Tribunal de grande instance de Pontoise, Juge des référés, 27 décembre 2017, n° 17/00390

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Pontoise, juge des réf., 27 déc. 2017, n° 17/00390
Juridiction : Tribunal de grande instance de Pontoise
Numéro(s) : 17/00390

Texte intégral

DU 27 Décembre 2017 N° minute :

N° 17/00390

N° 17/00464

Madame Y Z épouse X

Madame A B

Monsieur C X

Monsieur D E

C/

[…]

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE

DE PONTOISE

---===ooo§ooo===---

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

---===ooo§ooo===---

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

DEMANDEURS:

Madame Y Z épouse X, demeurant 21 rue Hélie Denoix de Saint-Marc – 95320 […]

Madame A B, demeurant 17 rue Hélie Denoix de Saint-Marc – 95320 SIANT LEU LA FORET

Monsieur C X, demeurant 21 rue Hélie Denoix de Saint-Marc – 95320 […]

Monsieur D E, demeurant 17 rue Hélie Denoix de Saint-Marc – 95320 […]

représentés par Me Gaëlle LE DEUN, avocat au barreau de VAL D’OISE, vestiaire : 33

DÉFENDERESSE:

[…], dont le siège social est sis 217 rue du Faubourg Saint-Honoré – 75008 PARIS

représentée par Maître Renaud DUBOIS de la SCP KRAMER LEVIN NAFTALIS & FRANKEL LLP, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : J008

Monsieur C X et Madame Y X sont propriétaires au sein d’un lotissement comprenant 14 biens immobiliers ainsi que des immeubles d’habitation, d’une maison individuelle, située à […], cadastrée […] », grevée d’une servitude de cour commune et de vue, acquise en l’état futur d’achèvement auprès de la SCCV LES GRANDES TANNIERES.

Monsieur D E et Madame A B sont quant à eux propriétaires d’une maison individuelle acquise selon les mêmes modalités située à […], cadastrée […] », grevée de servitudes identiques.

Le 8 avril 2016, le notaire de la SCCV a adressé aux quatre propriétaires un projet d’acte de constitution de servitude ainsi qu’une procuration prévoyant une servitude de canalisation et de réseau sur leurs terrains en qualité de fonds servants.

S’estimant atteints dans leur droit de propriété par un trouble manifestement illicite, les époux X et les consorts E-B n’ont donné aucune suite.

Par exploit d’huissier en date du 24 avril 2017 et du 15 mai 2017, ils ont saisi la juridiction de céans sur le fondement de l’article 809 du code de procédure civile aux fins de :

— ordonner à la SCCV DES GRANDES TANNIERES de retirer les canalisations litigieuses en partie souterraine de leurs propriétés respectives, les regards ainsi que tout autre réseau passant à ces endroits sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de trois mois à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir,

— dire que la SCCV DES GRANDES TANNIERES devra les prévenir au moins 15 jours avant le jour et l’heure de l’intervention,

— condamner la SCCV DES GRANDES TANNIERES à leur verser chacun (époux X d’une part et consorts E-B d’autre part) une indemnité provisionnelle de 5 000 euros,

— condamner la SCCV DES GRANDES TANNIERES à leur verser chacun (époux X d’une part et consorts E-B d’autre part) la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Lors de l’audience, les demandeurs ont maintenu le bénéfice de leur exploit introductif d’instance expliquant que les canalisations litigieuses n’étaient pas apparentes, ce qui rend la garantie des vices cachés inapplicable et par conséquent l’argument de la forclusion de la demande inopérant, ajoutant que le bien vendu n’est pas conforme à l’acte de vente qui ne prévoyait pas de canalisations souterraines dont ils ont appris l’existence en avril 2016, au surplus « non visibles au premier coup d’œil par un profane».

Ils font valoir que les canalisations litigieuses sont des servitudes non apparentes qui ne peuvent s’établir que par titres, en l’absence desquelles elles sont constituées de façon illégale, générant ainsi un trouble manifestement illicite.

S’agissant de la demande de provision sur dommages et intérêts, les époux X la justifient par le fait qu’ils se sont rapidement manifestés auprès de la société BRICQUEVILLE, gérante de la SCCV, après la livraison, puis régulièrement jusqu’en mars 2016 afin de faire déplacer les canalisations, et qu’ils n’ont jamais accepté de régulariser la constitution de servitude qui leur a été adressée par le notaire de la SCCV en avril 2016.

Les consorts B-E expliquent pareillement qu’ils n’ont pas « perçu la difficulté immédiatement » et qu’ils n’ont jamais régularisé la constitution de servitude.

La SSCV soulève la forclusion de la demande en application des dispositions des articles 1642-1 et 1648 alinéa 2 du code civil, et l’existence d’une contestation sérieuse liée à l’absence de trouble manifestement illicite.

S’agissant de la forclusion, elle indique que les regards situés dans les jardins des demandeurs étaient « nécessairement apparents » lors de la livraison intervenue le 4 novembre 2015 puis ultérieurement, et que leur présence ne constitue pas un défaut de conformité relevant de l’obligation de délivrance du vendeur échappant aux textes suscités comme le croient les requérants.

La SCCV allègue par ailleurs que les demandeurs ne démontrent pas l’existence d’un trouble manifestement illicite résultant de la présence des canalisations en tréfonds, et se bornent à affirmer que l’atteinte à leur droit de propriété constitue à elle seule ce trouble, le cadre juridique de la construction (VEFA) imposant de plus « une flexibilité et une adaptabilité en fonction des contraintes techniques rencontrées à l’occasion de la construction de l’immeuble ou des immeubles», le contrat de vente et le plan annexé à l’acte de vente prévoyant une possibilité d’aménagement ou de modification si bien que le trouble allégué ne peut revêtir le caractère d’illicéité prévu par l’article 809 alinéa 2 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire, la SCCV estime que la mesure sollicitée n’est pas « une mesure conservatoire ou de remise en état » mais un acte « définitif et irréversible », qui se heurte par ailleurs aux dispositions de l’article 1638 du code civil prévoyant la résolution de la vente ou le bénéfice d’une indemnité dans pareil cas.

La demande d’indemnité provisionnelle sera selon elle également rejetée en l’absence de trouble lié à la présence des canalisations en tréfonds et compte tenu de la stipulation contractuelle prévoyant la possibilité d’apporter des modifications aux plans, la preuve du quantum du préjudice allégué n’étant pas de surcroît rapportée.

La SCCV demande enfin la condamnation des époux X d’une part, et des consorts E-B d’autre part à lui verser chacun la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

L’affaire a été mise en délibéré au 20 décembre 2017, prorogé au 27 décembre 2017.

La Présidente a rendu l’ordonnance dont la teneur suit.

Nous, H I-J, Vice-Présidente au Tribunal de Grande Instance de PONTOISE, assistée de F G, Greffier.

Il ya lieu d’ordonner la jonction de l’instance numéro 17/00464 avec l’affaire numéro 17/00390.

Selon les dispositions de l’ article 809 alinéa 2 du code de procédure civile, le juge des référés peut ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend ; il peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Sur la forclusion

Comme le soutiennent à bon droit les demandeurs, des canalisations souterraines, non prévues au contrat de vente, ne sont pas par définition apparentes, et ne peuvent par conséquent obéir au régime juridique de la forclusion prévu par les dispositions des articles 1642-1 et 1648 alinéa 2 du code civil.

Dès lors, l’action intentée par les époux X et les consorts E-B n’est pas forclose.

Sur la demande principale

La mesure de retrait des canalisations souterraines et des regards sollicitée par les demandeurs suppose l’existence d’un trouble manifestement illicite que ceux-ci caractérisent par l’atteinte à leur droit de propriété, laquelle repose sur les canalisations non apparentes litigieuses.

Or, compte tenu de la nature du contrat de vente (vente en l’état futur d’achèvement) et des stipulations contractuelles prévoyant la possibilité d’apporter aux plans initiaux, « des modifications rendues nécessaires ou exigées par des sujétions techniques imprévues », la seule atteinte au droit de propriété ne saurait démontrer « la perturbation résultant d’un fait matériel ou juridique, qui, directement ou indirectement, constitue une violation de la règle de droit ».

La preuve du trouble manifestement illicite n’étant pas rapportée, il y a lieu de considérer que la demande principale se heurte à une contestation sérieuse qui ne saurait être tranchée par le juge de l’évidence.

Sur les frais de procédure et les dépens

Il y a lieu de débouter les parties de leurs demandes formées au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, chacune conservant par ailleurs les dépens engagés par elle.

PAR CES MOTIFS:

Nous, H I-J, Vice-Présidente au Tribunal de Grande Instance de PONTOISE, assistée de F G Greffier, statuant publiquement en référé, par ordonnance contradictoire, rendue par mise à disposition au greffe à la date indiquée aux parties et en premier ressort;

Vu les dispositions de l’article 809 alinéa 2 du code de procédure civile,

ORDONNONS la jonction de l’instance numéro 17/00464 avec l’affaire numéro 17/00390.

DISONS que l’action intentée par les époux X et les consorts E-B à l’encontre de la SCCV DES GRANDES TANNIERES n’est pas forclose.

DISONS n’y avoir lieu à référé en raison de l’existence d’une contestation sérieuse.

DEBOUTONS les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires.

DISONS que chacune des parties conservera à sa charge les dépens engagés par elle dans le cadre du présent litige.

RAPPELONS que la présente ordonnance est exécutoire par provision.

Fait au Tribunal de Grande Instance de Pontoise, le 27 Décembre 2017.

Le Greffier, La Présidente,

F G H I-J.

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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