CAA de NANCY, 2ème chambre, 31 décembre 2021, 20NC01149, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nancy, 2e ch., 31 déc. 2021, n° 20NC01149
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro : 20NC01149
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Strasbourg, 2 mars 2020, N° 1909423
Identifiant Légifrance : CETATEXT000044861231

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A… B… a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d’annuler l’arrêté du 29 octobre 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l’a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1909423 du 3 mars 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 mai 2020, M. B…, représenté par Me Kling, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du 3 mars 2020 ;

2°) d’annuler cet arrêté du 29 octobre 2019 ;

3°) d’enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

 – la décision portant refus de titre de séjour méconnaît le 11° de l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dans la mesure où il souffre de pathologies particulièrement graves, suit un traitement médical lourd et est totalement dépendant ;

 – elle est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

 – la décision portant obligation de quitter le territoire est privée de base légale du fait de l’illégalité du refus de séjour ;

 – elle est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

 – la décision fixant le pays de destination est privée de base légale du fait de l’illégalité du refus de séjour.

La requête a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin qui n’a pas produit de mémoire.

M. B… a été admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par une décision du 7 juillet 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

 – la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

 – le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Le rapport de Mme Mosser a été entendu au cours de l’audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B…, ressortissant albanais, né le 18 avril 1949 à Berat (Albanie), est entré régulièrement en France le 24 mai 2015 sous couvert de son passeport biométrique en vue d’y solliciter l’asile. Sa demande d’asile a été rejetée en dernier lieu par la Cour nationale du droit d’asile le 20 octobre 2016. Le 28 novembre 2016, il a déposé une demande de titre de séjour en raison de son état de santé. Il a bénéficié d’un titre de séjour du 9 juin 2017 au 8 juin 2018. Le 11 mai 2018, M. B… a sollicité le renouvellement de son droit à séjour en raison de son état de santé. Par un arrêté du 29 octobre 2019, le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l’a obligé à quitter le territoire français. M. B… relève appel du jugement du 3 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté du 29 octobre 2019.

Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :

2. E premier lieu, aux termes du 11° de l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention » vie privée et familiale « est délivrée de plein droit : (…) 11° A l’étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l’offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d’un traitement approprié. La condition prévue à l’article L. 313-2 n’est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l’autorité administrative après avis d’un collège de médecins du service médical de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d’Etat. (…) ».

3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l’une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte-tenu, le cas échéant, de l’abstention d’une des parties à produire les éléments qu’elle est seule en mesure d’apporter et qui ne sauraient être réclamés qu’à elle-même, d’apprécier si l’état de santé d’un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité, sous réserve de l’absence d’un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle.

4. La partie qui justifie d’un avis du collège de médecins du service médical de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l’existence ou l’absence d’un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d’un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l’autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d’apprécier l’état de santé de l’étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l’offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d’un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d’apprécier si l’état de santé d’un étranger justifie la délivrance d’un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d’instruction utile.

5. Par un avis rendu le 3 décembre 2018, le collège de médecins de l’OFII a estimé que l’état de santé de M. B… nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d’une exceptionnelle gravité sur son état de santé mais qu’eu égard à l’offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pouvait y bénéficier effectivement d’un traitement approprié et que par ailleurs, au vu des éléments du dossier, l’état de santé lui permettait de voyager sans risque vers son pays d’origine. Il ressort des pièces du dossier que M. B… souffre d’une cardiopathie ischémique avec insuffisance cardiaque à la suite d’un infarctus du myocarde, d’un symptôme d’apnée obstructive du sommeil, d’une myopie avec cataracte obturante entraînant une malvoyance et d’un diabète insulinodépendant. S’il ressort des pièces produites, à savoir deux certificats médicaux et son dossier d’aide personnalisée à l’autonomie (APA) dans lequel sa dépendance a ainsi été évaluée en GIR2 dans la grille nationale Aggir (Autonomie Gérontologie Groupe Iso Ressources) ce qui correspond à une forte perte d’autonomie, que M. B… a besoin d’une aide pour les actes de la vie courante et d’un traitement médical, il n’est pas établi qu’il ne pourrait pas être pris en charge et soigné en Albanie où le préfet fait valoir, sans être utilement contredit, que pour chacune de ses pathologies, un traitement est effectivement disponible. Par ailleurs, si son médecin généraliste, considère qu’un trajet en avion non médicalisé, sans oxygénothérapie serait contre-indiqué, cette circonstance n’empêche pas, le cas échéant, M. B… de se rendre en Albanie en utilisant un autre moyen de transport. Dans ces conditions, compte tenu de la nature des troubles invoqués par le requérant et eu égard à l’ensemble des éléments avancés par l’autorité administrative, ces pièces ne sont pas à elles seules de nature à remettre en cause l’appréciation portée par le préfet sur son état de santé. Il s’ensuit que M. B… n’est pas fondé à soutenir que la décision contestée méconnaît le 11° de l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

6. M. B… soutient qu’il ne pourrait pas bénéficier dans son pays d’origine du soutien nécessaire à son état de santé et de dépendance dans la mesure où il est séparé de son épouse et que son fils et sa belle-fille vivent en France tandis que sa fille réside en Allemagne. Toutefois, hébergé chez un tiers en France, il ne démontre pas entretenir de liens particulièrement forts avec son fils et sa belle-fille présents sur le territoire français. Par ailleurs, il n’établit pas être dépourvu de toute attache familiale ou amicale en Albanie où il a vécu jusqu’à l’âge de 66 ans. Dans ces conditions, le préfet n’a pas entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B….

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Il résulte de ce qui précède que M. B… n’est pas fondé à exciper de l’illégalité du refus de titre de séjour à l’appui de ses conclusions dirigées contre la décision l’obligeant à quitter le territoire français.

8. Eu égard à ce qui a été dit aux points 5 et 6, le préfet n’a pas entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

9. Il résulte de ce qui précède que M. B… n’est pas fondé à exciper de l’illégalité du refus de titre de séjour à l’appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d’annulation, ainsi que par voie de conséquence, ses conclusions à fin d’injonction ainsi que celles tendant à l’application des dispositions de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B… est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M A… B… et au ministre de l’intérieur.

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Une copie du présent arrêt sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

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N° 20NC01149

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