Tribunal administratif de Nantes, 4ème chambre, 30 décembre 2022, n° 1911523

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Nantes, 4e ch., 30 déc. 2022, n° 1911523
Juridiction : Tribunal administratif de Nantes
Numéro : 1911523
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 8 septembre 2023

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 21 octobre 2019, M. A C, représenté par Me Vaubois, demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision du 20 août 2019 par laquelle le ministre de l’intérieur a confirmé la décision du préfet d’Ille-et-Vilaine ajournant à deux ans sa demande de naturalisation ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— il n’est pas établi que la décision attaquée a été signée par une autorité compétente ;

— la décision attaquée est entachée d’erreur manifeste d’appréciation au regard de l’ancienneté des faits reprochés ;

— elle méconnaît l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 juillet 2020, le ministre de l’intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

— le code civil ;

— le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

— le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Le rapport de Mme B a été entendu au cours de l’audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A C, ressortissant de la République centrafricaine, a sollicité l’acquisition de la nationalité française. Par une décision du 31 janvier 2019, la préfète d’Ille-et-Vilaine a ajourné sa demande à deux ans. Saisi du recours préalable obligatoire prescrit par le décret du 30 décembre 1993, le ministre de l’intérieur a confirmé cet ajournement par une décision du 20 août 2019. M. C demande au tribunal l’annulation de cette décision.

2. En premier lieu, par un arrêté du 9 août 2018, publié au Journal officiel de la République française du 11 août 2018, M. D E, signataire de la décision attaquée, a été reconduit dans ses fonctions de sous-directeur de l’accès à la nationalité française à la direction de l’accueil, de l’accompagnement des étrangers et de la nationalité au sein de la direction générale des étrangers du ministère de l’intérieur, pour une durée deux ans à compter du 28 août 2018. Conformément aux dispositions de l’article 1er du décret n° 2005-850 du

27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du gouvernement, les

sous-directeurs peuvent signer au nom du ministre l’ensemble des actes relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité. Par suite, M. C n’est pas fondé à soutenir que la décision attaquée serait entachée d’incompétence.

3. En deuxième lieu, aux termes de l’article 21-15 du code civil : « Hors le cas prévu à l’article 21-14-1, l’acquisition de la nationalité française par décision de l’autorité publique résulte d’une naturalisation accordée par décret à la demande de l’étranger ». Aux termes de l’article 48 du décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 : « () / Si le ministre chargé des naturalisations estime qu’il n’y a pas lieu d’accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l’ajournement en imposant un délai ou des conditions () ». En vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l’intérêt d’accorder la nationalité française à l’étranger qui la sollicite. Dans le cadre de cet examen d’opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant.

4. Il est constant que M. C a été l’auteur de faits de circulation d’un véhicule terrestre à moteur sans assurance le 5 mai 2011 qui ont donné lieu à une condamnation à 500 euros d’amende et à une suspension de permis de conduire pendant six mois par le tribunal correctionnel de Rennes le 7 juin 2011. Si M. C soutient que, depuis lors, il s’est amendé et que ce fait présente un certain caractère d’ancienneté, il n’en conteste pas la matérialité. Ainsi, au regard du caractère non dénué de toute gravité et non exagérément ancien de ce fait et à la circonstance que le requérant a été l’auteur de faits similaires, ayant également donné lieu à condamnation en 2007 et 2008, le ministre de l’intérieur a pu, eu égard au large pouvoir d’appréciation dont il dispose pour accorder la naturalisation à l’étranger qui la sollicite, pour ce seul motif qui suffit à justifier la décision attaquée, ajourner à deux ans la demande de naturalisation de M. C sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation.

5. Par ailleurs, il appartient à M. C, qui se prévaut d’une bonne intégration sociale et professionnelle en France où résident ses trois enfants mineurs, de formuler, s’il ne l’a déjà fait, une nouvelle demande de naturalisation, le délai d’ajournement ayant expiré.

6. En troisième et dernier lieu, la décision par laquelle est ajournée une demande de naturalisation n’est pas, par nature, susceptible de porter atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale. Ainsi, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaît ce droit, garanti par les stipulations de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, doit être écarté comme inopérant.

7. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d’annulation présentées par M. C doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions présentées en application de l’article L. 761-1 code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. F et au ministre de l’intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l’audience du 9 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Livenais, président,

M. Huin, premier conseiller,

Mme Thierry, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 décembre 2022.

La rapporteure,

S. BLe président,

Y. LIVENAIS

La greffière,

C. MICHAULT

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

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