Cour de cassation, Chambre sociale, 20 mai 2015, 14-13.357, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail dans leur rédaction issue de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, ensemble l’article 1er de cette loi ;

Attendu qu’en application de ces textes, lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l’existence d’une telle discrimination et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que la discrimination inclut notamment tout agissement à connotation sexuelle subi par une personne et ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement hostile, dégradant, humiliant ou offensant ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme X…, engagée en qualité d’agent polyvalent par l’association Stade poitevin tennis club (l’association) selon contrat de travail à durée déterminée à temps partiel pour la période du 6 septembre 2009 au 6 septembre 2010, a, après avoir dénoncé des faits de discrimination à son employeur par lettre du 1er avril 2010 et avoir été placée en arrêt de travail à partir du 29 mai suivant, saisi la juridiction prud’homale de diverses demandes ;

Attendu que pour rejeter les demandes de la salariée en paiement de dommages-intérêts pour discrimination et violation de l’obligation de sécurité, l’arrêt retient que la simple vulgarité indéniable des propos « sac à foutre » tenus à son égard par un autre salarié ne peut caractériser l’existence de paroles discriminatoires, et que les faits attestés par un témoin de quolibets, de moqueries douteuses, d’insultes et de jets de divers détritus dont la salariée a été victime le 18 mars 2010 de la part des bénévoles présents, étaient inacceptables mais ne permettaient pas de retenir que l’intéressée avait été victime de ces agissements pour des raisons discriminatoires, le témoin ne citant pas de paroles précises susceptibles de valoir propos racistes ou discriminatoires ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que la salariée avait été victime de quolibets, de moqueries douteuses, d’insultes et de jets de divers détritus et qu’un témoin confirmait que l’intéressée avait été traitée de « sac à foutre », éléments ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité de la salariée laissant supposer l’existence d’une discrimination, et que l’employeur n’établissait pas que ces agissements n’étaient pas constitutifs d’une telle discrimination, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il rejette les demandes de Mme X… en paiement de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices moral et financier pour discrimination et violation par l’employeur de son obligation de sécurité, l’arrêt rendu le 27 mars 2013, entre les parties, par la cour d’appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Limoges ;

Condamne l’association Stade poitevin tennis club aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne l’association Stade poitevin tennis club à payer à la SCP Monod, Colin et Stoclet la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mai deux mille quinze.



MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat aux Conseils, pour Mme X….

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir débouté Madame X… de sa demande tendant à la condamnation de l’association Stade poitevin tennis club à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et la somme de 2 348, 08 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice financier ;

AUX MOTIFS QUE Madame X… a soutenu devant les premiers juges qu’elle avait été victime d’insultes et d’attitudes vexatoires de la part d’autres membres du personnel les 18 et 20 mars 2010 et que ses conditions de travail avaient provoqué un état dépressif réactionnel, entraînant un arrêt de travail pour cause de maladie du 29 mai 2010 jusqu’au terme du contrat à durée déterminée, dont étaient résulté un préjudice moral mais aussi un préjudice financier en raison de la perte de salaire subie ; que l’appelante reprend ces demandes devant la cour et souligne qu’elle a subi un traitement discriminatoire et que l’employeur a méconnu son obligation de sécurité dès lors qu’elle a présenté un syndrome dépressif réactionnel l’empêchant de poursuivre l’exécution du contrat à durée déterminée jusqu’à son terme ; qu’il est établi que le 1er avril 2010 Madame X… a écrit à M. Y…, président de l’association Stade poitevin tennis club pour se plaindre de faits de « discrimination », commis lors de l’open de mars 2010, en dénonçant, d’une part, des propos qu’elle a qualifiés d’injurieux, à savoir « t’en as un sac à foutre » tenus à son encontre seulement par une personne dénommée « C… » recrutée pour la restauration lors de l’open de mars 2010, d’autre part, des comportements de bénévoles lui ayant lancé, à elle seule, de la salade, des frites, des oeufs frais, sans réaction de ses supérieures hiérarchiques M. Z… et Erwan, et enfin le fait qu’elle n’avait pas été conviée au repas de clôture organisé par M. Z… et Erwan pour les membres du groupe de restauration ; que par lettre du 12 avril 2010, M. Y… a répondu à Madame X… qu’une enquête interne avait été diligentée, que les faits dénoncés ne pouvaient pas être interprétés comme des faits de discrimination, qu’elle pouvait demander à être reçue par le bureau si de nouveaux comportements qu’elle estimerait discriminatoires survenaient mais aussi qu’elle devait faire des efforts pour s’intégrer à l’équipe de restauration et ne pas dénigrer le club auprès des adhérents, « un effort des deux parties devant éviter tout problème à l’avenir » ; que la propre lettre de Madame X… contredit sa version des propos tenus par le dit C… auquel elle reproche désormais de lui avoir dit « tu es un sac à foutre » ; que si Madame X… soutient mal maîtriser la langue française, sans d’ailleurs en justifier, il est manifeste qu’elle n’a pas pu personnellement rédiger la lettre du 1er avril 2010, compte tenu des termes employés, le rédacteur ainsi requis n’ayant donc pas pu, compte tenu de la portée de ce courrier, se méprendre sur l’exacte teneur des propos reprochés alors au dit C… ; qu’il s’en déduit que la simple vulgarité indéniable de ces propos ne peut caractériser l’existence de paroles discriminatoires ; que l’attestation recevable de M. A…, dont les relations conflictuelles avec l’association Stade poitevin tennis club sont certes démontrées, confirme que Madame X… a été victime le 18 mars 2010, dans les cuisines de l’association Stade poitevin tennis club, de « quolibets », de « moqueries douteuses », puis « d’insultes » et de « jets de divers détritus destinés aux déchets », de la part des bénévoles présents non nommément désignés ; que si ces faits sont inacceptables pour toute personne, quels que soient son sexe ou/ et ses origines, le témoin ne cite pas en revanche de paroles précises, susceptibles de valoir propos racistes ou discriminatoires et permettant de retenir que, pour des raisons discriminatoires, Madame X… a été victime de tels agissements ; que si M. A… ajoute que « Madame X… est l’objet d’une discrimination particulièrement ciblée et insidieuse de la part de M. Z… donnant lieu à des brimades et harcèlement », il ne précise pas la teneur et les circonstances de ces faits, ce qui ne suffit pas à caractériser une discrimination au sens de l’article L. 1132-1 du code du travail et subie par Madame X… en raison notamment de son sexe ou de ses origines ; que si M. A… ajoute que Madame X… a été traité de « sac à foutre », les précédents motifs ont répondu sur la réalité et le sens de ces propos ; que la réponse de l’employeur en date du 12 avril 2010 et discutée dans les précédents motifs démontre suffisamment sa réactivité et sa prise en compte, y compris pour l’avenir, des doléances de la salariée ; que Madame X… n’a pas formulé de nouvelle plainte, concernant des faits postérieurs à l’open de mars 2010 et n’argue d’ailleurs pas d’autres faits ; que si, ainsi que déjà exposé, M. A… a relaté que Madame X… subissait des brimades commises ou entretenues par M. Z…, il est incontestable que la médecine du travail, alertée, s’est déplacée dans l’entreprise, et a déclaré Madame X… apte après visite du 25 mai 2010 ; qu’il s’en déduit que l’état dépressif réactionnel constaté par le médecin traitant le 29 mai 2010 et ayant justifié un arrêt de travail pour maladie, prolongé jusqu’au terme du contrat à durée déterminée, ne peut être considéré comme imputable à l’employeur ; que les cas d’autres salariés ayant rencontrés des difficultés avec l’association Stade poitevin tennis club en 2006 et 2008 ne permettent de retenir cette imputabilité sauf à procéder par analogie hypothétique ; que Madame X… reproche à tort à M. B…, son tuteur dans le contrat aidé départemental, de ne pas être intervenu alors que l’intéressé a, dans son compte rendu d’intervention, indiqué avoir suivi la salariée, avoir été informé des discordes avec M. Z…, avoir organisé des rencontres pour des mises au point amiables et avoir été informé par courrier de Madame X… en date du 28 avril 2010 qu’elle n’était pas prête à faire un bilan de son contrat à durée déterminée sans avoir ensuite d’autres nouvelles pour fixer un rendez-vous ; que c’est donc à tort que Madame X… soutient que l’association Stade poitevin tennis club a méconnu son obligation de sécurité telle que définie par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code de travail ; qu’en conséquence Madame X… sera déboutée de ses demandes d’indemnisation ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, sur les dommages et intérêts pour préjudice moral et préjudice financier, Madame X… a écrit à son employeur le 1er avril 2010 pour lui signaler des anomalies dans l’exécution de son travail et que le président de l’Association STADE POITEVIN TENNIS CLUB lui a répondu le 12 avril pour lui dire qu’il demandait au personnel de prendre toutes les précautions nécessaires dans les relations de travail. ; que le médecin du travail a déclaré le 25 mai 2010 que Madame X… était apte ; que madame X… a été en arrêt de travail à compter du 29 mai 2010 pour dépression et qu’elle a perçu les indemnités journalières de sécurité sociale à partir du 1er juin 2010 après 3 jours de carence conformément à la loi ; qu’en conséquence, le conseil dit que le préjudice moral et le préjudice financier dont Madame X… fait état ne peuvent pas être imputés à l’Association STADE POITEVIN TENNIS CLUB et la déboute de ses demandes.

1°) ALORS QUE tout agissement à connotation raciste ou sexuelle, subi par un salarié et ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant constitue une discrimination ; que, lorsque le salarié présente au juge des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une telle discrimination, il incombe à l’employeur de prouver que les agissements dont a été victime le salarié sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a relevé que Madame X… avait été victime de quolibets, de moqueries, de jets de détritus et d’insultes, telles que « sac à foutre » ; que Madame X… faisait valoir que ses responsables hiérarchiques n’étaient pas intervenus face à ces agissements et qu’elle n’était pas la première à se plaindre des propos racistes de M. Z… (conclusions, p. 8-9) ; qu’en rejetant la demande de dommages et intérêts formulées par Madame X… aux motifs qu’elle ne démontrait pas avoir fait l’objet d’une discrimination, cependant qu’il incombait seulement à celle-ci de présenter au juge des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une telle discrimination, la cour d’appel a violé les articles L. 1134-1 du code du travail, ensemble l’article L. 1132-1 du même code et l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 ;

2°) ALORS QUE, en tout état de cause, à supposer qu’elle puisse être regardé comme ayant recherché si madame X… présentait des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une telle discrimination, la cour d’appel en statuant comme elle l’a fait, par des motifs inopérants, cependant que les éléments dont elle avait relevé l’existence laissaient supposer que madame X… avait fait l’objet d’une discrimination, n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l’article L. 1134-1 du code du travail, ensemble l’article L. 1132-1 du même code et l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008.

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