Cour de cassation, Chambre criminelle, 5 juin 2018, 17-87.524, Inédit

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

— 
-
Mme Nathalie X…, épouse Y…,
M. Jacques Z…,

contre l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de PARIS, 7e section, en date du 23 novembre 2017, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 4 octobre 2016, pourvoi n° 16-81.200), dans l’information suivie contre eux du chef de complicité de harcèlement moral, a dit n’y avoir lieu à annulation d’un acte ou d’une pièce de la procédure ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 23 mai 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Talabardon, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

Sur le rapport de M. le conseiller référendaireTALABARDON, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général QUINTARD ;

Vu l’ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 22 février 2018, joignant les pourvois et prescrivant leur examen immédiat ;

Vu les mémoires et les observations complémentaires, produits ;

Sur le moyen unique de cassation proposé pour Mme X…, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 121-6, 121-7, 222-33-2 du code pénal, préliminaire, 80-1, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

« en ce que la chambre de l’instruction a rejeté le moyen tiré de la nullité de la mise en examen de Mme X… du chef de complicité de harcèlement moral au préjudice de salariés ne relevant pas de son autorité hiérarchique et de salariés dont la situation s’est dégradée après qu’elle a quitté la direction des actions territoriales de France télécom en mars 2008 ;

« aux motifs que le délit de harcèlement moral prévu à l’article 222-33-2 du code pénal est défini, notamment, par le fait de harceler autrui, ce qui implique que la mise en examen d’une personne du chef de cette infraction doit nécessairement viser une ou plusieurs personnes déterminées ; qu’il résulte, par ailleurs, des dispositions de l’article 80-1 du code de procédure pénale qu’à peine de nullité, le juge d’instruction ne peut mettre en examen que les personnes à l’encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’elles aient pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont il est saisi. Il apparaît, dès lors, indispensable, en l’espèce, de s’assurer que ces éléments de complicité de harcèlement moral existent pour chacun des salariés visés ; que (
) sur la mise en examen de Mme X… il faut, là encore, rechercher dans la procédure quels indices rendraient vraisemblable la participation de Mme X… comme complice au harcèlement moral de M. Etienne C…, Mmes Anne-Sophie D…, Corinne E…, MM. Michel F…, Jean-Michel G… , Didier H…, Mme Stéphanie I…, MM. Jean-Paul J…, Bernard K…, Vincent L…, Alain M…, Mme N…, MM. O… et P…, Mme Q…, MM. R…, S…, T…, U…, Rémy W…, XX…, YY… et Mme ZZ…, à savoir des faits personnels, positifs et conscients de complicité, ayant concouru à la commission du fait principal sans pour autant que leur auteur ait accompli matériellement aucun des actes décrits par le texte d’incrimination ; qu’il est soutenu que Mme X… a été mise en examen en qualité de directrice territoriale des opérations France de 2007 à mars 2008 au sein du groupe France télécom et qu’en conséquence, les faits recherchés ne peuvent, d’une part, concerner que des salariés relevant de la direction dont elle avait la charge au cours de la période considérée et, d’autre part, ne peuvent pas, non plus, concerner des situations relatives à des salariés pour une période de temps se situant en dehors de la période de mise en examen ; qu’il convient, toutefois, de rappeler qu’il est indifférent, au sens de l’article 222-33-2 qu’un pouvoir hiérarchique ou un lien d’autorité existe entre la personne poursuivie et la victime ; au demeurant, en l’absence d’un tel lien, des faits personnels et positifs peuvent, le cas échéant, être imputés à la personne poursuivie, sous la qualification de complicité, dès lors qu’ils ont contribué, en connaissance de cause, à la réalisation du fait principal au préjudice de salariés du groupe ; qu’en l’espèce, Mme X… était présente à la deuxième table ronde de la convention du 20 octobre 2006 de l’ACSED à la maison de la chimie en présence de MM. Olivier AA… et JJ… BB…, au cours de laquelle est évoqué, pour permettre de respecter les objectifs de réduction massive des effectifs, l’existence d’un crash programme pour accélérer ACT et, où, prenant la parole, elle déclare, d’une part, que « c’est le rôle des espaces de développement d’accélérer les départs vers l’extérieur de l’entreprise, et d’accélérer les redéploiements vers les métiers face aux clients ; que ce travail doit être fait en étroite collaboration avec les managers » et d’autre part que sa priorité est de « réussir ACT » ; que ces déclarations sont corroborées par le document « Réussir ACT » Synthèse des tables rondes de l’année 2007 laissant apparaître sa participation à deux d’entre elles, dont l’une en présence de Mme Brigitte CC…, responsable du programme ACT, étant observé que cette synthèse évoque la nécessité d’une réduction d’effectifs de 16 000 personnes sur trois ans, soit, in fine, la nécessité d’organiser 4 500 départs externes chaque année et fait état de véritables stratégies, visant à brusquer un peu les salariés pour favoriser la mobilité externe forcée ; que l’ensemble de ces éléments caractérisent l’existence d’indices graves ou concordants à l’encontre de Mme X…, en sa qualité de directrice des actions territoriales d’opérations France au sein du groupe France télécom, d’avoir, par aide et assistance, c’est-à-dire par sa contribution effective à l’efficacité du plan ACT pour l’ensemble du groupe, en participant à des tables rondes au cours desquelles étaient élaborées des stratégies visant à la réduction drastique à marche forcée d’effectifs, générateur d’un climat d’insécurité permanent de l’ensemble des salariés, facilité sciemment, par aide et assistance, la préparation et la consommation des délits de harcèlement moral reprochés à la SA Orange, MM. Didier DD…, Olivier AA… et JJ… BB… au préjudice de chacun des salariés visés dans sa mise en examen, nonobstant l’absence de lien hiérarchique avec M. C…, Mmes D…, E…, MM. F… , G…, EE…, FF…, W…, H…, Mme I…, MM. J…, K…, L…, et O… et P…, Mme Q…, MM. R…, S…, T…, U…, Rémy W…, XX…, YY… et Mme ZZ… quand bien même leur mutation effective ou les gestes désespérés qu’ils ont commis sur eux-mêmes seraient intervenus postérieurement à la cessation des fonctions de Mme X… ; qu’il n’en résulte aucune nullité » ;

« 1°) alors que si le délit de complicité de harcèlement moral peut être caractérisé en l’absence de lien hiérarchique entre l’auteur et la victime, il en va autrement lorsque l’intéressé est poursuivi à raison des fonctions de direction dont il était investi et des pouvoirs qui y étaient attachés ; qu’en rejetant la demande de Mme X… tendant à exclure de sa mise en examen les salariés ne relevant pas de son autorité hiérarchique, lorsque celle-ci était mise en examen « en sa qualité de directrice des actions territoriales d’opérations France au sein du groupe France télécom » pour avoir organisé le suivi strict et concret des réductions d’effectifs et pratiqué un mode de management très directif encourageant la pression sur les départs, la chambre de l’instruction, qui n’a pas caractérisé l’existence d’indices graves ou concordants à l’encontre de la demanderesse d’avoir été complice d’un harcèlement moral à l’égard des salariés qui ne relevaient pas de son autorité hiérarchique, n’a pas justifié sa décision ;

« 2°) alors qu’une personne ne peut être mise en examen du chef du délit de complicité de harcèlement moral qu’à l’égard d’une ou de plusieurs personnes déterminées ; qu’en se bornant à relever, pour rejeter la demande de Mme X… tendant à exclure de sa mise en examen les salariés ne relevant pas de son autorité hiérarchique et ceux dont la situation s’était dégradée après son départ du poste de directrice des actions territoriales de France télécom en mars 2008, qu’elle avait contribué, par sa présence à des tables rondes, à l’élaboration et à l’efficacité du plan salarial « ACT » qui avait été « générateur d’un climat d’insécurité permanent de l’ensemble des salariés », la chambre de l’instruction, qui s’est prononcée par des motifs généraux qui ne caractérisent pas, pour chacun des salariés en cause, l’existence d’indices graves ou concordants à l’encontre de Mme X… d’avoir été complice d’un harcèlement moral à l’égard de ces derniers, n’a pas justifié sa décision ;

« 3°) alors que la chambre de l’instruction ne pouvait retenir, au titre des indices graves ou concordants justifiant la mise en examen de Mme X… pour des faits de complicité de harcèlement moral commis entre 2007 et mars 2008, sa présence à la deuxième table ronde de la convention de l’ACSED qui a eu lieu le 20 octobre 2006 et les propos qu’elle y a tenus, ces faits étant antérieurs à la période visée à la prévention » ;

Sur le moyen unique de cassation proposé pour M. Z…, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, 121-6, 121-7, 222-33-2 du code pénal, préliminaire, 80-1, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

« en ce que la chambre de l’instruction a rejeté le moyen tiré de la nullité de la mise en examen du demandeur du chef de complicité de harcèlement moral au préjudice de salariés ne relevant pas de son autorité hiérarchique ;

« aux motifs que le délit de harcèlement moral prévu à l’article 222-33-2 du code pénal est défini, notamment, par le fait de harceler autrui, ce qui implique que la mise en examen d’une personne du chef de cette infraction doit nécessairement viser une ou plusieurs personnes déterminées ; qu’il résulte, par ailleurs, des dispositions de l’article 80-1 du code de procédure pénale qu’à peine de nullité, le juge d’instruction ne peut mettre en examen que les personnes à l’encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’elles aient pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont il est saisi ; qu’il apparaît, dès lors, indispensable, en l’espèce, de s’assurer que ces éléments de complicité de harcèlement moral existent pour chacun des salariés visés ; que sur la mise en examen de M. Z… il est, ainsi, nécessaire de rechercher dans la procédure quels indices rendraient vraisemblable la participation de M. Z… comme complice au harcèlement moral M. Etienne C…, Mmes Anne-sophie D… , Corinne E…, MM. Michel F…, Jean-Michel G…, Didier EE…, Georges FF…, Rémy W…, Didier H…, Mme Stéphanie I…, MM. Jean-Paul J…, Bernard K…, Vincent L…, et Alain M…, c’est-à-dire des faits personnels, positifs et conscients de complicité, ayant concouru à la commission du fait principal sans pour autant que leur auteur ait accompli matériellement aucun des actes décrits par le texte d’incrimination ; que l’avocat de M. Z… soutient que son client a été mis en examen en qualité de directeur territorial-Est de mai 2006 à juin 2008, directeur des ressources humaines OPF de juin 2008 à juin 2009 et directeur des ressources humaines et directeur des actions territoriales OPF au sein du groupe France Télécom et qu’en conséquence, les faits recherchés ne peuvent concerner que des salariés relevant de la direction dont il avait la charge au cours de la période considérée ; qu’à cet égard, il est indifférent, au sens de l’article 222-33-2 qu’un pouvoir hiérarchique ou un lien d’autorité existe entre la personne poursuivie et la victime ; néanmoins, en l’absence d’un tel lien, des faits personnels et positifs peuvent, le cas échéant, être imputés à la personne poursuivie, sous la qualification de complicité, dès lors qu’ils ont contribué, en connaissance de cause, à la réalisation du fait principal au préjudice de salariés du groupe ; qu’en l’espèce, il apparaît à la lecture du document reprenant les déclarations faites devant l’ACSED (D.74) lors de la deuxième table ronde de la convention du 20 octobre 2006 qu’à la question : « F.T. a annoncé moins 22000 sur l’exercice 2006-2008, O. AA… où en est-on aujourd’hui ? » M. Olivier AA… a répondu «
on est dans une situation critique. D’où le discours très direct du Président. Il m’a demandé de présenter lundi au comité de direction générale, un crash programme pour accélérer ACT. Donc on ne va plus être dans un discours basé sur un volontariat un peu mou, on va être beaucoup plus systématique », ajoutant que « Jacques Z… est en charge d’une mission d’intérim pour favoriser la fluidité de l’emploi » et qu’il « faut s’interroger sur la valeur créée non pas par les gens mais par les postes qu’ils occupent. C’est la détection systématique avec inscription obligatoire des personnes concernées à l’espace développement : mission d’interim, examen systématique des possibilités de parcours pro dans la maison, priorité aux métiers de vente et postes stratégiques et sinon, établissement dans un délai fixé à l’avance d’un PPA ou d’essaimage. Il s’agit de mettre un peu de process et de systématiser la démarche qui a été commencé en DT Est. » ; que ces déclarations sont corroborées par le contenu d’un document de travail intitulé « intérim/développement : un levier pour l’équation RH » découvert en perquisition chez M. Z… et dont les enquêteurs ont ainsi résumé le contenu :
- Page 1, ce document prescrit de proposer systématiquement des missions temporaires à certaines catégories de salariés, comme ceux qui sont éligibles au congé de fin de carrière (CFC) ou au départ à la retraite qui ne désirent pas quitter l’entreprise et ceux qui sont sédentarisés sur leur poste.
- L’objectif présenté est de résoudre l’équation RH en développant de la flexibilité, de la fluidité sur l’emploi, en générant des sorties du groupe, en répondant aux besoins prioritaires du groupe et notamment en impulsant une déstabilisation positive pour les salariés sédentarisés.
- La page 2 mentionne que la fin de mission doit se traduire par le recrutement sur un métier prioritaire, un parcours de professionnalisation ou un projet externe (essaimage, plan personnel accompagné ou fonction publique)
- La page 3 mentionne la mise en place d’un dispositif d’incentive intégrant l’Intérim / Développement dans la part variable : cadres en mission, Duo/ Managers Directeurs régionaux, ED 80 salariés minimum en portefeuille Intérim/ développement par conseiller

— La page 4 mentionne notamment que la mise en mission temporaire sur une activité de front éloignée du domicile est déclencheur d’un projet externe ; qu’il apparaît, enfin, à la lecture d’un document à en-tête d’ORGA consultants, France Télécom et Orange que M. Z… a, en 2007, participé, en qualité d’intervenant, à quatre tables rondes « Réussir ACT » en présence, notamment de M. Brigitte CC…, la responsable du programme ; que M. Z… a, pour sa part, admis avoir participé, en qualité de DRH Opérations France, à la coordination des actions ou solutions ACT ; que l’ensemble de ces éléments caractérisent l’existence d’indices graves ou concordants à l’encontre de M. Z…, en sa qualité de directeur territorial Est, de directeur des ressources Humaines puis de directeur des actions territoriales d’opérations France au sein du groupe France Télécom, d’avoir, par aide et assistance, c’est-à-dire par sa contribution effective à l’efficacité du plan ACT pour l’ensemble du groupe, en concevant et en généralisant, notamment, le plan intérim/ développement, générateur d’un climat d’insécurité pour l’ensemble des salariés, facilité sciemment la préparation et la consommation des délits de harcèlement moral reprochés à la SA Orange, MM. Didier DD…, Olivier AA… et JJ… BB… au préjudice de chacun des salariés visés dans sa mise en examen, nonobstant l’absence de lien hiérarchique avec MM. André II…, Etienne C…, Mmes Anne-Sophie D…, Corinne E…, MM. Didier EE…, Didier H…, Mme Stéphanie I…, MM. Jean-Paul J…, Vincent L… et Alain M… ; qu’il n’en résulte aucune nullité ;

« 1°) alors que si le délit de complicité de harcèlement moral peut être caractérisé en l’absence de lien hiérarchique entre l’auteur et la victime, il en va autrement lorsque l’intéressé est poursuivi à raison des fonctions de direction dont il était investi et des pouvoirs qui y étaient attachés ; qu’en rejetant la demande de M. Z… tendant à exclure de sa mise en examen les salariés ne relevant pas de son autorité hiérarchique, lorsque celui-ci était mis en examen « en sa qualité de directeur territorial Est, de directeur des ressources humaines puis de directeur des actions territoriales d’opérations France au sein du groupe France télécom » pour avoir organisé le suivi strict et concret des réductions d’effectifs, mis en place des outils de pression sur les départs, conçu puis généralisé la pratique des missions temporaires et être intervenu dans les décisions de mobilité forcée, la chambre de l’instruction, qui n’a pas caractérisé l’existence d’indices graves ou concordants à l’encontre du demandeur d’avoir été complice d’un harcèlement moral à l’égard des salariés qui ne relevaient pas de son autorité hiérarchique, n’a pas justifié sa décision ;

« 2°) alors qu’une personne ne peut être mise en examen du chef du délit de complicité de harcèlement moral qu’à l’égard d’une ou de plusieurs personnes déterminées ; qu’en se bornant à relever, pour rejeter la demande de M. Z… tendant à exclure de sa mise en examen les salariés ne relevant pas de son autorité hiérarchique, qu’il avait contribué, par sa présence à des tables rondes, à l’élaboration et à l’efficacité du plan salarial « ACT » qui avait été « générateur d’un climat d’insécurité pour l’ensemble des salariés », la chambre de l’instruction, qui s’est prononcée par des motifs généraux qui ne caractérisent pas, pour chacun des salariés en cause, l’existence d’indices graves ou concordants à l’encontre de M. Z… d’avoir été complice d’un harcèlement moral à l’égard de ces derniers, n’a pas justifié sa décision ;

« 3°) alors que la chambre de l’instruction ne pouvait retenir, au titre des indices graves ou concordants justifiant la mise en examen de M. Z… pour des faits de complicité de harcèlement moral commis entre 2007 et 2010, les déclarations faites lors de la deuxième table ronde de la convention de l’ACSED qui a eu lieu le 20 octobre 2006, ces faits étant antérieurs à la période visée à la prévention » ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu’à la suite d’une plainte déposée au mois de décembre 2009 par la fédération syndicale Sud des activités postales et télécommunications, contre la société France Télécom et ses dirigeants, pour dénoncer la mise en place, dans le cadre des plans NEXT (« Nouvelle Expérience des Télécoms ») et ACT (« Anticipation et Compétences pour la Transformation »), suivant annonce faite au cours de la convention du 20 octobre 2006 de l’Association des cadres supérieurs et dirigeants de France Télécom (ACSED), d’une nouvelle politique de gestion des ressources humaines ayant eu pour objet le départ de 22 000 salariés ou agents et pour effets, selon la plaignante, de déstabiliser le personnel, de créer un climat anxiogène et de provoquer plusieurs suicides et arrêts de travail, une enquête préliminaire a été diligentée, au terme de laquelle une information judiciaire a été ouverte le 8 avril 2010 du chef, notamment, de harcèlement moral ; qu’après que la société France Télécom et trois de ses dirigeants (M. Didier DD…, président-directeur général, M. Olivier AA…, directeur des relations humaines, et M. JJ… BB…, directeur exécutif délégué) eurent été mis en examen de ce chef au mois de juillet 2012, quatre autres cadres ont été entendus en qualité de témoins au cours des mois de novembre 2013 et septembre 2014, puis mis en examen du chef de complicité de harcèlement moral au mois de décembre 2014 ; que deux d’entre eux, Mme X… et M. Z…, ont présenté une requête aux fins d’annulation de leur mise en examen, motif pris de ce que l’acte vise, comme victimes, certains salariés ne relevant alors pas ou plus de leur autorité hiérarchique ;

Attendu que, pour dire n’y avoir lieu à annulation d’une pièce quelconque de la procédure, après avoir écarté l’argumentation des requérants, prise de ce qu’étant mis en examen en qualité de directeurs d’un service, ils ne peuvent se voir reprocher une complicité de harcèlement qu’à l’égard des salariés relevant, à l’époque du dommage invoqué, de ce service, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu’en l’état de ces énonciations, qui caractérisent l’existence d’indices graves ou concordants à l’encontre de Mme X… et de M. Z… d’avoir, en leur qualité de cadres de la société France télécom, indépendamment du rôle spécifique de direction d’un service qu’ils exerçaient, par aide et assistance, en l’occurrence par leur contribution active à l’efficacité, pour l’ensemble du groupe, du plan ACT, qui a créé un climat d’insécurité permanent pour tout le personnel, facilité la préparation et la consommation des délits de harcèlement moral reprochés à la société et trois de ses dirigeants au préjudice de chacun des salariés visés dans leur mise en examen, peu important que certains d’entre eux n’eussent pas relevé de la direction dont ils avaient alors la charge ou, s’agissant de Mme X…, que le dommage invoqué se fût produit après qu’elle eut quitté ses fonctions, la chambre de l’instruction a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;

D’où il suit que les moyens, inopérants en leur troisième branche en ce que l’arrêt ne mentionne les déclarations faites par Mme X… et M. Z…, lors de la convention du 20 octobre 2006, qu’à titre d’indice rendant vraisemblable leur participation à la commission des faits pour lesquels ils sont mis en examen, ne sauraient être accueillis ;

Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq juin deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.



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