Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-10, 3 septembre 2020, n° 19/00043

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 1-10, 3 sept. 2020, n° 19/00043
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 19/00043
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Bouches-du-Rhône, EXPRO, 6 juin 2019, N° 18/00120
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

CHAMBRE DES EXPROPRIATIONS

ARRÊT AU FOND

DU 03 SEPTEMBRE 2020

N° 2020/19

N° RG 19/00043

N° Portalis DBVB-V-B7D-BEYQO

SARL ENSUA

C/

X Y

Z A

B C

D E

COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT DE MARSEILLE

Copie exécutoire délivrée :

le :

à :

— SARL ENSUA

— Madame X Y

— Madame Z A

— Madame B C

— Monsieur D E

Copie certifiée conforme :

le :

à :

— Me Olivier BURTEZ-DOUCEDE

— Me Gérard ANCEAU

— COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT DE MARSEILLE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Juge de l’expropriation des BOUCHES-DU-RHONE en date du 07 Juin 2019, enregistré au répertoire général sous le n° 18/00120.

APPELANTE

SARL ENSUA,

demeurant […]

représentée par Me Olivier BURTEZ-DOUCEDE de la SCP CABINET BERENGER, BLANC, BURTEZ-DOUCEDE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Madame X Y

demeurant Chemin de l’Aiguille – 13820 ENSUES-LA-REDONNE

représentée par Me Gérard ANCEAU, avocat au barreau de VALENCE.

Madame Z A

demeurant 1, chemin carraire de l’Aiguille – 13820 ENSUES-LA-REDONNE

représentée par Me Gérard ANCEAU, avocat au barreau de VALENCE.

Madame B C

demeurant 1, chemin carraire de l’Aiguille – 13820 ENSUES-LA-REDONNE

représentée par Me Gérard ANCEAU, avocat au barreau de VALENCE.

Monsieur D E

demeurant 1, chemin carraire de l’Aiguille – 13820 ENSUES-LA-REDONNE

représenté par Me Gérard ANCEAU, avocat au barreau de VALENCE.

COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT DE MARSEILLE,

demeurant […]

*-*-*-*-*

Les parties ont indiqué expressément qu’elles acceptaient que l’affaire soit jugée selon la procédure sans audience prévue par l’article 8 de l’ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Septembre 2020.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE

Madame Anne DUBOIS, Conseiller rapporteur,

désignée pour présider la Chambre des Expropriations, en qualité de titulaire, par ordonnance du Premier Président de la Cour d’Appel d’Aix en Provence.

Mme Valérie GAILLOT-MERCIER, Conseiller,

Madame Sandrine LEFEBVRE, Conseiller,

Puis les mêmes magistrats ont délibéré de l’affaire, conformément à la loi, hors la présence du Commissaire du Gouvernement et du greffier.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé publiquement le 03 Septembre 2020 et signé par Madame Anne DUBOIS, Conseiller et Madame Charlotte COMBARET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DES FAITS :

Par délibération du 27 mai 2005, la communauté urbaine Marseille Provence Métropole a décidé la mise en 'uvre d’une opération visant à réaliser une zone d’aménagement concertée (ZAC) d’intérêt communautaire à vocation d’activité économique sur le lieu-dit «'Les Aiguilles'» sur les territoires d’Ensuès-la-Redonne, Gignac-la-Nerthe et Chateauneuf-les-Martigues.

La concession d’aménagement de la ZAC a été finalement confiée à la SARL Ensua.

L’enquête publique et parcellaire s’est déroulée du 30 mars 2015 au 30 avril 2015.

L’opération, déclarée d’utilité publique par arrêté préfectoral du 1er septembre 2015, concerne notamment la parcelle cadastrée section B n° 9 à Ensuès-la-Redonne dont X Y, Z A, B C et D E sont propriétaires indivis à raison d’un 5e chacun.

L’ordonnance d’expropriation est intervenue le 20 septembre 2016.

Les expropriés n’ayant pas répondu à son offre du 6 juin 2016, la SARL Ensua a saisi le juge de l’expropriation des Bouches-du-Rhône en fixation des indemnités d’expropriation.

Après avoir visité les lieux le 23 mai 2017, ce dernier a débouté l’expropriant de sa demande en l’absence de date de référence visée à la procédure, par jugement du 28 juin 2017.

Par mémoire du 3 décembre 2018, la SARL Ensua a de nouveau saisi le juge de l’expropriation.

Après avoir visité les lieux le 4 mars 2019, ce dernier a, par jugement du 7 juin 2019':

— fixé la date de référence au 30 juin 2016,

— fixé l’indemnité principale due à X Y, Z A, B C et D E à la somme de 771.090 euros,

— fixé l’indemnité de remploi à la somme de 78.109 euros,

— condamné la SARL Ensua à payer à X Y, Z A, B C et D E la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— laissé les dépens à la charge de la SARL Ensua.

Cette dernière a interjeté appel reçu le 31 juillet 2019.

Dans son mémoire reçu le 7 octobre 2019 et tenu pour intégralement repris, elle demande à la cour de :

— à titre principal :

— réformer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

— en conséquence':

— fixer les indemnités comme suit':

— indemnité principale lot A': 85 m² x 3.000 € x 60% = 153.000 euros,

— indemnité principale lot B': 153 m² x 3.000 € x 60% = 275.400 euros,

— indemnité principale lot C': 87 m² x 3.000 € x 60% = 156.600 euros,

— indemnité principale lot D': 100 m² x 2.700 € x 10% = 27.000 euros,

— indemnité principale lot E': 31 m² x 2.700 € x 60% = 50.220 euros,

— total de l’indemnité principale : 662.220 euros

— indemnité de remploi : 67.222 euros,

— laisser les dépens à la charge des expropriés.

Dans leur mémoire en réponse du 16 décembre 2019, tenu pour intégralement repris, les intimés demandent à la cour de':

— réformer partiellement le jugement dont appel,

— fixer le montant du prix à leur verser à 923.600 euros,

— à titre subsidiaire,

— fixer le montant du prix à leur verser à la somme de 846.481 euros correspondant aux conclusions de première instance du commissaire du gouvernement,

— à titre encore plus subsidiaire,

— confirmer le jugement entrepris,

— en tout état de cause,

— confirmer les dispositions du jugement sur l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner l’appelante à leur payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 26 décembre 2019 et tenues pour intégralement reprises, le commissaire du gouvernement sollicite la confirmation de la décision dans toutes ses dispositions.

Les mémoires des parties, les conclusions du commissaire du gouvernement et toutes les pièces sur lesquelles ils s’appuient, ont été régulièrement notifiés conformément aux dispositions de l’article R 311-26 du code de l’expropriation.

L’audience du 2 juillet 2020 n’ayant pu avoir lieu du fait des mesures gouvernementales liées au Covid 19, l’affaire a fait l’objet d’une décision rendue sans audience, en application de l’article 8 de l’ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale, en l’absence d’opposition des parties.

***

**

SUR CE':

Sur la date de référence':

La date de référence fixée au 30 juin 2016 par le premier juge en application des articles L 322-2 du code de l’expropriation et L 213-4 du code de l’urbanisme, correspondant à la date d’approbation de la modification n° 4 du plan local d’urbanisme de la commune, n’est pas discutée.

Sur la qualification et la consistance du bien':

La parcelle, toute en longueur, est divisée en 5 parties clôturées avec chacune une maison dont 4 à usage d’habitation principale, construites en infraction avec les règles de l’urbanisme.

Selon le rapport d’expertise Pirard, missionné par les expropriés, malgré l’absence de division juridique effective, ces parties ont été respectivement appelées':

— lot A': d’une surface de 85 m²': supporte une maison de plain-pied, comprenant un séjour avec baie vitrée, 3 chambres, une cuisine équipée, une salle de douche avec WC, lavabo et douche à l’italienne, fenêtres en double vitrage et grilles de protection, l’ensemble étant en très bon état,

— lot B': d’une surface de 153 m²': supporte une maison surélevée d’un étage, comprenant au rez-de-chaussée un séjour et salon avec grande cuisine équipée, grande salle de bains avec jacuzzi, grand dressing, 1 WC carrelé et un grand débarras avec fenêtre, et à l’étage, trois chambres avec velux, 1 WC, 2 dégagements et une petite terrasse avec vue sur l’étang, toutes les fenêtres étant équipées de double vitrage et stores roulants, et l’extérieur, une grande terrasse carrelée et une piscine hors-sol clôturée, l’ensemble étant en bon état à très bon état,

— lot C': d’une surface de 87 m²': supporte une petite habitation en L, comprenant une petite pièce de vie au plafond bas, avec coin cuisine et 3 fenêtres, 2 grandes chambres avec baie vitrée, 1 salle de bains en cours de rénovation, 1 WC avec fenêtre, et dans le jardin, face à la maison, une piscine hors sol et un petit bâti composant une salle de bains entièrement carrelée (WC et grande baignoire), l’ensemble étant en bon état,

— lot D': d’une surface de 100 m²': supporte un bâti en parpaings et toit en tuiles muré, empêchant qu’il soit visité,

— lot E': d’une surface de 31 m²': supporte un petit bâti au fond comprenant une pièce de vie avec cuisine équipée et climatisation réversible, le tout étant en bon état, et un autre petit bâti avec toit en tôles et murs nus avec WC et fenêtre double vitrage.

Sur l’évaluation :

Le premier juge a relevé que le fait que les immeubles soient irréguliers au regard de la réglementation d’urbanisme, n’a pas pour effet de les frapper d’inaliénabilité mais justifie un taux d’abattement de 30% pour l’ensemble des lots sauf le lot D qui était, au jour du transport sur les lieux, à l’abandon, hors d’état d’être habité avec les issues murées, et qui motive un taux de 90%.

Après analyse du rapport d’expertise Pirard et des termes de comparaison fournis par le commissaire du gouvernement, il a retenu une valeur métrique de 3.000 euros pour les lots A B C D, dont les bâtis ont été édifiés bien après les biens de référence construits en moyenne dans les années 1970, et sont en très bon état à l’exception de la construction inachevée. Pour le lot E, présentant un moindre degré de finition, il a fixé un prix au m² de 2.700 euros.

La SARL Ensua considère que la valeur métrique de 2.700 euros doit également être retenue pour le lot E. Elle conteste par ailleurs l’abattement de 30% pour illégalité pratiqué et veut voir appliquer un taux de 40% d’autant que des critères défavorables n’ont pas été pris en compte, et notamment le fait qu’en l’absence de division, les maisons sont invendables individuellement et qu’elles sont situées dans une zone d’exploitation industrielle générant des nuisances sonores avec un trafic important de poids lourds.

Les intimés se fondent sur les conclusions de leur expert, sans toutefois les produire en appel, et réclament une indemnité principale de 179.000 euros pour le lot A, de 322.000 euros pour le lot B, de 209.000 euros pour le lot C, de 76.000 euros pour le lot D et de 55.000 euros pour le lot E sans application du coefficient de vétusté proposé par le commissaire du gouvernement en invoquant le parfait état d’entretien des constructions. À titre subsidiaire, ils se réfèrent aux points de comparaison fournis par le commissaire du gouvernement en première instance mais excluent l’emploi d’un critère de vétusté déjà pris en compte par l’expert Pirard. Plus subsidiairement encore, ils sollicitent la confirmation du jugement.

Force est toutefois de constater qu’ils ne produisent aucune pièce à l’appui de leurs prétentions et ne justifient aucunement d’une valeur métrique qui inclurait un coefficient de vétusté.

Au demeurant, l’abattement n’a pas été pratiqué pour ce motif, mais en raison de l’illégalité des constructions.

A cet égard, il convient de substituer au taux de 30% retenu en première instance celui de 40% d’une part, parce qu’il correspond à celui déjà appliqué par le premier juge pour construction illicite dans une ZAC, comme en justifie l’appelante par la production du jugement du 13 juin 2018, et, d’autre part, parce que l’indivision empêche la vente individuelle des maisons.

Par ailleurs, la liste des mutations de maisons de 80 à 160 m² construites entre 2001 et 2010 dans un périmètre géographique de 3.000 mètres autour de la parcelle B 9, entre 2016 et 2019, fournie par le commissaire du gouvernement, met en évidence une fourchette allant de 1.989,90 euros à 4.481,25 euros, soit un prix au m² moyen de 3.327,01 euros et un médian de 3.309,76 euros.

Eu égard, à la situation nettement moins attractive du terrain, à proximité immédiate d’entreprises de lavage de poids lourds et de transports routiers et d’une boulangerie industrielle, c’est à bon droit que

le premier juge a fixé à 3.000 euros la valeur métrique des «'lots'» A B C comprenant des maisons en très bon état et à 2.700 euros celle du lot E présentant un moindre degré de finition.

En revanche, le lot D qui n’a pu être visité et qui supporte un bâti en parpaings et toit en tuiles muré, ne peut bénéficier d’un prix au m² équivalent à celui des habitations ABC et celui de 2.700 euros proposé par l’appelante sera donc retenu.

En conséquence, l’indemnité principale s’élève à 662.220 euros, se détaillant comme suit':

— lot A': 85 m² x 3.000 € x 60% = 153.000 euros,

— lot B': 153 m² x 3.000 € x 60% = 275.400 euros,

— lot C': 87 m² x 3.000 € x 60% = 156.600 euros,

— lot D': 100 m² x 2.700 € x 10% = 27.000 euros,

— lot E': 31 m² x 2.700 € x 60% = 50.220 euros,

L’indemnité de remploi qui en résulte est donc de 67.222 euros selon le barème dégressif de 20%, 15% et 10%.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile':

L’issue du procès conduit à mettre les dépens à la charge des intimés sans qu’il y ait lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

***

**

PAR CES MOTIFS

la cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition,

INFIRME le jugement entrepris en ce qui concerne le montant des indemnités allouées,

Statuant à nouveau,

FIXE l’indemnité d’expropriation globale revenant à X Y, Z A, B C et D E à la somme de 729.442 euros incluant l’indemnité de remploi de 67.222 euros,

Y ajoutant,

DIT n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement pour le surplus,

REJETTE le surplus des demandes,

CONDAMNE X Y, Z A, B C et D E aux dépens d’appel. la greffière la présidente

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