Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 29 juin 2016, n° 14/05040

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 29 juin 2016, n° 14/05040
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 14/05040
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Toulon, 28 août 2013, N° 10/04694

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

6e Chambre D

ARRÊT AU FOND

DU 29 JUIN 2016

F.T.

N° 2016 /170

Rôle N° 14/05040

Y X

C/

C AA AB N X

I X

Q-U AG N X

Grosse délivrée

le :

à :

Me Ludovic ROUSSEAU

Me Christian GIRARD

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 29 Août 2013 enregistré au répertoire général sous le n° 10/04694.

APPELANT

Monsieur Y X

né le XXX à XXX,

XXX – XXX

représenté par Me Ludovic ROUSSEAU de la SCP ROUSSEAU & ASSOCIES, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE, ayant pour avocat Le Bruno PERRIN, avocat au barreau de BORDEAUX.

INTIMES

Madame C AA AB N D AO X

K le XXX à XXX,

XXX

représentée et assistée par Me Christian GIRARD, avocat au barreau de TOULON

Madame I X

K le XXX à XXX,

XXX

représentée et assistée par Me Christian GIRARD, avocat au barreau de TOULON

Monsieur Q-U AG N X

né le XXX à XXX,

XXX

représenté et assisté par Me Christian GIRARD, avocat au barreau de TOULON

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 785, 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 01 Juin 2016 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme N-Christine AIMAR, Présidente, et Mme Florence TESSIER, Conseiller, chargées du rapport.

Mme Florence TESSIER, Conseiller, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme N-Christine AIMAR, Présidente

M. Benoît PERSYN, Conseiller

Mme Florence TESSIER, Conseiller

Greffier lors des débats Madame Brigitte NADDEO

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Juin 2016.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 29 Juin 2016.

Signé par Mme N-Christine AIMAR, Présidente et Mme Dominique COSTE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Q-R X, né le XXX, est décédé à Toulon le XXX, laissant pour lui succéder son épouse K C D ainsi que deux enfants, Monsieur Q-U X et Madame I X.

Le 28 octobre 1996, Maître A B, notaire en charge des opérations de liquidation-partage de la succession de Q-R X, a dressé un acte de partage afférent à celle-ci.

Par jugement en date du 10 novembre 2005, le tribunal de grande instance de Toulon, saisi d’une action en recherche de paternité intentée par Madame N-O F, mère de Monsieur Y F, a dit que ce dernier, né le XXX, est le fils de Q-R X.

Par arrêt en date du 6 février 2007, la cour d’appel d’Aix-en-Provence a dit que Monsieur Y F est autorisé à porter le nom de son père, la mention de cette modification étant portée à l’acte de naissance de ce dernier le 14 avril 2008.

Par exploit en date du 10 août 2010, Monsieur Y X a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Toulon Madame C D AO X, Madame I X et Monsieur Q-U X afin que lui soit attribuée en valeur la part qui lui revient dans la succession de son père en sa qualité d’héritier réservataire, ainsi que pour faire valoir ses droits dans la succession de sa grand’mère paternelle, G H décédée le XXX.

Il a sollicité subsidiairement que l’acte de partage de la succession du de cujus, en date du 28 octobre 1996, soit annulé, pour avoir été établi en son absence, les peines du recel successoral étant appliquées, son omission étant volontaire.

Par jugement avant dire droit rendu le 21 septembre 2012, le tribunal de grande instance de Toulon a ordonné la production de l’intégralité de l’acte de partage en date du 28 octobre 1996 et a invité Monsieur Y X à se prononcer sur la question de savoir s’il sollicite l’annulation du partage avant le 22 novembre 2012, précisant que la procédure serait clôturée le 3 janvier 2013.

Par jugement en date du 28 février 2013, le tribunal de grande instance de Toulon a écarté les pièces et conclusions signifiées par Monsieur Y X le 31 décembre 2012 ainsi que toutes écritures signifiées postérieurement à l’ordonnance de clôture.

Par jugement rendu le 29 août 2013, la même juridiction a débouté Monsieur Y X de l’ensemble de ses demandes et l’a condamné aux dépens.

Le tribunal a considéré que :

— aucune demande en nullité du partage de la succession de Q-R X n’a été formulée par Monsieur Y X avant l’ordonnance de clôture,

— le recel successoral n’est pas constitué dans la mesure où l’acte de partage a été établi antérieurement à l’action en recherche de la paternité de Monsieur Y X, l’intention frauduleuse des défendeurs n’étant pas caractérisée,

— Monsieur Y X ne peut représenter son père dans la succession de sa grand’mère paternelle, G H, conformément aux dispositions de l’ancien article 739 du code civil.

Monsieur Y X a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe en date du 11 mars 2014.

Par ordonnance en date du 13 octobre 2015, le conseiller de la mise ne état de la cour d’appel d’Aix-en-Provence a rejeté la demande de sursis à statuer présentée par Monsieur Y X, dans l’attente de la justification de la publication effective de sa demande de nullité de l’acte de partage du 28 octobre 1996, au motif que cette formalité constitue, non une exception dilatoire mais une fin de non recevoir.

Monsieur Y X, aux termes de ses dernières écritures notifiées le 2 mai 2016, demande à la cour de :

— le recevoir en son appel,

— constater que la demande en nullité de l’acte de partage du 28 octobre 1996 a été publiée aux services de la publicité foncière de Draguignan et de Toulon,

— rejeter les exceptions de prescription et d’irrecevabilité élevées par les parties intimées,

— constater sa qualité d’héritier dans la succession de Q-R X,

— constater que les parties intimées n’ignoraient pas son existence au moment de l’établissement de l’acte de partage et qu’il a été omis ou exclu de celui-ci,

— réformer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de :

— faire droit à sa demande de recevoir sa part héréditaire dans la succession de son père, sans que le partage ne soit annulé,

— pour déterminer cette part, dire que les biens et droits sur lesquels le partage a porté seront réévalués de la même manière que s’il s’agissait d’un nouveau partage,

— subsidiairement, prononcer l’annulation du partage,

— en tout état de cause, désigner tel expert qu’il plaira à la cour et lui donner mission de déterminer l’ensemble des biens composant la succession et de les estimer,

— commettre Maître Bernard LAMAIGNERE, notaire à XXX, et tel autre notaire hors du tribunal de grande instance de Toulon, pour procéder à la détermination de ses droits dans la succession de son père, en fixer la valeur, dont le montant sera mis solidairement à la charge des autres copartageants et, dans le cas où le partage serait annulé, le désigner pour procéder à son nouvel établissement en tenant compte de ses droits successoraux,

— dire que les consignations afférentes seront mises à la charge des intimés,

— dire que les parties intimées sont passibles des peines du recel successoral,

— constater qu’ils ont vendu le 6 mars 1998 un bien immobilier dépendant du GFA de Play postérieurement à l’assignation délivrée à leur encontre et qu’ils sont coupables de recel sur cette vente,

— dire que les intimés seront privés de tout droit sur les biens recelés,

— les condamner à verser aux débats le compte de gestion du GFA et de la propriété immobilière sise au Rayol Canadel,

— dire que les notaires commis devront évaluer le montant de l’indemnité d’occupation due à l’indivision successorale pour l’occupation par ses copartageants de ce bien,

— condamner solidairement les intimés à lui payer les sommes de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et de 10.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel.

Monsieur Y X a fait valoir les moyens suivants :

*sur les exceptions de procédure :

— son action n’est pas prescrite sur le fondement de l’article 1304 du code civil, la prescription ne courant pas contre celui qui est dans l’impossibilité d’agir, sa qualité et son intérêt à ester résultant du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Toulon le 10 novembre 2005, qui a reconnu sa filiation envers le de cujus, le délai de prescription n’ayant commencé à courir qu’à compter de cette date et l’assignation du 10 août 2010 ayant interrompu la prescription,

— la demande subsidiaire tendant à la nullité de l’acte de partage était incluse dans les conclusions par lui signifiées le 31 décembre 2012 et n’a pas été formulée pour la première fois par écritures du 2 juin 2014,

— la demande subsidiaire en nullité de l’acte de partage n’est pas une demande nouvelle, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l’établissement des masses successorales et la cour se trouvant saisie de plein droit, conformément à l’article 561 du code de procédure civile, de la connaissance du litige,

*sur le fond :

— il est héritier de plein droit de son père en application des articles 334-8 et 310-1 du code civil issus de la loi du 25 juin 1982, aucune distinction ne devant être opérée entre les enfants légitimes et les enfants naturels, sa filiation paternelle ayant été établie par jugement,

— ces dispositions sont applicables à l’espèce, seuls les enfants naturels dont la filiation a été établie par la possession d’état ne pouvant s’en prévaloir dans les successions déjà liquidées,

— en application de l’article 887-1 du code civil, issu de la loi du 23 juin 2006, le partage doit être annulé compte tenu qu’il a été omis, sauf à ce qu’il soit indemnisé en nature ou en valeur,

— en tout état de cause, la liquidation de la succession de Q-R X ne lui est pas opposable car elle est intervenue en fraude de ses droits, son existence étant connue par l’épouse et les deux enfants légitimes du de cujus, qui a assumé les frais liés à son entretien et à son éducation jusqu’à sa mort, sa mère, Madame N-O F s’étant manifestée auprès d’eux le jour des obsèques de son père,

— la grande chambre de la cour européenne des droits de l’homme a, par un arrêt en date du 7 février 2013, jugé que si la protection des droits acquis peut servir les intérêts de la sécurité juridique et la paix au sein des familles, ce but doit s’effacer derrière l’objectif d’égalité entre les enfants, dès lors que la différence de traitement est disproportionnée, les intimés n’étant pas fondés à lui opposer que la succession de Q-R X, ouverte avant le 4 décembre 2001, a donné lieu à un partage avant cette date,

— sur le recel, celui-ci est constitué, les héritiers de Q-R X l’ayant délibérément exclu du partage, alors qu’ils avaient connaissance de son existence.

Madame C D AO X, Madame I X et Monsieur Q-U X, dans leurs dernières écritures signifiées le18 mai 2016, sollicitent de la cour de :

— juger prescrites au visa de l’article 1304 du code civil les demandes principale et subsidiaire fondées sur les dispositions des articles 887-1 et 887 ancien du code civil,

— juger prescrite au visa de la loi du 18 juin 2008 la demande de nullité de l’acte de partage en date du 28 octobre 1996,

— juger irrecevable au visa de l’article 564 du code de procédure civile la demande de nullité dudit acte,

— juger irrecevable la demande en nullité de l’acte de partage, sauf à justifier d’une publication régulière de l’acte introductif d’instance à la publication des hypothèques,

— subsidiairement :

— juger inapplicables les dispositions de l’article 887-1 du code civil, en application des articles 25-II-2 de la loi du 3 décembre 2001, 47 de la loi du 23 juin 2006 et, par voie de conséquence, irrecevables ou mal fondées les demandes de la partie appelante,

— statuant sur la demande de nullité de l’acte de partage, débouter Monsieur Y X de sa demande au visa de l’ancien article 887 du code civil,

— débouter Monsieur Y X de ses prétentions formulées au titre du recel successoral,

— le condamner à payer aux parties intimées la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Les consorts X soutiennent principalement que :

— le délai de prescription de l’action a commencé à courir le 4 janvier 2005, jour de la majorité de Monsieur Y X, sa mère s’étant abstenue de toute action avant cette date depuis le décès du père de l’enfant,

— l’action est donc prescrite, l’assignation interruptive étant du 10 août 2010,

— la demande subsidiaire tendant à la nullité de l’acte de partage n’a été présentée que par conclusions du 2 juin 2014 et est, de surcroit, irrecevable pour avoir été présentée la première fois en cause d’appel, ne pouvant être considérée comme un moyen de défense, les intimés n’ayant formulé aucune demande ni prétention,

— ils n’ont eu la révélation de l’existence de Monsieur Y X que lors de la délivrance de l’assignation en date du 18 mars 1997, la preuve d’une connaissance antérieure n’étant pas rapportée, les époux X ayant des comptes joints, mais également des comptes séparés qui permettaient au défunt d’effectuer des chèques et virements au bénéfice de l’appelant en toute discrétion,

— l’article 2 de la loi du 25 juin 1982 prévoit que les dispositions de la loi sont applicables aux enfants naturels avant son entrée en vigueur mais qu’ils ne pourront s’en prévaloir dans les successions déjà liquidées,

— l’article 887-1 du code civil issu de la loi du 23 juin 2006 permet aux héritiers exclus ou omis de revendiquer la nullité de l’acte de partage ou une indemnisation à hauteur de la part leur revenant, que dans le cadre des successions non liquidées au 1er janvier 2007, ce qui n’est pas le cas en l’espèce,

— l’article 30-II-2 de l’ordonnance du 4 juillet 2005 stipule que les enfants nés avant l’entrée en vigueur de texte ne peuvent s’en prévaloir dans les successions déjà liquidées,

— l’arrêt rendu par la grande chambre de la cour de justice des communautés européennes le 7 février 2013 est un arrêt d’espèce et non de principe, qui est sans effet, la France n’ayant pas modifié la loi et qui est dépourvu d’effet rétroactif,

— la demande subsidiaire tendant à la nullité de l’acte de partage n’est pas fondée, la cour de cassation étant revenue sur sa jurisprudence initiale admettant l’erreur comme cause de nullité, par arrêt en date du 26 octobre 1943,

— sur le recel, le partage de la succession du de cujus ayant produit ses effets, ses héritiers étaient libres de disposer des biens dont ils ont hérité, les peines du recel ne leur étant pas applicables en l’état de l’acte de partage du 28 octobre 1996.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 1er juin 2016.

MOTIVATION DE LA DECISION

Attendu que de manière liminaire, sera écarté le moyen tiré de l’irrecevabilité de la demande tendant à voir prononcer la nullité de l’acte notarié de partage en date du 28 octobre 1996, faute de publication régulière aux services de la publicité foncière, Monsieur Y X justifiant, par les pièces qu’il produit, avoir publié au bureau des hypothèques de Toulon, Digne-les-Bains et Draguignan l’assignation par lui délivrée selon exploit du 10 août 2010 ;

1/ Sur les exceptions de procédure :

Attendu, d’une part, sur la demande principale, que les parties intimées soulèvent que l’action introduite par Monsieur Y X par acte d’huissier du 10 août 2010, tendant à la dévolution de sa part réservataire dans la succession de Q-R X, se trouve entachée de prescription au visa des dispositions de l’article 1304 du code civil, pour avoir commencé à courir au jour de sa majorité, survenue le 4 janvier 2005 ;

Mais attendu qu’aux termes des dispositions de l’article 2234 du code civil, la prescription ne court pas ou est suspendue contre celui qui est dans l’incapacité d’agir par suite d’un évènement résultant de la loi, de la convention ou de la force majeure ;

Attendu qu’en l’espèce, la capacité à agir et l’intérêt à ester de Monsieur Y X ne sont nés que par l’effet du jugement définitif du tribunal de grande instance de Toulon en date du 10 novembre 2005, qui a reconnu sa filiation et que Q-R X était son père ;

Attendu en conséquence que le point de départ de la prescription doit être fixé à cette date, l’assignation du 10 août 2010 l’ayant interrompue ;

Attendu que l’exception tirée de la prescription doit être rejetée, la demande de l’appelant aux fins d’obtention de sa part réservataire étant recevable ;

Attendu d’autre part, sur la demande subsidiaire de Monsieur Y X, fondée sur les dispositions de l’article 887 ancien du code civil, que l’action en nullité du partage pour dol ou violence ou en rescision pour lésion se trouve soumise au régime de la nullité relative et au délai de prescription quinquennale imposé par les dispositions de l’article 1304 du code civil, lequel commence à courir au jour du partage lésionnaire, ou, tel qu’en l’espèce et conformément aux dispositions de l’article 2234 du code civil, au 10 novembre 2005, date du jugement ayant établi de manière définitive la filiation paternelle de Monsieur Y X ;

Attendu que ce dernier a formulé sa demande en nullité de l’acte notarié de partage par conclusions signifiées en première instance le 31 décembre 2012 ;

Attendu que la circonstance que la décision déférée les aient écartées des débats est inopérante, dans la mesure où, par l’effet de la dévolution, la cour se trouve saisie de l’entier litige, l’appel interjeté étant général ;

Que la demande subsidiaire ne se trouve pas prescrite par application des dispositions de la loi du 18 juin 2008, le délai de cinq ans venant à expiration le 19 juin 2013 ;

Attendu, sur le moyen tiré de la formulation d’une demande nouvelle en cause d’appel, fondée sur la nullité de l’acte, qu’en matière de partage, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l’établissement de l’actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse ;

Attendu que Monsieur Y X se trouve recevable en cette demande ;

Attendu en conséquence que les exceptions de procédure soulevées devant la cour doivent être rejetées ;

2/ Sur le fond :

Attendu que Monsieur Y X sollicite, à titre principal, de recevoir sa part héréditaire en valeur dans la succession de Q-R X, sur le fondement des dispositions de l’article 887-1 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 23 juin 2006 et, subsidiairement, l’annulation de l’acte authentique de partage en date du 28 octobre 1996, sur le fondement des dispositions de l’article 887 ancien du code civil, arguant de la fraude manifestée à son encontre et caractérisée par la dissimulation par les intimés de son existence dans le cadre des opérations de liquidation-partage de la succession de son père ;

A : Sur la demande principale :

Attendu, sur la demande principale, qu’aux termes des dispositions de l’article 47 de la loi numéro 2006-728 du 23 juin 2006, les dispositions des articles 2, 3, 4, 7 et 8 de la loi ainsi que les articles 116, 466, 515-6 et 813 à 814-1 du code civil, tels qu’ils résultent de la loi, sont applicables, dès l’entrée en vigueur de celle-ci, aux indivisions existantes et aux successions ouvertes, non encore partagées à cette date ;

Attendu que de l’article 8 de la loi ci-dessus visé est issu le nouvel article 887-1 du code civil, qui prévoit en ses alinéas 1 et 2 que le partage peut être annulé si un des cohéritiers y a été omis, l’héritier omis pouvant toutefois demander de recevoir sa part, soit en nature, soit en valeur, sans annulation du partage ;

Mais attendu qu’en l’espèce, il est constant que la succession de Q-R X a été liquidée, en application de l’acte notarié de partage en date du 28 octobre 1996 ;

Attendu par suite qu’il ne saurait être fait application des dispositions précitées dans la mesure où la condition insérée in fine dans l’article 887-1 du code civil n’est pas remplie ;

Attendu que Monsieur Y X invoque, pour faire obstacle à ce moyen de droit, le bénéfice des dispositions de la loi du 3 décembre 2001 ainsi que l’interprétation qui en a été faite par la Grande Chambre de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, soutenant que le statut successoral spécial de l’enfant adultérin, empreint d’infériorité, a été abrogé et que la différence de traitement autorisée en droit français par ladite loi est contraire aux articles 14 et 1er du protocole numéro 1 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme ;

Attendu qu’aux termes des dispositions transitoires de la loi du 3 décembre 2001, dont l’entrée en vigueur a été différée au 1er juillet 2002, telles que figurant à l’article 25-II-2, les nouveaux droits successoraux des enfants naturels dont le père ou la mère étaient, au temps de la conception, engagés dans les liens du mariage, ne sont applicables qu’aux successions ouvertes au 4 décembre 2001 et à condition qu’elles n’aient pas donné lieu à un partage avant cette date ;

Que l’article 14 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme dispose que la jouissance des droits et libertés reconnus par elle doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur la naissance, l’article 1 du protocole affirmant, quant à lui, que toute personne physique et morale a droit au respect de ses biens et que nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ;

Attendu que, par un arrêt en date du 7 février 2013, rendu par la Grande Chambre, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a pu considérer à la lecture de ce texte, qu’en matière successorale, le but de protection des droits acquis, qui sert les intérêts de sécurité juridique et la paix au sein des familles, doit s’effacer derrière l’objectif d’égalité entre les enfants, dès lors que la différence de traitement entre ces derniers est disproportionnée ;

Qu’elle a par suite déclaré illégal le refus d’accorder à un enfant adultérin les droits successoraux auxquels il pouvait prétendre en vertu de la loi du 3 décembre 2001 ;

Mais attendu que les faits soumis à la Cour Européenne des Droits de l’Homme étaient distincts de ceux que la cour doit apprécier, dans la mesure où la filiation de l’enfant adultérin était établie et connue des enfants légitimes au décès de leur mère, tandis que, dans la présente affaire, Monsieur Y X se contente de procéder par voie d’affirmations et ne produit aux débats aucun document démontrant que les parties intimées avaient connaissance, à l’ouverture des opérations de liquidation-partage de Q-R X, de son existence ;

Que les relevés du compte des chèques postaux de sa mère, s’ils établissent l’existence de versements effectués auprès de cette dernière par Q-R X, ne prouvent pas que Madame C D épouse X avait connaissance de leur destinataire ;

Que sa filiation à l’égard du de cujus a été établie par arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence en date du 6 février 2007, l’action en recherche de paternité n’ayant été introduite par la mère de l’appelant que par acte d’huissier du 18 mars 1997 ;

Attendu, au surplus, que l’arrêt rendu par la Grande Chambre de la Cour Européenne des Droits de l’Homme le 7 février 2013 ne se trouve pas revêtu d’un effet rétroactif, la France n’ayant pas, postérieurement à cette décision, modifié la loi ;

Attendu en conséquence que la demande principale formulée par Monsieur Y X sera rejetée ;

B/ Sur la demande subsidiaire :

Attendu que Monsieur Y X sollicite que l’acte de partage en date du 28 octobre 1996 soit annulé, sur le fondement de l’article 887 ancien du code civil qui prévoit que les partages peuvent être rescindés pour cause de violence ou de dol ; qu’il peut aussi y avoir lieu à rescision lorsqu’un des héritiers établit à son préjudice une lésion de plus du quart, la simple omission d’un objet de la succession ne donnant pas ouverture à l’action en rescision mais seulement à un supplément à l’acte de partage ;

Attendu que ce texte ne vise que le dol ou la violence et n’admet pas que l’erreur consistant dans l’exclusion d’un héritier puisse entrainer la nullité du partage opéré ;

Attendu que la cour observe que Monsieur Y X n’invoque, aux termes de ses écritures du 31 décembre 2012, que son absence à l’acte et non l’existence d’une lésion de plus du quart résultant d’une évaluation inexacte de la masse partageable ou de certains biens ;

Attendu en conséquence qu’il y a lieu de débouter Monsieur Y X de sa demande principale subsidiaire, tendant à la nullité de l’acte authentique de partage du 28 octobre 1996, aucune mesure d’expertise ne s’avérant nécessaire ;

Attendu que le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a débouté Monsieur Y X de sa demande fondée sur le recel, aucun droit successoral ne lui étant reconnu ;

Attendu que l’appelant doit être, pour le même motif, débouté de sa prétention tendant à l’obtention de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral, aucune faute commise par les intimés n’étant prouvée sur ce chef ;

Vu les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu l’article 696 du code de procédure civile ;

P A R C E S M O T I F S

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Déclare recevable pour avoir été publiée aux services de la publicité foncière la demande de Monsieur Y X tendant à voir prononcer la nullité de l’acte notarié de partage en date du 28 octobre 1996 ;

Rejette les exceptions de procédure soulevées et déclare recevables les demandes principale et subsidiaire de Monsieur Y X ;

Confirme le jugement déféré en ce qu’il a débouté Monsieur Y X de sa demande de recel successoral et l’a condamné aux dépens de première instance ;

Y ajoutant,

Déboute Monsieur Y X de sa demande principale fondée sur les dispositions de l’article 887-1 du code civil ainsi que de sa demande subsidiaire fondée sur l’article 887 ancien du code civil ;

Déboute Monsieur Y X de sa demande tendant à l’instauration d’une mesure expertale ;

Déboute Monsieur Y X de sa demande en dommages et intérêts ;

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Monsieur Y X aux dépens d’appel et dit qu’ils seront recouvrés dans les formes et conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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