Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 8e chambre c, 23 février 2017, n° 14/21864

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, 8e ch. c, 23 févr. 2017, n° 14/21864
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 14/21864
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Marseille, 22 octobre 2014, N° 13/03903
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE 8e Chambre C

ARRÊT AU FOND

DU 23 FEVRIER 2017

N° 2017/ 116 Rôle N° 14/21864

SA SOCIETE MARSEILLAISE DE CREDIT

C/

A Y

C D

Grosse délivrée

le :

à :XXX

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE en date du 23 Octobre 2014 enregistré au répertoire général sous le n° 13/03903.

APPELANTE

la Société Marseillaise de Crédit, venant aux droits du Crédit du Nord, prise en la personne de son représentant légal, dont le siège est sis XXX

représentée par Me Fabienne FIGUIERE-MAURIN, avocat au barreau de MARSEILLE et assistée de Me Marion ETTORI, avocat au barreau de MARSEILLE substituant Me FIGUIERE-MAURIN, avocat

INTIMES

Monsieur A Y

né le XXX à XXX

représenté et assisté de Me Anne DE CASTELLO MARIANI, avocat au barreau de MARSEILLE

Maître C D, assigné en intervention forcée en qualité de mandataire judiciaire dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire de Monsieur A Y

XXX

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 10 Janvier 2017 en audience publique. Conformément à l’article 785 du Code de Procédure Civile, Madame Claudine PHILIPPE, Conseiller a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Monsieur Dominique PONSOT, Président

Madame Cathy CESARO-PAUTROT, Conseiller

Madame Claudine PHILIPPE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 23 Février 2017

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 23 Février 2017,

Signé par Monsieur Dominique PONSOT, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

Vu le jugement du 23 octobre 2014 par lequel le tribunal de grande instance de Marseille a :

— dit que la Société Marseillaise de Crédit, anciennement Crédit du Nord, a commis deux séries de fautes contractuelles dans le contrat de dépôt souscrit par M. A Y, dont elle lui doit réparation,

— débouté la Société Marseillaise de Crédit de ses contestations aucune faute n’étant établie à l’encontre de M. A Y,

— condamné la Société Marseillaise de Crédit à payer à M. A Y les sommes suivantes:

* 21 993 euros au titre des chèques frauduleux, majorée des intérêts au taux légal depuis le 20 décembre 2011,

* 10 539,63 euros au titre des frais bancaires et agios consécutifs au découvert et à l’interdiction bancaire, * 3 000 euros au titre du préjudice moral,

— débouté M. A Y de ses demandes plus amples,

— condamné la Société Marseillaise de Crédit au paiement d’une somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et au paiement des dépens,

— ordonné l’exécution provisoire ;

Vu la déclaration du 19 novembre 2014 par laquelle la Société Marseillaise de Crédit a interjeté appel de cette décision ;

Vu les dernières conclusions du 27 mai 2016 aux termes desquelles la Société Marseillaise de Crédit demande à la cour de :

— infirmer le jugement déféré,

— juger que M. A Y en ne veillant pas à la conservation de ses chéquiers et en ne vérifiant pas périodiquement les relevés de son compte pendant 9 mois consécutifs a commis une faute exonératoire pour la banque de sa responsabilité, sauf pour la part résultant de sa propre faute,

— lui donner acte de ce qu’elle accepte d’indemniser M. A Y des détournements effectués par M. X Frutto à hauteur de 1 843 euros,

— lui donner acte de ce qu’elle accepte d’indemniser M. A Y à hauteur de 392 euros correspondant aux frais générés par les chèques émis par M. A Y pendant l’interdiction bancaire,

— débouter M. A Y de ses demandes,

— condamner M. A Y au paiement de la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et au paiement des dépens qui seront recouvrés selon les dispositions de l’article 699 du même code ;

Vu les dernières conclusions du 7 mars 2016 aux termes desquelles M. A Y demande à la cour de :

— confirmer le jugement déféré sauf en ce qui concerne le montant des condamnations prononcées au titre des agios, frais et des dommages et intérêts pour le préjudice moral,

— condamner la Société Marseillaise de Crédit au paiement d’une somme de 14 925,99 euros au titre des agios et frais générés par le découvert et l’interdiction bancaire,

— condamner la Société Marseillaise de Crédit au paiement de la somme de 15 000 euros de dommages et intérêts pour le préjudice moral,

— condamner la Société Marseillaise de Crédit au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens qui seront recouvrés selon les dispositions de l’article 699 du même code ;

MOTIFS

Attendu qu’il résulte des pièces produites aux débats et des écritures non contestées des parties que M. A Y, E F, disposait d’un compte professionnel ouvert dans les livres de la Société Marseillaise de Crédit, anciennement Crédit du Nord ;

Qu’au cours du mois de novembre 2011 M. A Y a été informé par sa banque du fait que le découvert autorisé avait été dépassé ;

Que M. A Y s’est alors aperçu que des sommes avaient été débitées de son compte à son insu, au moyen de chèques ;

Qu’il a déposé plainte et que l’enquête a permis d’établir que son apprenti avait volé et falsifié 17 chèques pour un montant total de 21 993 euros, sur la période de mars 2011 à novembre 2011 ; que cet apprenti était condamné pénalement pour ces faits le 25 janvier 2013;

Que le conseil de M. A Y a, par divers courriers, réclamé à la banque le remboursement des chèques indûment débités de son compte, en vain ;

Attendu que par lettres des 27 juillet et 9 août 2012, le Crédit du Nord devenu Société Marseillaise de Crédit, a notifié à M. A Y une interdiction d’émettre des chèques en raison de 3 chèques tirés sur un autre compte ouvert à son nom, alors que la provision était insuffisante ;

Que M. A Y s’est alors aperçu qu’il avait été victime d’un vol et d’une falsification de chèques commis par son ex compagne et portant sur 3 formules de chèques relatives à un compte qu’il savait clôturé ;

Qu’il a déposé plainte pour ces nouveaux faits et a sollicité la banque afin que l’interdiction d’émettre des chèques soit levée ; que cette interdiction a été levée le 25 septembre 2012 ;

Sur la demande en indemnisation formée par M. A Y au titre de chèques falsifiés par son apprenti

Sur la responsabilité de la banque et de M. A Y

Attendu que M. A Y soutient que la banque a engagé sa responsabilité en acceptant de payer les chèques frauduleux sans vérifier, même de façon sommaire, leur authenticité alors que ces derniers comportaient une signature différente de celle du titulaire du compte ;

Qu’en réponse aux arguments invoqués par la Société Marseillaise, M. A Y affirme qu’il n’a commis aucune faute ni quant aux conditions dans lesquelles il conservait ses chéquiers professionnels ni quant aux vérifications qu’il a faites à réception de ses relevés bancaires ;

Qu’il en conclut qu’il ne saurait y avoir un partage de responsabilité entre la banque et lui-même ;

Qu’en réponse, la Société Marseillaise de Crédit fait valoir que M. A Y a commis une faute en ne veillant pas à conserver ses chéquiers dans un endroit sûr et en ne vérifiant pas régulièrement ses relevés de compte pendant 9 mois ; Que la banque précise que ces fautes ont permis la réitération des infractions dont son client est victime ;

Que la société Marseillaise de Crédit ne reconnaît ainsi sa responsabilité que pour les deux premiers chèques volés et émis frauduleusement en mars 2011 ;

Attendu qu’en l’absence de faute du déposant, ou d’un préposé de celui-ci, et même s’il n’a lui même commis aucune faute, le banquier n’est pas libéré envers le client qui lui a confié des fonds quand il se défait de ces deniers sur présentation d’un faux ordre de paiement revêtu dès l’original d’une fausse signature ; Qu’en revanche, si l’établissement de ce faux ordre de paiement a été rendu possible à la suite d’une faute du titulaire du compte, ou de l’un de ses préposés, le banquier n’est tenu envers lui que s’il a lui-même commis une négligence, et ce seulement pour la part de responsabilité en découlant ;

Attendu qu’en l’espèce, l’examen comparatif de la signature apposée sur les chèques frauduleux communiqués aux débats et de la signature de M. A Y apposée sur les procès verbaux de gendarmerie révèle que la signature apposée sur les chèques était différente de celle de M. A Y ;

Que d’ailleurs, la société Marseillaise de Crédit reconnaît elle-même en page 10 de ses conclusions que les falsifications étaient 'grossières’ ;

Qu’il en résulte que la Société Marseillaise de Crédit a commis une négligence en acceptant de payer des chèques dont l’examen permettait de connaître leur caractère falsifié ;

Qu’elle a ainsi engagé sa responsabilité ;

Attendu, cependant, que si aucun élément ne permet d’établir que M. A Y a été négligent quant aux conditions dans lesquelles il conservait ses chéquiers professionnels, il résulte des pièces du dossier et des écritures de M. A Y lui-même que ce dernier a été négligent quant à la vérification de ses relevés bancaires ;

Qu’en effet, en laissant s’écouler 9 mois sans vérifier les opérations mentionnées sur les relevés bancaires, que M. A Y ne conteste pas avoir régulièrement reçus et qui ne comportent que 2 ou 3 feuillets par mois, à savoir un nombre d’opérations bancaires raisonnables et facilement vérifiables, M. A Y a commis une faute qui a permis à son apprenti de réitérer ses infractions sur une période de 9 mois et qui a ainsi concouru à son préjudice ;

Que cette faute justifie un partage de responsabilité par moitié ;

Qu’il convient dès lors d’infirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté la Société Marseillaise de Crédit de ses contestations en retenant qu’aucune faute n’était établie à l’encontre de M. Y ;

Sur le préjudice indemnisable

Attendu que M. A Y sollicite la condamnation de la Société Marseillaise de Crédit au paiement des sommes suivantes:

— la somme de 21 993 euros outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 20 décembre 2011, au titre du montant total des chèques falsifiés,

— la somme de 8 551,64 euros au titre des agios dus pour la période du 30 mars 2011 au 31 décembre 2014,

— la somme de 5 982,35 euros au titre des frais et commissions prélevées du fait de la position débitrice du compte ;

Attendu qu’au regard du partage de responsabilité tel qu’exposé ci-dessus, il convient de condamner la société Marseillaise de Crédit à payer la somme de 10 996,50 euros correspondant à la moitié du montant total des chèques falsifiés émis, outre les intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2011, date de la mise en demeure ;

Que s’agissant des agios et des frais, ils ne sont pas en lien direct avec les chèques falsifiés, le compte de M. A Y ayant présenté à diverses reprises un solde débiteur sans lien avec les débits frauduleux ;

Sur la demande en indemnisation formée par M. A Y au titre des chèques falsifiés par son ex compagne

Attendu qu’il est constant que trois chèques datés de juillet 2012, d’un montant respectif de 672,55 euros, 754 euros et 61,57 euros relatifs à un compte de M. A Y qui avait été clôturé, ont été grossièrement falsifiés et déposés par Mme Z, ex compagne de M. Y ;

Que la banque a procédé au rejet de ces trois chèques, non pour cause de falsification de chèques, mais pour défaut de provision suffisante ; qu’elle a ensuite notifié à M. A Y une interdiction d’émettre des chèques qui n’a été levée que le 25 septembre 2012 ;

Attendu que les parties s’accordent pour dire que les chèques litigieux n’auraient pas dû être rejetés pour défaut de provision et qu’aucune interdiction d’émettre des chèques n’aurait dû être notifiée à M. A Y ;

Que M. A Y sollicite le remboursement des frais financiers générés par cette interdiction, soit la somme de 392 euros ;

Que la Société Marseillaise de Crédit sera condamnée à régler cette somme qu’elle ne conteste pas ;

Attendu que M. A Y sollicite en outre des dommages et intérêts à hauteur de 15 000 euros au titre de son préjudice moral ; qu’il reproche à la banque, d’une part, son attitude désinvolte lors de la gestion des difficultés engendrées par les infractions dont il a été victime, et, d’autre part, le fait de lui avoir notifié à tort une interdiction d’émettre des chèques préjudiciable au bon fonctionnement de son entreprise de boucherie ;

Que l’examen des pièces produites aux débats révèle que la banque a effectivement tardé à répondre aux réclamations de M. A Y et à lever l’interdiction d’émettre des chèques ; que ce comportement de l’établissement bancaire a provoqué des désagréments d’autant plus préjudiciables qu’ils touchaient à l’activité professionnelle de M. A Y ;

Que c’est à juste titre que le premier juge a condamné la Société Marseillaise de Crédit au paiement de la somme de 3 000 euros au titre du préjudice moral de M. A Y ; que le jugement déféré sera confirmé de ce chef ;

Attendu que l’équité commande qu’une somme de 2 000 euros soit allouée à M. A Y en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a :

— débouté la Société Marseillaise de Crédit de ses contestations aucune faute n’étant établie à l’encontre de M. A Y,

— condamné la Société Marseillaise de Crédit à payer à M. A Y la somme de 21 993 euros au titre des chèques frauduleux, outre les intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2011 et la somme de 10 539,63 euros au titre des frais bancaires et agios consécutifs au découvert et à l’interdiction bancaire, Statuant à nouveau de ces chefs,

— Dit que M. A Y a commis une faute, justifiant un partage de responsabilité par moitié entre lui et la banque,

— Condamne la Société Marseillaise de Crédit à payer à M. A Y la somme de

10 996,50 euros, au titre des chèques frauduleux, outre les intérêts au taux légal à compter du 20 décembre 2011, et la somme de 392 euros au titre des frais consécutifs à l’interdiction bancaire,

— Déboute M. A Y de ses plus amples demandes au titre de ses préjudices,

Y ajoutant,

— Condamne la Société Marseillaise de Crédit à payer à M. A Y la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel,

— Condamne la Société Marseillaise de Crédit au paiement des dépens d’appel qui seront recouvrés selon les dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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