Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 21 décembre 1987, 85-13.173, Publié au bulletin

  • Engagement de payer pris par la société-mère·
  • Acceptation par le banquier de la filiale·
  • Restitution de la véritable qualification·
  • Engagement de payer pris par la société·
  • Pouvoirs des dirigeants d'une société·
  • Qualification donnée par les parties·
  • Loi nationale de la société·
  • Pouvoirs et devoirs du juge·
  • Contrats et obligations·
  • Conditions de validité

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

° Malgré son caractère unilatéral, une lettre d’intention peut, selon ses termes, lorsqu’elle a été acceptée par son destinataire et eu égard à la commune intention des parties, constituer à la charge de celui qui l’a souscrite un engagement contractuel de faire ou de ne pas faire pouvant aller jusqu’à l’obligation d’assurer un résultat, voire encore constituer un cautionnement ; il appartient au juge de donner ou restituer son exacte qualification à un pareil acte sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ° Si le cautionnement ne se présume pas et s’il doit être exprès, celui qui, par une manifestation non équivoque et éclairée de sa volonté, déclare se soumettre envers le créancier à satisfaire à l’obligation du débiteur si celui-ci n’y satisfait pas lui-même, se rend caution de cette obligation . ° L’appréciation des pouvoirs des dirigeants d’une société relève de la loi nationale de cette société ; viole dès lors les articles 3 du Code civil et 3 de la loi du 24 juillet 1966 la cour d’appel qui, pour écarter les prétentions d’une société espagnole selon lesquelles un engagement de payer pris en son nom aurait été nul pour n’avoir pas été pris conformément au droit espagnol sur les sociétés, se borne à déclarer qu’elle était saisie d’un litige consécutif à des faits et des actes qui se sont produits en France et auxquels la législation française doit s’appliquer

Commentaires5

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Me Zineb Naciri Bennani · consultation.avocat.fr · 30 avril 2021

La lettre d'intention est un engagement unilatéral de faire ou de ne pas faire par lequel le confortant apporte son soutien à un débiteur, le conforté, dans l'exécution de son obligation envers un créancier. Elle a été consacrée par le droit positif (art. 2322 c. civ., 2287-1 c. civ) après s'être imposée dans la pratique des affaires, notamment en matière bancaire et avoir été reconnue par la jurisprudence : « malgré son caractère unilatéral, une lettre d'intention peut, selon ses termes, […] constituer à la charge de celui qui l'a souscrite un engagement contractuel de faire ou de ne pas …

 

Kate Jarrard Et Gérard Haas · Haas avocats · 16 septembre 2019

Par Kate JARRARD et Gérard HAAS L'intérêt pour une filiale dans un groupe de société est de pouvoir bénéficier du soutien de la société mère, mais quelle est la nature juridique de ce soutien ? Autrement dit, l'obligation de la société mère qui souscrit une lettre d'intention vis-à-vis de sa filiale est-elle une obligation de résultat ou une obligation de moyens ? 1. L'obligation de moyens et l'obligation de résultat Sûreté personnelle et gage d'honorabilité, la lettre d'intention constitue à la charge de celui qui l'a souscrite un engagement contractuel de faire ou de ne …

 

Jurispilote · LegaVox · 2 juin 2011
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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 21 déc. 1987, n° 85-13.173, Bull. 1987 IV N° 281 p. 210
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 85-13173
Importance : Publié au bulletin
Publication : Bulletin 1987 IV N° 281 p. 210
Décision précédente : Cour d'appel de Montpellier, 9 janvier 1985
Dispositif : Cassation .
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000007019993
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

Attendu que, selon les énonciations de l’arrêt attaqué, la société Textiles du Vallespir (société TV), filiale de la société de droit espagnol Viuda de José X… (société X…), a obtenu, aux termes de contrats constatés par des actes notariés, respectivement établis au cours des mois de novembre 1973 et juin et septembre 1974, trois prêts de la Société de développement régional du Languedoc-Roussillon (SODLER) en vue de la construction d’une usine ; qu’outre le cautionnement qu’elle avait donné pour le remboursement du premier de ces prêts, la société X… a signé le 29 mai 1974 une lettre adressée à la SODLER par laquelle elle affirmait son intention de « soutenir sa filiale dans ses besoins financiers et, dans le cas où cela deviendrait nécessaire, de se substituer à elle pour faire face à tous les engagements qu’elle pouvait prendre à l’égard de la SODLER », tout en exprimant son souci de veiller de façon durable à sa totale solvabilité et en confirmant son « intention, en cas de nécessité, d’effectuer immédiatement les démarches nécessaires auprès des autorités espagnoles pour obtenir l’autorisation du transfert des fonds » ; que cette lettre a été mentionnée dans l’acte notarié daté des 12 et 17 septembre 1974 relatif au troisième prêt, mais qu’elle vise également le deuxième ; qu’à la suite du prononcé du règlement judiciaire de la société TV et de la conversion de celui-ci en liquidation des biens, la SODLER a assigné la société X… en paiement du montant en principal et intérêts des deuxième et troisième prêts, sur le fondement de la lettre d’intention ;.

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches :

Attendu que la société X… fait grief à la cour d’appel d’avoir considéré que la lettre d’intention l’engageait contractuellement, et d’avoir retenu à son encontre une obligation de résultat, alors, selon le pourvoi, d’une part, que, sauf exception, une déclaration d’intention unilatérale ne fait naître aucune obligation civile ; qu’il résulte des propres énonciations de l’arrêt que la société X… s’est bornée à exprimer unilatéralement son intention sans qu’une convention se soit formée, faute d’accord des parties ; qu’en considérant que la lettre d’intention, établie par la société X…, avait pu faire naître une obligation civile à sa charge, la cour d’appel a violé les articles 1101 et suivants du Code civil ; et alors, d’autre part, que l’obligation de résultat de se substituer, le cas échéant, à un débiteur pour faire face aux engagements pris envers un créancier, est l’obligation de la caution ; qu’elle ne peut résulter que d’un contrat de cautionnement, lequel doit être exprès et avoir un objet déterminé ou déterminable ; qu’en considérant que la lettre d’intention contenait une obligation de résultat distincte d’un cautionnement, la cour d’appel a violé les articles 2011 et suivants du Code civil ;

Mais attendu, d’une part, que, malgré son caractère unilatéral, une lettre d’intention peut, selon ses termes, lorsqu’elle a été acceptée par son destinataire et eu égard à la commune intention des parties, constituer à la charge de celui qui l’a souscrite un engagement contractuel de faire ou de ne pas faire pouvant aller jusqu’à l’obligation d’assurer un résultat, si même elle ne constitue pas un cautionnement ; qu’il appartient au juge de donner ou restituer son exacte qualification à un pareil acte sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ;

Attendu, d’autre part, que la cour d’appel relève que, dans sa lettre du 29 mai 1974, la société X… avait entendu accepter de se substituer, le cas échéant, à sa filiale pour faire face aux engagements pris vis-à-vis de la SODLER et ajoute que cette lettre visait de façon certaine le deuxième et le troisième emprunt ; que, si le cautionnement ne se présume point, et s’il doit être exprès, celui qui, par une manifestation non équivoque et éclairée de sa volonté, déclare se soumettre envers le créancier à satisfaire à l’obligation du débiteur si celui-ci n’y satisfait pas lui-même, se rend caution de cette obligation ; que, par ce motif de pur droit, substitué à ceux qui sont critiqués, se trouve justifiée la décision de la cour d’appel en ce qu’elle a constaté que la société X… s’était engagée à payer à la SODLER, en cas de défaillance de la société TV, ce qui lui resterait dû par celle-ci au titre des prêts consentis ;

D’où il suit que le moyen ne peut être accueilli dans aucune de ses branches ;

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :

Attendu que la société X… reproche au surplus à la cour d’appel, pour les raisons qui sont reproduites en annexe, d’avoir privé sa décision de base légale au regard des articles 1131, 1134 et 1315 du Code civil et 354 de la loi du 24 juillet 1966, faute d’avoir établi que les qualités de filiale et de société mère des sociétés TV et X… étaient actuelles au moment de l’action de la SODLER ;

Mais attendu qu’il ne résulte ni des conclusions, ni de l’arrêt, que ce moyen ait été mis en oeuvre devant les juges du fond ; qu’il est donc nouveau et, eu égard à son mélange de fait et de droit, irrecevable ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche :

Vu l’article 3 du Code civil, ensemble l’article 3 de la loi du 24 juillet 1966 ;

Attendu que, pour écarter les prétentions de la société X… selon lesquelles, même si la lettre d’intention contenait un engagement de payer, celui-ci aurait été nul pour n’avoir pas été pris conformément au droit espagnol sur les sociétés, la cour d’appel s’est bornée à déclarer qu’elle était « saisie d’un litige consécutif à des faits et des actes qui se sont produits en France et auxquels la législation française doit s’appliquer » ;

Attendu qu’en se déterminant ainsi, après avoir relevé que la société X… était une société anonyme de droit espagnol et alors que l’appréciation des pouvoirs des dirigeants d’une société relève de la loi nationale de cette société, la cour d’appel a violé, par fausse application, les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, en son entier, mais dans la limite des deuxième et troisième moyens, l’arrêt rendu le 10 janvier 1985, entre les parties, par la cour d’appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Lyon

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Textes cités dans la décision

  1. Loi n°66-537 du 24 juillet 1966
  2. Code civil
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Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 21 décembre 1987, 85-13.173, Publié au bulletin