et la S.A.R.L. DE LONGHI a, par acte du 23 novembre 2006, appelé la S.A. D E INTERNATIONAL en intervention forcée devant le tribunal de grande instance de Nanterre qui, par jugement rendu le 14 septembre 2007, a :

— dit que Mme Z A et la MAIF ne pouvaient fonder leurs demandes à l’encontre des sociétés ETABLISSEMENTS C ET FILS, DE LONGHI et D E INTERNATIONAL que sur les dispositions des articles 1386-1 et suivants du code civil sur la responsabilité des produits défectueux ou sur celles de l’article 1641 du code civil au titre de la garantie des vices cachés,

— déclaré irrecevable l’action de Mme Z A et de la MAIF sur le fondement des articles 1386-1 et suivants du code civil et sur le fondement de l’article 1641 du code civil, comme étant prescrite en application des dispositions de l’article 1386-17 du code civil et de celles de l’article 1648 du code civil,

— débouté Mme Z A et la MAIF de leurs demandes fondées sur les dispositions des articles 1147, 1603, 1615 et 1382 du code civil,

— débouté les parties de leurs plus amples demandes,

— dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la S.A.S. ETABLISSEMENTS C ET FILS, de la S.A.R.L. DE LONGHI et son assureur, la S.A. GENERALI IARD, et de la S.A. D E INTERNATIONAL,

— dit que la charge des frais d’expertise devait être supportée par chacune des parties à hauteur de un quart pour chacune d’entre elles et condamnées les demanderesses aux dépens.

Appelantes de cette décision, Mme Z A et la MAIF, aux termes de leurs écritures déposées le 7 octobre 2008, concluent en son infirmation et elles demandent, vu les articles 1382, 1386-1 et suivants du code civil, L 121-1 du code des assurances de condamner solidairement les sociétés DE LONGHI, B C ET FILS, D E INTERNATIONAL et GENERALI IARD à payer les sommes de :

  • 374.476, 27 euros à Mme Z A en réparation de l’ensemble de ses préjudices,
  • 2.541,42 euros à la MAIF subrogée dans les droits de Mme Z A s’agissant d’une partie de la réparation du préjudice matériel subi par elle,

— débouter les sociétés DE LONGHI, ETABLISSEMENTS C ET FILS, D E INTERNATIONAL et GENERALI IARD de toutes leurs demandes, fins et conclusions contraires aux présentes et les condamner solidairement à leur payer une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens comprenant les frais de référé et d’expertise.

La société D E INTERNATIONAL S.A., aux termes de ses écritures déposées le 9 septembre 2008, conclut à la confirmation du jugement sauf en ce qu’il a réparti les frais d’expertise entre chacune des parties et par voie d’appel incident, elle demande de dire que Mme Z A et la MAIF devront supporter l’intégralité des frais d’expertise ; elle sollicite qu’il soit dit que l’action intentée par Mme Z A et la MAIF est prescrite par application de l’article 1386-17 du code civil ainsi que de l’article 1648 du code civil et que celle intentée au titre de l’article 1382 du code civil est irrecevable et mal fondée et, à titre subsidiaire, qu’elles soient déclarées infondées ; à titre subsidiaire, elle demande de ramener à de plus justes proportions les demandes indemnitaires de Mme Z A et de la MAIF et de débouter les sociétés DE LONGHI, ETABLISSEMENTS C ET FILS et GENERALI IARD de toutes demandes, fins et conclusions à son encontre et de condamner tout succombant à lui payer une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

La société DE LONGHI S.A.R.L. et la société GENERALI IARD S.A. anciennement GENERALI ASSURANCES, aux termes de leurs écritures déposées le 4 septembre 2008, concluent à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et à titre subsidiaire et demandent de,

— dire et juger prescrites les demandes de Mme Z A et la MAIF sur le fondement de l’article 1386-17 du code civil et les débouter de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions dirigées à leur encontre,

— à titre subsidiaire,

— dire que Mme Z A doit rapporter la preuve du vice ou du défaut de sécurité invoqué et que cette preuve n’est pas rapportée,

— la débouter en conséquence de l’ensemble de ses demandes,

— plus subsidiairement,

— condamner la S.A. D E INTERNATIONAL à les relever et garantir de toutes condamnations susceptibles d’être prononcées à leur encontre en principal, intérêts et frais et ce avec exécution provisoire,

— débouter la S.A.S. ETABLISSEMENTS C ET FILS de son appel en garantie formé à leur encontre,

— en toute hypothèse,

— dire que le préjudice subi par Mme Z A au titre de la perte de chance ne peut excéder la somme de 15.000 euros,

— condamner tout succombant à leur payer une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

La société ETABLISSEMENTS C ET FILS S.A.S., aux termes de ses écritures déposées le 2 juillet 2008, conclut, vu les dispositions des articles 1386-1, 1386-17, 1641, 1648, 1147 du code civil, à la confirmation du jugement en ce qu’il a,

— dit que Mme Z A et la MAIF ne peuvent fonder leurs demandes à l’encontre des sociétés ETABLISSEMENTS C ET FILS, DE LONGHY et D E INTERNATIONAL que sur les dispositions des articles 1386-1 et suivants du code civil au titre de la responsabilité des produits défectueux, ou sur celles de l’article 1641 du code civil au titre de la garantie des vices cachés,

— déclaré irrecevable l’action de Mme Z A et de la MAIF sur le fondement des articles 1386-1 et suivants du code civil, et sur le fondement de l’article 1641 du code civil, comme étant prescrite, en application des dispositions de l’article 1386-1 du code civil et de celles de l’article 1648 du code civil,

— et a débouté Mme Z A et la MAIF de leurs demandes fondées sur les dispositions des articles 1147, 1603, 1615 et 1382 du code civil,

— et en son infirmation en ce qu’il a dit que la charge des frais d’expertise devait être supportée par chacune des parties à hauteur d’un quart pour chacune d’entre elles,

— statuant à nouveau,

— dire que Mme Z A et la MAIF devront supporter et conserver à leur charge l’intégralité des frais d’expertise,

— en conséquence,

— condamner Mme Z A et la MAIF à verser à la S.A.S. ETABLISSEMENTS C ET FILS une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’à supporter les entiers dépens de première instance et d’appel,

— en autoriser le recouvrement au profit de la SCP JUPIN ALGRIN, avoués,

— à titre subsidiaire,

— dire et juger Mme Z A et la MAIF mal fondées en toutes leurs demandes, fins et conclusions sur le fondement des dispositions des articles 1386-1 et suivants du code civil,

— dire et juger qu’au plan contractuel, Mme Z A et la MAIF ne rapportent pas la preuve d’un défaut de sécurité du produit sur le fondement des articles 1386-1 et suivants du code civil, ni d’un vice de conception du produit sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil,

— dire et juger que Mme Z A et la MAIF mal fondées en toutes leurs demandes, fins et conclusions sur le fondement des articles 1147, 1603 et 1615 du code civil dirigées à l’encontre de la S.A.S. ETABLISSEMENTS C ET FILS,

— sur l’ensemble de ces fondements,

— débouter Mme Z A et la MAIF de l’intégralité de leurs demandes, de même que toutes autres parties,

— condamner Mme Z A et la MAIF au paiement d’une indemnité de 3.000 euros à la S.A.S ETABLISSEMENTS C ET FILS sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel,

— en autoriser le recouvrement au profit de la SCP JUPIN ALGRIN, avoués,

— à titre plus subsidiaire,

— Sur la nécessité garantie de la S.A.R.L. DE LONGHI, la S.A. GENERALI ASSURANCES IARD et la S.A. D E INTERNATIONAL

— condamner, in solidum, ou l’une à défaut de l’autre, la S.A.R.L. DE LONGHI, la S.A. GENERALI ASSURANCES IARD, et la S.A. D E INTERNATIONAL à relever et garantir la S.A.S. ETABLISSEMENTS C ET FILS de toutes éventuelles condamnations susceptibles d’être prononcées à son encontre au profit de Mme Z A et de la MAIF,

— Sur les demandes de Mme Z A et de la MAIF

. Sur les réclamations de la MAIF

— en l’absence de rapport d’expertise contradictoire des dommages et de pièces justifiant des dommages mobiliers et immobiliers indemnisés par la MAIF, subrogée dans les droits de Mme Z A,

— déclarer la MAIF mal fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions,

— l’en débouter purement et simplement,

. Sur les réclamations de Mme Z A

— enjoindre à Mme Z A de mettre ses réclamations en conformité avec la nomenclature Dintilhac, distinguant les préjudices patrimoniaux des préjudices extra-patrimoniaux, permettant l’imputation de la créance de l’organisme tiers payeur,

— dire et juger inopposable à la S.A.S. ETABLISSEMENTS C ET FILS les certificats et rapports d’expertise non contradictoires des Docteurs DARDOUR, Y et X, respectivement en date des 3 mai 2000, 25 mai 2000 et 26 avril 2001,

— constater qu’aucune indemnisation des préjudices allégués par Mme Z A ne saurait être allouée sur la base des documents et rapports d’expertise non contradictoires,

— en conséquence,

— ordonner une mesure d’expertise médicale confiée à tel Expert qu’il plaira au Tribunal de désigner, avec la mission habituelle pour déterminer la nature des blessures reçues et leurs suites,

— dire et juger qu’au titre de la mission expertale, il appartiendra à l’expert commis de :

* de se prononcer sur l’état antérieur de Mme Z A pour ne retenir que les seules séquelles imputables aux faits, objet de la présente instance,

* d’établir un pré-rapport sur lequel les parties pourront émettre leurs observations dans un délai de quatre semaines à réception du pré-rapport,

— dire et juger que les frais d’expertise médicale seront supportés par Mme Z A,

— plus subsidiairement encore, et pour le cas où le tribunal statuerait sans recourir à une mesure d’expertise judiciaire,

— dire et juger Mme Z A mal fondée en sa demande d’indemnisation au titre de l’incidence professionnelle, improprement qualifiée 'préjudice résultant de la perte de chance',

— la débouter de sa demande de dommages et intérêts chiffrée à 367.255,82 euros,

— constater que l’indemnisation du préjudice moral fait double emploi avec l’indemnisation du pretium doloris,

— en conséquence,

— débouter Mme Z A de sa demande de réparation du préjudice moral,

— la débouter également de sa demande au titre du préjudice matériel,

— pour le surplus,

— réduire à de plus justes proportions les sommes réclamées par Mme Z A au titre des souffrances endurées et du préjudice esthétique,

— la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions,

— constater que la CPAM de PARIS n’entend par intervenir à la présente instance,

— déclarer opposable et commun à la CPAM de PARIS le jugement à intervenir,

— dire et juger Mme Z A mal fondée en sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— l’en débouter purement et simplement, et débouter toutes parties du surplus de leurs demandes, fins et conclusions,

— condamner in solidum la S.A.R.L. DE LONGHI, la S.A. GENERALI ASSURANCES IARD et la S.A. D E INTERNATIONAL ou l’une à défaut de l’autre, à payer à la S.A.S. ETABLISSEMENTS C ET FILS une indemnité de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

MOTIFS ET DECISION

Considérant qu’en cause d’appel, Mme Z A et la MAIF fondent leurs prétentions à l’égard des sociétés ETABLISSEMENTS C ET FILS et DE LONGHI sur les dispositions de l’article 1386-1 du code civil et à l’égard de la S.A. D E INTERNATIONAL sur celles de l’article 1382 du code civil en faisant valoir qu’en qualité de tiers au contrat, Mme Z A est fondée à invoquer un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ;

Que la S.A.S. ETABLISSEMENTS C ET FILS, vendeur du produit litigieux, leur oppose l’irrecevabilité de leurs demandes comme étant couvertes par la prescription prévue par l’article 1386-17 du code civil, qu’elle fait subsidiairement valoir que sa responsabilité ne peut être recherchée par application de l’article 1386-7 du code civil ;

Que la S.A.R.L. DE LONGHI, venant aux droits de la société KENWOOD, et son assureur soulèvent également l’irrecevabilité de la demande pour cause de prescription ;

Que la S.A. D E INTERNATIONAL fait valoir que Mme Z A, en tant que sous acquéreur, n’est pas tiers au contrat conclu entre la S.A.R.L. DE LONGHI et la S.A. D E INTERNATIONAL, que l’action directe dont elle dispose en tant que sous acquéreur contre le fabricant est nécessairement contractuelle et qu’elle ne peut donc agir sur le terrain de la responsabilité délictuelle ;

Considérant que le régime de responsabilité sans faute du fait des produits défectueux prévue par les articles 1386 et suivants du code de procédure civil désigne comme principal responsable le producteur du produit, que l’article 1386-6 du code civil le définit comme étant le fabricant d’un produit, le producteur d’une matière première, le fabricant d’une partie composante ; qu’en l’espèce il est établi et non contesté que la S.A. D E INTERNATIONAL est le fabricant de la friteuse litigieuse ;

Que l’article 1386-6 alinéa 2 du code civil assimile au producteur, dès lors qu’il agit à titre professionnel celui qui se présente comme producteur en apposant sur le produit son nom, sa marque ou tout autre signe distinctif ; qu’en l’espèce, la S.A.R.L. DE LONGHI venant aux droits de la société KENWOOD, fournisseur de l’appareil et qui a apposé sa marque sur celui-ci, doit être considérée comme producteur dont la responsabilité peut être recherchée, qu’elle peut recourir en garantie contre la S.A. D E INTERNATIONAL, fabricant identifié du produit dont la défectuosité, est alléguée ;

Considérant que les dispositions de l’article 1386-7 du code civil excluent la responsabilité du vendeur pour défaut de sécurité du produit lorsque le producteur est, comme en l’espèce identifié, que les demandes de Mme Z A et la MAIF dirigées contre la S.A.S. ETABLISSEMENTS C ET FILS doivent en conséquence être écartées et qu’il convient de mettre hors de cause la S.A.S. ETABLISSEENTS C ET FILS ;

Considérant que la responsabilité du fait des produits défectueux suppose pour être consacrée la preuve de l’existence d’un défaut du produit et d’un lien de causalité entre le défaut et le dommage ; que doit être considéré comme défectueux le produit qui n’offre pas la sécurité à laquelle on peut légitiment s’attendre et qui en conséquence se révèle anormalement dangereux même s’il est exempt de vice, lorsqu’il en est fait un usage normal ;

Et considérant que l’action en réparation du fait des produits défectueux se prescrit, par application de l’article 1386-17 du code civil, dans un délai de trois ans à compter de la date à laquelle le demandeur a eu ou aurait dû avoir connaissance du dommage, du défaut et de l’identité du producteur ; que ce délai est susceptible de suspension ou de prescription conformément au droit commun en matière de prescription ;

Qu’en l’espèce, la date de consolidation du préjudice corporel a été fixée, par l’expert amiable qui a examiné Mme Z A, au 31 mars 2001, que cette date n’est pas contestée, qu’elle doit être retenue comme étant celle de la connaissance par la demanderesse du dommage ;

Que s’agissant de la défectuosité du produit, la relation des circonstances de l’accident, non contestée par les défendeurs lesquels ne rapportent pas la preuve d’une quelconque faute de la victime, démontre que Mme Z A a fait un usage normal de la friteuse laquelle s’est révélée anormalement dangereuse dès lors qu’elle a provoqué des blessures et des lésions sur le visage et le haut du corps de son utilisatrice par projection d’huile et que l’intérieur du bac de cet appareil s’est enflammé ; qu’il convient donc d’estimer que Mme Z A a eu ou aurait dû avoir connaissance du défaut du produit à l’occasion de l’accident au cours duquel elle a été brûlée le 1er mars 2000 et au cours duquel la dangerosité anormale de l’appareil s’est révélée ; que le rapport établi par l’expert amiable, le 15 octobre 2002 ne fait que mettre en évidence le caractère anormalement dangereux de cette friteuse alors qu’il en était fait un usage normal en se rapportant à la relation des faits énoncée par Mme Z A ;

Que Mme Z A a, par ailleurs, eu immédiatement connaissance du nom du producteur, figurant sur l’appareil, la société KENWOOD et dont l’assureur a assisté aux opérations et réunions d’expertise amiable ;

Que le point de départ du délai de prescription doit en conséquence être fixé à la date du 31 mars 2001, date de la connaissance du dommage ;

Considérant toutefois que l’assignation en référé, délivrée le 5 mars 2003, a eu pour effet d’interrompre le cours de la prescription et de supprimer le temps déjà écoulé depuis le 31 mars 2002 ; que toutefois la désignation de l’expert, contrairement à ce que soutiennent les appelantes, n’a pas entraîné de suspension du délai de prescription jusqu’au dépôt du rapport d’expertise le 25 décembre 2003, que la prescription a pris un nouveau point de départ pour un délai de trois ans dès l’ordonnance de référé du 28 avril 2003 désignant l’expert judiciaire ; que la circonstance selon laquelle les opérations d’expertise ont été déclarées communes, par ordonnance du 28 août 2003, à la S.A. D E INTERNATIONAL n’a pas eu pour conséquence de faire courir un nouveau délai de prescription au profit de Mme Z A et la MAIF, demanderesses, dès lors que l’ordonnance de référé du 28 août 2003 a été prononcée à la demande et sur assignation de la S.A.R.L. DE LONGHI à l’encontre de la S.A. D E INTERNATIONAL de façon à interrompre son propre délai de prescription et qu’elle ne concernait que l’action en garantie dont la S.A.R.L. DE LONGHI disposait à l’encontre de cette société, en tant que fabricant ; qu’au surplus, Mme Z A et la MAIF ne recherchent la responsabilité de la S.A. D E INTERNATIONAL sur le terrain de la responsabilité du fait des produits défectueux, mais sur le fondement de l’article 1382 du code civil ; qu’étant constaté qu’un délai de plus de trois ans a couru entre la désignation de l’expert en référé, le 28 avril 2003 et l’assignation au fond du 28 mars 2006, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu’il a déclaré la demande prescrite ;

Considérant que Mme Z A et la MAIF reprochent à la S.A. D E INTERNATIONAL d’avoir commis une faute en ne lui fournissant pas un produit exempt de tout défaut, qu’elle estime que cette société a engagé sa responsabilité contractuelle à l’égard de la société KENWOOD aux droits de laquelle vient la S.A.R.L. DE LONGHI et par voie de conséquence, engagée sa responsabilité délictuelle à l’égard de Mme Z A, tiers au contrat ;

Considérant que par arrêt du 25 avril 2002 (aff. C-183/00 Gonzalez/Medicina Asturia), la cour de justice des communautés européennes a précisé que « la référence à l’article 13 de la directive, aux droits dont la victime d’un dommage peut se prévaloir au titre de la responsabilité contractuelle ou extracontractuelle doit être interprétée en ce sens que le régime mis en place par ladite directive (') n’exclut pas l’application d’autres régimes de responsabilité contractuelle ou extracontractuelle reposant sur des fondements juridiques différents tels que la garantie des vices cachés ou la faute » ;

Que le juge communautaire explicite la référence que fait l’article 13 à la possibilité pour la victime d’invoquer « un régime spécial de responsabilité existant au moment de la notification de la directive », devant s’entendre comme « visant un régime propre limité à un secteur déterminé », que la CJCE conclut à ce que l’article 13 de la directive doit être interprété en ce sens que les droits conférés par la législation d’un Etat membre aux victimes d’un dommage causé par un produit défectueux, au titre d’un régime général ayant le même fondement que celui mis en place par ladite circulaire se trouve limité ou restreint à la suite de la transposition de celle-ci dans l’ordre interne dudit Etat » ;

Qu’il s’en déduit que pour asseoir leur action en responsabilité sur le fondement de l’article 1382 du code civil à l’encontre du fabricant, Mme Z A et la MAIF ne peuvent invoquer la défaillance contractuelle de la S.A. D E INTERNATIONAL à l’égard de la S.A.R.L. DE LONGHI pour absence de fourniture d’un produit exempt de tout défaut dès lors que l’action fondée sur l’obligation de sécurité instituée par la jurisprudence française sur le fondement de l’article 1147 du code civil doit être considérée comme « relevant d’un régime général ayant le même fondement » ; que les appelantes qui ne se prévalent d’aucune faute directement commise par la S.A. D E INTERNATIONAL à leur égard doivent en conséquence être déboutées de leurs demandes ; qu’au demeurant, en qualité de sous acquéreur dans ses relations avec les sociétés DE LONGHI et D E INTERNATIONAL, Mme Z A n’a pas la qualité de tiers au contrat ;

Considérant que l’équité commande d’allouer aux intimées une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile, que les appelantes qui succombent dans leurs prétentions doivent être condamnées aux entiers dépens, que s’agissant des frais d’expertise, il convient de dire qu’ils seront supportés pour moitié par les appelantes et pour l’autre moitié par la société DE LONGHI S.A.R.L. laquelle a attrait société D E INTERNATIONAL S.A. afin de lui voir déclarer les opérations d’expertise communes ;

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu le 14 septembre 2007 sauf à prononcer la mise hors de cause de la société ETABLISSEMENTS C ET FILS S.A.S. et à dire que Mme Z A et la MAIF d’une part, et la société DE LONGHI S.A.R.L. d’autre part, doivent supporter chacune pour moitié les frais d’expertise ;

Rejette toutes autres prétentions des parties,

Condamne Mme Z A et la MAIF à payer au titre de l’article 700 du code de procédure civile à la société DE LONGHI S.A.R.L. et à la société GENERALI IARD S.A. une indemnité de 1.500 euros, à la société ETABLISSEMENTS C ET FILS S.A.S. une indemnité de 1.500 euros, à la société D E INTERNATIONAL S.A. une indemnité de 1.500 euros,

Condamne Mme Z A et la MAIF aux entiers dépens et dit que les frais d’expertise doivent être supportés pour moitié par Mme Z A et la MAIF et pour l’autre moitié par la société DE LONGHI S.A.R.L. et autorise la SCP JUPIN-ALGRIN, la SCP LEFEVRE-TARDY-HONGRE-BOYELDIEU et la SCP LISSARAGUE-DUPUIS-BOCCON-GIBOD, études d’avoués associés à les recouvrer directement comme il est prescrit à l’article 699 du code de procédure civile.

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Joëlle BOURQUARD, Président et par Madame Marie-Claire THEODOSE, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,

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Cour d'appel de Versailles, 3ème chambre, 18 décembre 2008, n° 07/07348