Cour de cassation, Chambre sociale, 9 janvier 2019, 17-21.516, Inédit

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

SOC.

MF

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 9 janvier 2019

Cassation

Mme Z…, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 16 F-D

Pourvoi n° P 17-21.516

Aide juridictionnelle totale en défense

au profit de M. X….

Admission du bureau d’aide juridictionnelle

près la Cour de cassation

en date du 16 janvier 2018.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par la société Isri France, société par actions simplifiée, dont le siège est […] ,

contre l’arrêt rendu le 16 mai 2017 par la cour d’appel de Colmar (chambre sociale, section B), dans le litige l’opposant :

1°/ à M. A… X…, domicilié […] ,

2°/ à Pôle emploi de Paris, dont le siège est […] ,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 27 novembre 2018, où étaient présents : Mme Z…, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Y…, conseiller référendaire rapporteur, M. Ricour, conseiller, Mme Becker, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Y…, conseiller référendaire, les observations de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Isri France, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. X…, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Vu l’article L. 1226-2 du code du travail dans sa rédaction applicable en la cause ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’engagé le 6 novembre 2006 en qualité de soudeur par la société Isri France, M. X… a été licencié le 30 mai 2010 pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement ;

Attendu que pour dire le licenciement du salarié sans cause réelle et sérieuse et condamner en conséquence l’employeur au paiement de dommages et intérêts à ce titre, l’arrêt retient que le salarié a demandé à bénéficier d’un reclassement sur plusieurs postes qui lui ont été présentés par l’employeur, notamment sur l’un d’eux dont il considérait qu’il répondait à la limitation de la station prolongée plus de trois heures consécutives, l’intéressé estimant que les deux pauses de dix minutes et la pause casse-croûte de vingt minutes constituaient des coupures suffisantes, que l’employeur indique, dans la lettre de licenciement, avoir saisi par téléphone le médecin du travail qui a considéré que ces temps de rupture n’étaient pas suffisants au regard des restrictions qu’il avait préconisées, que toutefois, aucun élément n’est versé aux débats, permettant de constater que le médecin du travail a examiné concrètement la situation qui opposait les parties, que si, par une lettre du 19 avril 2010, il a fait état d’un échange téléphonique du même jour, il ne précise pas avoir examiné les caractéristiques du poste envisagé, ni même avoir affirmé que les temps de rupture inhérents à ce poste étaient insuffisants pour permettre une récupération, que l’employeur ne démontre pas avoir obtenu un avis circonstancié concernant le poste dont le salarié demandait à bénéficier, que la recherche de reclassement ne répond pas, dès lors, aux exigences légales ;

Attendu cependant que si l’employeur doit prendre en considération, au besoin en les sollicitant, les propositions du médecin du travail en vue du reclassement du salarié déclaré inapte, il lui appartient de tirer les conséquences du refus de ce médecin de donner lui-même son avis sur le poste de reclassement envisagé ;

Qu’en statuant comme elle a fait, alors qu’elle constatait que l’employeur avait sollicité l’avis du médecin du travail sur le poste de reclassement envisagé par le salarié, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 16 mai 2017, entre les parties, par la cour d’appel de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Metz ;

Condamne M. X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé et signé par Mme Z…, conseiller doyen faisant fonction de président, et par Mme Jouanneau, greffier de chambre présente lors de la mise à disposition de la décision le neuf janvier deux mille dix-neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour la société Isri France.

Le moyen reproche à l’arrêt infirmatif attaqué D’AVOIR dit que le licenciement de monsieur X…, salarié, était dénué de cause réelle et sérieuse, condamné la société ISRI France, employeur, à lui payer 12.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et ordonné à la société ISRI France de rembourser à Pôle-Emploi les indemnités de chômage effectivement versées au salarié dans la limite de 6 mois d’indemnités ;

AUX MOTIFS QUE dans ses conclusions déposées le 20 avril 2016, soutenues oralement à l’audience, le salarié demandait à la cour d’infirmer le jugement et de dire que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse, de condamner la SAS ISRI France à lui payer les sommes de 8.923,32 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif avec les intérêts au taux légal à compter de l’arrêt et de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ; [

] que, sur le licenciement, [

] lorsqu’à l’issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié était déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui proposait un autre emploi approprié à ses capacités, que l’emploi proposé était aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; que c’était à l’employeur qu’il incombait de démontrer qu’il s’était acquitté de cette obligation ; que par ailleurs, en cas de désaccord entre l’employeur et le salarié sur la compatibilité d’un poste avec les propositions du médecin du travail, il appartenait à l’employeur de saisir ce dernier afin de recueillir son avis ; qu’il était constant que, s’agissant d’une maladie non professionnelle, la formalité de l’article L.1226-12 du code du travail, à savoir la notification des motifs s’opposant au reclassement, ne s’imposait pas ; qu’en revanche, le salarié avait demandé à bénéficier d’un reclassement sur plusieurs postes qui lui avaient été présentés par l’employeur, notamment sur l’un d’eux dont il considérait qu’il répondait à la limitation de la station prolongée plus de trois heures consécutives, l’intéressé estimant que les deux pauses de 10 minutes et la pause casse-croûte de 20 minutes constituaient des coupures suffisantes ; que l’employeur indiquait, dans la lettre de licenciement, avoir saisi le médecin du travail par téléphone et affirmait que ce praticien avait considéré que ces temps de rupture n’étaient pas suffisants au regard des restrictions qu’il avait préconisées ; que toutefois, aucun élément n’était versé aux débats, permettant de constater que le médecin du travail avait examiné concrètement la situation qui opposait les parties ; que si, par une lettre du 19 avril 2010, il avait fait état d’un échange téléphonique du même jour, il ne précisait pas avoir examiné les caractéristiques du poste envisagé, ni même avoir affirmé que les temps de rupture inhérents à ce poste étaient insuffisants pour permettre une récupération ; que par suite, la SAS ISRI France ne démontrait pas avoir obtenu un avis circonstancié concernant le poste dont le salarié demandait à bénéficier ; que la recherche de reclassement ne répondait pas, dès lors, aux exigences légales ; que le licenciement était en conséquence dénué de cause réelle et sérieuse ; que compte-tenu de l’ancienneté du salarié (3 ans et 6 mois) et de son âge au jour de la rupture (22 ans), des dommages-intérêts lui seraient alloués, indemnisant l’intégralité du préjudice résultant de la rupture, à hauteur de 12.000 euros ; que le jugement serait donc infirmé en ce sens (arrêt, p. 2, §§ 16 et 17, p. 5, § 12, p. 6, §§ 1 à 12) ;

ALORS, PREMIEREMENT QUE les juges du fond sont tenus de respecter les limites du litiges telles qu’elles sont fixées par les conclusions respectives des parties ; que dans ses conclusions d’appel, dont l’arrêt attaqué a constaté qu’elles avaient été soutenues oralement à l’audience, le salarié avait uniquement demandé que l’employeur soit condamné à lui payer la somme de 8.932,32 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif, avec intérêts au taux légal compter de l’arrêt à intervenir ; qu’en condamnant néanmoins l’employeur à payer au salarié la somme de 12.000 euros à titre de dommages-intérêt, soit une somme supérieure au quantum de la demande du salarié, la cour d’appel a modifié les termes du litige et violé l’article 4 du code de procédure civile ;

ALORS, DEUXIEMEMENT QUE si l’employeur doit prendre en considération, au besoin en les sollicitant, les propositions du médecin du travail en vue du reclassement du salarié déclaré inapte, il ne peut lui être imputé l’imprécision ni le caractère non circonstancié de l’avis donné par le médecin du travail ; qu’en retenant néanmoins que l’employeur, dans sa recherche d’un reclassement du salarié notamment au poste convoité par ce dernier, avait manqué à ses obligations, par la considération erronée que si l’employeur avait utilement sollicité et obtenu un avis du médecin du travail, un tel avis n’était pas précis et circonstancié, la cour d’appel a violé l’article L.1226-2 du code du travail ;

ALORS, TROISIEMEMENT QU’en retenant que, par une lettre du 19 avril 2010, le médecin du travail n’avait pas affirmé que les temps de rupture – fixés à deux fois 10 minutes outre une pause pour déjeuner de 20 minutes – inhérents au poste convoité par le salarié étaient insuffisants pour permettre une récupération, cependant que cette lettre énonçait clairement la nécessité pour le salarié, soit de pouvoir s’asseoir dès qu’il en ressentirait le besoin –donc pas seulement pendant deux fois dix minutes outre la pause déjeuner – soit de bénéficier d’un temps de rupture d’une heure au minimum en position assise passé trois heures de travail en station debout, soit un temps de rupture d’une durée nettement supérieure à celle de deux pauses de dix minutes outre la pause déjeuner, la cour d’appel a méconnu l’interdiction faite aux juges de dénaturer les documents de la cause.

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Textes cités dans la décision

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