CAA de NANCY, 2ème chambre, 31 décembre 2021, 21NC01926, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Nancy, 2e ch., 31 déc. 2021, n° 21NC01926
Juridiction : Cour administrative d'appel de Nancy
Numéro : 21NC01926
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, 27 mai 2021, N° 2100426
Identifiant Légifrance : CETATEXT000044861271

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C… a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d’annuler l’arrêté du 27 janvier 2021 par lequel le préfet de l’Aube lui a refusé un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter dans un délai d’un mois le territoire français, a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d’office et lui a fait interdiction de retour sur le territoire pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2100426 du 28 mai 2021, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er juillet 2021, M. C…, représenté par Me Gaffuri, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du 28 mai 2021 ;

2°) d’annuler l’arrêté du 27 janvier 2021 ;

3°) d’enjoindre à l’autorité préfectorale compétente de lui délivrer une carte de séjour temporaire, à défaut de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de l’arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l’Etat le versement à son avocat d’une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

 – l’arrêté est insuffisamment motivé ;

 – le refus de séjour : méconnaît le 11° de l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile en ce qu’il n’aura pas accès à un traitement en Géorgie ; a été pris en violation de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales, de l’article L. 313-14 et du 7° de l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ; repose sur une appréciation manifestement erronée de sa situation ;

 – l’obligation de quitter le territoire : est privée de base légale du fait de l’illégalité du refus de séjour ; repose sur une appréciation manifestement erronée de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

 – l’interdiction de retour sur le territoire : est disproportionnée et porte atteinte à son droit à la vie privée et familiale en violation de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales

M. C… a été admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par décision du bureau d’aide juridictionnelle du 23 novembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ;

 – la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ;

 – la convention internationale relative aux droits de l’enfant ;

 – le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

 – le code des relations entre le public et l’administration ;

 – la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

 – le décret 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

 – le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Le rapport de M. Agnel a été entendu au cours de l’audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C…, de nationalité géorgienne, né le 6 mai 1974, est entré en France

le 30 novembre 2017 et a sollicité auprès des autorités françaises son admission au séjour en qualité de réfugié le 13 février 2018. Sa demande d’asile a été rejetée par décision

du 18 décembre 2018 de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 28 juin 2019 de la Cour nationale du droit d’asile. Le 19 septembre 2019,
M. C… a sollicité la délivrance d’un titre de séjour sur le fondement du 11°

de l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Par un arrêté du 27 janvier 2021, le préfet de l’Aube a refusé de lui délivrer un tel titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire pour une durée de deux ans. M. C… relève appel du jugement du 28 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l’arrêté pris dans son ensemble :

2. L’arrêté attaqué mentionne de manière suffisante et non stéréotypée les motifs de droit et de fait sur lesquels l’autorité administrative s’est fondée afin de prendre à l’encontre de M. C… les décisions qu’il comporte. Par suite, le moyen tiré de l’insuffisance de motivation sera écarté.

Sur la légalité du refus de séjour :

En ce qui concerne l’état de santé de M. C… :

3. Aux termes de l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile alors applicable : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention » vie privée et familiale « est délivrée de plein droit : (…) 11° A l’étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l’offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d’un traitement approprié. La condition prévue à l’article L. 313-2 n’est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l’autorité administrative après avis d’un collège de médecins du service médical de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d’Etat ».

4. La partie qui justifie d’un avis du collège de médecins du service médical de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l’existence ou l’absence d’un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d’un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l’autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d’apprécier l’état de santé de l’étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l’offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d’un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d’apprécier si l’état de santé d’un étranger justifie la délivrance d’un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

5. Il ressort des pièces médicales du dossier que M. C… a été victime d’un accident de la circulation ayant atteint sa jambe gauche lui occasionnant une ostéite du genou gauche désormais guérie mais lui ayant laissé des séquelles fonctionnelles ainsi que d’importantes douleurs traitées au moyen de médicaments morphiniques. Il ressort également de ces pièces que le suivi médical est susceptible d’impliquer l’amputation du membre concerné. Le collège des médecins de l’Office français de l’immigration et de l’intégration a estimé que le traitement et le suivi médical que l’état de santé de l’intéressé étaient disponibles dans son pays d’origine. Si M. C… soutient que ce traitement et ce suivi ne sont pas disponibles dans son pays d’origine, en particulier en ce qui concerne le traitement de sa pharmacodépendance, aucun des certificats médicaux qu’il produit, y compris celui du docteur B… du 9 juillet 2021, ne sont de nature à remettre en cause les conclusions de l’avis du collège des médecins au vu duquel l’autorité administrative a pris sa décision. Par suite, M. D… n’est pas fondé à soutenir que l’autorité préfectorale aurait inexactement apprécié son état de santé.

En ce qui concerne la vie privée et familiale du requérant :

6. Aux termes de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. ». Aux termes de l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile alors en vigueur : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention » vie privée et familiale « est délivrée de plein droit : (…) / 7° A l’étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n’entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d’existence de l’intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d’origine, sont tels que le refus d’autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l’article L. 313-2 soit exigée. L’insertion de l’étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ». Aux termes de l’article L. 313-14 du même code : « La carte de séjour temporaire mentionnée à l’article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l’article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l’ordre public, à l’étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l’admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu’il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l’article L. 313-2 ».

7. Il ressort des pièces du dossier que M. C… est en France

depuis novembre 2017 avec son épouse, elle-même en situation irrégulière. Il n’apporte pas la preuve d’une particulière insertion dans la société française, dont il ne maîtrise pas la langue ainsi qu’il ressort du dernier certificat médical produit, ni aucun élément permettant d’établir qu’il ne dispose plus d’attaches familiales dans son pays d’origine où il a vécu jusqu’à l’âge de 43 ans. Par suite, eu égard à sa situation personnelle et familiale et en dépit de son état de santé, M. C… n’est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de délivrance d’un titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des normes ci-dessus reproduites. Pour les mêmes raisons, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait commis une erreur manifeste dans l’appréciation de sa situation au regard des dispositions de l’article L. 313-14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant.

Sur la légalité de l’obligation de quitter le territoire :

8. Il résulte de ce qui précède que M. C… n’est pas fondé à exciper de l’illégalité du refus de séjour à l’appui de ses conclusions dirigées contre l’obligation de quitter le territoire tandis que moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation sera écarté par adoption des motifs retenus à juste titre par le jugement attaqué.

Sur la légalité de l’interdiction de retour sur le territoire :

9. M. C… reprend en appel les moyens soulevés en première instance à l’encontre de la décision d’interdiction de retour sur le territoire. Il y a lieu d’écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses demandes. Par suite, sa requête d’appel doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l’application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C… est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A… C… et au ministre de l’intérieur.

Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de l’Aube.

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N°21NC01926

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