Tribunal administratif de Grenoble, 4ème chambre, 30 décembre 2022, n° 2100840

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Grenoble, 4e ch., 30 déc. 2022, n° 2100840
Juridiction : Tribunal administratif de Grenoble
Numéro : 2100840
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Grenoble, 29 décembre 2014
Dispositif : Satisfaction partielle
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 8 février 2021 et le 29 août 2022, M. A C, représenté par Me Vigneron, demande au tribunal :

— d’annuler la décision du 25 novembre 2020 par laquelle le préfet de l’Isère a refusé oralement d’enregistrer sa demande de titre de séjour ;

— d’enjoindre au préfet d’enregistrer sa demande de titre de séjour dans un délai de deux jours, de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour avec autorisation de travail dans le même délai et d’assortir ces injonctions d’une astreinte de 200 euros par jour de retard ;

— de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 200 euros hors taxes qui sera versée à son conseil au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

— l’auteur de l’acte n’était pas compétent ;

— la décision n’est pas motivée ;

— le préfet ne pouvait refuser d’enregistrer sa demande de titre de séjour pour défaut de passeport ou en l’absence d’attestation d’hébergement ;

— son dossier étant complet le préfet était tenu de l’enregistrer et de lui délivrer un récépissé ;

— le refus de titre de séjour n’a pas fait l’objet d’un examen de sa situation, a été rendu sans saisine du collège des médecins et est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 30 juin 2022, le préfet de l’Isère conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

M. C a été admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par une décision du 29 mars 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

— la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ;

— le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Le rapport de Mme Bailleul, premier conseiller, a été entendu au cours de l’audience publique, les parties n’étant ni présentes ni représentées.

Considérant ce qui suit :

1. M. C, ressortissant congolais né en juin 1945, est entré en France en 2012 où il a enregistré une demande d’asile. Sa demande ayant été rejetée, il a fait l’objet d’une mesure d’éloignement le 14 avril 2014 dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Grenoble du 30 décembre 2014. Le 8 juin puis le 25 novembre 2020, il s’est rendu en préfecture pour y enregistrer une demande de titre de séjour en qualité d’étranger malade. Il demande, dans la présente instance, l’annulation de la décision du 25 novembre 2020 par laquelle le préfet de l’Isère a refusé oralement d’enregistrer sa demande de titre de séjour et de lui délivrer un récépissé.

Sur les conclusions aux fins d’annulation :

2. Aux termes de l’article R. 311-1 alinéa 1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée : « Tout étranger, âgé de plus de dix-huit ans ou qui sollicite un titre de séjour en application de l’article L. 311-3, est tenu de se présenter () à la préfecture ou à la sous-préfecture, pour y souscrire une demande de titre de séjour du type correspondant à la catégorie à laquelle il appartient ». Selon l’alinéa 1 de l’article R. 311-2-2 du même code : « L’étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d’un titre de séjour présente les documents justifiant de son état civil et de sa nationalité (). La délivrance du premier récépissé et l’intervention de la décision relative au titre de séjour sollicité sont subordonnées à la production de ces documents. ».

3. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes de l’attestation circonstanciée rédigée le 4 décembre 2020 par la présidente de l’association « cœurs 2 Gre » accompagnant le requérant, que M. C, ressortissant congolais né en juin 1945, s’est présenté en préfecture le 25 novembre 2020 muni d’un extrait d’acte de naissance. Dans ces conditions, le préfet qui ne conteste pas que le dossier de l’intéressé comportait les autres pièces nécessaires à l’instruction de sa demande de titre de séjour en qualité d’étranger malade, était tenu d’enregistrer la demande de ce dernier.

4. Il résulte de ce qui précède que la décision du 25 novembre 2020 par laquelle le préfet de l’Isère a refusé d’enregistrer la demande de titre de séjour de M. C doit être annulée sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête.

Sur les conclusions aux fins d’injonction :

5. Aux termes de l’article L. 425-9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile auparavant codifié au 11° de l’article L. 313-11 de ce code : « L’étranger, résidant habituellement en France, dont l’état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l’offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d’un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention » vie privée et familiale « d’une durée d’un an. La condition prévue à l’article L. 412-1 n’est pas opposable. La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l’autorité administrative après avis d’un collège de médecins du service médical de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d’Etat. () ». Selon l’article R. 425-11 du même code : « Pour l’application de l’article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention »vie privée et familiale« au vu d’un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l’Office français de l’immigration et de l’intégration. / L’avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l’immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d’une part, d’un rapport médical établi par un médecin de l’office et, d’autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d’un traitement approprié dans le pays d’origine de l’intéressé. () » L’article R. 425-12 de ce code dispose que : « Le rapport médical mentionné à l’article R. 425-11 est établi par un médecin de l’Office français de l’immigration et de l’intégration à partir d’un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l’ordre, dans les conditions prévues par l’arrêté mentionné au deuxième alinéa du même article. () / Sous couvert du directeur général de l’Office français de l’immigration et de l’intégration le service médical de l’office informe le préfet qu’il a transmis au collège de médecins le rapport médical. En cas de défaut de présentation de l’étranger lorsqu’il a été convoqué par le médecin de l’office ou de production des examens complémentaires demandés dans les conditions prévues au premier alinéa, il en informe également le préfet. Dans ce cas le récépissé de demande de première délivrance d’un titre de séjour prévu à l’article R. 431-12 n’est pas délivré. Lorsque l’étranger dépose une demande de renouvellement de titre de séjour, le récépissé est délivré dès la réception, par le service médical de l’office, du certificat médical mentionné au premier alinéa. () / Le demandeur dispose d’un délai d’un mois à compter de l’enregistrement de sa demande en préfecture pour transmettre à l’Office et de l’intégration le certificat médical mentionné au premier alinéa. Lorsque la demande est fondée sur l’article L. 431-2, le certificat médical est transmis dans le délai mentionné à ce même article ».

6. Il résulte des dispositions de l’article R. 431-12 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile qu’hormis le cas d’une demande à caractère abusif ou dilatoire, l’autorité administrative chargée d’instruire une demande de titre de séjour ne peut refuser de l’enregistrer et de délivrer le récépissé y afférent, que si le dossier présenté à l’appui de cette demande est incomplet. Toutefois, dans l’hypothèse d’une première demande de titre de séjour en qualité d’étranger malade, la délivrance du récépissé est différée à la date de transmission du rapport médical établi par un médecin de l’Office français de l’immigration et de l’intégration au collège des médecins de l’Office, sous réserve que l’étranger se présente aux convocations du médecin de l’office et produise les examens complémentaires demandés.

7. L’exécution du présent jugement implique, sous réserve de modifications dans les circonstances de droit et de fait à la date du jugement, qu’il soit enjoint au préfet d’enregistrer la demande de titre de séjour de M. C dans un délai de quinze jours. Il n’y a pas lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte.

8. Le préfet délivrera à M. C le récépissé de demande de première délivrance d’un titre de séjour sous les conditions énoncées au point 6 tenant au respect des formalités incombant au demandeur. Toutefois, il résulte des dispositions de l’article R. 431-14 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que le récépissé délivré lors d’une demande première délivrance de titre de séjour présentée en application de l’article L. 425-9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile n’autorise pas son titulaire à travailler. Par suite, les conclusions aux fins d’injonction présentées à ce titre par le requérant ne peuvent qu’être rejetées.

9. M. C a obtenu le bénéfice de l’aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, et sous réserve que Me Vigneron, avocate de M. C, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l’État, de mettre à la charge de ce dernier le versement à Me Vigneron de la somme de 1 000 euros.

D E C I D E :

Article 1er  :La décision du 25 novembre 2020 par laquelle le préfet de l’Isère a refusé d’enregistrer la demande de titre de séjour de M. C est annulée.

Article 2  :Il est enjoint au préfet de l’Isère d’enregistrer dans un délai de quinze jours la demande de titre de séjour de M. C et, sous réserve du respect des formalités incombant à ce dernier, qu’il lui délivre un récépissé de demande de titre de séjour.

Article 3  :L’Etat versera à Me Vigneron une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette dernière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l’Etat.

Article 4  :Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5  :Le présent jugement sera notifié à M. A C, à Me Vigneron et au préfet de l’Isère.

Délibéré après l’audience du 15 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pfauwadel, président,

Mme B et Mme D, assesseurs.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 décembre 202Le rapporteur,

C. B

Le président,

T. Pfauwadel

La greffière,

C. Billon

La République mande et ordonne au préfet de l’Isère en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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