Cour de cassation, Chambre criminelle, 31 mai 2016, 15-82.169, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. crim., 31 mai 2016, n° 15-82.169
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 15-82.169
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Chambéry, 25 février 2015
Textes appliqués :
Articles L. 243-1 à L. 243-2 du code rural et de la pêche maritime et 16 de la loi du 5 juillet 1996.
Dispositif : Cassation partielle
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000032634786
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2016:CR02310
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Sur les parties

Texte intégral

N° Z 15-82.169 F-D

N° 2310

SL

31 MAI 2016

CASSATION PARTIELLE

M. GUÉRIN président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

— 

L’union française des maréchaux-ferrants, partie civile,

contre l’arrêt de la cour d’appel de CHAMBÉRY, chambre correctionnelle, en date du 26 février 2015, qui l’a déboutée de ses demandes après relaxe de Mme W… G… du chef d’exercice illégal de la profession de maréchal-ferrant ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 5 avril 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Harel-Dutirou, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Hervé ;

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire HAREL-DUTIROU, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de la société civile professionnelle THOUIN-PALAT et BOUCARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général LAGAUCHE ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme, 16 et 24 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996, 1 et 3 du décret 98-246 du 2 avril 1998, de l’arrêté du 16 juillet 1998 fixant les modalités de la délivrance du certificat d’aptitude professionnelle option maréchalerie, des articles L. 243-1 et L. 243-2 du code rural et de la pêche maritime, 111-3 et 111-4 du code pénal, 1382 du code civil, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

« en ce que l’arrêt attaqué, relaxant Mme W… G… du chef d’exercice illégal de la profession de maréchal-ferrant du 28 avril 2005 au 29 juin 2009, a débouté l’union française des maréchaux-ferrants de ses demandes ;

« aux motifs que, quand bien même, il existerait des éléments concernant le métier de maréchal-ferrant, d’une part, l’existence de référentiels cités dans le CAPA option maréchalerie, définis dans l’arrêté du 16 juillet 1998, parlant des programmes de formation prévus pour les élèves pour l’obtention de leur diplôme et, au début dudit document, des activités professionnelles développées par un maréchal-ferrant, et, d’autre part, une définition du métier donnée par la fédération nationale des artisans et petites entreprises plus orientée sur la finalité de l’intervention du maréchal-ferrant, il en résulte une variété d’informations non susceptibles cependant de venir combler l’absence de définition légale de la profession et ainsi de permettre de venir caractériser les éléments matériels de l’infraction qui auraient été commis par la prévenue, qui fait état en ce qui la concerne, de la seule activité de parage de pieds d’équidés ; qu’il convient de rappeler la période de prévention envisagée pour les faits reprochés à la prévenue, soit du 28 avril 2005 au 29 juin 2009, pour examiner les textes existants alors au moment de cette période, et, d’autre part, les textes servant de fondement aux poursuites, à savoir la violation des articles 16 et 24 de la loi du 5 juillet 1998, sur la profession réglementée de maréchal-ferrant ; que l’examen des dispositions légales citées ci-dessus existantes au cours de la période d’incrimination, à savoir les articles 16 et 24 de la loi du 5 juillet 1998 et les articles 1 et 3 du décret du 2 avril 1998, fait effectivement apparaître que la profession de maréchal-ferrant est bien une profession réglementée et protégée, nécessitant une qualification professionnelle adéquate ; que la prévenue fait état de la pratique de parage naturel portant sur des pieds d’équidés sains, non caractéristique pour elle de la profession de maréchal-ferrant, et conteste donc faire concurrence aux professionnels que sont les maréchaux-ferrants ; qu’au cours de la période d’incrimination, le seul document susceptible de venir définir les actes du ressort du maréchal-ferrant est l’arrêté du 16 juillet 1998 concernant le programme du CAPA option maréchalerie, diplôme venant sanctionner la formation professionnelle pour exercer la profession réglementée de maréchal-ferrant, dans lequel il est indiqué que le maréchal-ferrant enlève, le cas échéant, la ferrure existante, pare le pied, si besoin est, en réduisant la corne excessive, et confectionne des fers, pose les fers … ; que ce texte ne peut cependant être considéré comme venant définir de manière normative suffisante que la seule activité de parage ressort du domaine réservé à ce professionnel ; que d’ailleurs, la partie civile ne cherche guère à invoquer ce fondement pour venir établir l’infraction reprochée à la prévenue, préférant s’appuyer sur les articles du code rural, notamment, L. 243-1 à L. 243-3, pour venir définir les activités spécifiques du maréchal-ferrant protégées par la loi, notamment au niveau du parage, articles du code rural qui en définitive ont été repris en fait dans la jurisprudence citée de la cour d’appel de Poitiers ; que c’est là qu’il convient de bien se souvenir de la période de prévention couvrant avril 2005 au 29 juin 2009 et de la rapporter aux seules versions des textes existantes alors au niveau du code rural, les textes cités par la partie civile étant en fait très largement postérieurs à la période de prévention, et donc inapplicables en l’espèce, puisqu’inexistants alors ; que l’article L. 243-1 du code rural existant au moment des faits, valable jusqu’au 22 janvier 2011, vient parler d’exercice illégal de la médecine ou de la chirurgie des animaux, commis à titre habituel par toute personne donnant des consultations, établissant des diagnostics, délivrant des prescriptions …. ; que c’est à compter du mois de janvier 2011, que les notions d’actes de médecine des animaux et d’actes de chirurgie des animaux s’affinent, sans que toutefois il en résulte une définition plus précise de la profession ; que l’article L. 243-2 du code rural, en vigueur du 9 septembre 2005 au 8 mai 2010, puis celle en vigueur entre le 8 mai 2010 et le 22 janvier 2011, vient parler d’interventions faites par les maréchaux-ferrants « pour les maladies du pied et les pareurs bovins dans le cadre des opérations habituelles de parage du pied » ne tombant pas sous le coup des dispositions relatives à l’exercice illégal d’activités de vétérinaire ; qu’iI faudra attendre l’arrêté du 5 octobre 2011 pour obtenir une liste des actes de médecine ou de chirurgie des animaux plus détaillée pouvant être pratiqués notamment par un maréchal-ferrant, liste faisant alors état « d’écornage » et de « taille des appendices cornés (débecquage, dégriffage et parage) » ; que cet arrêté est très largement postérieur à la période de prévention et ne saurait donc pouvoir être retenu à l’encontre de la prévenue en raison de son inexistence par rapport à la période de prévention et sa nature de disposition plus sévère ; que l’article L. 243-3 du code rural, en vigueur du 21 septembre 2000 au 22 janvier 2011, est un texte de répression du délit d’exercice illégal de médecine ou de chirurgie des animaux ; que c’est seulement à partir du 22 juillet 2011, que l’article L. 243-3 du code rural viendra définir de manière plus précise qu’un maréchal-ferrant peut réaliser des actes de médecine ou de chirurgie des animaux « pour le parage et les maladies du pied des équidés et les pareurs bovins dans le cadre des opérations habituelles du parage de pied », soit également bien après la période de prévention retenue à l’encontre de la prévenue ; qu’iI résulte de l’ensemble de ces éléments qu’en l’absence de définition légale claire et précise concernant les éléments spécifiques à la profession de maréchal ferrant, au moment de la période de prévention reprochée à la prévenue, il convient de prononcer la relaxe de la prévenue, confirmant ainsi le jugement entrepris sur ce point ;

« et aux motifs adoptés qu’iI résulte des pièces de la procédure d’instruction et des débats que Mme G… a exercé dans la période du 28 avril 2005 au 29 juin 2009 visée dans la prévention, d’abord à Lille puis à Saint- André de Boëge (Haute-Savoie), une activité qu’elle qualifie de « pédicure équin » consistant à procéder au parage des chevaux, c’est-à-dire la taille et l’enlèvement de la corne de leurs sabots, à l’exclusion de tout ferrage ; qu’une telle activité, également pratiquée par les maréchaux-ferrants ne relève toutefois pas de leur compétence exclusive et ne peut constituer le délit reproché à la prévention dès lors que les articles 16 et 24 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l’artisanat ne définissent pas les éléments constitutifs du délit d’exercice illégal de l’activité de maréchal-ferrant ; que s’il n’existe aucune définition légale de cette activité, il est cependant admis qu’elle consiste en l’art de forger et d’adapter rationnellement aux sabots des équidés des semelles et contours protecteurs généralement appelés « fers », afin de protéger les pieds de l’animal contre l’usure et de remédier aux défauts d’aplomb ou de forme ; que l’arrêté du ministre de l’agriculture et de la pêche en date du 27 juin 1998, portant création et fixant les modalités de la délivrance du certificat d’aptitude professionnelle agricole, option « maréchalerie », contient en son annexe 1 un « référentiel professionnel » disposant que « le maréchal ferrant qualifié est un professionnel du cheval dans le domaine du pied ; qu’il assure la préservation du fonctionnement physiologique du pied pour les chevaux au pré, les chevaux de sport, de course, de loisir ou de rente ; qu’il prépare et effectue des ferrures courantes et selon les services et l’emploi, sur des chevaux ne nécessitant pas de soins particuliers ; qu’il prépare la pose de ferrures orthopédiques et thérapeutiques en accord et selon les indications du vétérinaire et sous la responsabilité du maréchal-ferrant employeur dans le cas d’un salarié ; que dans son domaine d’action, il intervient auprès de tous les équidés et bovidés ; qu’il se sert du parage, de la confection et de la pose des ferrures métalliques ou synthétiques pour protéger le pied du cheval ; qu’il peut être amené à juger de la boîte cornée, la modifier dans certains cas, la traiter le cas échéant avec des produits à usage externe et effectuer, conformément aux dispositions du code rural, les

soins des maladies du pied » ; qu’il est, par ailleurs, précisé que « devant un pied et des aplombs normaux, le maréchal ferrant qualifié enlève, le cas échéant la ferrure existante, pare le pied si besoin est, en réduisant la corne excessive » ; qu’aucun raisonnement par analogie avec les dispositions de l’article L. 2431 du code rural, dans sa rédaction en vigueur au moment des faits et non celle issue de la loi n°2011-525 du 17 mai 2011, visée par la partie civile dans ses conclusions, n’est admissible dès lors qu’il n’est pas reproché à Mme G… une infraction d’exercice illégal de la profession de vétérinaire, étant surabondamment observé que si l’article L. 243-2 dudit code, dans sa version alors en vigueur vise les « interventions faites par les maréchaux-ferrants pour les maladies du pied […] dans le cadre des opérations habituelles de parage du pied », le parage des pieds sains d’équidés constitue de toute évidence un acte d’entretien courant et non pas un acte médical ; qu’en conséquence, les faits qui Iui sont reprochés ne constituant pas le délit visé à la prévention, Mme G… doit être relaxée des fins de la poursuite ;

« 1°) alors que la partie civile a droit, de la part de la personne relaxée, à la réparation du dommage qui résulte de la faute civile démontrée à partir et dans la limite des faits objet de la poursuite ; que constitue le délit d’exercice illégal de la profession de maréchal ferrant, dont les éléments constitutifs sont suffisamment définis par les articles 16 et 24 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996, 1 et 3 du décret 98-246 du 2 avril 1998, combinés avec le référentiel professionnel figurant en annexe de l’arrêté du 16 juillet 1998 fixant les modalités de la délivrance du certificat d’aptitude professionnelle option maréchalerie, le fait, pour une personne non titulaire du CAPA option maréchalerie, de se livrer à titre professionnel, au parage des pieds des équidés; qu’en décidant le contraire, les juges du fond ont violé ces textes ;

« 2°) alors que les actes de médecine des animaux, relevant du monopole des vétérinaires, incluent, en application de l’article L. 243-1 du code rural et de la pêche maritime en vigueur à l’époque des faits, la pratique de soins préventifs ou curatifs en matière médicale ou chirurgicale; que selon l’article L. 243-2 alors applicable, ne tombent pas sous le coup de l’exercice illégal de médecine des animaux les «interventions faites par les maréchaux-ferrants pour les maladies du pied et les pareurs bovins dans le cadre des opérations habituelles de parage du pied » ; qu’il s’en déduit, déjà à l’époque, de manière claire et précise, que les opérations habituelles de parage du pied relevaient des actes de médecine des animaux réservés aux maréchaux-ferrants ; que la cour a violé ces textes" ;

Vu les articles L. 243-1 à L. 243-2 du code rural et de la pêche maritime et 16 de la loi du 5 juillet 1996 ;

Attendu qu’il résulte de la combinaison de ces textes, dans leur version applicable au moment des faits, que les opérations habituelles de parage du pied ne peuvent être réalisées que par les vétérinaires ou les maréchaux-ferrants et les pareurs bovins, et que la profession de maréchal-ferrant ne peut être exercée que par une personne qualifiée ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que L’union française des maréchaux-ferrants a porté plainte et s’est constituée partie civile contre Mme G… qui exerce l’activité de pédicure équin ; qu’une information a été ouverte au terme de laquelle celle-ci a été renvoyée devant le tribunal correctionnel du chef d’exercice illégal de la profession de maréchal-ferrant du 28 avril 2005 au 29 juin 2009 ; que le tribunal l’a relaxée ; que le procureur de la République et la partie civile ont interjeté appel ;

Attendu que, pour débouter L’union française des maréchaux-ferrants et confirmer le jugement, l’arrêt relève que si la profession de maréchal-ferrant est une profession réglementée et protégée, nécessitant une qualification professionnelle adéquate, l’arrêté du 16 juillet 1998 concernant le programme du CAPA option maréchalerie, seul document susceptible de déterminer les actes du ressort du maréchal-ferrant, ne peut être considéré comme venant définir de manière normative suffisante que la seule activité de parage ressort du domaine réservé à ce professionnel ; que les juges ajoutent que les dispositions du code rural relatives à l’exercice illégal de la médecine vétérinaire applicables au moment des faits prévoient seulement la possibilité des interventions faites par les maréchaux-ferrants, pour les maladies du pied et les pareurs bovins dans le cadre des opérations habituelles de parage de pieds, sans donner une liste des actes de médecine ou de chirurgie des animaux plus détaillée pouvant être pratiqués notamment par un maréchal-ferrant ; qu’ils en déduisent l’absence de définition légale claire et précise concernant les éléments spécifiques à la profession au moment de la période de prévention ;

Mais attendu qu’en prononçant ainsi, alors qu’elle avait constaté que Mme […] se livrait habituellement à des opérations de parage de pieds, la cour d’appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus énoncés ;

D’où il suit que la cassation est encourue :

Par ces motifs :

CASSE ET ANNULE en ses seules dispositions civiles, l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Chambéry, en date du 26 février 2015, et pour qu’il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’appel de Grenoble, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 618-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Chambéry et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le trente et un mai deux mille seize ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

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