Conseil d'Etat, 10/ 1 SSR, du 23 décembre 1988, 75201, publié au recueil Lebon
Chronologie de l’affaire
Résumé de la juridiction
(1) Aux termes de l’article 3 de la loi du 28 décembre 1966 : "Le Gouvernement peut, pour assurer la défense des intérêts nationaux et par décret pris sur le rapport du ministre de l’économie et des finances : 1°) soumettre à déclaration, autorisation préalable ou contrôle … b) la constitution, le changement de consistance et la liquidation des avoirs français à l’étranger". En prohibant, par l’article 3 du décret du 24 novembre 1968, et sauf autorisation du ministre de l’économie et des finances, tous transferts ou opérations de change en France tendant à la constitution par un résident d’avoirs à l’étranger, le Gouvernement n’a pas excédé les pouvoirs que lui conférait la disposition précitée. Sur le fondement de la loi et du décret susrappelés, le ministre de l’économie et des finances a pu compétemment décider, par un arrêté du 24 mars 1982, d’abroger les dispositions de l’arrêté du 9 août 1973 par lesquelles son prédécesseur avait autorisé l’acquisition, par des résidents français, d’immeubles à l’étranger. (2), 60-01-02-01-01-03 M. M. et la société "Michel Martin", dont l’activité consistait notamment à vendre des résidences secondaires en Espagne, se prévalent du caractère prétendument anormal du préjudice subi par eux du fait des dispositions de l’arrêté du 24 mars 1982 abrogeant les dispositions de l’arrêté du 9 août 1973 par lesquelles avait été autorisé l’acquisition, par des résidents français, d’immeubles à l’étranger. La loi du 28 décembre 1966 a eu pour objet de restreindre le transfert des capitaux à l’étranger en vue de la protection de la monnaie. En l’absence de toute disposition législative en disposant expressément, les règlements légalement pris en application de cette législation ne sauraient engager la responsabilité de l’Etat.
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Chapitre trois- Conditions d'engagement de la responsabilité de l'administration Comme en droit civil, il existe trois conditions d'engagement de la responsabilité de l'administration : l'existence d'un préjudice, un lien de causalité entre le préjudice et le fait générateur et un fait générateur. Section I- Préjudice Il convient de déterminer quelle est l'étendue du droit à réparation et quelles sont les personnes qui sont titulaires de ce droit avant de définir quels caractères doit présenter le préjudice pour être réparé et comment est assurée la réparation de ce préjudice. §I- …
Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés les 27 janvier 1986 et 27 mai 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Michel Y…, demeurant … sur Marne (94500), et pour la société « Michel Y… », dont le syndic à la liquidation des biens est Me X…, et tendant à ce que le Conseil d'Etat : 1°) annule le jugement du 26 novembre 1985 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande d'indemnité à raison du préjudice subi du fait de l'interdiction d'achat d'immeubles à l'étranger par des résidents français, 2°) condamne l'Etat à …
Sur la décision
Référence : | CE, 10/ 1 ss-sect. réunies, 23 déc. 1988, n° 75201, Lebon |
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Juridiction : | Conseil d'État |
Numéro : | 75201 |
Importance : | Publié au recueil Lebon |
Type de recours : | Plein contentieux |
Décision précédente : | Tribunal administratif de Paris, 25 novembre 1985 |
Dispositif : | Rejet |
Identifiant Légifrance : | CETATEXT000007743614 |
Identifiant européen : | ECLI:FR:CESSR:1988:75201.19881223 |
Sur les parties
- Président : Mme Bauchet
- Rapporteur : M. Gerville-Réache
- Rapporteur public : Mme Leroy
- Parties : Martin et Société "Michel Martin"
Texte intégral
Vu la requête et le mémoire complémentaire enregistrés les 27 janvier 1986 et 27 mai 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Michel Y…, demeurant … sur Marne (94500), et pour la société « Michel Y… », dont le syndic à la liquidation des biens est Me X…, et tendant à ce que le Conseil d’Etat :
1°) annule le jugement du 26 novembre 1985 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande d’indemnité à raison du préjudice subi du fait de l’interdiction d’achat d’immeubles à l’étranger par des résidents français,
2°) condamne l’Etat à leur verser une indemnité de un million de francs avec intérêts de droit et capitalisation des intérêts,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu la loi n° 66-1006 du 28 décembre 1966 ;
Vu le décret n° 68-1021 du 24 novembre 1968 ;
Vu l’ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
– le rapport de M. Gerville-Réache, Conseiller d’Etat,
– les observations de Me Ryziger, avocat de M. Y…,
– les conclusions de Mme Leroy, Commissaire du gouvernement ;
Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article 3 de la loi du 28 décembre 1966 : « Le Gouvernement peut, pour assurer la défense des intérêts nationaux et par décret pris sur le rapport du ministre de l’économie et des finances : 1° soumettre à déclaration, autorisation préalable ou contrôle … b) La constitution, le changement de consistance et la liquidation des avoirs français à l’étranger » ; qu’en prohibant, par l’article 3 du décret du 24 novembre 1968, et sauf autorisation du ministre de l’économie et des finances, tous transferts ou opérations de change en France tendant à la constitution par un résident d’avoirs à l’étranger, le Gouvernement n’a pas excédé les pouvoirs que lui conférait la disposition précitée ; que, sur le fondement de la loi et du décret susrappelés, le ministre de l’économie et des finances a pu compétemment décider, par un arrêté du 24 mars 1982, d’abroger les dispositions de l’arrêté du 9 août 1973 par lesquelles son prédécesseur avait autorisé l’acquisition, par des résidents français, d’immeubles à l’étranger ; qu’ainsi les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le ministre de l’économie et des finances a commis une illégalité ;
Considérant, d’autre part, que M. Y… et la société « Michel Y… », dont l’activité consistait notamment à vendre des résidences secondaires en Espagne, se prévalent du caractère prétenduement anormal du préjudice subi par elles du fait des dispositions de l’arrêté du 24 mars 1982 ; que la loi du 28 décembre 1966 a eu pour objet de restreindre le transfert des capitaux à l’étranger en vue de la protection de la monnaie ; qu’en l’absence de toute disposition législative en disposant expressment, les règlements légalement pris en application de cette législation ne sauraient engager la responsabilité de l’Etat ;
Considérant enfin que le ministre de l’économie et des finances n’était, en tout état de cause, pas tenu de renouveler en 1983 les dérogations qu’il avait accordées au mois de juin 1982 aux requérants au titre des opérations en cours, sur le fondement du décret du 24 novembre 1968 ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que M. Michel Y… et la société « Michel Y… » ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande d’indemnité ;
Article ler : La requête de M. Michel Y… et de la société « Michel Y… » est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Michel Y…, au syndic de la société « Michel Y… » et au ministre d’Etat, ministre de l’économie, des finances et du budget.
Textes cités dans la décision
Imprimer ... Section III – Fait générateur Si la nature de la responsabilité administrative a longtemps été incertaine, il ne fait pas de doute qu'elle est aujourd'hui, en principe, une responsabilité pour faute et dans des cas de moins en moins exceptionnels une responsabilité sans faute. §I – Données historiques du problème Si l'arrêt Blanco touche à l'ensemble du droit administratif, tant pour les questions de fond que pour les questions de compétence, il concernait au premier chef un problème de responsabilité. Il résulte en effet de cet arrêt que la responsabilité des …