Cour de cassation, Chambre sociale, 13 février 2019, 17-15.928, Inédit

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Chronologie de l’affaire

Commentaires5

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Me Jérémie Jardonnet · consultation.avocat.fr · 15 mai 2019

La liberté d'expression est consacrée par : l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; et l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, qui proclame en son alinéa 1er que le droit à la liberté d'expression comprend « la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérences d'autorités publiques et sans considération de frontière » ; Elle constitue « l'un des fondements essentiels de pareille société, l'une des conditions primordiales de …

 

Village Justice · 1er mai 2019

Les limites de la liberté d'expression des salariés. Quelques exemples jurisprudentiels récents montrent la difficulté de distinguer parmi les propos du salarié ce qui relève de la liberté d'expression ou de son abus. Par principe, le salarié bénéficie d'une liberté d'expression et ne peut pas être licencié en raison de critiques qu'il a portées contre la société (article L1121-1du code du travail). Parce que la liberté d'expression est une liberté fondamentale, protégée par l'article 10 de la Convention Européenne des droits de l'Homme, le salarié licencié en violation de cette …

 

Me Jean-luc Braunschweig-klein · consultation.avocat.fr · 22 février 2019

Rappel L'article L. 1121-1 du code du travail stipule que : « Nul ne peut apporter au droit des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. » La liberté d'expression est également consacrée par l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. La jurisprudence a précisé à plusieurs reprises que le salarié jouit de la liberté d'expression à l'intérieur et à l'extérieur de …

 
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Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 13 févr. 2019, n° 17-15.928
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 17-15.928
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 6 février 2017, N° 13/04486
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000038161362
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2019:SO00209
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Sur les parties

Texte intégral

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 7 février 2017), que M. B…, engagé le 3 novembre 1997 par l’association Prudis CGT, a été licencié pour cause réelle et sérieuse le 30 mai 2005 ; qu’il a saisi la juridiction prud’homale et que le syndicat SNPEFP-CGT est intervenu à l’instance ;

Sur les troisième, quatrième et cinquième branches du moyen unique :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs annexés, qui ne sont manifestement pas susceptibles d’entraîner la cassation ;

Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :

Attendu que le salarié et le syndicat font grief à l’arrêt de dire que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, de débouter le salarié de ses demandes tendant à la condamnation de l’association à poursuivre son contrat de travail et à lui verser une indemnité correspondant aux salaires dus entre le mois de mai 2006 et la date effective de sa réintégration et de débouter le syndicat de sa demande de condamnation de l’association à lui payer 1 euro de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé à l’intérêt collectif de la profession par un licenciement attentatoire à l’exercice du droit de grève et à la liberté d’expression alors, selon le moyen :

1°/ que le salarié jouit, dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d’expression à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées ; que tout salarié est ainsi en droit de critiquer tant l’organisation de l’entreprise que des propos, des décisions ou des méthodes qui lui paraissent inappropriés ; qu’en se bornant à énoncer que les courriers auxquels les premiers juges avaient fait référence relevaient des propos diffamatoires, infamants et même parfois injurieux, constituant un abus dans la liberté d’expression du salarié, sans caractériser l’existence, par l’emploi de termes injurieux, diffamatoires ou excessifs, d’un abus dans l’exercice de la liberté d’expression dont jouit tout salarié, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail, ensemble l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

2°/ que l’appréciation de l’éventuel abus dans l’exercice de la liberté d’expression du salarié doit se faire in concreto, au regard des responsabilités qui lui sont confiées, du contexte des propos incriminés, de la tolérance dont il a jusqu’alors pu être fait preuve, ou du franc-parler en usage dans l’entreprise ; qu’il en va d’autant plus ainsi dans une association syndicale dont chaque membre ou employé est par définition un militant engagé dans la défense des droits des salariés, et où le débat et la confrontation d’idées sont partie intégrante du fonctionnement de l’entreprise ; qu’en se bornant à énoncer que les courriers auxquels les premiers juges avaient fait référence relevaient des propos diffamatoires, infamants et même parfois injurieux, constituant un abus dans la liberté d’expression du salarié, sans tenir compte notamment de la pratique en vigueur au sein de l’association Prudis, institut de formation des conseillers prud’hommes CGT, ni de la qualité de M. B…, engagé depuis de nombreuses années dans le militantisme syndical et exerçant comme enseignant puis directeur d’études au sein de Prudis depuis 15 ans à la date de son licenciement, la cour d’appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail, ensemble l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu qu’ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que le salarié avait, dans différentes lettres, mentionné qu’il refusait « d’accourir ventre à terre pour répondre à l’injonction hiérarchique « bête et méchante»», qualifié de « torchon » la lettre du 8 mars 2005 adressée par le directeur et le président de l’association et ayant « suscité le dégoût chez la plupart de ses lecteurs », écrit que le directeur mentait « effrontément » et que la « bonne foi » du président n’était pas « parfaite », que le directeur jouait « au caporal », et que le président de l’association se laissait « aspirer […] par la galaxie « droits et libertés » qui érige en vertu la pratique des coups tordus », la cour d’appel, qui a pris en compte l’environnement de travail, a pu décider que ces propos, largement diffusés, constituaient un abus de la liberté d’expression du salarié caractérisant une cause réelle et sérieuse de licenciement ; que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. B… et le syndicat SNPEFP-CGT aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize février deux mille dix-neuf.



MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. B… et le syndicat SNPEFP-CGT

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir dit que le licenciement de M. B… reposait sur une cause réelle et sérieuse, de l’avoir en conséquence débouté de ses demandes tendant à la condamnation de l’Association Prudis CGT à poursuivre son contrat de travail et à lui verser une indemnité correspondant aux salaires dus entre le mois de mai 2006 et la date effective de sa réintégration et d’avoir débouté le SNPEFP-CGT de sa demande de condamnation de l’Association Prudis CGT à lui payer 1 € de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé à l’intérêt collectif de la profession par un licenciement attentatoire à l’exercice du droit de grève et à la liberté d’expression ;

AUX MOTIF ADOPTES QU’il résulte des débats et pièces versées que les relations entre Monsieur D… B… et la direction de l’association Prudis CGT ont commencé à se dégrader à la suite du départ à la retraite du directeur et de la nomination de son successeur ainsi que de la décision prise d’une refonte de la formation des conseillers prud’hommes ; que préalablement au changement de direction, l’ancien directeur avait fait connaître à la direction confédérale sa préférence pour une autre personne que celle qui sera finalement nommée pour lui succéder, pour un ensemble de considérations ; que Monsieur D… B… avait fait de même par lettre du 1er juin 2004 ; QUE l’annonce concomitante par information du 30 juin 2004, diffusée aux « UD-FD-Régions » et aux « membres de la CE confédérale » du changement de direction de l’association Prudis et « de la refonte largement concertée, de la formation des conseillers prud’hommes, amplifiant les évolutions déjà intervenues ces derniers mois », avec une réflexion collective devant être menée par le nouveau directeur portant notamment sur le bilan des formations dispensées et le fonctionnement de l’association, a suscité une réaction quasi immédiate de Monsieur D… B… ; qu’il a, par courrier du 5 juillet 2004, invité les directeurs de stages nationaux à une rencontre prévue le 10 septembre 2004 pour « réfléchir ensemble sur « les retombées pédagogiques » de ce « chef d’oeuvre », joignant à cet envoi copies de l’information datée du 30 juin ainsi que d’un courrier envoyé à Monsieur Z… O…, responsable du collectif Droits, Libertés, Actions juridiques de la confédération, et portant sur sa situation au sein de l’institut ; que cette initiative fut suivie d’une mise au point publique quant au jugement porté sur la qualité du travail mené par l’association et le sens de la refonte ; que Monsieur O… a également répondu à Monsieur D… B…, démentant une quelconque suggestion concernant son départ ; que le responsable de la coordination confédérale, signataire de l’information du 30 juin, a, de son côté, confirmé à l’intéressé que son départ n’était pas à l’ordre du jour, lui a fait part de son désaccord sur sa démarche et lui a demandé de se rapprocher des responsables pour décider des initiatives à prendre lorsqu’il « s’agit de réfléchir ensemble sur les retombées pédagogiques des décisions confédérales » ; qu’à la suite de la réunion du 10 septembre, reportée au 17 septembre, un texte de protestation contre la refonte annoncée, ressentie comme « insultante », était signé par des éducateurs et directeurs de stages nationaux, texte dont Monsieur D… B… indique avoir été à l’origine ; QU’un degré supplémentaire était franchi en mars 2005, période durant laquelle de nombreux écrits furent échangés ; qu’ainsi le 7 mars 2005, Monsieur D… B… interpellait le directeur de l’association notamment sur la situation de la personne que lui-même et l’ancien directeur avaient souhaité voir nommée à la direction et lui demandait soit de présenter sa démission, ce « qui serait regrettable mais aurait le mérite de montrer que tu as au moins le sens de la parole donnée », soit d’obtenir dans de meilleurs délais la « solution la plus conforme à l’intérêt général de Prudis, c’est-à-dire l’embauche de P… » ; que Monsieur B… ajoutait que, depuis son arrivée à Prudis, le directeur était un autre homme, se laissant aspirer [

par la galaxie « droits et libertés » qui érige en vertu la pratique des coups tordus

» ; que dans sa réponse du 8 mars adressée aux animateurs Prudis, le directeur faisait état de la situation difficile et, tout en reconnaissant les qualités de Monsieur B…, regrettait son comportement, ce dernier persistant à « travailler isolément » ; QUE les échanges écrits ont perduré, tels celui du 9 mars dans lequel le directeur demandait expressément à Monsieur B… de se rendre sur son lieu de travail pour discuter des problèmes que celui-ci avait évoqués, lui confirmait son souhait de lui soumettre des propositions au sujet des stages et lui réitérait la demande de sa participation aux réunions de travail « tout particulièrement celles touchant directement » ses responsabilités ; que Monsieur D… B…, quant à lui, confirmait le 13 mars, concernant son « prétendu refus de tout dialogue au sujet du travail », ses propos, à savoir un refus « d’accourir ventre à terre pour répondre à l’injonction hiérarchique « bête et méchante » qui se contentait de [lui] asséner sèchement de venir « parler travail » » ; qu’après un autre échange, relatif à deux stages, le directeur écrivait le 29 mars une lettre à Monsieur D… B… dans laquelle il relatait un certain nombre d’événements, rappelait les fonctions contractuellement prévues, lui fixait des missions prioritaires dans le cadre des nouvelles orientations et lui précisait qu’il était impératif qu’il reprenne des « relations de travail normales avec le collectif national DLAJ » ; QUE durant le même mois de mars, la direction de l’association Prudis et Monsieur D… B… s’opposaient quant à la participation d’une intervenante lors d’une formation programmée en avril, opposition ayant abouti à l’annulation de la formation, l’intervenante choisie par la direction ayant décidé de revenir sur sa participation par lettre du 30 mars 2005 ; qu’aux termes de celle-ci, elle précisait avoir « reçu le 24 mars 2005 » l’appel téléphonique de l’intervenante initialement prévue et le 29 mars, celui de Monsieur B… ; qu’elle écrivait vouloir rester « totalement étrangère à cette situation » qualifiée de contexte « très houleux », en concluant qu’elle adresserait un courrier à ses deux interlocuteurs afin de leur faire part de son avis « quant au procédé qu’ils ont employé » ; que cet événement suscitait l’intervention du président de l’association Prudis qui, par lettre recommandée du 31 mars 2005, adressait un avertissement à Monsieur D… B… et l’invitait à se conformer aux demandes du directeur explicitées dans le courrier du 29 mars ; QUE le 5 avril 2005, Monsieur D… B… écrivait un long courrier aux directeur et président de l’association Prudis ; qu’il y qualifiait de « torchon » la lettre du 8 mars adressée aux animateurs Prudis (dont l’inspirateur, si ce n’est le rédacteur du texte, a été sans doute le « génial » Z… O…) », ladite lettre ayant « suscité le dégoût chez la plupart de ses lecteurs » ; qu’il y affirmait qu’il ne saurait « y avoir de relations amicales avec celui qui a oeuvré à l’élaboration d’un document [note d’information du 30 juin] considéré comme insultant », réitérait son refus de l’ « éviction » de l’intervenante, constitutive d’un acte « arbitraire » qu’il était « hors de question d’accepter » ; que selon Monsieur D… B…, le directeur mentait « effrontément » et la « bonne foi » du président n’était pas « parfaite » ; que dans cet écrit, Monsieur D… B… faisait notamment part de l’historique de ses activités, de son sentiment sur les options en matière de formation et exposait que la proposition d’effectuer l’essentiel de son travail au siège de l’association aux jours et heures d’ouverture frappait par « sa mesquinerie et son caractère dérisoire » ; qu’il concluait que « Coincé entre un Directeur de Prudis qui joue au caporal et un Responsable du collectif national droits et libertés aux tendances ubuesques », il se laissait « parfois aller à un peu de pessimisme sur le libre exercice de sa liberté d’expression sur l’évolution de Prudis » ; QUE le conflit relatif à la participation de la même intervenante se répétait pour un stage de formation prévu en mai 2005 (Méthodologie juridique), le directeur de l’association sollicitant le 12 avril 2005 l’éventuel accord de Monsieur B… pour rechercher une autre intervenante, accord à défaut duquel il le ferait lui-même ; que le 13 avril 2005, Monsieur D… B… réaffirmait son refus de ce « comportement arbitraire » ; que les autres points de litige apparaissant dans ces deux derniers courriers avaient trait également à la « pratique pédagogique », le directeur insistant notamment pour que Monsieur B… oeuvre dans le sens d’un élargissement du panel des intervenants ; QU’une réunion se tenait le 14 avril 2005, à l’initiative du SNEPFP, syndicat dont est adhérent Monsieur D… B…, réunion qui n’a pas pu aboutir sur le rapprochement espéré par le syndicat qui spécifiait, dans une déclaration, après avoir demandé à Monsieur B… de mettre par écrit les modalités selon lesquelles il envisageait la poursuite de son contrat de travail et expliquait la nature de son soutien à la grève décidée par ce dernier ; que celle-ci, prévue le 22 avril, avait été annoncée dans un tract du 19 avril pour « protester contre l’annulation du stage [

]prévu du 4 au 18 avril marquer son refus de la désinvolture que le directeur de PRUDIS a manifesté envers les conseillers prud’hommes de la CGT et le travail de conception de stage réalisé par le directeur des études. Protester contre le comportement arbitraire du directeur de Prudis qui entend remettre en cause le travail réalisé par le directeur des études en procédant à une modification unilatérale et non justifiée de la grille de stage « méthodologie juridique » […] protester contre la suspicion manifestée envers sa pratique pédagogique [

] » ; QUE le 28 avril 2005, Monsieur D… B… était convoqué à un entretien préalable à sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement, fixé au 11 mai 2005 ; que le lendemain de l’entretien, Monsieur D… B… énonçait au président de l’association, qu’il était « convaincu que la meilleure aide » qu’il pouvait apporter était de continuer à travailler à la conception des programmes de formation des stages nationaux et à assurer des interventions dans ces stages, étant relevé à ce stade que cette position était en contraction avec les priorités notifiées le 29 mars ; qu’il soulignait également que le maintien de la grille du stage « Méthodologie » avec sa mouture initiale serait de nature à « donner un coup d’accélérateur au rétablissement d’un climat de confiance » qu’il pourrait « alors revenir, pas nécessairement souriant, mais serein, aux réunions du collectif national DLAJ » ; QUE par lettre du 18 mai 2005, le président de l’association Prudis transmettait à Monsieur D… B… la motion adoptée par le conseil d’administration le 17 mai 2005, dans laquelle ce dernier estimait souhaitable de tenter une dernière démarche en demandant à l’intéressé de prendre l’engagement « écrit, clair, loyal et non équivoque de mettre fin à [son] attitude et de respecter de manière loyale les décisions prises par Prudis [

] » ; que cet engagement devait parvenir au président dans les huit jours de sa notification ; que le 19 mai 2005, le président et le directeur de l’association Prudis excluait Monsieur D… B… du stage « Méthodologie juridique », compte tenu de son refus de discuter de la grille élaborée avec la direction du stage, et faute d’engagement de sa part, des dispositions ayant dû être prises pour assurer la direction du stage dans de bonnes conditions ; que le 25 mai 2005, Monsieur D… B… signalait au président être « affligé par la brutalité de la refonte de la grille du stage « Méthodologie juridique » et par son éviction de cette grille ; qu’il renvoyait à son courrier du 12 mai « de nature à répondre à l’attente du conseil d’administration » ; QUE si, dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, le salarié jouit de sa liberté d’expression, cet exercice ne saurait donner lieu à abus ; qu’or, on ne peut que constater que Monsieur D… B… a employé, à plusieurs reprises, à l’égard des dirigeants de l’association Prudis et des responsables confédéraux des propos dénigrants, méprisants, voire insultants, spécialement dans ses courriers des 7 mars, 13 mars et 5 avril ; que cet abus est d’autant plus caractérisé que Monsieur D… B… a diffusé largement ses prises de position, ce qu’au demeurant il conteste pas, diffusion qui n’a pu que participer à la détérioration des relations et du fonctionnement de l’association, compte tenu de ses fonctions de directeur des études et de l’estime dont il bénéficiait auprès d’un grand nombre de personnes ; que la réitération des propos reprochés, dépassant largement le cadre de la liberté d’expression et mettant en cause les personnes mêmes, au-delà des orientations de l’institut, ne peuvent se justifier ni par le « peu d’égards » manifesté selon Monsieur D… B… envers l’ancien dirigeant de l’association, ni par la situation de la personne que ce dernier et l’intéressé avaient souhaité voir nommée à la direction ; qu’à cet égard, il n’apparaît nullement que l’utilisation de termes ou de termes ou d’expressions de même nature que ceux adoptés par Monsieur D… B… aient été employés par ses interlocuteurs au sein de la direction ; qu’en outre, Monsieur D… B…, dont le contrat de travail stipule qu’il a parmi ses fonctions essentielles la « conception des programmes de formation dans le cadre national fixé par l’Institut », a de manière très nette refusé d’appliquer les modalités de fonctionnement décidé par son employeur, de la même façon qu’il a de façon réitérée marqué son opposition à la décision prise par l’institut concernant une intervenante, décision dont il n’appartient pas au juge d’apprécier l’opportunité ; qu’ainsi le conflit ayant abouti au licenciement est antérieur à la grève du 22 avril 2005, et s’est poursuivi ensuite, Monsieur D… B… maintenant ses positions alors que l’association avait tenté de remédier à la situation de rupture en lui ouvrant la possibilité de rectifier son attitude ; que ce n’est donc pas l’exercice de son droit de grève qui a motivé le licenciement ;

ET AUX MOTIFS PROPRES QUE si la liberté d’expression hors de l’entreprise permet au salarié d’en user comme un citoyen libre, sans considération du lien de subordination, dans les limites du respect de la loi, cette liberté d’expression et le droit de critique existant au sein de l’entreprise ne doit pas dégénérer en abus ; que le chef d’entreprise, ou comme en l’espèce les organes chargés de la direction, ont l’obligation de préserver l’intérêt social et de faire respecter l’image et la réputation de la structure sociale ; que le excès commis dans l’exercice de la liberté d’expression du salarié doivent s’apprécier à l’aune des circonstances dans lesquels ils s’exercent ; QU’en l’espèce, le statut particulier de Monsieur B…, seul salarié dans une association issue d’une organisation syndicale, a manifestement créé une confusion sur les limites auxquelles il devait s’astreindre dans l’exercice de sa liberté syndicale et dans les obligations qui le liaient à son contrat de travail ; que même si le militantisme syndical de Monsieur B… pouvait autoriser une certaine tolérance dans le langage utilisé à l’égard de ses camarades, les courriers auxquels les premiers juges ont amplement fait référence dans le langage utilisé à l’égard de ses camarades, les courriers auxquels les premiers juges ont amplement fait référence révèlent des propos diffamatoires, infamants et même parfois injurieux à l’égard des membres de la direction de l’association et du conseil d’administration ; que ces propos excessifs dépassent largement le seuil de cette tolérance dès lors qu’ils sortent du champ professionnel et portent atteinte nominativement à la personne du directeur, du président de l’association, de membres du Conseil d’administration ; QUE la seule lecture du courrier du 5 avril 2005 atteste des excès de langage utilisés par le salarié ; que le fait pour la direction de ne pas avoir cherché à polémiquer à la suite de la réception de ce courrier auprès d’instances tierces, ne l’empêchait pas de l’invoquer à l’appui du licenciement disciplinaire dont Monsieur B… a fait l’objet ; que cet abus dans la liberté d’expression a débuté concomitamment à l’embauche du nouveau directeur et c’est à juste titre que le Conseil a souligné qu’il y avait réitération des faits et a précisé que l’attitude excessive du salarié ne pouvait être considérée comme une réponse légitime et ponctuelle à un comportement de la direction qui aurait pu être inadaptée ; que le Conseil a justement déduit de ces griefs que la grève du salarié pendant une demie journée le 22 avril 2005 n’était pas à l’origine du licenciement ; que la Cour soulignera que dans le cadre de la procédure engagée en référé, la cour d’appel de Paris, statuant en dernier ressort le 10 mars 2009, a considéré dans le même sens que le licenciement n’était vicié ni par une atteinte à la liberté d’expression ni au droit de grève ; QU’enfin il y a lieu de confirmer également les motifs des premiers juges qui ont relevé une opposition marquée et répétée de Monsieur B… à appliquer les décisions de l’employeur ; que si l’ensemble des pièces communiquées démontrent l’existence d’un réel combat d’idées sur l’évolution fixée par les instances confédérales sur la formation des conseillers prud’homaux, il ressort des échanges entre le salarié et la direction, et notamment ceux des 1er juin 2004 et 7 mars 2005, qu’en réalité, Monsieur B… a refusé les décisions transmises par le nouveau Directeur, Monsieur L…, avec lequel il était en conflit dès le départ ; que dès lors les manifestations d’opposition d’autres militants sont sans effet sur le débat relatif au licenciement de Monsieur B… ; QU’un certain nombre de faits attestent de ce conflit de personne ; qu’en mars 2005, le refus du salarié de modifier la grille de stage concernant l’intervention d’une avocate sur deux jours n’est en réalité qu’une démonstration de force de Monsieur B… face à une décision du directeur et du Président qu’il considère unilatéralement comme arbitraire ; que cette opposition aux décisions de la direction s’est également manifestée lorsque dans le cadre de la refonte, de nouvelles missions lui ont été confiées par la direction le 29 mars 2005 ; que Monsieur B… transmettra une réponse catégorique, le 5 avril 2005 : « Il n’est pas encore né celui qui réussira à me cloîtrer dans un bureau à confectionner des brochures pendant les heures d’ouverture » ; que plusieurs tentatives ont été engagées en interne et au sein même des instances syndicales pour tenter de désamorcer ce conflit et au vu de l’opposition de Monsieur B…, la poursuite du contrat de travail s’est avérée impossible ; QUE l’ensemble de ces motifs permettent de confirmer la décision prise par le conseil et de rejeter la contestation relative au licenciement et les demandes de réintégration et salariales de Monsieur B… ; qu’au vu des motifs précédemment exposés sur l’absence d’atteinte à la liberté d’expression et au droit de grève, il y a lieu de rejeter les demandes et prétentions du Syndicat SNPEFP-CGT ;

1) ALORS QUE le salarié jouit, dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d’expression à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées ; que tout salarié est ainsi en droit de critiquer tant l’organisation de l’entreprise que des propos, des décisions ou des méthodes qui lui paraissent inappropriés ; qu’en se bornant à énoncer que les courriers auxquels les premiers juges avaient fait référence relevaient des propos diffamatoires, infamants et même parfois injurieux, constituant un abus dans la liberté d’expression du salarié, sans caractériser l’existence, par l’emploi de termes injurieux, diffamatoires ou excessifs, d’un abus dans l’exercice de la liberté d’expression dont jouit tout salarié, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail, ensemble l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

2) ALORS en outre QUE l’appréciation de l’éventuel abus dans l’exercice de la liberté d’expression du salarié doit se faire in concreto, au regard des responsabilités qui lui sont confiées, du contexte des propos incriminés, de la tolérance dont il a jusqu’alors pu être fait preuve, ou du franc-parler en usage dans l’entreprise ; qu’il en va d’autant plus ainsi dans une association syndicale dont chaque membre ou employé est par définition un militant engagé dans la défense des droits des salariés, et où le débat et la confrontation d’idées sont partie intégrante du fonctionnement de l’entreprise ; qu’en se bornant à énoncer que les courriers auxquels les premiers juges avaient fait référence relevaient des propos diffamatoires, infamants et même parfois injurieux, constituant un abus dans la liberté d’expression du salarié, sans tenir compte notamment de la pratique en vigueur au sein de l’association Prudis, institut de formation des conseillers prud’hommes CGT, ni de la qualité de M. B…, engagé depuis de nombreuses années dans le militantisme syndical et exerçant comme enseignant puis directeur d’études au sein de Prudis depuis 15 ans à la date de son licenciement, la cour d’appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail, ensemble l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

3) ALORS QUE par leur courrier du 8 avril 2005, les dirigeants de l’association Prudis CGT avaient informé différentes « instances tierces» de leur choix de « ne pas répondre » au courrier de M. Prudis du 5 avril précédent ; que c’est seulement après la grève du 22 avril que ce courrier a été reproché à M. B… pour prétexter une « attitude » justifiant le licenciement ; qu’en énonçant, pour écarter le lien entre la grève du 22 avril et le déclenchement dès le 28 avril suivant de la procédure de licenciement, que le fait de ne pas avoir cherché à polémiquer à la suite de la réception du courrier du 5 avril n’empêchait pas les dirigeants de l’association Prudis CGT d’invoquer ce courrier à l’appui d’un licenciement disciplinaire, sans rechercher si le fait que l’association Prudis ait déclaré par lettre du 8 avril qu’elle choisissait « de ne pas répondre » au courrier de M. B… du 5 avril ne la privait pas de la possibilité d’invoquer ensuite ce même courrier à l’appui d’un licenciement, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1121-1, L. 1132-2 et L. 1132-4 du code du travail ;

4) ALORS QU’après avoir relevé l’existence d’un réel combat d’idées et de positions sur l’évolution fixée par les instances confédérales sur la formation des conseillers prud’homaux, la cour d’appel a considéré que les manifestations d’opposition d’autres militants étaient sans effet sur le débat relatif au licenciement de M. B…, en soulignant que les courriers des 1er juin 2004 et 7 mars 2005 faisaient ressortir que le salarié refusait les décisions transmises par le nouveau directeur, M. N… L…, avec lequel il était en conflit dès le départ ; que dans son courrier du 1er juin 2004 adressé à M. Q… V…, alors secrétaire général de la CGT, M. B… avait fait part de son point de vue sur l’opportunité de choisir M. M… comme nouveau directeur de Prudis sans mentionner M. L… ni manifester une quelconque opposition à une désignation de celui-ci ; que le courrier du 7 mars 2005, adressé par M. B… à M. L…, témoigne d’une déception exprimée vivement devant le revirement de M. L… au sujet de l’embauche de M. M… en vue de renforcer l’activité « droits et libertés » de la CGT et qu’il n’y est fait état d’aucune décision de M. L… concernant le travail de M. B… au sein de l’Association Prudis qui se serait heurtée à une fin de non-recevoir de la part du directeur des études ; qu’en affirmant que les courriers des 1er juin 2004 et 7 mars 2005 exprimaient le refus par M. B… des décisions transmises par le nouveau directeur de l’association Prudis CGT, la cour d’appel a méconnu le principe de l’interdiction faite aux juges de dénaturer les documents de la cause ;

5) ALORS QUE M. B… faisait valoir que par un courrier en date du 25 mai 2005 il avait précisé à l’employeur qu’un de ces précédents courriers en date du 12 mai était de nature à répondre à l’attente du conseil d’administration quant à une déclaration de loyauté de sa part et que, s’il devait subsister un doute, il suggérait au conseil de procéder à son audition ; que cette demande d’audition par le conseil d’administration avait été soutenue le 26 mai par le SNPEFP-CGT ; que la lettre de M. B… du 12 mai réaffirmait sa « détermination à oeuvrer loyalement pour que Prudis améliore sa force de frappe au service de la CGT et des travailleurs » ; que cette démarche avait eu pour seule réponse l’envoi de la lettre de licenciement en date du 30 mai ; qu’en énonçant, pour conclure à l’impossibilité de poursuivre le contrat de travail de M. B…, que plusieurs tentatives avaient été engagées en interne et au sein même des instances syndicales pour tenter de désamorcer le conflit et qu’il y avait eu une opposition du salarié, sans répondre à ce moyen de nature à établir qu’il avait satisfait à la demande de l’employeur relative à une déclaration de loyauté, la cour d’appel a méconnu les exigences de l’article 455 du code de procédure civile.

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code du travail
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Cour de cassation, Chambre sociale, 13 février 2019, 17-15.928, Inédit