Infirmation partielle 2 décembre 2021
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Sur la décision
| Référence : | CA Aix-en-Provence, ch. 1-5, 2 déc. 2021, n° 18/13995 |
|---|---|
| Juridiction : | Cour d'appel d'Aix-en-Provence |
| Numéro(s) : | 18/13995 |
| Décision précédente : | Tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, 4 juillet 2018, N° 15/04790 |
| Dispositif : | Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours |
Texte intégral
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-5
ARRÊT AU FOND
DU 02 DECEMBRE 2021
lv
N° 2021/ 536
Rôle N° RG 18/13995 – N° Portalis DBVB-V-B7C-BC7CQ
D X
E F épouse X
C/
G Z
H Z épouse Y
I A
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Claire BRUNA
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance d’AIX EN PROVENCE en date du 05 Juillet 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 15/04790.
APPELANTS
Monsieur D X
demeurant […]
représenté par Me Fabien ATLANI de la SELARL ATLANI FABIEN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Madame E F épouse X
demeurant […]
représentée par Me Fabien ATLANI de la SELARL ATLANI FABIEN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Monsieur G Z
demeurant […]
représenté par Me Claire BRUNA, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Emmanuel F, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, plaidant
Madame H Z épouse Y
demeurant […]
représentée par Me Claire BRUNA, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Emmanuel F, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, plaidant
Madame I A
demeurant […]
représentée par Me Claire BRUNA, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Emmanuel F, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 12 Octobre 2021 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Laetitia VIGNON, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Marie-Florence BRENGARD, Président
Madame Sylvaine ARFINENGO, Président
Madame Laetitia VIGNON, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 02 Décembre 2021.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 02 Décembre 2021,
Signé par Madame Marie-Florence BRENGARD, Président et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
M. D X et Mme E F épouse X sont propriétaires, depuis 1987, d’un immeuble sur la commune d’ISTRES cadastré section L n°73 ( désormais section CK n° 211) d’une contenance de 1 are 20 centiares, consistant en une maison d’habitation élevée d’un étage sur rez-de-chaussée et grenier au-dessus.
Cet immeuble est confronté au Nord par le fonds cadastré […] appartenant depuis 1954 aux consorts Z-A et à l’Est par un immeuble cadastré section CK n° 212.
Suivant déclaration enregistrée au greffe le 03 juillet 2014, M. D X a saisi la juridiction de proximité de Martigues aux fins de voir condamner M. G Z et Mme H Z épouse Y à réparer les troubles de voisinage qu’il subit, en obtenant la fermeture de trois jours ouvrants illégalement sur sa cour, qu’il soit mis fin à l’occultation de la vue de son balcon outre la mise en conformité du mur séparant leurs propriétés.
Par du 16 juin 2015, la juridiction de proximité de Martigues s’est déclarée incompétente au profit du tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence.
Par acte d’huissier en date du 08 décembre 2016, M. D X et Mme E F épouse X ont fait assigner en intervention forcée devant le tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence, Mme I A, propriétaire indivis et occupante du bien immobilier cadastré […].
Par jugement contradictoire en date du 05 juillet 2018, le tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence a:
— débouté M. D X et Mme E F épouse X de l’ensemble de leurs demandes,
— dit que M. G Z, Mme H Z et Mme I A ont acquis par prescription trentenaire des servitudes de vue sur le fonds X par les ouvertures pratiquées sur leurs façades,
— dit que M. G Z, Mme H Z et Mme I A ont acquis par prescription trentenaire la propriété du mur séparatif du fonds X-Z,
— condamné M. D X et Mme E F épouse X à supprimer toutes leurs constructions en dur prenant appui sur le mur séparatif, propriété du fonds X-Z,
— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,
— condamné M. D X et Mme E F épouse X à verser à M. G Z, Mme H Z et Mme I A la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,
— rejeté le surplus des demandes des parties plus amples ou contraires.
Par déclaration en date du 23 août 2018, M. D X et Mme E F épouse X ont interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par RPVA le 27 septembre 2021, M. D X et Mme E F épouse X demandent à la cour, au visa des articles 657, 675 et 680 du code civil, de:
— réformer en toutes ses dispositions le jugement du 05 juillet 2018 dont appel,
Statuant à nouveau,
— constater que les consorts Z-A ne démontrent pas avoir acquis par prescription trentenaire des servitudes de vue sur le fonds X par les ouvertures pratiquées sur leur façade,
— constater que les ouvertures en question n’ont été que de simples jours non susceptibles d’acquisition par prescription trentenaire,
— ordonner la suppression des trois vues pratiquées par les consorts Z-A sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir,
— dire que le mur séparatif des fonds X/Z-A est mitoyen, chaque partie s’étant comportée comme le propriétaire de ce dernier sans l’opposition de l’autre depuis plus de trente ans,
— ordonner la démolition de tous les ouvrages empiétant sur leur fonds,
— dire et juger que l’entretien du mur litigieux se fera à frais communs,
— condamner les intimés à payer la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, en ce compris ceux de première instance.
Sur leur demande de suppression des trois vues, ils font grief au tribunal d’avoir retenu que les
consorts Z-A avaient acquis par prescription les vues litigieuses aux motifs que les ouvertures avaient été crées depuis plus de trente ans alors que:
— pour être qualifiée de vue, une ouverture doit être non fermée ou être pourvue de fenêtre pouvant s’ouvrir, laisser passer la lumière et permettre d’apercevoir le fonds voisin,
— en l’espèce, M. J Z ( auteur des intimés) avait fait installer des ouvertures dans les murs litigieux qui demeuraient systématiquement fermées, avec des masses grillagées empêchant toute ouverture,
— il n’a donc existé que de simples jours avant que les ayants droits de M. J Z n’entreprennent des travaux en 2010 pour transformer ces jours en vues,
— les intimés échouent à démontrer qu’ils bénéficient de fenêtres et donc de vues depuis plus de trente ans,
— Mme K, veuve B, leur auteur, n’aurait pas manqué de signaler la présence de servitudes de vue si elles avaient étaient existantes donc opposables au jour de la vente, ce qui n’est pas le cas, corroborant le fait que lesdites ouvertures, à les supposer existantes, lorsqu’ils ont acquis leur bien, ne pouvaient constituer que de simples jours.
S’agissant de la propriété du mur séparatif et les empiètements éventuels, ils font valoir que:
— en 1987, lorsqu’ils ont acquis leur propriété, étaient notamment ancrés dans le mur litigieux les gonds du portail d’entrée permettant l’accès à leur fonds, caractérisant des actes de possession, le propriétaire ayant la volonté de se comporter comme si le mur était sa propriété exclusive ou s’il était mitoyen,
— si les intimés ont pu se comporter comme les propriétaires du mur litigieux, leurs auteurs ( les consorts B) et eux-mêmes ont procédé de la même manière, en apposant les ancrages destinés à permettre le fonctionnement du portail d’accès à leur fonds, de même qu’en implantant une voûte au-dessus de ce portail, un barbecue, des treillis ainsi que la toiture de leur extension et ce sans opposition de leurs voisins.
Ils considèrent que la demande de reconnaissance de la mitoyenneté du mur est parfaitement recevable en ce qu’elle ne s’analyse pas en une demande nouvelle en cause d’appel puisque la demande de démolition des ouvrages qu’ils avaient présentée en première instance, découle du caractère mitoyen du mur et donc de leur contestation du caractère privatif du mur comme étant sur le fonds Z.
Ils relèvent que le seul fait que le cadastre de 2014 ne présente qu’un tiret du côté de la propriété
Z ne saurait faire échec à la présomption de mitoyenneté édictée à l’article 653 du code civil, le cadastre n’étant pas une preuve de propriété, de mêmes que les techniques de construction du mur ne sont pas de nature à révéler le caractère privatif de celui-ci, d’autant qu’il est acquis que les actes notariés de l’époque ne mentionnent pas de propriété de l’une ou l’autres des parties sur ce mur.
Ils en concluent que les parties et leurs auteurs se sont toujours comportés comme si le mur était leur propriété exclusive ou s’il était mitoyen depuis plus de trente ans, justifiant le rejet de la demande de démolition des ouvrages présentée par les intimés.
M. G Z, Mme H Z et Mme I A, suivant leurs dernières conclusions signifiées le 04 janvier 2019, demandent à la cour de:
— dire irrecevable comme nouvelle en appel la demande relative à la mitoyenneté du mur,
— confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Subsidiairement,
— constater que les trois fenêtres de la maison Z donnant sur le fonds X, ouvertes en 1954, constituent des vues au sens des articles 675 et suivants du code civil, acquises par prescription trentenaire,
— constater que les murs séparatifs sont la propriété du fonds Z,
Subsidiairement,
— constater qu’ils en ont acquis la propriété par usucapion,
— condamner les époux X à supprimer toutes les constructions en dur s’appuyant sur les mur de la maison Z et le mur séparatif, notamment le barbecue,
— condamner les époux X à payer en cause d’appel la somme de 3.600 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
Ils estiment avoir acquis par usucapion des servitudes de vues sur le fonds X par les trois ouvertures pratiquées sur leurs façades, sollicitant la confirmation du jugement querellé sur ce point en rappelant que:
— les vues litigieuses ont été créées en 1954, par la réalisation de trois ouvertures dans le mur séparatif, chaque ouverture étant équipée depuis l’origine de fenêtre en verre, avec un dispositif d’ouverture,
— ces vues n’ont jamais été modifiées, la seule intervention ayant consisté en 2014 en un remplacement des anciens ouvrants métalliques par des ouvrants en aluminium et PVC,
— le constat d’huissier dressé le 21 janvier 2010 à la demande des époux X démontrent que des vues, et non des jours de souffrance, existaient déjà à cette date,
— ces fenêtres qui existaient en 2010, avec leur vues, étaient celles de 1954 et ouvraient avant même le remplacement des ouvrants en 2014, attestant que les vues n’ont pas été créées en 2014 par la transformation de jours de souffrance mais qu’elles existaient depuis l’origine,
— ils justifient par la production de plusieurs attestations que les trois vues existent depuis le milieu des années cinquante, que plus particulièrement les trois fenêtres ont été ouvertes avec pose de châssis ouvrants, avec l’autorisation des auteurs des consorts X, lors de la réfection totale de la maison qui a été entreprise à cette époque,
— les époux X ont acquis leur propriété en 1987, en l’état, après l’acquisition de la servitude de vue par prescription et ils étaient informés de ce qu’ils achetaient y compris les servitudes passives et actives qui grevaient son fonds,
— ils n’ont jamais formulé la moindre contestation avant 2013/2014, de sorte que les ouvertures litigieuses, toutes pourvues de fenêtres ouvrantes, depuis l’origine, constituent bien des vues au sens du code civil et non des jours de souffrance, et ces vues bénéficient incontestablement de la prescription trentenaire.
Ils concluent par ailleurs au caractère privatif du mur séparatif en observant que:
— la demande de mitoyenneté constitue une demande nouvelle, en ce que devant les premiers juges les consorts X n’ont à aucun moment revendiqué la mitoyenneté du mur ou contesté son caractère privatif mais se sont contentés de prétendre que le mur Z avait été construit sur leur fonds,
— en toute hypothèse, il s’agit bien d’un mur privatif à leur fonds au sens des articles 653 et 654 du code civil:
* la première partie du mur est constituée par le mur de leur maison qui donne sur le fonds X dans lequel ils ont percé leur fenêtres et encastré leurs cheminées, cette partie constituant ainsi nécessairement un pan de leur maison donnant sur la cour des appelants, l’immeuble X n’y étant pas accolé et ne comportant aucune ' héberge', étant relevé que l’entretien du mur a toujours été réalisé par les propriétaires successifs du fonds Z,
* la seconde partie du mur est constituée par le mur de clôture séparatif entre les deux cours, qui est la continuité du mur privatif de leur propriété qu’il prolonge, comme étant construit dans la même ligne, intégralement sur leur fonds et non à cheval sur la signe séparative.
Sur cette dernière partie, ils soulignent que le mur sert d’appui à la terrasse qu’ils ont refaites en 1954-1955, qu’il comporte en son sommet une dalle qui déborde uniquement sur leur fonds, afin d’y
évacuer l’eau et comporte en outre un accès en son sommet depuis leur terrasse, au seul profit de leur fonds afin d’entretenir le haut du mur ou tailler les buissons grimpants, de tels indices étant des marques de non mitoyenneté au sens de l’article 654 du code civil.
Ils ajoutent que ce mur a toujours été considéré, au moins jusqu’en 2014, comme privatif à leur fonds, que les appelants ne s’en sont jamais comportés comme propriétaires et sont bien incapables de rapporter la preuve d’une quelconque possession à titre de propriétaire pendant trente ans, alors que pour leur part, ils justifient avoir acquis le mur par usucapion dès lors qu’il est incontestable que depuis 1954; ils ont toujours estimé que ce mur leur appartenait et se sont comportés en propriétaires sans la moindre contestation de leurs voisins.
La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 28 septembre 2021.
MOTIFS
Sur la demande des époux X de suppression des trois vues
Les appelants soutiennent que lors de leur prise de possession des lieux en 1987, trois jours de souffrance étaient visibles de leur cour intérieure au niveau des murs de façade de la propriété des consorts Z-A, que durant toute l’occupation de la maison litigieuse par M. J Z, les ouvertures litigieuses demeuraient systématiquement fermées, avec des masses grillagées et que ce n’est qu’à partir de 2010, que les intimés ont remplacé les
jours existants par des fenêtres coulissantes avec châssis PVC, créant ainsi des vues directes sur leur fonds.
Les consorts Z-A, pour leur part, font valoir que les ouvertures litigieuses ont été créées en 1954, que les vues existent en conséquence depuis cette date et qu’il n’ y pas eu de transformation de jours en vues lors du changement des menuiseries en 2014.
Il est constant qu’une servitude de vue constitue une servitude continue et apparente, qui s’acquiert par titre ou par la possession de trente ans conformément à l’article 690 du code civil.
Les intimés communiquent plusieurs attestations qui confirment qu’au cours des années 1954 et 1955, M. J Z et son frère, C, ont entrepris d’importants travaux de rénovation de leur maison et qu’à cette occasion, ont été crées les trois ouvertures dans le mur:
— M. L M, qui avait 14 ans à l’époque et habitait au […], dont la cour donne sur la place Louis Vigne en face de la cour de la propriété Z et qui relate que ' Je me souviens être allé plusieurs fois sur le chantier de la maison de M. J Z qu’il étant entrain de rénover avec son frère(…) Je certifie qu’au milieu des années 1950, pendant les travaux, que les trois fenêtres donnant dans la cour de M et Mme B (…) avaient été ouvertes par M. J Z et son frère C Z et qu’elles n’ont plus été modifiées par la suite',
— Mme N O, qui avait alors 27 ans et résidait à l’angle de la rue Torte( juste à côté des lieux litigieux ) et confirme avoir été témoin ' En 1954, de l’ouverture de trois fenêtres donnant sur la cour côté Impasse Vigne de M. et Mme B et que étant voisins et amis, l’accord s’est fait verbalement, les fenêtres existent toujours aujourd’hui'.
— M. P Q, qui n’a pas été témoin de l’ouverture des fenêtres mais atteste avoir toujours vu depuis 1958, date à laquelle sa famille s’est installée juste à côté de la maison des intimés ' J’ai toujours vu trois fenêtres, chambre et salle de bain jusqu’à ce jour, donnant sur la cour de M. et Mme B'
— M. R S qui explique être souvent venu dans la maison Z à compter de 1964 alors qu’il avait 11 ans ' Je me rappelle (…) que la maison possédait déjà deux ouvertures dans la salle de bain ainsi qu’une ouverture dans la chambre du 1er étage (….) Ces trois ouvertures donnaient sur la cour intérieure de M. et Mme B (…) Je confirme que depuis il y a eu aucun changement. Je passe régulièrement devant la maison , j’ai toujours vu ces fenêtres depuis, et elles existent encore aujourd’hui'.
— Mme T U, qui témoigne ' qu’en 1966 lorsqu’elle venait chez les grands-parents et parents de son mari, M. V B, dont la maison est mitoyenne par la cour avec celle de M. J Z et qu’elle sortait dans la cour, elle constatait que les trois fenêtres de la maison de M. Z existaient'.
Il est ainsi établi que les trois ouvertures contestées et présentes sur les façades Nord et Est de la propriété des intimés ont été pratiquées à compter du milieu des années 1950 et ont toujours existé depuis lors.
Contrairement aux affirmations des époux X, ces ouvertures n’étaient pas à l’origine des simples jours ne pouvant être qualifiés de vues, dès lors que tous les témoins emploient le terme de ' fenêtres' qui, par définition, suppose une ouverture dans un mur pour laisser pénétrer l’air et la lumière.
Le procès-verbal de constat dressé le 21 janvier 2010 à la requête des appelants démontrent qu’à cette date, des vues existaient et non de simples jours de souffrance dès lors que l’huissier indique expressément que:
' La partie requérante (…) nous requiert ce jour à l’effet de constater l’existence d’ouvertures type fenêtres donnant directement sur sa propriété avec vue directe sur ladite propriété, ce lui cause désordres et nuits à son intimité (….)
Je constate la présence de trois ouvertures:
- une première ouverture en face, avec vue directe sur la cour intérieure de la partie requérante,
- et deux ouvertures sur la gauche en vues obliques'
L’huissier poursuit en précisant que s’agissant des deux ouvertures sur le mur de gauche, ' la première ouverture en partie basse est fermée par une grille en fer et que la seconde en partie haute présente une moustiquaire avec un encadrement en fer. Nous constatons que ladite ouverture a une vue directe sur la terrasse de M. X où nous nous trouvons. La partie requérante m’a dit que cette ouverture n’est pas fermée définitivement et que le voisin peut procéder à son ouverture'
Concernant la première ouverture, l’huissier constate ' la présence d’un élément type moustiquaire avec un encadrement de couleur grise' et la présence d’un oscillo-battant en verre transparent soutenu par une cale en bois.
Ce procès-verbal de constat établit, sans conteste, qu’en 2010, les vues directes provenant de fenêtres avec ouvertures étaient présentes et non de simples jours de souffrance comme le prétendent les consorts X. En effet, il est manifeste que les trois fenêtres n’étaient pas en ' verre dormant’ mais bien constituées d’ouvrants protégés par un système de moustiquaires et de grillages, démontant à l’évidence qu’il s’agissait de fenêtres régulièrement ouvertes.
Ces fenêtres constituaient des vues depuis le milieu des années 1950 et avant le remplacement des ouvrants intervenus en 2014, travaux qui ont consisté à remplacer les anciens ouvrants métalliques par des ouvrants en aluminium et PVC, ainsi qu’il en ressort du constat d’huissier en date du 21
octobre 2014 qui ne met en évidence que des changements de menuiserie au niveau des ouvertures.
En conséquence, il est établi qu’en 1985, les vues avaient été créées depuis trente ans et que la servitude de vue était acquise par prescription.
M. et Mme X ont acquis leur propriété en 1987, en l’état, après acquisition, par les intimés, des servitudes de vues par usucapion et ils n’ont jamais contesté lesdites ouvertures avant 2013.
Le jugement entrepris en ce que dit que M. G Z, Mme H Z et Mme I A ont acquis par prescription trentenaire des servitudes de vue sur le fonds X par les ouvertures pratiquées sur leurs façades et par là, débouté M. et Mme X de leur demande de suppression de ces trois ouvertures, sera confirmé.
Sur la propriété du mur séparatif et l’existence d’éventuels empiètements
En cause d’appel, les consorts X revendiquent la mitoyenneté du mur.
Les consorts Z-A leur opposent l’irrecevabilité de cette demande comme étant nouvelle en cause d’appel.
Or, une telle prétention tend aux mêmes fins que celle qui avait été présentée aux premiers juges par les époux X, à savoir la démolition des ouvrages prenant appui sur ce mur, les appelants prétendant en première instance que ledit mur leur appartenait et maintenant devant la cour qu’il est mitoyen. Seul le fondement juridique est différent.
Cette demande est donc recevable.
En vertu de l’article 653 du code civil, dans les villes ou les campagnes, tout mur servant de séparation entre bâtiments, jusqu’à l’héberge, ou entre cours et jardins, et même entre enclos dans les champs est présumé mitoyen, s’il n’y a titre ou marque du contraire.
L’article 654 du même code précise qu’il y a marque de non mitoyenneté lorsque la sommité du mur est droite et à plomb de son parement d’un côté et présente de l’autre un plan incliné. Lors encore qu’il n’y a que d’un côté ou un chaperon ou des filets et corbeaux de pierre qui y auraient été mis en bâtissant le mur. Dans ces cas, le mur est censé appartenir exclusivement au propriétaire du côté duquel sont l’égout ou les corbeaux et filets de pierre.
Comme le soulignent à juste titre les intimés, la première partie du mur est constituée par le mur de la maison Z, qui donne sur le fonds X. Il s’agit du mur dans lequel les consorts Z ont percé les trois fenêtres et encastré leur cheminée. Cette partie du mur constitue uniquement un pan de la maison Z donnant sur la cour X et n’est donc pas séparatif entre deux bâtiments.
Dès lors, au sens de l’article 653 du code civil, cette première partie du mur ne peut pas être présumée mitoyenne et constitue un mur privatif au fonds Z.
Au demeurant, les consorts B , auteurs des époux X, n’auraient pas autorisé leurs voisins à percer des fenêtres et encastrer des cheminées dans le mur de la maison s’il considérait que celui-ci était mitoyen, sauf à céder leur part de mitoyenneté.
La seconde partie du mur concerne le mur de clôture séparatif entre les deux cours.
Il ressort des constats d’huissier et des photographies que cette seconde partie est dans la continuité du mur privatif de la maison Z.
Ce mur séparatif comporte au seul profit des intimés un accès en son sommet depuis leur terrasse, refaite en 1954-1955, et qui leur permet de tailler les buissons grimpants et d’arroser les végétaux qu’ils ont fait installer dans des pots sur le sommet du mur.
En outre, les photographies du mur démontrent que celui-ci comporte une dalle en son sommet qui déborde uniquement sur le fonds Z pour y évacuer l’eau. En revanche, le parement du mur est droit et à plomb du côté X.
Il s’agit de marques de non mitoyenneté au sens de l’article 654 du code civil, en ce que le mur appartient à celui qui y a accès et du côté duquel sont l’égout et le plan incliné.
Les consorts X prétendent pour leur part de l’existence des gonds de leur portail d’accès à leur fonds et qui seraient dans le mur litigieux, mais les seules photographies qu’ils produisent ne démontrent rien alors que le constat d’huissier qu’ils ont fait établir en 2014 aux termes duquel il est indiqué ' La partie requérante contrairement à ce qui a été indiqué dans le précédant constat, nous indique que le mur pourrait être mitoyen' mais ne comporte aucune photographie de ces prétendues marques de mitoyenneté ni aucune constatation de l’huissier sur le mur en cause.
Enfin, le plan cadastral qui est produit fait apparaître un petit tiret situé dans la parcelle 215 propriété des intimés, parallèle au mur de clôture, corroborant le caractère privatif de ce mur au fonds Z.
Ce mur n’est donc pas mitoyen mais a toujours appartenu au fonds Z
C’est donc à juste titre que le tribunal a:
— débouté les époux X de leur demande de démolition des ouvrages empiétant sur leur fonds,
— fait droit aux demandes des consorts Z-A concernant la suppression en dur s’appuyant sur leur mur en façade Nord et le mur séparatif des fonds.
Le jugement entrepris sera donc confirmé sauf à préciser que le mur séparatif des fonds X- CALATAUYD est la propriété des consorts Z-A.
Vu l’article 700 du code de procédure civile,
Vu l’article 696 du code de procédure civile,
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Déclare recevable en cause d’appel la demande M. D X et Mme E F épouse X relative à la mitoyenneté du mur séparatif,
Confirme le jugement du tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence déféré sauf à préciser que le mur séparatif des fonds X- CALATAUYD est la propriété M. G Z, Mme H Z et Mme I A,
Y ajoutant,
Condamne M. D X et Mme E F épouse X à payer à M. G Z, Mme H Z et Mme I A la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. D X et Mme E F épouse X aux dépens de la procédure d’appel qui pourront être recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
Le greffier Le président
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