CEDH, Comité des ministres, AFFAIRES CONCERNANT LA DETENTION IRREGULIERE DES MINISTRES DU CULTE DES TEMOINS DE JEHOVAH ET DES PROCEDURES INEQUITABLES D'INDEMNISATION ( TSIRLIS ET KOULOUMPAS c. GRECE , GEORGIADIS c. GRECE , ARRETS DU 29 MAI 1997 ), 22 décembre 2004, 19233/91 et autres

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CEDH, Comité des Ministres, 22 déc. 2004, n° 19233/91 et autres
Numéro(s) : 19233/91, 19234/91, 21522/93
Résolution : DH (2004) 82
Type de document : Résolution
Date d’introduction : 26 novembre 1991
Organisation mentionnée :
  • Comité des Ministres
Niveau d’importance : Importance faible
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusion : Informations fournies par le gouvernement concernant les mesures prises permettant d'éviter de nouvelles violations. Versement des sommes prévues dans l'arrêt.
Identifiant HUDOC : 001-68015
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Texte intégral

Résolution ResDH(2004)82

relative aux arrêts de la Cour européenne des Droits de l'Homme
dans affaires concernant la détention irrégulière des ministres du culte des témoins de Jéhovah et des procédures inéquitables d'indemnisation (Tsirlis et Kouloumpas contre la Grèce, Georgiadis contre la Grèce, arrêts du 29 mai 1997)

(adoptée par le Comité des Ministres le 22 décembre 2004,
lors de la 906e réunion des Délégués des Ministres)

Le Comité des Ministres, en vertu de l'ancien article 54 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales (ci-après dénommée «la Convention»),

Vu les arrêts de la Cour européenne des Droits de l'Homme dans les affaires Tsirlis et Kouloumpas, et Georgiadis rendus le 29 mai 1997 et transmis à la même date au Comité des Ministres ;

Rappelant qu'à l'origine de ces affaires se trouvent des requêtes (Nos 19233/91, 19234/91 et 21522/93) dirigée contre la Grèce, introduites devant la Commission européenne des Droits de l'Homme respectivement le 26 novembre 1991 et le 27 février 1993 en vertu de l'ancien article 25 de la Convention, par M. Dimitrios Tsirlis, M. Timotheos Kouloumpas et M. Anastassios Georgiadis, tous ressortissants grecs et ministres du culte des témoins de Jéhovah, et que la Commission a déclaré recevables les griefs concernant en particulier d'une part, l'irrégularité de la détention de M. Tsirlis et de M. Kolumpas suite à leur condamnation pour avoir refusé d'effectuer leur service militaire en leur qualité de ministres d'une "religion reconnue", d'autre part l'iniquité de la procédure en réparation introduite par les trois requérants devant les tribunaux militaires afin d'obtenir une indemnisation au titre de cette détention irrégulière ;

Rappelant que les affaires ont été portées devant la Cour européenne par la Commission européenne des Droits de l'Homme le 17 avril 1996;

Considérant que dans ses arrêts du 29 mai 1997 la Cour à l'unanimité a dit notamment :

-  qu'il y avait eu violation de l'article 5, paragraphe 1, de la Convention dans l'affaire Tsirlis et Kouloumpas en raison de la détention irrégulière des requérants ordonnée par les tribunaux militaires contrairement à la jurisprudence clairement bien établie de la Cour Suprême Administrative exemptant du service militaire les ministres d'une religion connue, ainsi que de l'article 5, paragraphe 5, de la Convention en raison de l'absence d'indemnisation au titre de cette détention irrégulière;

-  qu'il y avait eu violation de l'article 6, paragraphe 1, de la Convention dans l'affaire Georgiadis en raison du refus des tribunaux militaires, par une décision prise proprio motu, sans audience et motivation adéquate, de fournir au requérant une indemnisation pour sa présumée détention irrégulière ;

- que l'Etat défendeur devait verser aux requérants, dans les trois mois, certains montants au titre de la satisfaction équitable (voir détails dans l'annexe à la présente résolution), que ces montants seraient à majorer d'un intérêt simple de 6% l'an à compter de l'expiration dudit délai et jusqu'au versement ;

Vu les Règles adoptées par le Comité des Ministres relatives à l'application de l'article 46, paragraphe 2, de la Convention telle qu'amendée par le Protocole no 11, règles qui s'appliquent par décision du Comité des Ministres aux affaires relevant de l'ancien article 54 ;

Ayant invité le gouvernement de la Grèce à l'informer des mesures prises à la suite des arrêts de la Cour européenne, eu égard à l'obligation qu'a la Grèce de s'y conformer selon l'ancien article 53 et l'article 46 de la Convention ;

Considérant que lors de l'examen de ces affaires par le Comité des Ministres, le gouvernement de l'Etat défendeur a donné à celui-ci des informations sur les mesures d'ordre individuel prises afin d'effacer les conséquences des violations et sur les mesures d'ordre général prises afin d'éviter de nouvelles violations semblables à celle constatée dans les présents arrêts (voir en annexe) ;

S'étant assuré que le gouvernement de la Grèce avait versé aux requérants le 26 juin et le 29 août 1997, dans les délais impartis, les sommes prévues au titre de la satisfaction équitable dans les arrêts de la Cour européenne du 29 mai 1997 (voir détails en annexe) ;

Déclare, après avoir examiné les informations fournies par le Gouvernement de la Grèce, qu'il a rempli ses fonctions en vertu de l'ancien article 54 de la Convention dans les présentes affaires.

Annexe à la Résolution ResDH(2004)82

Informations présentées par la gouvernement de la Grèce

durant l'examen des affaires Tsirlis et Kouloumpas, et Georgiadis

par le Comité des Ministres

I.Paiement de la satisfaction équitable

Affaire

Requête no

Date de l'arrêt

Montants accordés par la Cour

Délai du paiement

Date du paiement

Tsirlis et Kouloumpas

no. 19233/91; 19234/91

29/05/1997

Dommages pécuniaires et non pécuniaires :

Tsirlis : 8 millions de drachmes ;

Kouloumpas : 70 000 drachmes

Frais et dépens (somme globale) :

2 millions de drachmes

29/08/1997

26/06/1997

Georgiadis

21522/93

29/05/1997

Frais et dépens : 750 000 drachmes

29/08/1997

29/08/1997

II.Mesures de caractère individuel visant à permettre la restitutio in integrum

Dans l'affaire Tsirlis et Kouloumpas, la Cour européenne a accordé aux requérants, pour leur détention illégale, une satisfaction équitable couvrant à la fois leurs préjudices matériel et moral. Aucune autre mesure ne s'imposait donc.

Dans l'affaire Georgiadis, où la Cour européenne a conclu à une violation de l'article 6, paragraphe 1, en raison de l'iniquité de la procédure interne, s'est posée la question de la réouverture de cette procédure aux fins d'indemnisation adéquate du requérant.

Le 19 décembre 2000 a été promulguée la loi 2865/2000 portant amendement au Code de procédure pénale et autorisant la réouverture de la procédure pénale interne dans les affaires où la Cour européenne a conclu à une violation du droit à un procès équitable ou d'une disposition juridique de fond (nouvel Article 525, paragraphe 1(5), du Code). Cette nouvelle disposition ne s'applique, cependant, qu'aux personnes condamnées et ne permet pas la réouverture dans les affaires des trois requérants, la condamnation de ces derniers ayant été cassée par les tribunaux militaires compétents respectivement en 1991 et 1992.

Le 11 octobre 2002, le Code de procédure pénale a été de nouveau amendé par la loi 3060/2002 portant introduction du nouvel article 525A, qui autorise toutes les personnes acquittées – dont les requérants – à demander la réouverture de la procédure interne pour être indemnisés de leur détention illégale dans les affaires où la Cour européenne a conclu à une violation de la Convention en raison du caractère inéquitable de la procédure interne. Par suite de ce dernier amendement, M. Georgiadis a obtenu la réouverture de la procédure pénale incriminée aux fins d'indemnisation pour sa détention afin d'effacer les conséquences de la violation établie par la Cour européenne dans son affaire.

III. Mesures de caractère général

Prévention de la détention illégale

En ce qui concerne le problème de la détention illégale de ministres du culte des Témoins de Jéhovah soulevé par les présentes affaires, le gouvernement rappelle que cette violation a été causée par le fait qu'au début des années quatre vingt dix, les autorité militaires n'avaient pas reconnu le droit de ces personnes à être exemptées du service militaire en tant que ministres du culte d'une « religion connue », conformément à la jurisprudence de la Cour administrative suprême de Grèce. A l'issue de la diffusion large des arrêts de la Cour européenne (voir ci-dessous), la pratique des autorités militaires en la matière a été modifiée et alignée sur la jurisprudence de la Cour administrative suprême aux termes de laquelle aucun ministre du culte des Témoins de Jéhovah n'est tenu d'accomplir le service militaire. Par conséquent, le problème de la détention des ministres du culte des Témoins de Jéhovah pour refus d'exécuter les ordres de l'autorité militaire n'existe plus.

Réformes constitutionnelles et législatives assurant une indemnisation suffisante pour détention illégale

Pour ce qui est des violations de l'article 5, paragraphe 5, et de l'article 6, paragraphe1, établies par la Cour européenne, elles résultaient en grande partie de l'application des dispositions du Code de procédure pénale alors en vigueur, à savoir :

-l'article 535, paragraphe 1, aux termes duquel l'Etat n'était tenu en aucun cas de payer une indemnité si la personne concernée s'était rendue responsable de sa détention intentionnellement ou par excès de négligence ;

-l'article 536, paragraphes 1 et 2, aux termes desquels les tribunaux étaient habilités à se prononcer proprio motu sur la question d'une indemnisation pour détention illégale sans tenir d'audience et sans motivation suffisante.

A la suite des arrêts de la Cour européenne, la Grèce a adopté des réformes constitutionnelles et statutaires en vue de trouver une solution à ces problèmes.

En ce qui concerne l'absence de motivation dans les décisions judiciaires, l'article 93, paragraphe 3, de la Constitution a été amendé en avril 2001 de manière à imposer explicitement que les décisions judiciaires soient motivées par une argumentation approfondie et à permettre au législateur de prévoir des sanctions en cas de non-respect de cette règle.

S'agissant de l'équité de la procédure, en vertu d'une nouvelle loi (2915/2001) portant amendement des articles 535 et 536 du Code de procédure pénale, les nouvelles dispositions n'excluent plus la possibilité d'une indemnisation dans les affaires de détention dues à l'« excès de négligence » du détenu et astreignent les juridictions pénales à motiver leurs arrêts après avoir entendu les personnes concernées et le ministère public.

Ces nouvelles dispositions, jointes à l'effet direct de la Convention et des arrêts de la Cour européenne en droit grec (voir, en particulier, la Résolution ResDH(99)714 relative à l'affaire Papageorgiou contre Grèce et la Résolution ResDH(2004)2 dans l'affaire Agoudimos and Cefallonian Sky Shipping Co. contre Grèce), devraient empêcher toute nouvelle violation analogue de la Convention.

Publication et diffusion des arrêts

L'arrêt de la Cour européenne dans l'affaire Tsirlis et Kouloumpas a été diffusé auprès de tous les Présidents et procureurs des tribunaux militaires de Grèce, afin d'attirer leur attention sur leurs obligations découlant de la Convention. De plus, il a été publié dans Diki, 29/1998 (p. 915) et a fait l'objet d'un commentaire dans Poiniki Dikaiosyni, 6/1998) (p. 665), deux journaux très lus par les avocats et les juges. L'arrêt rendu dans l'affaire Georgiadis a été diffusé par circulaire du ministère de la Défense auprès des Présidents et procureurs des tribunaux militaires, ainsi que des bureaux de recrutement de tous le pays, et transmis – par circulaire du ministère de la Justice – au Président et au Procureur de la Cour de cassation, ainsi qu'aux Présidents et procureurs des cours d'appel et des tribunaux d'instance.

IV.Conclusion

Le gouvernement considère qu'eu égard aux mesures d'ordre individuel et général susmentionnées, la Grèce a satisfait à ses obligations découlant de l'ancien article 53 (nouvel article 46, paragraphe 1) de la Convention en supprimant les conséquences des violations établies ainsi qu'en prévenant toute réédition de violation similaire.

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Textes cités dans la décision

  1. Constitution du 4 octobre 1958
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