Tribunal de grande instance de Marseille, 2e chambre civile, 22 décembre 2017, n° 16/00796

  • Victime·
  • Sonnerie·
  • Déficit fonctionnel temporaire·
  • Régie·
  • Transport·
  • Métro·
  • Préjudice esthétique·
  • Consolidation·
  • Préjudice corporel·
  • Souffrances endurées

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
TGI Marseille, 2e ch. civ., 22 déc. 2017, n° 16/00796
Juridiction : Tribunal de grande instance de Marseille
Numéro(s) : 16/00796

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE

DE MARSEILLE

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N°

Enrôlement n° : 16/00796

AFFAIRE : Mme A X (la SELARL LEVY LAURENT AVOCATS)

C/ REGIE DES TRANSPORTS MARSEILLAIS (Me Charlotte SIGNOURET)

Rapport oral préalablement fait

DÉBATS : A l’audience Publique du 03 Novembre 2017

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré

Président : B C

Greffier : Virginie NAVEAUX-LEMPEREUR

A l’issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au : 22 Décembre 2017

PRONONCE : Par mise à disposition au greffe le 22 Décembre 2017

Par B C, Juge

Assistée de Virginie NAVEAUX-LEMPEREUR, Greffier

[…]

réputée contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDERESSE

Madame A X

née le […] à […]

n° de SS : 079081305543922

représentée par Maître Laurent LEVY de la SELARL LEVY LAURENT AVOCATS, avocats au barreau de MARSEILLE

C O N T R E

DEFENDEURS

REGIE DES TRANSPORTS MARSEILLAIS, prise en la personne de son représentant légal, dont le siège social est sis 10-12 Avenue Clôt-Bey – 13008 MARSEILLE

représentée par Me Charlotte SIGNOURET, avocat au barreau de MARSEILLE

CPCAM DES BOUCHES DU RHONE, prise en la personne de son Directeur y domicilié, sise […]

défaillante

**********

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame A X, née le […], a été victime d’un accident, le 3 décembre 2013 . Elle a été blessée par la porte permettant l’accès à la rame de métro du réseau de la Régie des transports de Marseille (RTM) à la station National.

Par actes d’huissier de justice en date du 4 août 2014, madame A X a fait assigner la Régie des transports de Marseille (RTM) et la CPAM des Bouches du Rhône afin d’obtenir réparation du préjudice subi.

Madame A X, selon les termes de ses assignations auxquelles il est expressément référé pour un exposé complet de ses prétentions et moyens, sur le fondement de la loi responsabilité extra-contractuelle selon l’article 1384 al.1, avec le bénéfice de l’exécution provisoire, demande que la RTM soit jugée responsable du dommage subi et tenue de réparer son entier préjudice.

Elle sollicite la condamnation de la RTM à lui payer la somme totale de 14 206,10 euros en réparation de son préjudice corporel, outre 2 500 euros au tire des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l’instance.

Elle explique qu’alors qu’elle était dans la rame du métro, les portes de celle-ci se sont brutalement refermées sur elle, sans sonnerie préalable. Elle produit deux témoignages à l’appui. Elle a présenté des douleurs au cou, au dos et aux mains.

Elle soutient que la RTM gardien de la chose en mouvement est responsable du dommage et ne prouve aucune faute de la victime.

Elle sollicite que lui soient accordées, en réparation de son préjudice corporel, les sommes suivantes :

[…]

• Préjudices patrimoniaux temporaires

— Frais d’assistance à expertise 500 €

— Perte de gains professionnels actuels 96,10 €

➢ Préjudices extra-patrimoniaux

• Préjudices extra-patrimoniaux temporaires

— Déficit fonctionnel temporaire partiel à 25 % 375 €

— Déficit fonctionnel temporaire partiel à 10 % 1 335 €

— Souffrances endurées (2/7) 4 500 €

— Préjudice esthétique temporaire

(contention cervicale, anneau) 2 000 €

• Préjudices extra-patrimoniaux permanents

— Déficit fonctionnel permanent (3%) 5 400 €

SOIT AU TOTAL 14 206,10 €

dont il convient de déduire la somme de 2 000 €, déjà versée à titre de provision.

***

La Régie des transports de Marseille (RTM), selon les termes de ses conclusions notifiées le 27 octobre 2016 auxquelles il est référé pour un exposé complet de ses prétentions et moyens, conclut au principal que sa responsabilité n’est pas engagée en l’absence de preuve de la matérialité de l’accident : les témoignages produits soulèvent des contradictions sur le lieu de l’accident et sont imprécis sur les circonstances exactes de l’accident, d’autres contradictions existent sur la possession d’un titre de transport par la victime ; après vérification des services techniques, aucun incident technique n’a été signalé le 3 décembre 2012 et la sonnerie préparatoire à la fermeture des portes est une condition obligatoire à la circulation d’une rame en explication.

A titre subsidiaire, elle conclut à la faute de madame A X qui par son imprudence, en ne se tenant pas normalement à l’intérieur de la rame alors que les portes se refermaient à l’extérieur de la rame, a été à l’origine exclusive de son dommage.

A titre très subsidiaire, elle conclut à une limitation du droit à indemnisation de la victime à hauteur de 30% de son préjudice.

A titre infiniment subsidiaire, elle sollicite une réduction des prétentions émises.

Elle conclut à la condamnation de la requérante, en application de l’article 700 du code de procédure civile, à lui payer la somme de 1 500 euros ainsi qu’aux dépens de l’instance distraits au profit de Me Charlotte SIGNOURET.

***

La CPAM des Bouches du Rhône, bien que régulièrement mise en cause n’a as comparu mais a fait connaître le montant de ses débours soit 1 774,22 euros de dépenses de santé engagées pour la victime suite à son accident du 3 décembre 2013.

***

L’instruction a été clôturée, par ordonnance en date du 17 mars 2017, et l’affaire renvoyée pour être plaidée à l’audience du 3 novembre 2017.

Après débats à l’audience, la décision a été mise en délibéré pour être rendue, par mise à disposition au greffe le 22 décembre 2017.

MOTIFS

Sur la responsabilité de la RTM

En application des dispositions de l’article 1384 al. 1 du code civil, on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde.

En l’espèce, la Régie des transports de Marseille (RTM), propriétaire des rames de métro, ne conteste pas être gardienne des portes litigieuses.

Madame X explique avoir été coincée dans la fermeture des portes de la rame de métro dans laquelle elle se trouvait, alors que la sonnerie n’avait pas annoncé cette fermeture.

Son récit est confirmé par les témoignages de mesdames Y et MEBARKI.

Un agent de la RTM a consigné la déclaration d’accident de la victime le 03/12/13 à 13h40.

Aucun élément pertinent ne remet en cause ces déclarations : le fait que l’accident se soit produit à la station National et a été déclaré à la station suivante Joliette est sans incidence.

En l’espèce, l’appréciation de la faute de madame A X repose sur le fait de savoir si elle a entrepris de monter dans la rame après que la sonnerie de fermeture des portes ait retenti ou avant.

Il convient de rappeler qu’il appartient à la société RTM de prouver la faute de la victime et son rôle causal dans la survenue du dommage.

La RTM ne produit aucun élément de preuve à l’appui de son allégation d’une faute de la victime à l’origine exclusive de son dommage.

La réclamation de voyageur remplie sur un formulaire de la RTM vraisemblablement par un employé de la RTM non identifié, et qui n’a pas été signée indique que l’accident s’est produit à 13h40 : “La cliente s’est coincé les épaules et les doigts (le petit doigt) Main droite + nausées dans les portes ; se plaint mal cervicales, mal au dos. Ne veut pas les pompiers.”

La RTM conteste le fait que l’accident ait été provoquée par un dysfonctionnement de la rame de métro, et affirme que la sonnerie alertant les usagers de la fermeture imminente des portes a bien retenti avant la fermeture des portes. Cependant, elle ne produit aucun élément de preuve à l’appui.

La RTM affirme que la sonnerie retentit toujours avant la fermeture des portes sans produire aucun élément d’explication du mécanisme, dont on ne sait notamment s’il est automatique ou manuel, ni quelle est la durée de la sonnerie, quel est le délai habituel entre le début de la sonnerie et la fermeture ou quels sont les facteurs qui peuvent modifier ce délai.

Le fait que madame A X se soit retrouvée, le corps coincé dans la porte, dans la rame, ne suffit pas à établir qu’elle aurait commis une faute après que le signal sonore ait prévenu de la fermeture des portes, puisqu’il n’est pas prouvé que ce signal sonore aurait retenti avant la fermeture des portes.

Aucune preuve n’est donc rapportée que l’accident serait dû à une imprudence de la victime.

En l’absence de faute prouvée de la victime, la RTM gardienne de la chose en mouvement à l 'origine du dommage n’est pas exonérée de sa responsabilité.

Aucune faute de la victime n’est établie et son droit à réparation est donc entier.

Sur le montant de l’indemnisation :

Aux termes non contestés du rapport d’expertise du Docteur D-E, l’accident a entraîné pour la victime des cervicalgies avec enraidissement de la lordose et des signes dégénératifs, dorso-lombalgies, scapulalgies, névralgie sinter costales, ecchymoses de l’avant bras et du 5e doigt droits et de l’avant pied gauche.

Il persiste des douleurs cervicales et dorso lombaires à la pression et un enraidissement et limitation des mouvements du cou et du tronc en tous sens .

Les conséquences médico-légales de l’accident sont les suivantes :

— un arrêt temporaire des activités professionnelles du 4 décembre 2013 au 9 décembre 2013 ;

— un déficit fonctionnel temporaire partiel à 25 % pendant 1 mois (port du collier cervical en continu) ;

— un déficit fonctionnel temporaire partiel à 10 % jusqu’à la consolidation (8 mois et 27 jours) ;

— une consolidation au 30/09/14 ;

— une atteinte à l’intégrité physique et psychique de 3 % ;

— des souffrances endurées qualifiées de 2/7.

Sur la base de ce rapport, contre lequel aucune critique médicalement fondée n’est formée, et compte tenu des conclusions et des pièces produites, le préjudice corporel de Madame A X, âgée de 35 ans au moment de sa consolidation, doit être évalué ainsi qu’il suit :

[…] :

[…] :

— Les frais divers :

Les frais divers sont représentés par les honoraires d’assistance à expertise du Docteur Z, médecin conseil, soit 400 €, au vu de la note d’honoraire du 17 juillet 2015 qui a été produite.

La réparation du préjudice subi par la victime doit être intégrale et la dépense correspondant aux honoraires du médecin conseil de la victime, non prise en charge par l’organisme social, qui a été supportée par la victime, est née directement et exclusivement de l’accident : elle est par là même indemnisable.

En effet, la victime a pu valablement se faire assister devant l’expert par le médecin de son choix afin que la discussion s’engage sur un terrain médico-légal pour lequel il ne dispose d’aucune compétence technique, de sorte que sa présence a garanti l’instauration devant l’expert d’un débat réellement contradictoire.

Dès lors la RTM devra payer à la victime la somme de 500 euros justifiée par la note de frais d’assistance à expertise du Dr Z.

- la perte de gains professionnels actuels

La perte de gains professionnels actuels concerne le préjudice économique subi par la victime pendant la durée de son incapacité temporaire totale ou partielle.

L’évaluation de la perte de gains doit être effectuée in concreto, au regard de la preuve d’une perte de revenus apportée par la victime jusqu’au jour de la consolidation.

Le médecin a retenu une période d’arrêt de travail imputable de 6 jours.

Madame X produit son bulletin de salaire de décembre 2013 : du fait de son arrêt de travail, elle a perdu le bénéfice de 10 heures de travail.

La perte de salaire doit être calculée sur la base du salaire net et non brut.

Ainsi, madame X a perdu 74 euros de salaire net.

Il résulte de l’état des débours de la CPAM que la victime n’a perçu aucune indemnité journalière.

En conséquence, la RTM devra lui verser la somme de 74 euros au titre de sa perte de gains professionnels actuels.

[…] :

➢ Les Préjudices Extra-Patrimoniaux Temporaires :

— Le déficit fonctionnel temporaire :

Ce poste de préjudice cherche à indemniser l’incapacité fonctionnelle totale ou partielle que subit la victime jusqu’à sa consolidation et correspond à une perte de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante incluant le préjudice d’agrément temporaire pendant cette période.

Compte tenu de la nature des lésions subies par Madame A X et de la gêne qu’elles ont entraînée sur la vie quotidienne de celle-ci, il y a lieu d’indemniser ce poste de préjudice sur la base de 27སྒྱ par jour.

— déficit fonctionnel temporaire partiel à 25 % : 209 €

— déficit fonctionnel temporaire partiel à 10 % : 732 €

Total 941 €

— Les souffrances endurées :

Les souffrances endurées fixées par l’expert à 2/7 seront indemnisées par le versement de la somme de 3 500 €.

— Le préjudice esthétique temporaire :

Le préjudice esthétique temporaire vise à réparer le préjudice né de l’obligation pour la victime de se présenter temporairement au regard des tiers dans une apparence physique altérée en raison de ses blessures.

Le médecin expert n’a pas retenu de préjudice esthétique temporaire.

Le port d’une contention cervicale pendant un mois et d’un anneau de contention au doigt ne suffisent pas à caractériser un préjudice esthétique temporaire distinct de la gêne entrainée temporairement sur la vie quotidienne déjà réparée au titre du déficit fonctionnel temporaire.

Dès lors la demande en réparation d’un préjudice esthétique temporaire sera rejetée.

➢ Les Préjudices Extra-Patrimoniaux Permanents :

— Le déficit fonctionnel permanent :

Ce poste de préjudice cherche à indemniser le préjudice extra-patrimonial découlant de l’incapacité médicalement constatée et à réparer ses incidences touchant exclusivement la sphère personnelle de la victime, soit non seulement les atteintes aux fonctions physiologiques de celle-ci mais aussi la douleur permanente qu’elle ressent, la perte de la qualité de vie et les troubles dans ses conditions d’existence après consolidation.

Compte tenu des séquelles conservées par la victime, il a été estimé par l’expert à 2 %. Il y a donc lieu de l’indemniser par l’allocation de la somme de 2 800 euros.

Le préjudice résultant de l’accident subi par madame A X sera fixé à la somme totale de 7 815 euros, hors frais de santé pris en charge par la CPAM dee Bouches du Rhône, et avant déduction des provisions déjà versées. Cette somme sera mise à la charge de la RTM.

En application de l’article 1153-1 du code civil, cette somme portera intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement.

Sur les demandes accessoires :

L’exécution provisoire est nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire. Compte tenu de la date de survenance du sinistre et du caractère indemnitaire de la créance, il y a lieu de l’ordonner.

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, la RTM, succombante, sera condamnée aux entiers dépens de la présente procédure.

Madame A X ayant donc été contrainte d’exposer des frais pour obtenir la reconnaissance de l’intégralité de ses droits, il est équitable de condamner la société d’assurances MAIF à lui payer la somme de 1 300 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL,

Après débats publics, statuant par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,

Juge la Régie des Transports Marseillais tenue d’indemniser Madame A X des conséquences dommageables de l’accident du 3 décembre 2013, le droit à indemnisation de la victime étant entier ;

Evalue le préjudice corporel de Madame A X, à la somme de 7 815 euros, hors débours de la CPAM des Bouches du Rhône d’un montant de 1 774,22 euros ;

Condamne la Régie des Transports Marseillais à payer avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement à Madame A X :

— la somme de 7 815 euros en réparation de son préjudice corporel, dont il conviendra de déduire la provision,

— la somme de 1 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

Déclare le présent jugement commun et opposable à la CPAM des Bouches du Rhône ;

Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision ;

Condamne la Régie des Transports Marseillais aux entiers dépens,

Ainsi jugé et prononcé, par mise à disposition au greffe, le 22 décembre 2017.

LE GREFFIER LE JUGE

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires

Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal de grande instance de Marseille, 2e chambre civile, 22 décembre 2017, n° 16/00796