Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 2e section, 22 décembre 2017, n° 16/07565

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 3e ch. 2e sect., 22 déc. 2017, n° 16/07565
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 16/07565

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

3e chambre 2e section

N° RG :

16/07565

N° MINUTE :

Assignation du :

13 Mai 2016

JUGEMENT

rendu le 22 décembre 2017

DEMANDERESSE

Société SCA TISSUE FRANCE

[…]

93400 SAINT-OUEN

représentée par Me B C, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0512

DÉFENDERESSES

Société INDUSTRIE Z A FRANCE

[…]

[…]

Société INDUSTRIE Z A SPA

[…]

[…]

représentées par Maître David MASSON de l’AARPI DENTONS EUROPE, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0372

COMPOSITION DU TRIBUNAL

François ANCEL, Premier Vice-Président adjoint

Françoise BARUTEL, Vice-Présidente

Marie-Christine COURBOULAY, Vice Présidente

assisté de Jeanine ROSTAL, Faisant fonction de Greffier,

DÉBATS

A l’audience du 10 Novembre 2017 tenue en audience publique devant François ANCEL, Françoise BARUTEL, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenus seuls l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe

Contradictoire

en premier ressort

[…]

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

La société SCA TISSUE FRANCE est une société du groupe suédois SCA fondé en 1929, lequel se présente comme l’un des leaders mondiaux dans le domaine de l’hygiène personnelle, des produits d’hygiène papier et des produits forestiers.

En 2012, le Groupe SCA a racheté l’activité européenne du groupe GEORGIA-PACIFIC.

La société SCA TISSUE FRANCE, venant aux droits de la société GEORGIA-PACIFIC FRANCE, anciennement dénommée FORT JAMES FRANCE, est alors devenue titulaire du brevet européen n°1 081 284 B1 (ci-après « EP 284 »), déposé le 31 août 1999, délivré le 2 janvier 2008 et intitulé «produit en papier absorbant comprenant au moins trois plis et son procédé de fabrication ».

La société INDUSTRIE Z A SPA se présente comme une société de droit italien établie à Lucca en Toscane. Elle fabrique et commercialise du papier à usage ménager depuis 1978, à la fois sous ses propres marques, dont « FOXY », et sous des marques de distributeurs.

La société INDUSTRIE Z A SPA est titulaire d’un brevet européen n° 2 353 859 B1 relatif à un « produit en papier avec trois couches ou plus et son procédé de fabrication » portant sur un procédé de fabrication de produits en papier absorbant, dont la demande a été publiée le 10 août 2011 et le brevet délivré le 8 mars 2017.

La société INDUSTRIE Z A FRANCE est une des filiales de la société INDUSTRIE Z A SPA. Son siège social et son usine de fabrication sont situés à Pannes dans le Loiret.

Indiquant avoir eu connaissance fin 2014 que les sociétés INDUSTRIE Z A SPA et INDUSTRIE Z A FRANCE (ci-après sociétés INDUSTRIE Z A) fabriquaient et commercialisaient du papier toilette qu’elle estime être la contrefaçon de son brevet EP 284, après avoir adressé des lettres de réclamation les 31 octobre et 4 novembre 2014, réitérées en vain les 23 février 2015 et 30 juillet 2015, la société SCA TISSUE FRANCE a, par exploit d’huissier en date du 12 mai 2016, assigné les sociétés INDUSTRIE Z A devant le tribunal de grande instance de Paris en contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 4, 6 et 7 de la partie française du brevet européen EP 284.

Il est à noter qu’avant que la société SCA TISSUE FRANCE ne devienne titulaire du brevet EP 284 qu’elle invoque dans la présente instance, une autre société du groupe SCA avait formé devant l’office européen des brevets une opposition contre ce brevet appartenant alors au groupe GEORGIA-PACIFIC qui a été rejetée par la division de l’opposition, et dont l’appel contre cette décision a finalement été retiré après que le groupe SCA a fait l’acquisition de l’activité européenne du groupe GEORGIA-PACIFIC.

Il est à noter enfin qu’il existe des actions judiciaires similaires : en Espagne – la procédure, qui a donné lieu à la désignation d’un expert, est pendante devant les juridictions espagnoles ; en Allemagne – par jugement du 21 juillet 2017, le tribunal du district (Landgericht) de Mannheim a jugé qu’il n’y avait pas de contrefaçon de la partie allemande du brevet européen n°1 081 284 B1 et a donc rejeté l’ensemble des demandes de la société SCA, l’instance en nullité du brevet étant pendante devant le tribunal fédéral allemand.

Dans ses dernières conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique en date du 02 novembre 2017, la société SCA TISSUE FRANCE, au visa des articles L.611-1 et suivants, L.613-3, L.615-1, L.615-5-2 et L.615-7 CPI, demande en ces termes au tribunal de :

— Dire et juger la société SCA Tissue France recevable et fondée en toutes ses demandes,

— Dire et juger que les sociétés Industrie Z A Spa et Industrie Z A France ont contrefait les revendications 1, 2, 3, 4, 6 et 7 de la partie française du brevet européen EP 1 081 284 en fabriquant, offrant, mettant dans le commerce, utilisant et/ou important en France, et en détenant en France, aux fins précitées, le papier toilette vendu sous les marques « Labell le Moelleux » et « Ultra Douceur », « Foxy Soie Plus»,

En conséquence,

— Interdire aux sociétés Industrie Z A Spa et Industrie Z A France, directement ou indirectement par l’intermédiaire de toute personne physique ou morale, de fabriquer, offrir, mettre dans le commerce, utiliser, importer, transborder, exporter ou détenir aux fins précitées, sur le ou à partir du territoire français, tout produit, quelque soit la marque ou dénomination sous laquelle il est commercialisé, mettant en œuvre les revendications 1, 2, 3, 4, 6, et 7 de la partie française du brevet européen EP 1 081 284, et ce sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard, passé un délai de 8 jours à compter de la signification du jugement à intervenir,

— Ordonner aux sociétés Industrie Z A Spa et Industrie Z A France de produire tous les documents, pour la période débutant cinq ans avant l’assignation, indiquant le nombre de produits contrefaisants fabriqués, importés, achetés, reçus, commandés et/ou fournis en France, ainsi que les prix de vente et d’achat de ces produits, et ce sous astreinte 5 000 euros par jour de retard, passé un délai d’un mois à compter de la signification du jugement à intervenir,

— Ordonner aux sociétés Industrie Z A Spa et Industrie Z A France de communiquer à la société SCA Tissue France une déclaration de leurs commissaires aux comptes portant sur :

les quantités de produits contrefaisants commercialisés en France pour la période débutant cinq ans avant l’assignation,

le chiffre d’affaires et la marge brute relatifs à la vente en France de produits contrefaisants, pour la période débutant cinq ans avant l’assignation, et ce sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard, passé un délai d’un mois à compter de la signification du jugement à intervenir.

— Ordonner aux sociétés Industrie Z A Spa et Industrie Z A France de communiquer à la société SCA Tissue France les noms et adresses des distributeurs, fournisseurs et tout autre détenteur des produits contrefaisants, ainsi que les grossistes, détaillants et clients, et ce sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard, passé un délai d’un mois à compter de la signification du jugement à intervenir,

— Ordonner aux sociétés Industrie Z A Spa et Industrie Z A France, sans délai, de rappeler des circuits commerciaux, tous les produits contrefaisants qui ont été livrés ou qui sont encore en circulation à la date de la signification du jugement à intervenir, pour être remis à la société SCA Tissue France aux fins de confiscation, et ce sous astreinte de 5 000 euros par jour de retard, à compter du 8e jour suivant la signification du jugement à intervenir,

— Condamner in solidum les sociétés Industrie Z A Spa et Industrie Z A France à payer à la société SCA Tissue France, une provision sur dommages et intérêts de 200 000 euros, quitte à parfaire, en réparation de ses préjudices moral et commercial subis du fait de la contrefaçon,

— Dire que le tribunal se réservera la liquidation des astreintes ainsi prononcées en application de l’article L.131-3 du code des procédures civiles d’exécution,

— Condamner in solidum les sociétés Industrie Z A Spa et Z A France à payer à la société SCA Tissue France la somme de 100.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, quitte à parfaire,

— Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir, nonobstant tout appel éventuel et sans constitution de garantie,

— Condamner in solidum les sociétés Industrie Z A Spa et Z A France aux entiers dépens, lesquels pourront être recouverts directement par Maître B C, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique en date du 20 octobre 2017, les sociétés INDUSTRIE Z A, au visa du livre VI du Code de la propriété intellectuelle et notamment ses articles L.613-3, L.614-12, L.615-1, L.615-2 et L.615-5, des articles 52 et 138 de la Convention de Munich du 5 octobre 1973, de l’article 1er de l’ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers ; des articles 6, 9, 699 et 700 du Code de procédure civile, demandent en ces termes au tribunal de :

[…],

— Constater la nullité des procès-verbaux de constat datés des 28 octobre 2014, 19 janvier, 2015, 2 septembre 2015, 13 novembre 2015, 23 novembre 2015 et 24novembre 2015 et versés aux débats par la société SCA TISSUE FRANCE qui s’apparentent à des mesures de saisies-contrefaçon déguisées;

— Constater la nullité des procès-verbaux de constat d’achat des 19 janvier et 2 septembre 2015 et versés aux débats par la société SCA TISSUE FRANCE, les achats ayant été effectués par des stagiaires du conseil de la société SCA TISSUE France et ne sont donc pas des tiers indépendants de la partie requérante ;

— Ecarter des débats les trois rapports du Laboratoire TECNALIA datés du 10 février 2016 et versés aux débats par la société SCA TISSUE FRANCE d’une part, car ils résultent d’opérations de constat nulles et, en tout état de cause, au motif qu’ils sont dépourvus de force probante;

En conséquence,

— Dire et juger que la preuve des actes de contrefaçon allégués par la société SCA TISSUE FRANCE n’est pas rapportée ;

— Débouter la société SCA TISSUE FRANCE de l’ensemble de ses demandes formées au titre de la prétendue contrefaçon de son brevet européen EP 1 081 284.

[…],

— Ecarter des débats les produits « Ultra Douceur » faute pour SCA TISSUEFRANCE de démontrer leur provenance ;

— Constater la nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 6 et 7 de la partie française du brevet européen EP 1 081 284 pour défaut de nouveauté et d’activité inventive ;

En conséquence,

— Dire et juger que la partie française du brevet européen EP 1 081 284 est nulle et de nul effet ;

— Ordonner la transcription du jugement d’annulation au Registre National desBrevets dans le mois suivant la date il sera définitif, à la requête de Monsieur le Greffier en chef du Tribunal ;

— Dire et juger l’ensemble des demandes, fins et conclusions de la société SCATISSUE FRANCE irrecevables et infondées, l’en débouter;

[…],

— Dire et Juger que les produits « Foxy Soie Plus » et « Labell le Moelleux » des sociétés INDUSTRIE Z A SPA et INDUSTRIECARTARIE A FRANCE ne reproduisent pas les revendications 1, 2,3, 4, 6 et 7 du brevet européen EP 1 081 284;

En conséquence,

— Dire et juger l’ensemble des demandes, fins et conclusions de la société SCA TISSUE FRANCE infondées, l’en débouter ;

[…],

— Débouter la société SCA TISSUE FRANCE de ses demandes de communication de divers documents comptables se rapportant au « aux papiers toilette vendus sous les marques « Labell le Moelleux », « Ultra Douceur », « Foxie Soie Plus » ou toute autre dénomination », lesquelles sont irrecevables et non fondées ;

EN TOUTE HYPOTHESE,

— Constater que la société SCA TISSUE France ne justifie d’aucun préjudice ni dans son principe, ni dans son montant ;

— Dire et juger irrecevable et mal fondée la société SCA TISSUE FRANCE en toutes ses demandes et l’en Débouter, en ce compris l’exécution provisoire du jugement à intervenir, notamment s’agissant des mesures d’interdiction, de retrait et de publication ;

— Condamner la société SCA TISSUE FRANCE à verser aux sociétés INDUSTRIE Z A SPA et INDUSTRIE Z A FRANCE la somme de 100.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile;

— Condamner la société SCA TISSUE FRANCE aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître David MASSON de l’AARPI DENTONS EUROPE conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 novembre 2017.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la portée du brevet européen EP 284

Le brevet EP 284 concerne « les produits en papier absorbant et plus particulièrement en ouate de cellulose à usage sanitaire ou domestique». L’invention vise essentiellement le papier toilette mais peut aussi concerner les papiers ménagers. Elle se rapporte de manière plus précise à un produit constitué d’au moins trois plis et au procédé de fabrication d’un tel produit [004].

Les produits en papier absorbant composés de trois plis étaient déjà connus de l’art antérieur.

Le brevet EP 284 se réfère tout d’abord au brevet américain US 3 414 459 qui mentionne un produit comprenant trois plis associés. Suivant le procédé de fabrication décrit dans ce brevet, on gaufre les deux plis externe séparément avec un motif en relief consistant en des protubérances discrètes. On fait passer chacun des plis entre un cylindre métallique gravé en relief selon le motif souhaité et un cylindre lisse en caoutchouc.

Ces trois plis sont connectés les uns aux autres de la manière suivante aux termes du paragraphe [0007] de la description du brevet : « le troisième pli non gaufré est intercalé entre les deux plis gaufrés et est plus précisément disposé entre les surfaces distales ou sommets des protubérances de chacun des plis. En d’autres termes, les protubérances sont orientées vers l’intérieur de la structure. On associe les trois plis en faisant passer ces derniers dans l’intervalle de serrage ménagé entre les deux cylindres métalliques gravés de chacun des dispositifs de gaufrage prévus pour les plis externes. Les éléments en relief ou bossages de chacun des cylindres gravés se placent face à face. Cette technique d’association est plus généralement dénommée pointe-pointe, ou pointe contre pointe ».

Mais il est indiqué que la liaison des trois plis est assurée par l’application d’une pression suffisamment élevée pour créer des liaisons interfibres, et que le mode de fabrication de ce brevet antérieur entraîne une usure rapide des cylindres de gaufrage en raison de la pression de serrage élevée qu’il est nécessaire d’exercer pour l’association des trois plis. Par ailleurs il est précisé que la structure décrite présente une faible densité de motifs (de l’ordre de 10 à 15 protubérances par cm2), et que les produits à trois plis présentant cette structure sont principalement destinés à être utilisés comme essuie-tout ménagers dont la résistance et l’absorption sont les qualités premières, raisons pour lesquelles les motifs de gaufrage sont relativement profonds et par conséquent de faible densité.

Le brevet EP 284 indique que d’autres produits en papier absorbant sont constitués de trois plis associés selon une technique d’association différente : on gaufre d’une part un ensemble de deux plis superposés, et d’autre part un troisième pli au moyen de deux dispositifs distincts de gaufrage. Les deux premiers plis superposés ainsi que le troisième plis sont gaufrés selon des motifs en relief constitués de protubérances. La densité des motifs reste nécessairement faible c’est à dire inférieure à 20 protubérances par cm2, les deux plis superposés et le 3e pli étant associés au moyen d’un cylindre marieur de manière que les surfaces distales des protubérances des deux plis superposés soient disposées en face des surfaces situées entre deux protubérances dans le plan du troisième pli, cette technique étant appelée procédé « emboîté » ou « nested » en anglais.

La partie descriptive du brevet EP 284 précise ensuite que dans ce procédé d’association la douceur n’est pas optimale en raison du gaufrage relativement grossier.

Le brevet précise ensuite que d’autres produits complexes constitués de trois plis ont été décrits, par exemple la demande de brevet américain n° 0 564 319 qui permet d’obtenir un produit présentant une épaisseur et une rigidité améliorées mais dont la structure relativement complexe nécessite plusieurs niveaux d’encollage

Enfin il décrit la demande de brevet français n°98 02792 relative à un produit absorbant comprenant trois plis, qui est à la fois doux et épais, qui présente une bonne main et qui résiste à l’écrasement. [0020]. Cependant le mode de liaison entre les différents plis est du type « pointe-pointe » avec tous les inconvénients liés à ce mode de liaison

L’invention se propose donc de pallier « l’ensemble des inconvénients précités concernant tant les produits que leur procédé de fabrication ».

Elle a pour objet de fournir un nouveau produit d’au moins trois plis qui « soit épais et doux, présentant une bonne main, et résistant à l’écrasement une fois mis en rouleau. » [0025]

La revendication 1 du brevet EP'284 est ainsi rédigée : « Produit en papier absorbant d’un grammage d’environ 36 à environ 105 g/m² comprenant au moins trois plis, deux plis externes, inférieur et supérieur, gaufrés, comportant chacun des motifs en relief consistant au moins en partie en des protubérances discrètes, et un pli central, les surfaces distales d’au moins une partie des protubérances de chacun desdits plis externes étant tournées vers le pli central, et au moins l’un des plis externes ayant une densité de motifs supérieure à 30 protubérances/cm², le pli externe inférieur gaufré (2) présentant un premier (5) et un second (7) motif, le second motif ayant une hauteur inférieure à celle du premier motif, caractérisé en ce que le pli central (4) et le pli externe supérieur gaufré (3) sont associés dans un mode dit « emboîté » audit pli externe inférieur gaufré (2), au niveau d’au moins une partie des sommets du premier motif (5) dudit pli externe inférieur gaufré (2). »

Le brevet définit cependant dans le paragraphe [11] la notion de mode « dit emboîté » en précisant : « Dans le texte qui suit, on étend la définition du terme « emboîté » ou « nested » au cas où le plan de liaison entre la surface distale des protubérances d’un premier pli gaufré et d’un second pli, se situe dans le même plan que le plan dudit second pli quelle que soit la position relative de la surface distale par rapport aux protubérances du second pli. Ainsi celle-ci peut se retrouver entre deux protubérances du second pli mais aussi recouvrir en partie ou totalement une de ces protubérances qui est de ce fait écrasée ».

De même le paragraphe [37] du brevet précise : « Dans la présente demande le terme « emboîté » s’étend à la réalisation où le plan des surfaces distales des protubérances 6 correspond à celui du pli 3 sans qu’il soit nécessaire que le sommet des protubérances 6 vienne s’intercaler précisément entredeux protubérances 10 ».

Il suit de ces précisions qu’au sens du brevet le terme « emboîté » ne signifie pas la technique d’emboitement telle que précédemment décrite à savoir celle dans laquelle les surfaces distales des protubérances des deux plis superposés sont disposées en face des surfaces situées entre deux protubérances dans le plan du troisième pli, mais est étendu au cas où la surface distale des protubérances d’un premier pli recouvre la protubérance du second pli qui se trouve en conséquence écrasée.

Les autres caractéristiques de l’invention de produit sont couvertes par les revendications dépendantes 2 à 11. Les caractéristiques de l’invention relative au procédé de fabrication, sont couverts par les revendications 12 à 17. La revendication 18 protège un usage du produit.

Seules les revendications, dites de produit, 1, 2, 3, 4, 6, et 7 sont invoquées en l’espèce.

— Revendication 2 : Produit selon la revendication 1 caractérisé en ce que les trois plis sont liés par adhésif au niveau du premier motif.

— Revendication 3 : Produit selon l’une des revendications 1 à 2 caractérisé en ce que chacun des plis externes gaufrés (2, 3) a une densité totale de motifs (5, 7, 9) inférieure à 150 de préférence à 90 protubérances par cm2.

— Revendication 4 : Produit selon l’une des revendications 1 à 3 caractérisé en ce que les densités des motifs (5, 7, 9) des plis externes gaufrés sont différentes.

— Revendication 6 : Produit selon l’une des revendications 1 à 5 caractérisé en ce que le grammage du pli central (4) est différent du grammage d’au moins un des plis externes gaufrés (2, 3).

— Revendication 7 : Produit selon l’une des revendications 1 à 6 caractérisé en ce que la composition fibreuse et/ou chimique du pli central (4) est différente de celle d’au moins un des plis externes gaufrés (2, 3).

Sur le défaut de nouveauté du brevet

Les sociétés INDUSTRIE Z A prétendent que les enseignements du brevet litigieux étaient déjà connus d’une part dans la demande PCT WO9708386 (document D4), la caractéristique du « mode dit emboîté » ne devant pas être prise en compte comme « réputé non écrite» en ce qu’elle vise à la fois l’emboîtement, le pointe-pointe et l’écrasement, d’autre part dans la demande PCT W097/44529 (document D1), le procédé spécifique d’une suspension sous forme liquide de fibres de papier ne devant pas être pris en compte alors qu’il n’y a pas de différence fondamentale au niveau des protubérances entre le gaufrage par voie humide et le gaufrage à sec.

La société SCA TISSUE FRANCE rétorque que le document D4 ne comporte pas de pli central et ne divulgue pas non plus la caractéristique selon laquelle « au moins un pli externe présente une densité de protubérance supérieure à 30 cm2 ». Elle ajoute que le document D1 se distingue du brevet EP 284 d’une part, quant à la structure du papier, les plis externes étant fabriqués par voie humide, les dômes n’étant pas produits par gaufrage et un pli comportant de tels dômes ne pouvant être considéré comme un pli gaufré.

Sur ce,

Il ressort de l’article L. 614-12 du code de la propriété intellectuelle que la nullité du brevet européen est prononcée en ce qui concerne la France par décision de justice pour l’un quelconque des motifs visés à l’article 138 paragraphe 1 de la convention de Munich.

En application du paragraphe 1 de l’article 138 de la convention de Munich précitée, « Sous réserve des dispositions de l’article 139, le brevet européen ne peut être déclaré nul, avec effet pour un État contractant, que si :

a) l’objet du brevet européen n’est pas brevetable en vertu des article 52 à 57 (…) ; ».

L’article 54 de cette Convention stipule en outre que :

« (1) Une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique.

(2) L’état de la technique est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public avant la date de dépôt de la demande de brevet européen par une description écrite ou orale, un usage ou tout autre moyen.(…) ».

En l’espèce, pour contester la nouveauté de la revendication 1 du brevet EP 284 les sociétés INDUSTRIE Z A invoquent en premier lieu l’antériorité constituée par le dépôt de brevet PCT WO9708386 publié le 6 mars 1997, devenu le brevet américain 5840404 (document D4).

La revendication 1 de la demande PCT WO9708386 décrit une : « Feuille multicouche (10) absorbante à au moins deux couches (12, 14) constituées chacune d’au moins une feuille (16, 18, 20) gaufrée de papier absorbant crêpé, de poids compris entre 10 et 40g/m2 par feuille, avec une face externe formant la face externe de la feuille multicouche et une face interne, la face interne de la première couche (12)comportant des premières (22) et des deuxièmes (24) protubérances, et la face interne de la deuxième couche (14) comportant des troisièmes protubérances (26) imbriquées entre les protubérances (22, 24) de la première couche, les deux couches (12, 14) étant liées entre elles par une partie des sommets (28) des protubérances (22, 24) de la première couche (12) rendus solidaires, par collage, de la deuxième couche (14) entre deux troisièmes protubérances (26), caractérisée en ce que la première couche (12) est une feuille double constituée par :

- une feuille intérieure (16) dont la face interne comporte lesdites premières(22A) et deuxièmes (24A) protubérances ; et

- une feuille extérieure (18) dont la face interne comporte des premières protubérances (22B) coïncidant avec les premières protubérances (22A) de la feuille intérieure (16), et comporte des secondes protubérances (24B) coïncidant avec les deuxièmes protubérances (24A) de la feuille intérieure (16) ; »

Cependant, ainsi que le fait remarquer à juste titre la société SCA TISSUE FRANCE, le document D4 ne comprend pas un pli central ni ne divulgue une importante densité de protubérances supérieure à 30/cm2 de sorte qu’il ne constitue pas une antériorité de toutes pièces susceptible de priver de nouveauté la revendication 1.

Les sociétés INDUSTRIE Z A contestent encore la nouveauté de la revendication 1 du brevet français EP 284 au regard de l’antériorité constituée par la demande PCT W097/44529 (document D1) relative à un « Tissu papier multi plis avec des zones de réseaux continus ».

Cependant, la seule comparaison des figures 1 du brevet revendiqué et A du brevet opposé, dont les revendications n’ont pas été traduites, les sociétés INDUSTRIE Z A se bornant à communiquer les arguments tels que développés par la société du groupe SCA lors de l’opposition à l’encontre du brevet litigieux en 2009, ne permet pas de démontrer que ce dernier détruit la nouveauté de la revendication 1 du brevet EP 284 alors que les plis sont associés plutôt selon un assemblage « pointe-pointe » différent du mode « dit emboîté » du brevet litigieux, cette caractéristique ne pouvant être « réputée non écrite » comme l’allèguent les sociétés INDUSTRIE Z A alors que la notion d’emboîtement au sens du brevet, qui s’étend « au cas où le plan de liaison entre la surface distale des protubérances d’un premier pli gaufré et d’un second pli, se situe dans le même plan que le plan dudit second pli quelle que soit la position relative de la surface distale par rapport aux protubérances du second pli. Ainsi celle-ci peut se retrouver entre deux protubérances du second pli mais aussi recouvrir en partie ou totalement une de ces protubérances qui est de ce fait écrasée » est définie dans le paragraphe [11] et illustrée sur la figure 1, outre qu’il existait au moment du dépôt du brevet un troisième mode d’association de plis de papier absorbant à côté des modes « pointe-pointe » et « emboîté », à savoir la «rencontre aléatoire des têtes » ou « random » dans lequel « il est possible d’obtenir des encastrements précis mais également des rencontres de saillie contre saillie entraînant dans ce dernier cas un contre-gaufrage de certaines pointes (c’est-à-dire l’aplatissement de celles-ci) » ainsi que l’avait rappelé le tribunal civil de Rome dans son jugement du 27 avril 1987 invoqué à juste titre par les sociétés INDUSTRIE Z A.

Il s’ensuit que la document D1 ne constitue pas davantage une antériorité destructrice de la nouveauté de la première revendication.

La demande en nullité pour défaut de nouveauté de la revendication 1 du brevet EP 284 sera donc en conséquence rejetée.

Sur l’absence d’activité inventive du brevet

Sur la combinaison des antériorités D1 et D4

Les sociétés INDUSTRIE Z A font valoir que le dépôt PCT WO9708386 publié le 6 mars 1997 qui est devenu le brevet US 5840404 (document D4) relatif à un « papier absorbant multicouches et méthode de fabrication » et la demande PCT W097/44529 (D1) publiée le 27 novembre 1997 concernant un «tissu papier multi-plis avec des zones de réseau continu » portent sur le même domaine technique et résolvent le même problème technique que celui du brevet EP 284 de sorte que l’enseignement de la revendication 1 était évident pour l’homme du métier, détruisant par la même l’activité inventive du brevet EP 284.

La société SCA TISSUE FRANCE rétorque que les sociétés INDUSTRIE Z A ne fournissent aucun détail ni sur le problème technique auquel serait confronté l’homme du métier ni sur sa démarche pour parvenir de façon évidente à la solution. Elle oppose au contraire que l’homme du métier n’aurait pas déduit du document D4 une densité de protubérances supérieures à 30/cm2 ou un pli central non gaufré au sens du brevet EP 284. Elle ajoute que rien n’aurait permis à l’homme du métier d’associer les documents D1 et D4 alors que ces documents concernent des produits différents. Elle fait valoir que dans le document D1 les dômes qui sont obtenus par voie humide ne sont pas des protubérances obtenues par gaufrage et sont associés en mode pointe-pointe alors que dans le document D4 les protubérances sont obtenues par gaufrage et l’association des plis gaufrés du papier est réalisée en mode « emboîté ». Elle ajoute que ni D1 ni D4 ne divulguent la densité d’au moins 30 protubérances par cm2 pour des protubérances du pli gaufré.

Sur les enseignements de la décision américaine Perini de 1986

Les sociétés INDUSTRIE Z A font valoir qu’il résulte du jugement rendu aux Etats Unis le 30 décembre 1986 relativement à une machine « Double Embossed Ramdom Laminating II » dite DERL II, laquelle ne positionne pas de manière synchrone les saillies des deux bandes pour former un produit parfaitement emboîté, que le produit résultant de cette machine présente des protubérances écrasées qui peuvent apparaître au sein de taches couvrant jusqu’à 85% du rouleau des serviettes, et qu’en conséquence le fait d’avoir un produit comportant trois plis avec tantôt des protubérances emboîtées, tantôt des protubérances pointe-pointe écrasées était connu de l’homme du métier. Elles ajoutent que cet état de la technique était décrit dans la décision du tribunal de Rome du 12 mai 1987 évoquant un troisième mode d’association appelé « rencontre aléatoire des têtes » ou « random » dans laquelle les têtes sont estampées de manière opposée mais la rencontre des têtes est purement aléatoire, et « il est possible d’obtenir des encastrements précis mais également des rencontres de saillie contre saillie entraînant dans ce dernier cas un contre-gaufrage de certaines pointes (c’est-à-dire l’aplatissement de celles-ci) », et qu’il était en conséquence « évident pour l’homme du métier d’appliquer ce fait connu dans le cadre de la technique décrite (…) dans le brevet EP 284 ».

La société SCA TISSUE FRANCE oppose que les sociétés INDUSTRIE Z A ne procèdent que par affirmation sans expliciter les compétences de l’homme du métier et démontrer en quoi il était évident d’aboutir à l’invention, outre qu’elles raisonnent en connaissant la solution recherchée. Elle ajoute que la décision américaine ne décrit qu’une machine et un procédé sans donner le moindre détail sur le produit papier en résultant.

Sur l’antériorité du brevet français n° 98 02792

Les sociétés INDUSTRIE Z A font valoir que la demande de brevet n°98 02792 citée dans le brevet au titre de l’art antérieur décrit des protubérances en partie en pointe-pointe et en partie en emboîtement outre qu’elle prévoit aussi un pli à motifs de niveaux différents de sorte que la nouveauté de la revendication est détruite.

La société SCA TISSUE FRANCE oppose que le brevet français 98 02792 n’ayant été publié que le 31 août 1999 c’est à dire postérieurement au dépôt du brevet litigieux EP 284, il est inopposable sur le fondement de l’article L. 611-4 du code de la propriété intellectuelle.

Sur ce,

Il ressort de l’article L. 614-12 du code de la propriété intellectuelle que la nullité du brevet européen est prononcée en ce qui concerne la France par décision de justice pour l’un quelconque des motifs visés à l’article 138 paragraphe 1 précité de la Convention de Munich.

L’article 138 paragraphe 1 de ladite convention stipule que : « Sous réserve de l’article 139, le brevet européen ne peut être déclaré nul, avec effet pour un État contractant, que si :

a) l’objet du brevet européen n’est pas brevetable en vertu des articles 52 à 57 ;

(…) ».

En outre, selon l’article 56 de la Convention de Munich du 5 octobre 1973 sur la délivrance de brevets européens « une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d’une activité évidente de l’état de la technique ».

Il ressort de ces articles que pour apprécier l’activité inventive d’un brevet, il convient de déterminer d’une part, l’état de la technique le plus proche, d’autre part le problème technique objectif à résoudre et enfin d’examiner si l’invention revendiquée, en partant de l’état de la technique le plus proche et du problème technique objectif, aurait été évidente pour l’homme du métier.

Sur la combinaison des antériorités D1 et D4

Les sociétés INDUSTRIE Z A se bornent à affirmer dans un paragraphe de cinq lignes renvoyant à leurs développements sur le défaut de nouveauté que du fait des antériorités D1 et D4 l’enseignement de la revendication 1 du brevet EP 284 était évident pour l’homme du métier sans le démontrer.

Il n’est donc pas démontré comment en partant de l’antériorité D4, que les sociétés INDUSTRIE Z A sans le dire expressément semblent retenir comme l’état de la technique le plus proche, l’homme du métier qui est un technicien des papiers à usage sanitaire, en particulier des papiers toilette, et qui est confronté au problème de ce que les produits constitués de plis liés par emboîtement, dont la fabrication ne présente pas l’inconvénient d’une usure prématurée des cylindres, ne peuvent en revanche comporter une forte densité de picots du fait d’une insuffisante précision dans la synchronisation des cylindres, et ne sont donc pas épais et doux, arrive de manière évidente à la revendication 1 du brevet EP 284, qui divulgue un produit d’au moins trois plis, deux plis externes gaufrés et un pli central, dont au moins un des plis externes a une densité de motifs supérieure à 30 protubérances /cm2, le pli inférieur présentant un premier motif et un second motif ayant une hauteur inférieure à celle du premier motif caractérisé en ce que le pli central et le pli externe supérieur sont associés dans un mode dit « emboîté » audit pli inférieur, au niveau d’au moins une partie des sommets du premier motif du pli inférieur, les protubérances du premier pli pouvant se retrouver entre deux protubérances du second pli mais aussi recouvrir totalement ou en partie une de ces protubérances ainsi écrasée, tel que défini dans le paragraphe [11] du brevet.

Il s’ensuit que la demande de nullité pour défaut d’activité inventive résultant de la combinaison des antériorités D1 et D4 sera rejetée.

Sur les enseignements de la décision américaine Perini de 1986

Là encore les sociétés INDUSTRIE Z A se bornent à invoquer les attendus de la décision Perini relativement à la machine DERL II ainsi que l’attendu de la décision du tribunal de ROME relativement aux modes d’association connus de plis de papier joints pour en conclure qu’il « était évident d’appliquer ce fait connu dans le cadre de la technique du brevet EP 284 » sans expliciter comment l’homme du métier pouvait sans activité inventive en partant de la décision Perini et de l’état de la technique arriver à la revendication 1 du brevet EP 284.

Il s’ensuit que la demande de nullité pour défaut d’activité inventive résultant de la décision américaine Perini sera rejetée.

Sur l’antériorité du brevet français n° 98 02792

Aux termes du troisième alinéa de l’article L. 611-11 du code de la propriété intellectuelle : « Est également considéré comme compris dans l’état de la technique le contenu de demandes de brevet français et de demandes de brevet européen ou international désignant la France, telles qu’elles ont été déposées, qui ont une date de dépôt antérieure à celle mentionnée au second alinéa du présent article et qui n’ont été publiées qu’à cette date ou qu’à une date postérieure ».

En outre l’article L. 611-14 qui définit l’activité inventive dispose : «(…).Si l’état de la technique comprend des documents mentionnés au troisième alinéa de l’article L. 611-11, ils ne sont pas pris en considération pour l’appréciation de l’activité inventive ».

Il suit de ces dispositions que les demandes de brevet qui n’ont été publiées que postérieurement au dépôt de la demande de brevet dont la validité est contesté ne sont pas pris en compte dans l’état de la technique pour l’appréciation de l’activité inventive.

Il s’ensuit que le moyen tiré du défaut d’activité inventive fondé sur la demande de brevet N°98 02792 publiée le 10 septembre 1999 c’est à dire postérieurement au 31 août 1999, date de dépôt du brevet litigieux EP 284, sera rejeté.

Les moyens tirés du défaut de nouveauté et d’activité inventive ayant été rejetés, il y a lieu de dire que la revendication 1 du brevet EP 294 est valide. Les revendications 2, 3, 4, 6, et 7, étant dépendantes de la revendication 1 qui est valable, elles sont également valables.

Sur la contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 4, 6 et 7

Sur la nullité des opérations de constat diligentées entre le 28 octobre 2014 et le 24 novembre 2015

Les sociétés INDUSTRIE Z A font valoir qu’entre le 28 octobre 2014 et le 24 novembre 2015 la société SCA TISSUE FRANCE a fait diligenter différentes opérations de constat dont l’objectif est d’établir l’existence d’une contrefaçon et d’aboutir à la description détaillée des produits litigieux, de sorte que ces procès-verbaux s’appréhendent comme une seule et même opération et qu’il s’agit d’une saisie descriptive déguisée sans autorisation du juge, ainsi qu’il résulte notamment des mots du vocabulaire employé par l’huissier de justice dans son procès-verbal de constat du 24 novembre 2015 (les plis externes «sont dits gaufrés » et des petits points visibles sont quant à eux « dits picots ») qui lui ont été dictés par les préposés de la société SCA TISSUE FRANCE de sorte que le procès-verbal de constat du 24 novembre 2015 doit être annulé, ainsi que tous les procès-verbaux de constat d’achat des produits.

Elles ajoutent qu’il ressort du constat lui-même que l’huissier ne s’est pas cantonné à son rôle de constatant mais a bien pris part aux opérations comme au sein d’une même équipe avec la société SCA TISSUE FRANCE, l’emploi du pronom « nous » étant révélateur de sa démarche.

Elle font valoir qu’en matière de saisie-contrefaçon, la jurisprudence requiert que le procès-verbal de saisie distingue clairement les constatations de l’huissier et les déclarations des experts, sous peine de nullité des opérations de saisie, et que les experts qui interviennent dans la saisie ne peuvent en aucun cas être des préposés du breveté, ce qui n’est pas le cas du procès-verbal de constat du 24 novembre 2015, lequel est donc nul et ne peut servir de preuve pour établir la contrefaçon alléguée.

Elles concluent que ce constat se confondant dans une démarche de la société SCA pour obtenir une saisie descriptive des produits argués de contrefaçon sans pour autant respecter les règles exclusives de l’article L.615-5 du code de la propriété intellectuelle relatives à la saisie-contrefaçon de brevet, sa nullité ressurgit sur l’ensemble des procès-verbaux visés à l’assignation, dressés dans le même but final d’une saisie descriptive des produits « Foxy Soie Plus », « Labell le Moelleux » et « Ultra Douceur », à savoir les procès-verbaux des 28 octobre 2014, 19 janvier 2015, 2 septembre 2015, 13 novembre 2015 et 23 novembre 2015.

La société SCA rétorque qu’elle a fait constater les achats suivants :

• le 28 octobre 2014, un paquet de 9 rouleaux de papier toilette de la marque « Foxy Soie Plus » au supermarché E.Leclerc de Saint-Ouen-l’Aumône ;

• le 19 janvier 2015, un paquet de 12 rouleaux de papier toilette de la marque « Labell le Moelleux » au supermarché Intermarché à Vigneux-sur-Seine

• le 2 septembre 2015, un paquet de 9 rouleaux de papier toilette de la marque « Leader Price – Ultra Douceur » au supermarché Franprix à Boulogne-Billancourt ;

• le 13 novembre 2015, quatre paquets de 9 rouleaux de papier toilette vendus sous la marque « Foxy Soie Plus » au supermarché E.Leclerc d’Osny.

Elle explique qu’une fois mis sous scellés par les huissiers ayant constaté leurs achats, les paquets de papier toilette ont été envoyés à Maître X, huissier de justice à Colmar, afin qu’ils soient analysés en sa présence au centre de recherche de la société SCA à Y, et qu’il a été procédé à un procès-verbal de constat d’ouverture le 23 novembre 2015.

Elle précise qu’avant que les paquets ne soient apportés par Maître X à Y, ce dernier en a extrait un rouleau de chacun, que les rouleaux extraits ont ensuite été envoyés à un laboratoire d’analyses en Espagne, le laboratoire Tecnalia, qui dispose des appareils nécessaires à la prise d’images en coupe (micrographies) des feuilles de papier toilette.

Elle oppose qu’il ne s’agit pas d’une saisie-contrefaçon déguisée alors que les opérations ont été menées dans ses propres locaux, mais qu’il s’agit d’analyses effectuées par elle sur des produits qui sont dans le commerce et qui y ont été achetés sans fraude.

Elle ajoute que les rouleaux, objets des procès-verbaux de constat d’achat, sont les rouleaux, objets des analyses du 24 novembre 2015 effectuées en présence d’un huissier de justice pour assurer la traçabilité des produits analysés, et que rien n’interdit au demandeur à la contrefaçon de rapporter la preuve de la contrefaçon qu’il allègue par le biais d’analyses non contradictoires, dès lors qu’elles sont versées au débat et peuvent donc faire l’objet d’un débat contradictoire.

Sur ce,

Aux termes de l’article 1er de l’ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers, les huissiers de justice peuvent, commis par justice ou à la requête de particuliers, effectuer des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les circonstances de fait ou de droit qui peuvent en résulter.

Sur le procès-verbal du 24 novembre 2015

Il résulte du procès-verbal de constat en date du 24 novembre 2015 que l’huissier de justice est accueilli dans les locaux de la société SCA TISSUE FRANCE par trois personnes salariés de la société SCA TISSUE FRANCE qui lui déclarent que « seuls les échantillons en provenance de France seront analysés ce jour », que « pour la première analyse sera utilisé un matériel informatique fourni par la société Breuckmann se composant d’une caméra qui (…) va générer des images du papier toilette avec effet de relief », « qu’une fois l’image acquise, elle est récupérée par un second logiciel toujours fourni par la même société qui va assurer la visualisation de l’image, et qu’un document illustrant cette méthode lui est remis et sera joint au constat ».

L’huissier de justice mentionne ensuite : «Nous décidons de commencer par l’échantillon «LABELL LE MOELLEUX» ; «je constate que la feuille est constituée de trois feuilles que nous appelons plis» ; «les plis externes portent des marques. Ils sont dits gaufrés» ; «le pli côté extérieur du rouleau présente des motifs en sus des petits points visibles dits picots» ; « nous utilisons la caméra couplée à l’ordinateur» ; «nous comptons 59 marques de couleur bleue, dites protubérances dans le carré sélectionné » ;« nous prenons un autre morceau du même rouleau pour faire la même mesure sur la deuxième face du papier»; «nous comptons 49 protubérances sur ce deuxième côté de l’échantillon dans le carré sélectionné » ;« nous procédons suivant la même méthode pour la face intérieure de l’échantillon ; nous prenons un échantillon du rouleau pour faire les opérations relatives à la densité des protubérances».

Il résulte des mentions susvisées du procès-verbal en date du 24 novembre 2015 de constat d’opérations qui ont duré plus de 8 heures que l’huissier de justice en employant la première personne du pluriel n’a pas distingué ses propres constatations de ce qui lui était indiqué par les techniciens de la société requérante, outre qu’en reprenant des termes techniques du type « pli gaufré », « picot » ou « protubérance » qui échappent à sa compétence technique, il ne s’est pas borné à effectuer des constations purement matérielles, de sorte qu’il a outrepassé les pouvoirs qu’il tient de l’article 1er de l’ordonnance du 2 novembre 1945 susvisé.

Au vu de ces éléments, il y a lieu d’annuler le procès-verbal dressé par Maître D X, huissier de justice le 24 novembre 2015.

Sur les procès-verbaux de constat d’achat des 28 octobre 2014, 19 janvier 2015 , 2 septembre 2015 et 13 novembre 2015 et le procès-verbal de constat d’ouverture du 23 novembre 2015

Les sociétés INDUSTRIE Z A ne peuvent être suivies lorsqu’elles prétendent que l’annulation du procès-verbal de constat du 24 novembre 2015 entraîne de facto la nullité des procès-verbaux d’achat et d’ouverture comme faisant partie d’un même ensemble d’opérations, alors que lesdits procès-verbaux de constat sont antérieurs, et qu’il s’agit de simples constat d’achat et d’ouverture de scellés dont les éventuelles irrégularités doivent être examinées pour des motifs intrinsèques à chaque procès-verbal. Leur demande d’annulation de ce chef sera rejetée.

Sur la nullité des procès-verbaux de constat d’achat des 19 janvier 2015 et 2 septembre 2015

Les sociétés INDUSTRIE Z A soutiennent que les procès-verbaux de constat d’achat des 19 janvier et 2 septembre 2015 sont nuls pour des motifs qui leur sont propres, à savoir que le produit « Labell le Moelleux » objet du constat d’achat du 19 janvier 2015 et le produit « Ultra Douceur » objet du constat d’achat du 2 septembre 2015 ont été achetés par des stagiaires au sein du Cabinet d’avocats HOYNG MONEGIER, et que conformément à l’arrêt de la Cour de cassation du 25 janvier 2017 le droit à un procès équitable consacré par l’article 6 § 1 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales commande que la personne qui assiste l’huissier instrumentaire lors de l’établissement d’un procès-verbal de constat soit indépendante de la partie requérante, que cette jurisprudence est transposable au cas d’espèce et ce d’autant que l’indépendance de la personne assistant l’huissier de justice est d’autant plus fondamentale que la société SCA TISSUE FRANCE a agi en dehors de toutes autorisation pour conduire des opérations de saisie-contrefaçon déguisées.

La société SCA TISSUE FRANCE conteste le moyen tiré du défaut d’indépendance du stagiaire alors qu’un avocat est indépendant de sorte qu’il en va de même du stagiaire de l’avocat qui est sous sa responsabilité, outre qu’il n’est démontré aucune manoeuvre déloyale. Elle fait observer qu’avant le 4 mai 2017 les sociétés défenderesse n’avaient émis aucune critique à l’encontre des procès-verbaux.

Sur ce,

Le droit à un procès équitable consacré par l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ensemble le principe de loyauté dans l’administration de la preuve, commande que la personne qui assiste l’huissier instrumentaire lors de l’établissement d’un procès-verbal de constat soit indépendante de la partie requérante.

Il résulte du procès-verbal de constat dressé le 19 janvier 2015, que l’huissier de justice s’est transporté au magasin Intermarché en compagnie de Mademoiselle F G qui est entrée dans le magasin et en est ressortie avec un paquet de rouleaux de papier toilette « LABELL LE MOELLEUX » et un ticket de caisse, l’huissier de justice déclarant que Mademoiselle F G n’est ni au service de la société SCA TISSUE FRANCE ni à son service. Il résulte cependant du profil Linkedin de Mademoiselle F G qu’elle était à cette époque stagiaire du cabinet d’avocat, conseil de la société SCA TISSUE FRANCE de sorte que l’achat ne peut être considéré comme satisfaisant au principe de loyauté dans l’administration de la preuve.

De même, il résulte du procès-verbal de constat dressé le 2 septembre 2015, que l’huissier de justice s’est transporté au magasin Franprix en compagnie de Mademoiselle H I qui est entrée dans le magasin et en est ressortie avec un paquet de rouleaux de papier toilette « LEADER PRICE ULTRA DOUCEUR » et un ticket de caisse, l’huissier de justice déclarant que Mademoiselle H I est stagiaire du cabinet d’avocat, conseil de la société SCA TISSUE FRANCE de sorte que l’achat ne peut être considéré comme satisfaisant au principe de loyauté dans l’administration de la preuve.

Il s’ensuit que les procès-verbaux de constat d’achat des 19 janvier et 2 septembre 2015 seront annulés, et qu’en conséquence les produits « LABELL LE MOELLEUX » et « LEADER PRICE ULTRA DOUCEUR »sont écartés des débats.

Sur la demande d’écarter des débats les rapports TECNALIA

Les sociétés INDUSTRIE Z A soutiennent que les rapports Tecnalia sont fondés sur des produits extraits d’opérations qui sont nulles, car consistant en un contournement des règles de la saisie-contrefaçon.

La société SCA TISSUE FRANCE rétorque que les procès-verbaux sont valables et que l’existence des produits en cause n’est pas contesté.

Sur ce,

Les rapports TECNALIA (pièces 22-1 et 23-1) relatifs aux produits « LABELL LE MOELLEUX » et « LEADER PRICE ULTRA DOUCEUR » dont les opérations de constat d’achat ont été annulées seront en conséquence écartés des débats. En revanche le rapport TECNALIA (pièce 24-1) relatif au produit « FOXY SOIE PLUS » dont l’achat a été régulier, est maintenu dans les débats, les contestations relatives à sa force probante étant examinées ci-dessous.

Sur la contrefaçon des revendications 1, 2, 3, 4, 6 et 7

La société SCA TISSUE FRANCE soutient que le grammage du papier « FOXY SOIE PLUS » qui est de 51,4 g/m2 est compris dans la fourchette de la caractéristique, qu’il s’agit d’un papier composé de deux plis externes et d’un pli central, que les deux plis externes sont gaufrés et ont tous deux des motifs en relief constitués de protubérances discrètes par micro-gaufrage, que les sommets de ces protubérances sont tournés vers l’intérieur de la feuille et que l’un des plis a deux motifs ; que l’un des plis externe présente 34 protubérances par cm2 tandis que l’autre en présente 50/cm2 ; que les protubérances les plus larges sont plus profondes ; que les plis sont associés par emboitement au niveau des larges et hautes protubérances de l’un des plis externes, ces emboîtements au niveau du motif large étant les seuls points d’attache des trois plis les uns avec les autres de sorte que le papier toilette « FOXY SOIE PLUS » reproduit toutes les caractéristiques de la revendication 1.

Les sociétés INDUSTRIE Z A opposent que dans le produit « FOXY SOIE PLUS » le pli central et le pli gaufré ne sont pas associés dans le mode dit emboîté audit pli externe inférieur gaufré en ce que ce produit est fabriqué comme enseigné dans le brevet européen EP 859 dont la société ICT est propriétaire. Elles ajoutent que le pli 3 du produit « FOXY SOIE PLUS » ne présente aucune protubérance ou motifs permettant un emboîtement mais seulement des picots, que l’unification du premier pli externe et du pli central avec le second pli externe est réalisé par un procédé de pressage à plat au moyen du cylindre, et non par emboîtement, et que l’ensemble gaufré constitué du pli supérieur externe et du pli central n’est pas associé dans un mode dit emboîté au pli externe inférieur 3. Elles soutiennent que ces différences sont illustrées par les représentations en trois dimensions, une plaque en plexiglas représentant la surface du pli supérieur sur une plaque en laiton représentant le pli inférieur, de la figure 1 du brevet EP 284, qui montre un emboîtement, et de celle du produit « FOXY SOIE PLUS » qui n’est pas réalisé en mode dit emboîté, en ce que les protubérances les plus élevées de la plaque de laiton ne rentrent pas dans les creux entre les protubérances de la plaque de plexiglas, de sorte qu’un assemblage ne peut être réalisé qu’en appliquant une pression et en détruisant le gaufrage du pli inférieur, chaque protubérance du plis supérieur écrasant de nombreuses protubérances du pli inférieur. Elles soutiennent en outre que les analyses qu’elles ont fait effectuer par le laboratoire PTS démontrent l’existence d’un delta Z entre les différents points de jonction des plis ce qui fait qu’ils ne sont pas sur u même plan contrairement à la revendication 1. Elles prétendent enfin que dans le brevet revendiqué le pli central n’est pas gaufré alors que le produit incriminé a un pli central gaufré, ce motif étant suffisant pour écarter le grief de reproduction de la revendication 1. Elles font valoir enfin que dans le produit « FOXY SOIE PLUS » il y a deux motifs sur le pli supérieur, un premier composé de lignes continues sans protubérances et un second constitué de points, le premier motif étant plus grand dans la hauteur et concernant aussi le pli central gaufré, que le pli inférieur externe est gaufré grâce à un cylindre distinct appliquant un autre motif constitué de points de sorte que le pli central et le pli supérieur externe gaufré ne sont pas unis de manière emboîtée avec le pli inférieur externe qui est gaufré indépendamment

Sur ce,

Aux termes de l’article L.613-3 a) du Code de la propriété intellectuelle, « Sont interdites, à défaut de consentement du propriétaire du brevet, la fabrication, l’offre, la mise dans le commerce, l’utilisation ou bien l’importation ou la détention aux fins précitées du produit objet du brevet ».

Il sera rappelé que la revendication 1 du brevet EP'284 est ainsi rédigée: « Produit en papier absorbant d’un grammage d’environ 36 à environ 105 g/m² comprenant au moins trois plis, deux plis externes, inférieur et supérieur, gaufrés, comportant chacun des motifs en relief consistant au moins en partie en des protubérances discrètes, et un pli central, les surfaces distales d’au moins une partie des protubérances de chacun desdits plis externes étant tournées vers le pli central, et au moins l’un des plis externes ayant une densité de motifs supérieure à 30 protubérances/cm², le pli externe inférieur gaufré (2) présentant un premier (5) et un second (7) motif, le second motif ayant une hauteur inférieure à celle du premier motif, caractérisé en ce que le pli central (4) et le pli externe supérieur gaufré (3) sont associés dans un mode dit « emboîté » audit pli externe inférieur gaufré (2), au niveau d’au moins une partie des sommets du premier motif (5) dudit pli externe inférieur gaufré (2). »

Le brevet définit en outre dans le paragraphe [11] la notion de mode « dit emboîté » en précisant : « Dans le texte qui suit, on étend la définition du terme « emboîté » ou « nested » au cas où le plan de liaison entre la surface distale des protubérances d’un premier pli gaufré et d’un second pli, se situe dans le même plan que le plan dudit second pli quelle que soit la position relative de la surface distale par rapport aux protubérances du second pli. Ainsi celle-ci peut se retrouver entre deux protubérances du second pli mais aussi recouvrir en partie ou totalement une de ces protubérances qui est de ce fait écrasée ».

Le rapport TECNALIA produit par la société SCA TISSUE FRANCE, qui a permis d’observer les trois plis du papier « FOXY SOIE PLUS » en coupe au microscope optique, et qui se borne à constater « on observe les trois plis avec les petites protubérances (marques en bleu) dans la zone où les plis ne sont pas unis et des protubérances plus profondes (marquées en rouge) là où les trois plis sont unis » sans aucune précision sur le mode d’association, ne démontre pas que le pli central et le pli externe supérieur gaufré sont associés dans un mode dit « emboîté » audit pli externe inférieur gaufré, au niveau d’au moins une partie des sommets du premier motif dudit pli externe inférieur gaufré, alors au contraire que les graphiques du laboratoire PTS produit par les sociétés INDUSTRIE Z A décrivent qu’il n’y a pas d’emboîtement des trois plis les uns avec les autres sur le même plan que le pli externe puisqu’il existe un delta « z » entre les différents points de jonction des plis démontrant qu’ils ne sont pas sur le même plan.

Il s’ensuit que la contrefaçon de la revendication 1 n’est pas caractérisée, pas plus que celle des revendications 2, 3, 4, 6 et 7 qui sont dépendantes de la revendication 1.

La société SCA TISSUE FRANCE sera donc déboutée de l’ensemble de ses demandes.

Sur les autres demandes

Il y a lieu de condamner la société SCA TISSUE FRANCE, partie perdante, aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

En outre, elle doit être condamnée à verser aux sociétés INDUSTRIE Z A qui ont dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir leurs droits, une indemnité au titre de l’article 700 du Code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à la somme de 100.000 euros soit 50.000 euros pour chacune des défenderesses.

Enfin, l’exécution provisoire, compatible avec l’ancienneté et la nature du litige, sera ordonnée.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort,

DEBOUTE les sociétés INDUSTRIE Z A de leurs demandes en nullité des revendications 1, 2, 3, 4, 6 et 7 du brevet européen n° 1 081 284 B1 pour défaut de nouveauté et d’activité inventive ;

ANNULE les procès-verbaux de constat en date des 19 janvier 2015, 2 septembre 2015 et 24 novembre 2015 ;

REJETTE la demande des sociétés INDUSTRIE Z A FRANCE et INDUSTRIE Z A SPA tendant à l’annulation du procès-verbal de constat des 28 octobre 2014, 13 novembre et 23 novembre 2015 ;

ECARTE des débats les rapports TECNALIA relatifs aux produits « LABELL LE MOELLEUX » et « LEADER PRICE ULTRA DOUCEUR (pièces 22-1 et 23-1) ;

DEBOUTE la société SCA TISSUE FRANCE de l’ensemble de ses demandes sur le fondement de la contrefaçon de brevet ;

CONDAMNE la société SCA TISSUE FRANCE à payer aux sociétés INDUSTRIE Z A FRANCE et INDUSTRIE Z A SPA la somme de 50.000 euros chacune au titre de l’article 700 du Code de procédure civile;

CONDAMNE la société SCA TISSUE FRANCE aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile ;

ORDONNE l’exécution provisoire de la présente décision.

Fait et jugé à Paris le 22 décembre 2017

Le Greffier Le Président

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Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre 2e section, 22 décembre 2017, n° 16/07565