Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 8 octobre 2020, n° 18/07762

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 3e ch., 8 oct. 2020, n° 18/07762
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 18/07762
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Nanterre, 11 octobre 2018, N° 14/01613
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 38Z

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 08 OCTOBRE 2020

N° RG 18/07762

N° Portalis DBV3-V-B7C-SYYU

AFFAIRE :

SA INORA LIFE FRANCE

C/

X, Z Y

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Octobre 2018 par le Tribunal de Grande Instance de Nanterre

N° Chambre : 6

N° RG : 14/01613

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Anne ROULLIER de la SELEURL ROULLIER JEANCOURT-GALIGNANI AVOCATS

Me Anne BRASSENS

Me Claire RICARD

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE HUIT OCTOBRE DEUX MILLE VINGT,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

SA INORA LIFE FRANCE

N° SIRET : B 434 487 757

[…]

[…]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Anne ROULLIER de la SELEURL ROULLIER JEANCOURT-GALIGNANI AVOCATS, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : W05

APPELANTE

****************

1/ Madame X, Z Y

née le […] à […]

de nationalité française

[…]

[…]

Représentant : Me Anne BRASSENS, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1266

INTIMEE

2/ Société PREDICTIS anciennement dénommée […]

[…]

[…]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Claire RICARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 – N° du dossier 2018406

Représentant : Me Céline LEMOUX de l’AARPI LAWINS AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0246

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L’affaire était fixée à l’audience publique du 23 avril 2020 pour être débattue devant la cour composée de :

Madame Marie-José BOU, Président, Madame Françoise BAZET, Conseiller, Madame Caroline DERNIAUX, Conseiller,

En application de l’article 8 de l’ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020 portant, notamment, adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale, il a été décidé par le président que la procédure susvisée se déroulerait sans audience.

Les parties en ont été avisées par le greffe le 2 juin 2020 et ces dernières ne s’y sont pas opposées dans le délai de quinze jours.

Ces mêmes magistrats en ont délibéré conformément à la loi.


Le 7 novembre 2006, Mme X Y a adhéré au contrat d’assurance collectif sur la vie en unités de compte dénommé Imaging souscrit par la société Arca patrimoine auprès de la société Inora Life.

Mme Y a procédé au versement d’une somme de 30 000 euros, investie sur le support 'Lisseo Dynamic'. En 2010, elle a procédé à l’arbitrage de la totalité de son épargne investie vers le support dénommé 'Altéo Dynamic'.

Par lettre recommandée datée du 6 juillet 2012, Mme Y a fait part de sa volonté de renoncer au contrat d’assurance-vie précité en application des articles L. 132-5-1 et L. 132-5-2 du code des assurances, indiquant qu’elle avait perdu environ 80% de son capital et se prévalant du non-respect des obligations d’information prévues par le code des assurances. Elle a sollicité le remboursement de la somme de 30 000 euros.

Suivant lettre du 26 juillet 2012, la société Inora Life a répondu ne pouvoir donner une suite favorable à sa demande.

Se plaignant de la complexité du contrat ainsi que de l’ampleur de ses pertes financières, Mme Y ainsi que dix autres épargnants ont, par acte du 12 décembre 2013, assigné les sociétés Inora Life et Arca patrimoine devant le tribunal de grande instance de Nanterre pour voir constater leurs manquements à leurs obligations d’information précontractuelle et la prorogation subséquente du délai de renonciation au contrat. Ils ont dénoncé les manquements des sociétés Inora Life et Arca patrimoine à leur devoir de conseil et sollicité leur condamnation in solidum à réparer le préjudice financier découlant de cette faute.

Par ordonnance du 23 janvier 2015, le juge de la mise en état a disjoint la procédure en onze instances distinctes.

Suivant jugement du 12 octobre 2018, le tribunal a :

— ordonné le rabat de la clôture ordonnée le 16 octobre 2017,

— reçu les conclusions signifiées le 6 avril 2018 par la société Inora Life,

— clos de nouveau l’instruction,

— condamné la société Inora Life à payer à Mme Y la somme de 30 000 euros assortie des intérêts au taux légal majoré de moitié du 1er septembre au 1er novembre 2012, puis au double de ce taux jusqu’au paiement,

— dit que les intérêts échus pour une année entière depuis la demande en justice, soit le 12 décembre 2013, produiront eux-mêmes des intérêts à compter du 12 décembre 2014,

— déclaré Mme Y irrecevable en sa demande de dommages et intérêts,

— ordonné l’exécution provisoire,

— condamné la société Inora Life à payer à Mme Y la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens, dont distraction au profit de la société 28 octobre,

— rejeté toutes autres demandes.

Par déclaration du 15 novembre 2018, la société Inora life a interjeté appel du jugement en ce qu’il l’a condamnée à payer la somme de 30 000 euros avec intérêts au taux légal et capitalisation de ceux-ci ainsi qu’à une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La société Inora Life prie la cour, par dernières conclusions du 13 février 2019, de :

— infirmer le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

in limine litis :

— juger les demandes de Mme Y prescrites,

— en conséquence la déclarer irrecevable,

au fond,

à titre principal :

— juger que la société Inora Life a communiqué toutes les informations légales à Mme Y et par conséquent rempli ses obligations lors de la souscription de son contrat d’assurance-vie le 7 novembre 2006 et le 8 octobre 2010 lors de l’arbitrage de son contrat vers le support Altéo Dynamic,

à titre subsidiaire :

— juger que Mme Y a fait valoir avec mauvaise foi et déloyauté son droit de renonciation au contrat d’assurance-vie litigieux,

— juger que la société Inora Life a rempli ses obligations envers Mme Y,

— juger que Mme Y ne démontre pas l’existence d’un préjudice ni celle d’un lien de causalité, et que ses demandes sont injustifiées,

en conséquence :

— débouter Mme Y de ses demandes, fins et conclusions à l’encontre de la société Inora Life,

— condamner Mme Y à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner Mme Y aux entiers dépens.

Par dernières conclusions du 9 mai 2019, la société Predictis, se disant anciennement dénommée Arca patrimoine, prie la cour de :

— mettre hors de cause la société Predictis en l’absence de toute demande formée à son encontre et, en tout état de cause, confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Mme Y de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de la société Predictis,

— condamner tout succombant à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens avec distraction.

Bien qu’ayant constitué avocat le 10 janvier 2019, Mme Y n’a pas conclu.

La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.

S’agissant de Mme Y qui ne conclut pas, elle est réputée, conformément à l’article 954 dernier alinéa du code de procédure civile, s’approprier les motifs du jugement.

MOTIFS DE LA DECISION

- Sur la clôture

Les parties ont été destinataires de l’avis adressé en application de l’article 8 de l’ordonnance 2020-304 du 25 mars 2020 et ont déposé leur dossier.

La clôture est intervenue à la date limite fixée pour le dépôt des pièces, soit le 23 avril 2020.

- Sur la mise hors de cause de la société Predictis

La société Predictis sollicite sa mise hors de cause en l’absence de demande formée contre elle.

***

Devant le tribunal, Mme Y a sollicité la condamnation de la société Inora Life à lui rembourser les primes versées et la condamnation solidaire de cette société et de la société Arca patrimoine à des dommages et intérêts. Le tribunal a déclaré Mme Y irrecevable en sa demande de dommages et intérêts.

Si la société Inora Life a intimé la société Arca patrimoine devenue Predictis, son recours est limité, n’ayant pas interjeté appel de la disposition du jugement ayant déclaré irrecevable la demande de dommages et intérêts de Mme Y. En outre, la société Inora Life n’a formé aucune demande contre la société Predictis. Enfin, Mme Y, qui n’a pas conclu, n’a pas formé d’appel incident, ni de prétentions contre la société Predictis.

Il s’ensuit que les dispositions du jugement concernant la société Arca patrimoine devenue Predictis ne sont pas déférées à la cour et qu’aucune demande n’est formée contre celle-ci. En conséquence, la société Predictis sollicite à juste titre sa mise hors de cause sans qu’il y ait lieu de confirmer les dispositions du jugement concernant cette société, celles-ci n’étant pas frappées d’appel.

- Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription

Le tribunal n’a statué sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription qu’en ce qui concerne la demande de dommages et intérêts formée par Mme Y.

A hauteur d’appel, la société Inora Life soulève la prescription des demandes de Mme Y en vertu de l’article L. 110-4 du code de commerce, dont elle dit qu’il s’applique à toutes les obligations nées à l’occasion de l’activité commerciale d’un établissement de crédit, notamment à propos de l’adhésion à un contrat d’assurance de groupe par un emprunteur particulier auprès d’un établissement de crédit. Elle soutient que le point de départ de l’action est la date de conclusion du contrat et du versement réalisé, soit le 7 novembre 2006, lors de laquelle Mme Y a ou aurait dû avoir connaissance du non-respect par la société Inora Life de son obligation précontractuelle d’information et de la violation des dispositions du code des assurances. Or, elle relève que l’action n’a été introduite que le 12 décembre 2013. En toute hypothèse, elle prétend qu’une moins-value latente est apparue dès le relevé de situation de l’année 2007 de sorte que l’action est également prescrite au regard de la date d’apparition du préjudice.

***

L’article L.132-5-1 du code des assurances, dans sa rédaction applicable en l’espèce, dispose que toute personne physique qui a signé une proposition ou un contrat d’assurance sur la vie ou de capitalisation a la faculté d’y renoncer par lettre recommandée avec demande d’avis de réception pendant le délai de trente jours calendaires révolus à compter du moment où elle est informée que le contrat est conclu. Ce délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures. S’il expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il n’est pas prorogé.

La renonciation entraîne la restitution par l’entreprise d’assurance ou de capitalisation de l’intégralité des sommes versées par le contractant, dans le délai maximal de trente jours calendaires révolus à compter de la réception de la lettre recommandée. Au-delà de ce délai, les sommes non restituées produisent de plein droit intérêt au taux légal majoré de moitié durant deux mois, puis, à l’expiration de ce délai de deux mois, au double du taux légal.

Les dispositions du présent article sont précisées, en tant que de besoin, par arrêté ministériel. Elles ne s’appliquent pas aux contrats d’une durée maximale de deux mois.

Aux termes de l’article L.132-5-2 du même code, avant la conclusion d’un contrat d’assurance sur la vie ou d’un contrat de capitalisation, par une personne physique, l’assureur remet à celle-ci, contre récépissé, une note d’information sur les conditions d’exercice de la faculté de renonciation et sur les dispositions essentielles du contrat. Un arrêté fixe les informations qui doivent figurer dans cette note, notamment en ce qui concerne les garanties exprimées en unités de compte. Toutefois, la proposition d’assurance ou le projet de contrat vaut note d’information, pour les contrats d’assurance comportant une valeur de rachat ou de transfert, lorsqu’un encadré, inséré en début de proposition d’assurance ou de projet de contrat, indique en caractères très apparents la nature du contrat. L’encadré comporte en particulier le regroupement des frais dans une même rubrique, les garanties offertes et la disponibilité des sommes en cas de rachat, la participation aux bénéfices, ainsi que les modalités de désignation des bénéficiaires. Un arrêté du ministre chargé de l’économie, pris après avis de l’Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles, fixe le format de cet encadré ainsi que, de façon limitative, son contenu. La proposition ou le contrat d’assurance ou de capitalisation comprend :

1° Un modèle de lettre destiné à faciliter l’exercice de la faculté de renonciation ;

2° Une mention dont les termes sont fixés par arrêté du ministre chargé de l’économie, précisant

les modalités de renonciation.

La proposition ou le projet de contrat d’assurance ou de capitalisation indique, pour les contrats qui en comportent, les valeurs de rachat au terme de chacune des huit premières années du contrat au moins, ainsi que, dans le même tableau, la somme des primes ou cotisations versées au terme de chacune des mêmes années. Toutefois, pour les contrats mentionnés au deuxième alinéa de l’article L. 132-23, l’entreprise indique les valeurs de transfert au lieu des valeurs de rachat. La proposition ou le projet de contrat d’assurance ou de capitalisation indique les valeurs minimales et explique le mécanisme de calcul des valeurs de rachat ou de transfert lorsque celles-ci ne peuvent être établies.

Le défaut de remise des documents et informations prévus au présent article entraîne de plein droit la prorogation du délai de renonciation prévu à l’article L. 132-5-1 jusqu’au trentième jour calendaire révolu suivant la date de remise effective de ces documents, dans la limite de huit ans à compter de la date où le souscripteur est informé que le contrat est conclu.

Les dispositions du présent article sont précisées, en tant que de besoin, par arrêté ministériel.

Elles ne s’appliquent pas aux contrats d’une durée maximale de deux mois.

L’article L. 132-5-3 dispose que pour les contrats d’assurance de groupe sur la vie mentionnés à l’article L.141-1 comportant des valeurs de rachat ou de transfert, lorsque le lien qui unit l’adhérent au souscripteur ne rend pas obligatoire l’adhésion au contrat, la notice remise par le souscripteur inclut, outre les informations mentionnées au deuxième alinéa de l’article L.141-4, celles contenues dans la note mentionnée à l’article L.132-5-2. L’encadré mentionné au premier alinéa de l’article L.132-5-2 est inséré en début de notice. Lors de l’adhésion, le souscripteur doit remettre à l’adhérent le modèle de lettre mentionné au troisième alinéa de l’article L.132-5-2. Il communique à l’adhérent la mention visée au quatrième alinéa du même article ainsi que, dans les conditions définies au même article, les valeurs de rachat ou de transfert. La faculté de renonciation s’exerce conformément aux articles L.132-5-1 et L.132-5-2.

Conformément à l’article L. 110-4 du code de commerce, les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants et non commerçants se prescrivent par dix ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes, ce délai ayant été réduit à cinq ans par la loi du 17 juin 2013 entrée en vigueur le 19 juin 2008.

En application de l’article L. 114-1 du code des assurances, toutes actions dérivant d’un contrat d’assurance sont prescrites par deux ans à compter de l’événement qui y donne naissance.

Il est de principe que si la prescription de deux ans prévue à L. 114-1 du code des assurances s’applique entre assureur et assuré, elle ne saurait jouer, en matière d’assurance de groupe, dans les rapports de l’adhérent, assuré de la compagnie d’assurance, et du souscripteur du contrat d’assurance de groupe, entre lesquels il n’existe pas de lien d’assurance.

Il est aussi de principe que l’action en justice engagée par l’adhérent d’un contrat d’assurance sur la vie aux fins d’obtenir la restitution des sommes versées, lorsque l’assureur n’a pas procédé à cette restitution dans le délai de trente jours à compter de la réception de la lettre recommandée par laquelle l’adhérent a renoncé au contrat, dérive du contrat d’assurance et se prescrit par deux ans à compter du refus de restitution de l’assureur ou de l’expiration du délai de trente jours imparti par l’article L. 132-5-1 du code des assurances.

Cette solution s’applique en matière d’adhésion à un contrat collectif d’assurance sur la vie à adhésion facultative.

Au cas d’espèce, la demande en restitution des sommes versées oppose l’adhérente, soit Mme

Y, non pas au souscripteur du contrat d’assurance, la société Arca patrimoine devenue Predictis, mais à la compagnie d’assurance elle-même. Une telle action dérive du contrat d’assurance et se trouve donc exclusivement soumise à la prescription biennale de l’article L. 114-1 précité.

Le refus de la société Inora Life de donner une suite favorable à la demande de renonciation de Mme Y a été notifié à cette dernière par lettre du 26 juillet 2012. Or, comme l’appelante l’indique elle-même (page 3 des écritures de la société Inora Life), Mme Y a assigné la société Inora Life en restitution des sommes versées le 12 décembre 2013.

En conséquence, la fin de non-recevoir tirée de la prescription sera écartée.

- Sur la violation de ses obligations par la société Inora Life

Le tribunal a observé à l’étude des documents remis à Mme Y qu’il s’agit d’une liasse unique, divisée en deux parties s’agissant pour les pages 1 à 9 des conditions générales et pour les pages 11 à 23 de la notice d’information, et que l’encadré intitulé 'dispositions essentielles’ figure en page 10 de la plaquette. Il a considéré que la société Inora Life n’a pas respecté les dispositions de l’article L. 132-5-2 précité aux termes desquelles, pour valoir note d’information, la proposition d’assurance doit commencer par l’encadré prévu par ce texte. Il a relevé aussi que l’indication de la nature du contrat (contrat d’assurance de vie de groupe) est insuffisamment apparente dans l’encadré puisqu’elle figure dans la même police que les autres informations alors que l’article L. 132-5-2 susvisé exige qu’elle soit mentionnée en caractères très apparents.

Il en a déduit que l’assureur n’a pas respecté les dispositions de cet article et celles de l’article A 132-8 du code des assurances.

Il a aussi retenu que l’assureur ne justifie pas davantage avoir remis à Mme Y une documentation conforme à ces dispositions lors de l’arbitrage décidé le 8 octobre 2010, la mention manuscrite reproduite par l’adhérente sur la demande d’arbitrage ne faisant aucune référence à un encadré et la documentation citée n’étant pas produite aux débats.

La société Inora Life fait valoir qu’elle n’était tenue à aucun devoir de mise en garde, à défaut d’opération spéculative, ni à devoir de conseil spécifique, à défaut de contact direct avec Mme Y.

Elle soutient avoir respecté son obligation légale d’information lors de l’arbitrage du contrat. Elle fait valoir qu’à cette occasion, Mme Y a reçu une notice d’information et une fiche descriptive du support choisi comme en témoigne le récépissé approuvé et signé par Mme Y. Elle prétend que la notice d’information comprend en première page l’encadré visé par l’article 132-5-2 précité qui signale les dispositions essentielles du contrat au moyen d’un procédé typographique flagrant, attirant l’attention de l’adhérent, et qui donne les informations prescrites par l’article A 132-8 du code des assurances. Or, elle avance que le souscripteur qui, postérieurement à l’adhésion, a reçu un document conforme ne peut ensuite exercer son droit de renonciation.

Elle fait valoir que le contrat Imaging était adapté aux souhaits exprimés par Mme Y.

Elle prétend que la plaquette produite par Mme Y concerne le support Lisseo Dynamic 3 et non Lisseo Dynamic et qu’en tout état de cause, celle-ci présente les aspects les moins favorables du support, spécialement sur la protection du capital limitée à 45% hors frais à l’échéance de 10 ans. Elle fait valoir que la plaquette du support Altéo Dynamic comprend aussi les aspects les moins favorables du support, notamment le risque de perte en capital et la limitation de la garantie à 50%.

Elle soutient encore que dans plusieurs espèces où la notice d’information était placée après les conditions générales, les juridictions saisies ont estimé que cette présentation satisfaisait aux

exigences légales.

Elle se prévaut enfin de la conformité des supports Lisseo Dynamic et Altéo Dynamic à l’article L. 131-1 du code des assurances et du caractère non fondé des manquements invoqués par Mme Y à son encontre.

***

L’article L. 135-5-3 du code des assurances, qui concerne spécifiquement les assurances de groupe sur la vie, renvoie notamment à l’article L. 135-5-2 s’agissant de l’obligation d’information pesant sur l’assureur qui prévoit qu’avant la conclusion du contrat, l’assureur doit remettre contre récépissé au candidat à l’assurance une note d’information sur les conditions d’exercice de la faculté de renonciation prévue à l’article L. 135-2-1 et sur les dispositions essentielles du contrat. Les mentions que doit contenir cette note d’information sont précisées à l’article A 132-4.

Toutefois, pour les contrats d’assurance comportant une valeur de rachat ou de transfert, l’assureur est autorisé à ne pas fournir une note d’information distincte de la proposition d’assurance ou du projet de contrat, à la condition d’insérer en début de proposition d’assurance ou de projet de contrat, un encadré indiquant en caractères très apparents la nature du contrat et dont le format et le contenu sont définis à l’article A 132-8 du code des assurances applicable aux contrats souscrits à partir du 1er mai 2006.

Ces dispositions sont applicables au contrat d’assurance de groupe sur la vie aux termes de l’article L. 132-5-3 qui précise que l’encadré mentionné à l’article L. 132-5-2 est inséré en début de notice.

En l’espèce, il résulte de la pièce n°3 de la société Predictis (conditions générales et notice d’information du contrat Imaging) que lors de l’adhésion de Mme Y et comme l’a retenu le tribunal, les documents remis à cette dernière constituent une liasse unique comportant en première partie, des pages 1 à 9, les conditions générales et en seconde partie, des pages 11 à 23, la notice d’information, l’encadré intitulé 'dispositions essentielles’ se trouvant en page 10 de cette plaquette et ne figurant sur aucune des deux tables des matières.

C’est par une juste analyse des éléments de la cause et des motifs pertinents que la cour adopte expressément que le tribunal a retenu que ce faisant, la société Inora Life n’a pas respecté les dispositions de l’article L. 135-5-2 aux termes desquelles, pour valoir note d’information, la proposition d’assurance doit commencer par l’encadré prévu par ce texte (et non comme en l’espèce par les conditions générales).

De même, le tribunal a relevé de manière pertinente que cet encadré ne respecte pas les dispositions légales et réglementaires susvisées s’agissant de l’indication sur la nature du contrat (contrat d’assurance vie de groupe). En effet, seule la mention 'nature du contrat’ est portée en caractère gras, la nature effective du contrat, soit 'contrat d’assurance vie de groupe à adhésion facultative’ étant inscrite dans la même police que les autres informations. Cette mention est insuffisamment apparente alors que l’article L. 132-5-2 exige qu’elle figure en caractères très apparents.

Le tribunal a ainsi à juste titre considéré que lors de l’adhésion, l’assureur n’a pas respecté les dispositions des article L. 132-5-2 et A 132-8 du code des assurances.

Devant la cour, la société Inora Life verse non seulement aux débats la demande d’arbitrage du 8 octobre 2010 vers le support Altéo Dynamic (sur laquelle figure la mention manuscrite 'lu et approuvé’ suivie de la signature de Mme Y qui précèdent l’indication suivant laquelle elle reconnaît avoir pris connaissance des conditions générales, de la notice d’information ainsi que ses annexes), document déjà produit en première instance, mais aussi la notice d’information remise à Mme Y lors de l’arbitrage (pièce n°6 de la société Inora Life), documentation dont le tribunal a

noté qu’elle n’avait pas été produite devant lui.

Il importe peu, comme l’a relevé le tribunal, que la mention manuscrite de l’adhérente portée sur la demande d’arbitrage ne fasse pas référence à un encadré dès lors que la notice versée aux débats devant la cour qui est celle remise lors de l’arbitrage comporte bien l’encadré intitulé 'dispositions essentielles'. Et, ainsi que le fait valoir l’appelante, cet encadré est inséré en début de notice. Il constitue la page n°1 de cette notice, figurant avant sa table des matières qui correspond à la page n°2.

Il s’en déduit que le défaut de remise d’un document conforme s’agissant du positionnement de l’encadré a été régularisé postérieurement à l’adhésion, lors de l’arbitrage.

Cependant, force est de constater que cet encadré ne respecte pas davantage que celui remis lors de l’adhésion les dispositions légales et réglementaires susvisées s’agissant de l’indication sur la nature du contrat (contrat d’assurance vie de groupe). En effet, comme pour l’encadré initial, seule la mention 'nature du contrat’ est portée en caractère gras, la nature effective du contrat, soit 'contrat d’assurance vie de groupe à adhésion facultative’ étant inscrite dans la même police que les autres informations. Cette mention est contraire à l’article L. 132-5-2 exigeant qu’elle figure en caractères très apparents.

En dépit des pièces produites en appel, la société Inora Life ne justifie donc toujours pas avoir remis à Mme Y une documentation respectant les dispositions des articles L. 132-5-2 et A 132-8 du code des assurances lors de l’arbitrage décidé le 8 octobre 2010, le vice concernant l’indication de la nature du contrat retenu à juste titre par le tribunal n’ayant pas été régularisé par la remise ultérieure d’un document conforme. La possibilité de renoncer au contrat s’est ainsi trouvée prorogée de ce seul fait.

-Sur l’abus de droit reproché à Mme Y

Après avoir rappelé les termes de la lettre de Mme Y du 6 juillet 2012, le tribunal a estimé que l’assureur ne pouvait tirer de conséquences des réponses apportées par celle-ci, notamment quant à sa compréhension du fonctionnement du contrat, les nombreux manquements de l’assureur à son obligation d’information démontrant qu’elle était nécessairement dans l’impossibilité de mesurer la portée de son engagement. Il a relevé que Mme Y était aide-soignante et que l’assureur ne rapportait aucun élément démontrant qu’elle aurait eu une expérience suffisante des marchés financiers alors qu’à l’inverse, le bilan complété lors de l’adhésion justifiait que 80% de son patrimoine, soit environ 214 000 euros, était constitué en immobilier, et 43 000 euros en actifs financiers dont le détail n’était pas précisé. Il a considéré que la réalisation de l’arbitrage et l’information annuelle sur la valeur du contrat ne lui conféraient pas la qualité d’investisseur averti.

Il a aussi considéré que le fait que Mme Y ait attendu plusieurs années pour renoncer à son contrat alors en perte ne permettait pas à lui seul de caractériser sa déloyauté.

Il a ainsi conclu que la société Inora Life ne rapportait pas la preuve lui incombant de l’abus de droit dont elle se prévalait et l’a en conséquence condamnée à payer à Mme Y la somme de 30 000 euros augmentée des intérêts de retard conformément au code des assurances et avec capitalisation.

La société Inora Life affirme que Mme Y a exercé son droit de renonciation avec mauvaise foi et de manière abusive. Elle en veut pour preuve qu’elle a invoqué en 2013 un défaut d’information datant de 2006, plus de sept ans auparavant. Elle fait valoir en outre qu’elle n’est pas un investisseur profane puisque dans le bilan de situation patrimoniale, elle se déclarait familière des placements sur les marchés actions et indiquait accepter les risques de fluctuation y compris à la baisse. Elle argue également qu’au delà des documents signés par elle, elle a eu connaissance, dès les premiers relevés de situation, que les supports choisis étaient soumis aux aléas du marché boursier. Elle invoque enfin

la demande d’arbitrage formée pour transférer l’épargne vers le support Altéo Dynamic, qui établit selon l’appelante que Mme Y suivait l’évolution du contrat et en assurait une gestion 'pro-active'.

Elle en déduit que l’action entreprise est de pure opportunité, dans un contexte de baisse boursière, et doit être rejetée.

***

Il est de principe que si la faculté prorogée de renonciation prévue par l’article L. 132-5-2 du code des assurances en l’absence de respect, par l’assureur, du formalisme informatif qu’il édicte, revêt un caractère discrétionnaire pour le preneur d’assurance, son exercice peut dégénérer en abus.

L’abus de droit est le fait pour une personne de commettre une faute par le dépassement des limites d’exercice d’un droit qui lui est conféré, soit en le détournant de sa finalité, soit dans le but de nuire à autrui.

Il convient de rechercher à la date d’exercice de la faculté de renonciation, au regard de la situation concrète de l’intéressé, de sa qualité d’assuré profane ou averti et des informations dont il disposait réellement, quelle était la finalité de l’exercice de son droit de renonciation et s’il n’en résulte pas un abus.

La finalité de cet exercice doit s’apprécier au regard de la compréhension par l’adhérent de l’information qui lui a été donnée.

La charge de la preuve de l’abus pèse sur l’assureur qui l’invoque.

En l’espèce, le tribunal a rappelé à juste titre les termes de la lettre de renonciation de Mme Y.

Le bilan de situation patrimoniale de Mme Y rempli lors de son adhésion établit, comme s’en prévaut la société Inora Life, qu’elle a répondu 'oui’ aux questions suivantes : 'avez-vous déjà effectué des placements à risque et, plus particulièrement, êtes-vous familier des placements sur les marchés action'', 'avez-vous bien compris le mode de fonctionnement du support et la nature des risques de moins-values qu’il peut engendrer'', 'en cas de fortes fluctuations des marchés financiers ou en cas de baisse de la valeur du support, pensez-vous rester investi(e) jusqu’au terme du support'' et qu’elle a répondu 'non’ à cette dernière question : 'souhaitez-vous obtenir des informations complémentaires sur le support''.

Cependant, sa réponse positive quant à la compréhension du mode de fonctionnement du support et à la nature des risques de moins-value ne suffit pas à démontrer que les informations qui lui ont alors été fournies notamment par société Arca patrimoine par l’intermédiaire de laquelle elle a adhéré, informations dont le contenu exact est ignoré, ont été effectivement comprises.

De même, la seule réponse positive apportée à la question portant sur le point de savoir si elle était familière des placements sur les marchés action est insuffisante à démontrer qu’elle disposait réellement de compétences personnelles et/ou d’une expérience particulière en la matière.

Or, force est de constater que la société Inora Life ne remet pas en cause le bien-fondé de l’indication figurant dans le bilan de situation patrimoniale et reprise dans le jugement selon laquelle Mme Y exerçait le métier d’aide-soignante, profession par nature étrangère au fonctionnement des marchés financiers et aux produits financiers. Elle n’apporte pas non plus d’élément de nature à contredire les données relevées par le tribunal quant à la composition de son patrimoine constitué à 80% d’immobilier. Selon ce bilan, les 20% restants consistaient en des liquidités (comptes bancaires, livret A, codevi, monétaire…). La composition de son patrimoine ne révèle donc pas une

connaissance ou une expérience en matière de produits financiers. C’est par une juste déduction non critiquée par la société Inora Life que le tribunal a estimé que le patrimoine global de Mme Y s’élevait à 214 000 euros, dont environ 171 000 euros en immobilier, soit un patrimoine d’un montant relativement modeste ne laissant pas supposer chez son détenteur une connaissance des marchés ou produits financiers. Ainsi, il ne résulte pas de ces éléments que Mme Y ait été avertie et, au contraire, ceux-ci font d’elle une assurée profane.

Par ailleurs, il résulte des énonciations précédentes que l’information exigée légalement et réglementairement n’a pas été complétement respectée par la société Inora Life et que l’attention de Mme Y n’a pas été attirée sur la nature du contrat souscrit.

En outre, les fiches techniques des titres annexées aux notices, soit celle relative à Lisseo Dynamic et celle relative à Altéo Dynamic, déterminent que Mme Y a successivement investi dans des EMTN. Or, il résulte de ces fiches faisant référence à des formules mathématiques élaborées pour le calcul des montants de remboursement qu’il s’agit de produits complexes alors qu’il n’est pas démontré, au regard notamment de son profil ci-dessus décrit, qu’elle ait disposé de compétences personnelles lui donnant la faculté d’appréhender réellement les caractéristiques essentielles de tels investissements.

De plus, rien ne justifie que Mme Y ait reçu la plaquette de présentation du support Lisseo Dynamic invoquée par l’appelante puisque selon elle, la plaquette produite par Mme Y en première instance concernait un autre support, à savoir Lisseo Dynamic 3. Quant à la plaquette de présentation du support Altéo Dynamic également invoquée par la société Inora Life, elle n’est pas produite devant la cour et n’est pas mentionnée dans les bordereaux des pièces communiquées de sorte que son contenu ne peut être vérifié. Le caractère objectif de ces plaquettes à visée commerciale n’est au demeurant pas établi et il ne saurait dès lors en être tiré de conclusion quant à la compréhension effective de ses investissements par l’adhérente.

Le fait que Mme Y ait reçu une information annuelle sur la valeur de son contrat, quand bien même ce relevé l’informait d’une évolution négative de la valeur de l’unité de compte, et l’arbitrage réalisé par elle en 2010 en faveur du support Altéo Dynamic, seule opération effectuée sur le contrat, ne permettent pas d’en déduire qu’elle soit devenue un investisseur averti ou qu’elle ait acquis les compétences, l’expérience et/ou toutes les informations nécessaires.

Et rien n’établit qu’à la date où elle a exercé sa faculté de renonciation, le 6 juillet 2012, Mme Y ait eu en sa possession d’autres informations lui permettant de comprendre de manière effective les caractéristiques financières de son investissement.

Enfin, le fait que la renonciation ait été exercée plusieurs années après l’adhésion ne caractérise pas l’abus alors que les éléments susvisés corroborent le défaut de compréhension invoqué par Mme Y dans sa lettre de renonciation.

Il s’ensuit que l’abus invoqué n’est pas démontré.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a condamné la société Inora Life à restituer à Mme Y la somme versée par elle, outre intérêts et capitalisation de ceux-ci.

- Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

Le jugement sera confirmé sur les dépens et frais irrépétibles de première instance. Succombant en son recours, la société Inora Life supportera les dépens d’appel et sera déboutée de toute demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile. Il n’y a pas lieu à condamnation au titre de ces dispositions au bénéfice de la société Predictis.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Met hors de cause la société Predictis anciennement dénommée Arca patrimoine ;

Rejette la demande de la société Inora Life visant à déclarer irrecevable comme prescrite la demande en restitution de la somme de 30 000 euros ;

Confirme le jugement en toutes ses dispositions déférées à la cour ;

Rejette la demande de la société Inora Life fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Inora Life aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame Marie-José BOU, Président et par Madame Claudine AUBERT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

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Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 8 octobre 2020, n° 18/07762