Tribunal administratif de Rennes, 30 décembre 2019, n° 1905847

  • Offre·
  • Prix·
  • Trafic·
  • Autoroute·
  • Critère·
  • Sociétés·
  • Pouvoir adjudicateur·
  • Notation·
  • Technique·
  • Candidat

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
TA Rennes, 30 déc. 2019, n° 1905847
Juridiction : Tribunal administratif de Rennes
Numéro : 1905847

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF db/pc

DE RENNES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE N° 1905847 ___________

SOCIÉTÉ AUTOROUTES TRAFIC AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS ___________
M. David X Rapporteur Le juge des référés ___________

Audience du 27 décembre 2019 Lecture du 30 décembre 2019 ___________

54-03-05 D

Vu la procédure suivante :

Par ordonnance du 17 décembre 2019, le juge des référés, avant de statuer sur les conclusions de la requête présentée par la société Autoroutes Trafic tendant, sur le fondement de l’article L. 551-1 du code de justice administrative, à l’annulation de la procédure de passation du marché public engagée par la direction interdépartementale des routes Ouest (DIR Ouest) pour la fourniture en temps réel et en temps différé de données de vitesse issues de la localisation GNSS des véhicules circulant sur le réseau routier de la DIR Ouest et de ses partenaires, a enjoint à la DIR Ouest de communiquer à la société Autoroutes Trafic, avant le 20 décembre à 14 heures, avec copie au juge des référés, le montant du prix global de l’offre de la société attributaire.

Par un mémoire, enregistré le 18 décembre 2019, la DIR Ouest a communiqué le montant de l’offre de la société attributaire PTV France qui s’élève à 2 525,01 euros hors taxes.

Par un mémoire, enregistré le 23 décembre 2019, la société Autoroutes Trafic a conclu aux mêmes fins que précédemment et, en outre, a modifié ses demandes présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative en sollicitant que soit mise à la charge de l’État et de la société PTV la somme de 5 000 euros chacun.

Elle soutient, outre ses précédentes écritures, que :

- en l’absence de communication des éléments d’appréciation du critère technique et de la note qui lui a été attribuée à ce titre, un manquement au principe de transparence persiste ;

- les informations fournies aux candidats étaient insuffisantes pour leur permettre d’élaborer leur offre financière : en premier lieu, ni l’avis d’appel public à concurrence, ni aucun autre document du dossier de consultation des entreprises ne contient les éléments, à titre indicatif ou prévisionnel, sur les quantités estimatives du marché ; elle a été lésée puisque cela l’a conduite à présenter une offre onéreuse ; en second lieu, le détail quantitatif estimatif (DQE)



N° 1905847 2

fourni n’est pas représentatif des commandes futures, ce qu’a reconnu la DIR Ouest lors de l’audience du 12 décembre 2019 ; une quantité d’une unité a été indiquée pour les prix 400.8 et 400.17 alors que des dizaines voire des centaines de tronçons vont être commandés pour couvrir les zones de Nantes et Rennes ; l’hypothèse retenue par la société attributaire pour calculer ses prix en a tenu compte, ce qui l’a avantagée alors que rien n’indiquait qu’il fallait prendre particulièrement en compte ces deux lignes ; les offres ont été faussées en l’absence d’indications représentatives des quantités du marché ;

- le prix de l’offre retenue confirme son caractère anormalement bas ; l’écart avec l’offre classée en 2ème position est de 236 % et l’écart avec l’offre classée en 3ème position est de 3 214 % ; la seule fourniture du sous-détail des prix était insuffisante pour justifier de tels écarts ; le montant de l’offre retenue ne permet pas de réaliser les prestations demandées qui contiennent notamment deux prestations d’ingénierie et 28 études de trafic en temps différé ;

- la méthode de notation du critère prix est irrégulière : compte tenu du montant de l’offre retenue, toute offre supérieure à 5 050 euros se voyait attribuer la note de 0 au titre de ce critère ; une méthode linéaire aurait permis d’aboutir à un autre classement final, prenant en compte le critère technique ; la méthode retenue n’aboutit pas nécessairement à la sélection de l’offre économiquement la plus avantageuse.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics ;

- le décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Le président du tribunal a désigné M. X, premier conseiller, pour statuer sur les demandes de référés.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

- le rapport de M. X, juge des référés,

- les observations de Me Lafay, représentant la société Autoroutes Trafic qui a repris et développé ses écritures en insistant notamment sur l’absence d’éléments de nature à justifier la manière dont a été apprécié le critère technique, la nécessité d’une procédure de détection d’une offre anormalement basse au regard du prix proposé par l’attributaire, l’absence d’évaluation des besoins et d’indications représentatives des quantités du marché et la lésion qui en a résulté, sur le caractère contestable du constat d’huissier produit par l’attributaire et le caractère peu pertinent de la comparaison opérée avec le marché relatif aux données de trafic du réseau routier d’Ile de France, et sur le prix proposé au titre de la prestation annexe ;

- les observations de Me Favain, représentant la société PTV France, qui a repris et développé ses précédentes écritures, en ajoutant que l’absence d’indication quant à la valeur estimée n’avait pas été susceptible de léser la société requérante, que le détail quantitatif estimatif présentait nécessairement un caractère fictif, qu’il n’a jamais été indiqué que les prestations correspondant aux prix 400.8 et 400.17 étaient déterminantes, que le caractère compétitif de son offre résultait de sa stratégie consistant à acheter des données de trafic déjà traitées auprès d’un fournisseur qui est le leader mondial dans le domaine, ce qui lui permet ensuite de fournir des données sans exposer de coût supplémentaire et de s’adapter au plus juste



N° 1905847 3

aux besoins de l’administration, et que le prix proposé au titre de la prestation annexe avait tenu compte d’un prix supérieur à 350 euros HT par journée d’ingénierie.

La préfète d’Ille-et-Y n’était ni présente ni représentée.

La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience.

Considérant ce qui suit :

Sur le moyen tiré du non-respect de l’article 99 du décret du 25 mars 2016 :

1. Suite à l’ordonnance du 17 décembre 2019 visée ci-dessus, la DIR Ouest a communiqué, le 18 décembre 2019, le prix de l’offre de la société PTV France qu’elle a retenue qui s’élève à 2 525.01 euros HT. Compte tenu de cette information et des autres informations dont elle a eu connaissance, ainsi que rappelé dans les motifs de l’ordonnance du 17 décembre 2019, la société Autoroutes Trafic n’est plus fondée à invoquer la méconnaissance de l’article 99 du décret du 25 mars 2016.

Sur le moyen tiré du caractère anormalement bas de l’offre retenue :

2. Aux termes de l’article 53 de l’ordonnance du 23 juillet 2015 : « Lorsqu’une offre semble anormalement basse, l’acheteur exige que l’opérateur économique fournisse des précisions et justifications sur le montant de son offre. / Si, après vérification des justifications fournies par l’opérateur économique, l’acheteur établit que l’offre est anormalement basse, il la rejette dans des conditions fixées par voie réglementaire. / L’acheteur met en œuvre tous moyens pour détecter les offres anormalement basses lui permettant de les écarter. » Aux termes de l’article 60 du décret du 25 mars 2016 : « I. – L’acheteur exige que le soumissionnaire justifie le prix ou les coûts proposés dans son offre lorsque celle-ci semble anormalement basse eu égard aux travaux, fournitures ou services, y compris pour la part du marché public qu’il envisage de sous-traiter. / Peuvent être prises en considération des justifications tenant notamment aux aspects suivants : 1° Le mode de fabrication des produits, les modalités de la prestation des services, le procédé de construction ; 2° Les solutions techniques adoptées ou les conditions exceptionnellement favorables dont dispose le soumissionnaire pour fournir les produits ou les services ou pour exécuter les travaux ; 3° L’originalité de l’offre ; 4° La règlementation applicable en matière environnementale, sociale et du travail en vigueur sur le lieu d’exécution des prestations ; 5° L’obtention éventuelle d’une aide d’Etat par le soumissionnaire. II. – L’acheteur rejette l’offre : 1° Lorsque les éléments fournis par le soumissionnaire ne justifient pas de manière satisfaisante le bas niveau du prix ou des coûts proposés ; 2° Lorsqu’il établit que celle-ci est anormalement basse parce qu’elle contrevient aux obligations applicables dans les domaines du droit de l’environnement, social et du travail établies par le droit français, le droit de l’Union européenne, la ou les conventions collectives ou par les dispositions internationales en matière de droit de l’environnement, social et du travail figurant sur une liste publiée au Journal officiel de la République française. (…) »

3. Il résulte de ces dispositions que, quelle que soit la procédure de passation mise en œuvre, il incombe au pouvoir adjudicateur qui constate qu’une offre paraît anormalement basse de solliciter auprès de son auteur toutes précisions et justifications de nature à expliquer le prix proposé. Si les précisions et justifications apportées ne sont pas suffisantes pour que le prix



N° 1905847 4

proposé ne soit pas regardé comme manifestement sous-évalué et de nature, ainsi, à compromettre la bonne exécution du marché, il appartient au pouvoir adjudicateur de rejeter l’offre. En outre, le juge du référé précontractuel exerce sur le refus du pouvoir adjudicateur de demander des précisions au soumissionnaire dont l’offre paraît anormalement basse un contrôle limité à l’erreur manifeste d’appréciation.

4. Pour contrôler le caractère anormalement bas ou non d’une offre, le juge du référé précontractuel ne peut se borner à relever un écart de prix important entre ladite offre et d’autres offres que les explications fournies par le candidat ne sont pas de nature à justifier sans rechercher si le prix en cause est en lui-même manifestement sous-évalué et, ainsi, susceptible de compromettre la bonne exécution du marché. Ce juge exerce un contrôle limité à l’erreur manifeste d’appréciation sur la décision du pouvoir adjudicateur de ne pas rejeter une offre comme anormalement basse.

5. En premier lieu, la société Autoroutes Trafic reproche à la DIR Ouest de ne pas avoir mis en œuvre la procédure prévue à l’article 60 précité du décret du 25 mars 2016 à l’égard de l’offre présentée par la société PTV France dont le prix global suffisait, selon elle, à suspecter son caractère anormalement bas. Il résulte de l’instruction que le prix global de l’offre de la société PTV France s’élevait à 2 525.01 euros HT, celui de l’offre de Michelin/CBC à 8 500 euros HT et celui de la société requérante à 83 696.86 euros HT. En présence d’écarts de prix aussi conséquents, la DIR Ouest a demandé à chaque candidat de fournir le sous-détail des prix ayant servi à l’élaboration des prix pour l’ensemble du bordereau des prix de la consultation. La société PTV France a répondu à cette demande en produisant un document de huit pages qui, selon la DIR Ouest, était nettement plus développé et argumenté que le sous-détail des prix des autres concurrents et qui, surtout, s’est révélé suffisamment justifié et convaincant. La DIR Ouest indique que ce document lui a permis d’apprendre que la société PTV France avait fait le choix de recourir à un tiers pour fournir les données de trafic et leur traitement pour le calcul de vitesses moyennes dans des conditions respectant ses attentes techniques et justifiant le caractère compétitif de son offre. Elle explique encore avoir été particulièrement convaincue par la justification du calibrage de l’offre de la société PTV France qui a expliqué s’être fondée, pour déterminer l’ensemble de ses prix, sur une hypothèse de base d’une commande de données en temps réel 24h/24 sur une année et pour l’ensemble du réseau, prestations correspondant aux prix 400.8 et 400.17 du bordereau des prix. Compte tenu des justifications complémentaires ainsi apportées par la société PTV France en réponse à la demande de sous-détail de ses prix, il n’est pas établi que la DIR Ouest n’a pas été en mesure d’apprécier le caractère sérieux de son offre et qu’elle aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en ne procédant pas à des vérifications supplémentaires en application de l’article 60 du décret du 25 mars 2016.

6. En second lieu, la société requérante soutient que l’offre de la société PTV France devait être rejetée comme anormalement basse. À l’appui de son argumentation, elle fait essentiellement valoir l’écart particulièrement important de prix entre son offre et celle retenue, et critique les justifications, évoquées au point précédent, qu’a apportées la société PTV France en réponse à la demande de sous-détail de ses prix. Toutefois, contrairement à ce qu’indique la société requérante, il ne se déduit pas de ces justifications que l’offre retenue a été essentiellement et principalement appréciée au regard seulement des deux prix unitaires 400.8 et 400.17 qui ne correspondraient qu’à des prestations marginales au regard de l’ensemble des prestations du marché. En effet, et même si la méthodologie envisagée n’a pas été explicitée, la DIR Ouest a seulement indiqué avoir été convaincue par l’hypothèse retenue par la société PTV France pour le calibrage et le calcul de l’ensemble des prix du bordereau, consistant à prendre les désignations et prix de ces deux prestations comme références. Ensuite, si le prix global proposé par la société PTV France est considérablement inférieur à celui proposé par la société



N° 1905847 5

Autoroutes Trafic qui indique pourtant avoir consenti un effort commercial par rapport aux prix qu’elle avait pratiqués dans le cadre du précédent marché dont elle était titulaire, le prix de l’offre de l’autre candidat évincé apparaît, certes comme un peu plus de 3 fois supérieur au prix proposé par la société PTV France, mais aussi comme près de 10 fois inférieur à celui proposé par la société requérante. Par ailleurs, pour expliquer le caractère particulièrement compétitif de son offre, la société PTV France fait valoir qu’elle achète, tout en s’assurant une marge commerciale, les données de trafic déjà traitées et strictement nécessaires au besoin du marché, auprès d’un fournisseur, leader mondial dans le domaine. Elle relève également que la société Autoroutes Trafic a récemment été en mesure de remporter un marché qui, s’il n’était pas similaire s’agissant des caractéristiques et de l’étendue des prestations demandées, présentait un objet comparable et concernait le réseau routier de la direction régionale et interdépartementale équipement et aménagement d’Ile de France. Enfin et surtout, et malgré sa critique relative au prix supposé de la prestation annexe relative à une prestation d’ingénierie et à la part restante pour financer les autres prestations, la société Autoroutes Trafic n’apporte pas les éléments suffisants, tirés notamment de sa propre offre, d’offres comparables ou de tout autre élément concret et pertinent pour établir que le pouvoir adjudicateur aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en n’estimant pas l’offre retenue comme sous-évaluée et de nature à compromettre la bonne exécution du marché.

Sur le moyen tiré de l’utilisation d’une méthode de notation du critère prix irrégulière :

7. La société Autoroutes Trafic soutient que la méthode de notation du critère prix, qui a abouti à lui attribuer la note de 0/40, serait irrégulière dans la mesure où elle serait susceptible d’entrainer une neutralisation du critère technique et une surpondération du critère prix.

8. Le pouvoir adjudicateur définit librement la méthode de notation pour la mise en œuvre de chacun des critères de sélection des offres qu’il a définis et rendus publics. Toutefois, ces méthodes de notation sont entachées d’irrégularité si, en méconnaissance des principes fondamentaux d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, elles sont par elles-mêmes de nature à priver de leur portée les critères de sélection ou à neutraliser leur pondération et sont, de ce fait, susceptibles de conduire, pour la mise en œuvre de chaque critère, à ce que la meilleure note ne soit pas attribuée à la meilleure offre, ou, au regard de l’ensemble des critères pondérés, à ce que l’offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas choisie. Il en va ainsi alors même que le pouvoir adjudicateur, qui n’y est pas tenu, aurait rendu publiques de telles méthodes de notation.

9. Il résulte de l’instruction que le règlement de la consultation a prévu l’appréciation des offres selon deux critères pondérés, la valeur technique pour 60 % et le prix pour 40 %. Le même règlement a précisé que l’évaluation du critère prix s’effectuerait par attribution de la note maximale de 40 au moins-disant et, pour les autres candidats, par l’attribution d’une note nulle aux offres dont le prix est supérieur au double du prix de l’offre la moins-disante ou, pour les offres qui n’atteignent pas ce plafond, par l’application de la formule « 40 x (2-M/M0) », M étant l’offre considérée et M0 l’offre la moins-disante. Sous réserve des limites indiquées au point 8, il n’est pas interdit par principe de prévoir une formule de notation du critère prix qui ne soit pas strictement proportionnelle aux écarts constatés entre les offres. En l’espèce, la méthode litigieuse n’a pas pour effet l’attribution automatique d’une note nulle aux offres les plus onéreuses. Si elle peut avoir pour effet d’accentuer les écarts entre les prix des offres, ce n’est que dans l’hypothèse où existe un écart de prix substantiel entre celles-ci, la note de 0/40 n’étant attribuée qu’aux offres dont le prix est plus de deux fois supérieur à celui de la moins-disante, offre qui n’a nécessairement pas été écartée comme étant anormalement basse. Si l’écart de note



N° 1905847 6

sur le critère prix qui peut ainsi résulter de l’attribution de cette note nulle, n’est pas proportionnel à l’écart constaté entre le montant des offres, il reflète néanmoins un écart de prix suffisamment conséquent par rapport à l’offre la moins onéreuse. En outre, compte tenu de la pondération des deux critères, cette méthode n’a pas pour effet d’éliminer une offre notée 0/40 sur le prix, celle-ci demeurant toujours susceptible d’emporter le marché en fonction des notes attribuées sur le critère de la valeur technique des offres. Par suite, la société Autoroute Trafic n’est pas fondée à soutenir que la méthode de notation du critère prix était irrégulière.

10. En tout état de cause, compte tenu de l’écart entre le montant de son offre et celui de la société PTV France qui s’est vue attribuer la note maximale de 40 sur le critère prix, l’application d’une méthode de notation proportionnelle aurait abouti à attribuer à la société Autoroutes Trafic une note inférieure à 2/40 qui ne lui aurait pas permis d’être classée en 1ère position, la société PTV France ayant obtenu 36/60 au titre du critère de la valeur technique.

Sur l’appréciation du critère de la valeur technique :

11. En premier lieu, il résulte de l’instruction qu’ont été attribuées, au titre du critère de la valeur technique des offres, les notes de 48/60 aux sociétés Autoroutes Trafic et Michelin/CBC et de 36/60 à la société PTV France. Pour attribuer ces notes, la DIR Ouest n’a toutefois pas fait application de la méthode de notation définie par le règlement de la consultation qui prévoyait d’attribuer la note maximale de 60 à la mieux-disante, et, pour les autres offres, d’appliquer une formule de notation proportionnelle. Une telle irrégularité n’a toutefois pas été susceptible de léser la société requérante dans la mesure où la mise en œuvre de la méthode définie par le règlement de la consultation aurait abouti à attribuer les notes maximales de 60 aux sociétés Autoroutes Trafic et Michelin/CBC et de 45/60 à la société PTV France, sans que cela ne modifie le classement final compte tenu des notes attribuées sur le critère du prix.

12. En deuxième lieu, le règlement de la consultation a prévu d’évaluer la valeur technique des offres à partir du mémoire technique et de sa conformité aux exigences du cahier des clauses techniques particulières, étant précisé que le mémoire technique devait contenir les cinq éléments suivants : « la description de la source des données FCD fournies et des procédures mises en place pour leur utilisation (représentativité) / la description de la méthode de calcul des vitesses moyennes / la description de l’indicateur de fiabilité proposé / la description de l’organisation mise en place afin d’assurer la fourniture de données de qualité et le respect des délais / la description de la possibilité de fournir des données antérieures à la date de la demande (2 mois, 6 mois, un an) ». Le pouvoir adjudicateur n’était tenu ni de recourir à des sous-critères d’appréciation de la valeur technique des offres, ni d’être plus précis quant aux conditions d’appréciation de ce critère. Il ne résulte pas de l’instruction que les cinq éléments sur lesquels devait porter le mémoire technique des candidats aient constitué des sous-critères faisant l’objet d’une pondération particulière, et la DIR Ouest a parfaitement pu apprécier globalement la valeur technique des offres en fonction de la présence et de la précision des informations demandées dans chaque mémoire technique. En se bornant à soutenir qu’il est probable qu’une pondération de ces éléments ait été mise en œuvre sans apporter le moindre commencement de preuve, la société requérante n’établit pas l’irrégularité qu’elle invoque. Le moyen tiré d’une probable irrégularité quant à la méthode d’appréciation du critère technique doit, par suite, être écarté, sans qu’il y ait lieu de recourir à une mesure d’instruction complémentaire.



N° 1905847 7

13. En troisième lieu, il ne saurait être déduit de l’attribution d’une note identique aux deux candidats évincés que le pouvoir adjudicateur n’a pas examiné sérieusement la valeur technique de leurs offres et a neutralisé ce critère.

14. En tout état de cause, la société Autoroute Trafic a bénéficié de la meilleure note ex-aequo sur le critère de la valeur technique et n’apparaît pas susceptible d’avoir été lésée par les conditions dans lesquelles ce critère a été apprécié.

Sur le moyen tiré de l’insuffisante information fournie aux candidats pour élaborer leur offre :

15. La société Autoroute Trafic reproche, d’une part l’absence d’indication, dans l’avis d’appel public à concurrence, comme dans les autres documents du dossier de consultation, quant à la valeur estimée et aux quantités estimatives du marché, et d’autre part le caractère fictif et non représentatif des quantités portées sur le détail quantitatif estimatif (DQE). Elle fait valoir qu’une telle insuffisance d’évaluation et d’estimation ne l’a pas mise en mesure de présenter une offre la plus compétitive possible. Toutefois, elle s’est trouvée placée dans la même situation que les autres candidats qui ont élaboré et présenté leur offre à partir des seules quantités présentées dans le DQE, de sorte que l’égalité entre les candidats ne saurait avoir été rompue. En outre, compte tenu de l’écart entre le prix de son offre et les prix des deux autres offres, il n’est nullement établi qu’une autre estimation des quantités à fournir lui aurait permis d’améliorer son offre de manière suffisamment significative, étant encore précisé qu’il n’est pas exclu que les autres candidats auraient alors eux-aussi pu améliorer leur proposition. Par suite, la société requérante n’établit pas avoir été lésée par les seules estimations fournies sur le DQE.

16. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de la requête de la société Autoroutes Trafic tendant à l’annulation de la procédure de passation du marché public litigieux doivent être rejetées, et ce sans qu’il y ait lieu de procéder à une mesure d’instruction complémentaire.

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. En vertu des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, le tribunal ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l’autre partie des frais qu’elle a exposés à l’occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par la société Autoroutes Trafic doivent, dès lors, être rejetées.

18. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit à la demande présentée par la société PTV France sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de la société Autoroutes Trafic est rejetée.



N° 1905847 8

Article 2 : Les conclusions de la société PTV France présentées en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Autoroutes Trafic, à la ministre de la transition écologique et solidaire, à la société PTV France et à Me Nicolas Lafay.

Fait à Rennes, le 30 décembre 2019.

Le juge des référés, La greffière d’audience,

signé signé

D. X A. Gauthier

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal administratif de Rennes, 30 décembre 2019, n° 1905847