CEDH, Cour (deuxième section), AFFAIRE BURAK HUN c. TURQUIE, 15 décembre 2009, 17570/04

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Chronologie de l’affaire

Commentaires2

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CEDH · 15 décembre 2009

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Sur la décision

Référence :
CEDH, Cour (Deuxième Section), 15 déc. 2009, n° 17570/04
Numéro(s) : 17570/04
Type de document : Arrêt
Jurisprudence de Strasbourg : Bykov c. Russie ([GC], no 4378/02, §§ 88-93, 10 mars 2009

Ramanauskas c. Lituanie ([GC], no 74420/01, CEDH 2008

Teixeira de Castro c. Portugal, 9 juin 1998, Recueil des arrêts et décisions 1998 IV

Vanyan c. Russie, no 53203/99, §§ 46-47, 15 décembre 2005

Vlachos c. Grèce, no 20643/06, § 24, 18 septembre 2008
Niveau d’importance : Importance moyenne
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusions : Violation de l'article 6 - Droit à un procès équitable (Article 6 - Procédure pénale ; Article 6-1 - Procès équitable) ; Dommage matériel - demande rejetée (Article 41 - Lien de causalité ; Dommage matériel ; Satisfaction équitable) ; Préjudice moral - constat de violation suffisant (Article 41 - Préjudice moral ; Satisfaction équitable)
Identifiant HUDOC : 001-96228
Identifiant européen : ECLI:CE:ECHR:2009:1215JUD001757004
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Sur les parties

Texte intégral

DEUXIÈME SECTION

AFFAIRE BURAK HUN c. TURQUIE

(Requête no 17570/04)

ARRÊT

STRASBOURG

15 décembre 2009

DÉFINITIF

15/03/2010

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.


En l'affaire Burak Hun c. Turquie,

La Cour européenne des droits de l'homme (deuxième section), siégeant en une chambre composée de :

Françoise Tulkens, présidente,
Ireneu Cabral Barreto,
Vladimiro Zagrebelsky,
Danutė Jočienė,
Dragoljub Popović,
András Sajó,
Işıl Karakaş, juges,
et de Françoise Elens-Passos, greffière adjointe de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 24 novembre 2009,

Rend l'arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1.  A l'origine de l'affaire se trouve une requête (no 17570/04) dirigée contre la République de Turquie et dont un ressortissant de cet Etat, M. Burak Hun (« le requérant »), a saisi la Cour le 3 mai 2004 en vertu de l'article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2.  Le requérant est représenté par Me M. V. Dülger, avocat à Istanbul. Le gouvernement turc (« le Gouvernement ») est représenté par son agent.

3.  Le 16 décembre 2008, la présidente de la deuxième section a décidé de communiquer la requête au Gouvernement. Comme le permet l'article 29 § 3 de la Convention, il a en outre été décidé que la chambre se prononcerait en même temps sur la recevabilité et le fond de l'affaire.

EN FAIT

I.  LES CIRCONSTANCES DE L'ESPÈCE

4.  Le requérant est né en 1981.

A.  L'arrestation du requérant

5.  Le 15 mars 2001, dans le cadre d'une opération policière, une personne dénommée X, se faisant passer pour un consommateur, appela le requérant sur son téléphone portable et demanda s'il pouvait lui procurer quinze comprimés d'ecstasy. Le requérant accepta et prit contact avec une personne dénommée Ö.V. qui lui envoya par colis le stupéfiant demandé.

6.  Le 16 mars 2001, le requérant se rendit d'abord à l'agence du transporteur pour récupérer son colis puis retrouva le dénommé X dans sa voiture afin de procéder à la transaction. Il lui donna quinze comprimés d'ecstasy et reçut en contrepartie 300 000 000 d'anciennes livres turques (TRL) (soit environ 335 (euros) EUR à l'époque), pour lesquelles les numéros de série des billets avaient été relevés.

7.  Immédiatement après avoir réceptionné l'argent, le requérant fut arrêté en flagrant délit.

8.  Les policiers découvrirent sur l'intéressé 333 475 000 TRL (soit environ 375 EUR à l'époque), 200 dollars américains, neuf comprimés d'ecstasy et 0,42 gramme de cannabis.

B.  La garde à vue du requérant

9.  Les policiers demandèrent au requérant s'il souhaitait l'assistance d'un avocat. L'intéressé répondit explicitement par la négative au motif qu'il ne voulait pas que son père, M. Ediz Hun, député à l'époque des faits et acteur célèbre en Turquie, apprenne ce qui s'était passé. Il signa un formulaire lui rappelant ses droits, dont celui de garder le silence et de bénéficier de l'assistance d'un avocat.

10.  Le requérant passa aux aveux et reconnut les faits qui lui étaient reprochés. Il déclara vendre des produits stupéfiants pour pouvoir payer sa propre consommation.

11.  Les policiers relevèrent que l'intéressé avait un casier judiciaire vierge.

C.  Le rapport d'expertise relatif aux produits saisis sur le requérant

12.  Le 29 mars 2001, les experts près le laboratoire d'expertise criminelle d'Ankara rendirent leur rapport définitif, dans lequel ils affirmaient avoir trouvé dans les produits analysés des stupéfiants interdits par la loi, à savoir du tétrahydrocannabinole et de la méthylène-dioxy-méthylamphétamine, ainsi qu'un antalgique local appelé procaïne.

D.  L'acte d'accusation

13.  Par un acte d'accusation du 13 avril 2001, le procureur de la République reprocha au requérant l'acquisition et la vente de produits stupéfiants. Il requit sa condamnation en vertu de l'article 403/5 du code pénal.

14.  Une action pénale fut ainsi entamée devant la cour d'assises d'Ankara (« la cour d'assises ») à l'encontre du requérant.

E.  Le déroulement de la procédure

15.  A l'audience du 18 juin 2001, le requérant, assisté de ses avocats, revint sur sa déposition faite devant les policiers. Il reconnut la consommation des produits stupéfiants retrouvés sur lui mais en nia la vente.

16.  Lors de l'audience du 16 juillet 2001, les policiers qui avaient participé à l'opération furent entendus. Ils expliquèrent le déroulement de l'opération mais refusèrent de donner le nom de la personne qui avait agi en tant qu'« agent provocateur ».

17.  Le 3 janvier 2002, Ö.V. fut entendu sur commission rogatoire. Il nia avoir envoyé des stupéfiants au requérant.

18.  Au cours de l'audience du 18 février 2002, le procureur de la République présenta son réquisitoire, à l'issue duquel il requit la condamnation du requérant.

19.  Le 4 mars 2002, dans son mémoire en défense, l'avocat du requérant soutint que l'instruction pénale avait été défaillante notamment en raison de l'absence d'identification de l'agent provocateur.

20.  Par un arrêt du 6 mars 2002, la cour d'assises acquitta le requérant du chef d'accusation de vente de produits stupéfiants. Elle le condamna à une peine d'emprisonnement de dix mois, commuée en une peine d'amende de 1 423 656 000 TRL (soit environ 1 190 EUR à l'époque), pour consommation de produits stupéfiants.

21.  Le 25 juin 2002, la Cour de cassation cassa pour défaut de base légale l'arrêt attaqué.

22.  Le 27 mars 2003, la cour d'assises, statuant sur renvoi, se conforma à l'arrêt de la Cour de cassation et déclara l'intéressé coupable des faits qui lui étaient reprochés et le condamna à une peine d'emprisonnement d'un an et huit mois et à une peine d'amende de 59 318 000 TRL (soit environ 30 EUR à l'époque), en application de l'article 403/5 du code pénal.

23.  A l'appui de leur décision, les juges prirent notamment en compte les procès-verbaux de l'opération policière, les produits saisis, le rapport d'expertise légale, les mémoires en défense de l'accusé et les déclarations des témoins.

24.  Le 28 mars 2003, le requérant se pourvut en cassation contre cet arrêt de condamnation.

25.  Dans son mémoire en cassation du 22 avril 2003, l'avocat du requérant soutint notamment que la convocation de la personne qui avait agi en tant qu'agent provocateur était nécessaire, faute de quoi son témoignage ne pouvait selon lui être utilisé comme élément de preuve à charge.

26.  Par un arrêt du 3 novembre 2003, la Cour de cassation confirma l'arrêt du 27 mars 2003 en toutes ses dispositions, eu égard aux motifs invoqués par les juges de première instance ayant statué sur renvoi et au contenu du dossier.

27.  Le requérant, qui s'était entre-temps installé à l'étranger, ne purgea pas sa peine.

28.  Après l'entrée en vigueur de la loi no 5237 du 1er juin 2005 portant réforme du code pénal, la cour d'assises examina la question de savoir s'il était nécessaire de procéder à une adaptation de la condamnation du requérant.

29.  Par un arrêt du 15 juillet 2005, devenu définitif le 13 septembre 2005, la cour d'assises confirma la peine initialement prononcée contre le requérant mais décida de surseoir à l'exécution de cette peine.

II.  LE DROIT INTERNE ET INTERNATIONAL PERTINENT

30.  Le droit interne pertinent est décrit dans l'arrêt Ünel c. Turquie (no 35686/02, § 23, 27 mai 2008).

31.  Le droit international pertinent est décrit dans l'arrêt Ramanauskas c. Lituanie ([GC], no 74420/01, §§ 35-37, CEDH 2008).

EN DROIT

I.  SUR LES VIOLATIONS ALLÉGUÉES DE L'ARTICLE 6 §§ 1 et 3 c) et d) DE LA CONVENTION

A.  Sur la recevabilité

32.  Le requérant allègue avoir été incité à commettre une infraction par un « agent provocateur », et ce au mépris de son droit à un procès équitable garanti par l'article 6 § 1 de la Convention.

33.  Invoquant l'article 6 § 3 d) de la Convention, il soutient qu'il a été porté atteinte au principe de l'égalité des armes et que les droits de la défense ont été violés, au motif que, au cours du procès, ni les juges ni les parties n'ont interrogé l'agent provocateur impliqué dans l'affaire.

34.  Il se plaint également de n'avoir pas été assisté par un avocat lors de sa garde à vue, au mépris de l'article 6 § 3 c) de la Convention.

35.  Il allègue en outre que l'arrêt de cassation de la Cour de cassation et l'arrêt de condamnation de la cour d'assises d'Ankara n'étaient pas suffisamment motivés.

36.  Le Gouvernement ne s'exprime pas sur les conditions de recevabilité de la requête.

37.  La Cour note que les griefs du requérant ne sont pas manifestement mal fondés au sens de l'article 35 § 3 de la Convention. Elle relève par ailleurs qu'ils ne se heurtent à aucun autre motif d'irrecevabilité. Il convient donc de les déclarer recevables.

B.  Sur le fond

38.  Le requérant soutient qu'il a été incité à commettre une infraction par un agent provocateur, au mépris selon lui de son droit de ne pas s'incriminer lui-même, et que son droit à un procès équitable a été violé. Il invite la Cour à conclure à la violation de l'article 6 § 1 de la Convention en se référant à la jurisprudence suivie par elle dans ses arrêts Teixeira de Castro c. Portugal (9 juin 1998, Recueil des arrêts et décisions 1998‑IV) et Ramanauskas c. Lituanie ([GC], no 74420/01, CEDH 2008).

39.  Le Gouvernement combat cette thèse. Il fait valoir qu'après avoir pris connaissance d'activités régulières de vente de drogue par le requérant, la brigade des stupéfiants d'Ankara a initié des investigations qui se sont relevées concluantes. A cet égard, il est d'avis que l'appel à des mesures spéciales d'investigation dans le domaine de la lutte contre le trafic de stupéfiants est nécessaire face à l'ampleur de ce fléau. Il estime que la procédure pénale dirigée contre le requérant a été conduite dans le respect de la loi et notamment des droits de l'accusé prévus à l'article 6 § 1 de la Convention. Ainsi, selon le Gouvernement, l'intéressé a bénéficié de l'assistance d'un avocat tout au long de la procédure devant les juridictions nationales ; il aurait eu la possibilité de contester, dans le cadre d'une procédure contradictoire, les éléments de preuve recueillis lors de l'instruction ; sa condamnation aurait été fondée sur tout un ensemble d'éléments de preuve dont les procès-verbaux de l'opération policière, les produits saisis, le rapport d'expertise légale et les déclarations des témoins.

40.  Pour les principes généraux en la matière dégagés de sa jurisprudence, la Cour fait référence à ses arrêts Bykov c. Russie ([GC], no 4378/02, §§ 88-93, 10 mars 2009) et Ramanauskas (précité, §§ 49-61).

41.  Elle rappelle que si l'intervention d'agents infiltrés peut être tolérable dans la mesure où elle est clairement circonscrite et entourée de garanties, l'intérêt public ne saurait justifier l'utilisation d'éléments recueillis à la suite d'une provocation policière. Un tel procédé est susceptible de priver ab initio et définitivement l'accusé d'un procès équitable (voir, notamment, Vlachos c. Grèce, no 20643/06, § 24, 18 septembre 2008, Teixeira de Castro, précité, §§ 35-36 et 39, et Vanyan c. Russie, no 53203/99, §§ 46-47, 15 décembre 2005).

42.  Elle rappelle également qu'il y a provocation policière lorsque les agents impliqués – membres des forces de l'ordre ou personnes intervenant à leur demande – ne se limitent pas à examiner d'une manière purement passive l'activité délictueuse, mais exercent sur la personne qui en fait l'objet une influence de nature à l'inciter à commettre une infraction qu'autrement elle n'aurait pas commise, pour en rendre possible la constatation, c'est-à-dire en apporter la preuve et la poursuivre (Ramanauskas, précité, § 55).

43.  En l'espèce, la Cour observe qu'une personne dénommée X, intervenant dans le cadre d'une opération policière et se faisant passer pour un consommateur, a appelé le requérant sur son téléphone portable afin de lui demander s'il pouvait lui procurer des comprimés d'ecstasy ; que le requérant a accepté et qu'il s'est fait expédier les stupéfiants demandés ; que les policiers l'ont arrêté en flagrant délit au moment de la transaction (paragraphes 5 à 8 ci-dessus) ; que l'intéressé a par la suite été condamné pour acquisition et vente de produits stupéfiants (paragraphe 22 ci-dessus).

44.  La Cour est d'avis que les éléments constitutifs de l'infraction commise par le requérant, à savoir l'acquisition et la vente de produits stupéfiants, ont été provoqués par l'agent X. En effet, l'agent en question ne s'est pas limité à examiner d'une manière purement passive l'activité délictueuse de M. Hun, mais il l'a incité à commettre l'infraction en l'appelant sur son portable et en lui demandant de lui fournir un produit stupéfiant dont l'usage et la vente sont prohibés par la loi. Autrement dit, contrairement aux affirmations du Gouvernement, même si l'intéressé était potentiellement disposé à commettre une infraction, aucun élément objectif n'établissait, selon les éléments du dossier, qu'il eût mis sur pied une activité délictueuse avant l'intervention de l'agent X. A cet égard, la Cour note notamment que le requérant avait un casier judiciaire vierge et qu'il n'agissait pas en bande organisée. La petite quantité de drogue en cause en l'espèce ne se trouvait pas à son domicile. L'intéressé se l'est procurée chez un tiers à la demande de l'agent X (voir, dans le même sens, Teixeira de Castro, précité, § 38).

45.  La Cour relève également que, pour motiver la condamnation du requérant, les juridictions internes ont essentiellement tenu compte des procès-verbaux de l'opération policière, opération ayant impliqué le recours à l'intervention de l'agent X (paragraphe 23 ci-dessus).

46.  Tout en rappelant qu'elle a pour seule tâche, aux termes de l'article 19 de la Convention, d'assurer le respect des engagements résultant pour les Etats contractants de la Convention et qu'il ne lui appartient pas, en particulier, de connaître des erreurs de fait ou de droit prétendument commises par une juridiction interne, sauf si et dans la mesure où elles pourraient avoir porté atteinte aux droits et libertés sauvegardés par la Convention, la Cour considère en l'espèce que la condamnation du requérant a été principalement fondée sur les preuves recueillies au moyen de l'opération policière litigieuse. Or, selon les éléments du dossier et les observations du Gouvernement, ces preuves n'étaient pas confirmées par d'autres éléments décisifs (voir, a contrario, Bykov, précité, § 98).

47.  Tout en ayant à l'esprit l'importance et les difficultés du travail d'investigation de la police, la Cour estime, eu égard à ce qui précède, que les agissements de l'agent X ont eu pour effet de provoquer le requérant à commettre l'infraction pour laquelle il a été condamné et que rien n'indique que, sans son intervention, celle-ci aurait été commise ; compte tenu de cette intervention et de son utilisation dans la procédure pénale litigieuse, la Cour conclut que le procès du requérant a perdu le caractère équitable requis par l'article 6 de la Convention.

48.  Partant, il y a eu violation de l'article 6 § 1 de la Convention.

49.  En ce qui concerne les autres griefs du requérant, eu égard au constat de violation auquel elle est parvenue pour l'article 6 § 1 de la Convention (paragraphes 46-47 ci-dessus), la Cour estime avoir examiné la question juridique principale posée par la présente requête ; dès lors, elle considère qu'il ne s'impose plus de statuer séparément sur ces autres griefs (Kamil Uzun c. Turquie, no 37410/97, § 64, 10 mai 2007, et Ramanauskas, précité, §§ 79‑80).

II.  SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

50.  Reste la question de l'application de l'article 41 de la Convention. Le requérant réclame 50 000 EUR pour préjudice matériel et 10 000 EUR pour préjudice moral. Il demande également 13 035 EUR pour frais et dépens et fournit à titre de justificatif un décompte horaire.

51.  Le Gouvernement conteste ces prétentions.

52.  La Cour n'aperçoit pas de lien de causalité entre la violation constatée et le dommage matériel allégué et rejette cette demande. Par ailleurs, elle considère que, dans les circonstances de l'espèce, le constat de violation de l'article 6 § 1 de la Convention constitue en soi une satisfaction équitable suffisante pour le dommage moral allégué. Quant aux frais et dépens, compte tenu des documents en sa possession et de ses critères, la Cour estime raisonnable la somme de 1 500 EUR et l'accorde au requérant.

53.  Par ailleurs, la Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d'intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L'UNANIMITÉ,

1.  Déclare la requête recevable ;

2.  Dit qu'il y a eu violation de l'article 6 § 1 de la Convention ;

3.  Dit qu'il ne s'impose pas de statuer séparément sur le restant des griefs ;

4.  Dit que le constat d'une violation fournit en soi une satisfaction équitable suffisante pour le dommage moral subi par le requérant ;

5.  Dit

a)  que l'Etat défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois à compter du jour où l'arrêt sera devenu définitif en vertu de l'article 44 § 2 de la Convention, 1 500 EUR (mille cinq cents euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d'impôt par le requérant, pour frais et dépens, à convertir en livres turques au taux applicable à la date du règlement ;

b)  qu'à compter de l'expiration dudit délai et jusqu'au versement, ce montant sera à majorer d'un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

6.  Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 15 décembre 2009, en application de l'article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

              Françoise Elens-PassosFrançoise Tulkens
Greffière adjointePrésidente

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