Cour d'appel d'Amiens, 2e protection sociale, 26 juin 2025, n° 24/01833
TASS Douai 11 mars 2024
>
CA Amiens
Confirmation 26 juin 2025

Arguments

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  • Accepté
    Manquement aux obligations de sécurité

    La cour a retenu que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le salarié et n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver, constituant ainsi une faute inexcusable.

  • Accepté
    Droit à une rente majorée en cas de faute inexcusable

    La cour a confirmé que la majoration de la rente doit suivre l'évolution du taux d'incapacité et a ordonné la majoration conformément aux dispositions légales.

  • Autre
    Droit à réparation des préjudices subis

    La cour a noté que le salarié a droit à une réparation des préjudices causés par la faute inexcusable de l'employeur, mais a renvoyé la liquidation des préjudices à une juridiction compétente.

  • Accepté
    Responsabilité de l'employeur pour les frais liés à la faute inexcusable

    La cour a confirmé que l'employeur doit supporter les conséquences financières de sa faute inexcusable, y compris le remboursement des sommes dues à la caisse.

  • Accepté
    Droit à une indemnité au titre des frais irrépétibles

    La cour a jugé qu'il serait inéquitable de laisser à la charge du salarié les frais qu'il a exposés en appel, justifiant ainsi l'indemnisation.

Résumé par Doctrine IA

La Cour d'appel d'Amiens a été saisie par la société [11] pour infirmer le jugement du tribunal de Douai qui avait reconnu la faute inexcusable de l'employeur suite à un accident du travail survenu le 6 janvier 2020. La première instance avait jugé que l'employeur n'avait pas respecté ses obligations de sécurité, entraînant une incapacité permanente partielle de 10 % pour M. [B]. La cour d'appel a confirmé cette décision, soulignant que l'employeur avait conscience des risques et n'avait pas pris les mesures nécessaires pour protéger son salarié. Elle a également maintenu la majoration de la rente et l'indemnisation des préjudices, condamnant la société [11] aux dépens et à verser 2 000 euros à M. [B] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

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Sur la décision

Référence :
CA Amiens, 2e protection soc., 26 juin 2025, n° 24/01833
Juridiction : Cour d'appel d'Amiens
Numéro(s) : 24/01833
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Douai, 10 mars 2024
Dispositif : Autre
Date de dernière mise à jour : 8 juillet 2025
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Sur les parties

Texte intégral

ARRET

SAS [10] [A]

C/

[B]

CCC adressées à :

— SAS [10] [A]

— M. [B]

— Me MICHEL

— Me BLIN

Copie exécutoire délivrée à :

— Me BLIN

Le 26 juin 2025

COUR D’APPEL D’AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 26 JUIN 2025

*************************************************************

n° rg 24/01833 – n° portalis dbv4-v-b7i-jb7c – n° registre 1ère instance : 23/00044

Jugement du pôle social du tribunal des affaires de securite sociale de Douai en date du 11 mars 2024

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

SAS [10] [A], agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 2]

Représentée par Me Florine MICHEL, avocat au barreau de LILLE, vestiaire : 0030 substituée par Me Maxence BEAUREPAIRE, avocat au barreau de LILLE

ET :

INTIME

Monsieur [M] [B]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Non comparant

Représenté par Me Cedric BLIN de la SELARL BLIN CEDRIC, avocat au barreau de VALENCIENNES

DEBATS :

A l’audience publique du 28 Avril 2025 devant Mme Jocelyne RUBANTEL, président, siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l’article 945-1 du code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 26 Juin 2025.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame Isabelle MARQUANT

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Jocelyne RUBANTEL en a rendu compte à la cour composée en outre de :

Mme Jocelyne RUBANTEL, président,

M. Pascal HAMON, président,

et Mme Véronique CORNILLE, conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 26 Juin 2025, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, président a signé la minute avec Mme Nathalie LÉPEINGLE, greffier.

*

* *

DECISION

Le 6 janvier 2020, M. [M] [B], salarié de la société [11] en qualité de chauffeur routier et manutentionnaire depuis le 1er octobre 2019, a été victime d’un accident du travail.

Le certificat médical initial établi le 7 janvier 2020 mentionne un traumatisme de l’épaule gauche et des tendons de la coiffe des rotateurs après être tombé de la benne du camion.

Par courrier du 4 février 2020, la [4] ([5]) du Hainaut a notifié à M. [B] et son employeur sa décision de prise en charge de l’accident déclaré au titre de la législation sur les risques professionnels.

L’état de santé de M. [B], consécutif à cet accident du travail, a été déclaré consolidé au 20 juin 2021 et un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) de 10 % lui a été attribué en raison de l’existence d’une limitation des mouvements du bras gauche avec gêne fonctionnelle dans les suites d’un traumatisme du bras gauche ayant nécessité la réparation chirurgicale de la coiffe des rotateurs gauche chez un gaucher, le tout survenant sur un état antérieur caractérisé.

Saisi par M. [B] d’une requête tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de la société [11], le pôle social du tribunal judiciaire de Douai a, par jugement rendu le 11 mars 2024':

— jugé que l’accident du travail dont M. [B] avait été victime le 6 janvier 2020 était dû à la faute inexcusable de la société [11],

— ordonné la majoration de la rente versée à M. [B] dans les conditions maximales prévues par l’article L. 452-2 du code de la sécurité sociale sur la base d’un taux d’IPP de 10 %, laquelle serait avancée par la [6],

— jugé que ladite majoration suivrait automatiquement l’évolution éventuelle du taux d’IPP,

— ordonné avant dire droit une mesure d’expertise médicale judiciaire de M. [B] confiée à M. [W], avec pour mission, notamment, de donner son avis sur le préjudice des souffrances physiques et morales endurées par la victime, le préjudice esthétique, le préjudice d’agrément, le déficit fonctionnel temporaire, l’aide humaine avant consolidation, le déficit fonctionnel permanent, le préjudice de perte ou de diminution des possibilités de promotion professionnelle,

— condamné la société [11] à rembourser à la [6]':

— le montant de la majoration de l’indemnité prévue à l’article L. 452-2 du code de la sécurité sociale, laquelle devra toutefois être calculée dans la limite du taux d’IPP de 10 % définitivement notifié à l’employeur,

— le montant de l’indemnisation des préjudices complémentaires énumérés par l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale et ceux non couverts par les dispositions du livre IV,

— condamner la société [11] à payer à M. [B] la somme de 2'000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— réservé les dépens,

— ordonné l’exécution provisoire du jugement.

Ce jugement a été notifié le 25 mars 2024 à la société [11], qui en a relevé appel le 15 avril 2024.

Les parties ont été convoquées à l’audience du 28 avril 2025.

Aux termes de ses conclusions communiquées le 9 avril 2025, reprises oralement par avocat, la société [11] demande à la cour de':

— infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire,

statuant à nouveau,

— juger qu’elle a respecté ses obligations en matière de santé et sécurité,

en conséquence,

— débouter M. [B] de sa demande visant à faire reconnaître sa faute inexcusable,

— débouter M. [B] en ce qu’il demande une rente majorée à son maximum résultant de la faute inexcusable,

— débouter M. [Z] de sa demande d’indemnisation de l’intégralité de son préjudice résultant de sa faute inexcusable,

— condamner M. [B] à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle affirme avoir respecté ses obligations en matière de sécurité et avoir toujours pris les mesures nécessaires pour protéger la santé et la sécurité de ses salariés, ce dont il résulte qu’elle ne pouvait avoir conscience d’un potentiel danger. La société [11] précise disposer d’un document unique d’évaluation des risques professionnels ([7]) et de plusieurs fiches d’entreprise, effectuer des rappels essentiels concernant les chutes de hauteur, mettre à disposition des salariés des équipements de protection individuelle et du matériel en conformité avec les normes de sécurité.

Par conclusions réceptionnées le 25 février 2025, soutenues oralement par avocat, M. [B] demande à la cour de':

— débouter la société [11] de l’ensemble de ses demandes,

— confirmer le jugement du 11 mars 2024 dans toutes ses dispositions,

en conséquence,

— dire que l’accident dont il a été victime le 6 janvier 2020 résulte de la faute inexcusable de son employeur,

— dire que sa rente sera majorée à son maximum conformément aux dispositions de l’article L. 452-2 du code de la sécurité sociale sur la base d’un taux d’IPP de 10 %, et avancée directement par la [5],

— juger que ladite majoration suivra automatiquement l’évolution éventuelle du taux d’IPP,

— dire que la société [11] devra l’indemniser de l’intégralité de son préjudice résultant de la faute inexcusable de son employeur sur la base du rapport d’expertise déjà déposé par M. [W],

— condamner la société [11] à rembourser à la [5] le montant de la majoration de l’indemnité prévue à l’article L. 452-2 du code de la sécurité sociale et le montant de l’indemnisation des préjudices complémentaires,

— condamner la société [11] à payer la somme de 2'000 euros sur l’indemnité due en application de l’article 700 du code de procédure civile,

y ajouter,

— condamner la société [11] au paiement d’une somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Il fait valoir que la société [11] avait nécessairement conscience de ses obligations, des risques qu’elle lui faisait encourir en n’élaborant pas de [7], en ne vérifiant pas les équipements de travail qui lui étaient remis, en ne lui fournissant pas une échelle sécuritaire et des équipements de sécurité adéquats, en ne le formant pas à son poste.

Aux termes de ses conclusions déposées à l’audience, soutenues oralement par sa représentante, la [6] demande à la cour de':

— lui donner acte de ce qu’elle s’en rapporte à la sagesse de la cour sur la reconnaissance d’une faute inexcusable de l’employeur,

— en cas de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, confirmer le jugement en ce qu’il a dit qu’elle pourra recouvrer les sommes dues au titre de la faute inexcusable auprès de la société [11].

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des prétentions et moyens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande de reconnaissance de la faute inexcusable de la société [11]

Aux termes de l’article L. 4121-1 du code du travail, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l’article L. 4161-1 ;

2° Des actions d’information et de formation ;

3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.

L’article L. 4121-2 du même code dispose que l’employeur met en 'uvre les mesures prévues à l’article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :

1° Eviter les risques ;

2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;

3° Combattre les risques à la source ;

4° Adapter le travail à l’homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;

5° Tenir compte de l’état d’évolution de la technique ;

6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n’est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;

7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu’ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1, ainsi que ceux liés aux agissements sexistes définis à l’article L. 1142-2-1 ;

8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;

9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs.

L’article R. 4321-1 du code précité impose à l’employeur de mettre à la disposition des travailleurs les équipements de travail nécessaires, appropriés au travail à réaliser ou convenablement adaptés à cet effet, en vue de préserver leur santé et leur sécurité.

Selon l’article R. 4323-81, l’employeur s’assure que les échelles, escabeaux et marchepieds sont constitués de matériaux appropriés compte tenu des contraintes du milieu d’utilisation. Ces matériaux et leur assemblage sont d’une solidité et d’une résistance adaptées à l’emploi de l’équipement et permettent son utilisation dans des conditions adaptées du point de vue ergonomique.

En application de l’article R. 4323-82, les échelles, escabeaux et marchepieds sont placés de manière à ce que leur stabilité soit assurée en cours d’accès et d’utilisation et que leurs échelons ou marches soient horizontaux.

L’article R. 4323-84 prévoit que les échelles portables sont appuyées et reposent sur des supports stables, résistants et de dimensions adéquates notamment afin de demeurer immobiles.

Afin qu’elles ne puissent ni glisser ni basculer pendant leur utilisation, les échelles portables sont soit fixées dans la partie supérieure ou inférieure de leurs montants, soit maintenues en place au moyen de tout dispositif antidérapant ou par toute autre solution d’efficacité équivalente.

Enfin, selon l’article R. 4323-88, les échelles sont utilisées de façon à permettre aux travailleurs de disposer à tout moment d’une prise et d’un appui sûrs.

Le port de charges reste exceptionnel et limité à des charges légères et peu encombrantes. Il ne doit pas empêcher le maintien d’une prise sûre.

Le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l’employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d’une faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

En l’espèce, le 6 janvier 2020, M. [B] a été victime d’un accident du travail alors qu’il accédait à la benne de son camion afin d’y remettre les arceaux et bâcher'; l’échelle portable sur laquelle il grimpait a glissé et il s’est retrouvé suspendu par le bras gauche au bord de la benne.

M. [B] fait valoir que son employeur avait nécessairement conscience du risque de chute en ce qu’aucun [7] n’était établi malgré les recommandations formulées par le service médical inter-entreprises ([9]) en 2014 et la survenance de deux accidents du travail dans des conditions similaires, que les équipements de travail n’étaient pas vérifiés, l’échelle pas sécurisée et les formations inexistantes.

Le [7] versé aux débats par la société [11] (sa pièce n°20), créé le 24 octobre 2012 et mis à jour le 1er janvier 2022, mentionne un risque de chutes de hauteur lors de la descente du camion et d’intervention dans la benne, et comme mesure de prévention existante, la sensibilisation des nouveaux salariés lors de leur intégration.

Le salarié conteste l’existence de ce document, le [9] ayant clairement indiqué le 28 février 2022 que le document unique n’existait pas.

Lors de la rédaction de la fiche d’entreprise le 31 mars 2014, le [9] a relevé, parmi les risques d’accidents prépondérants, des risques de chute de hauteur en ces termes':

«'(')

Chute de hauteur :

Le code du travail indique qu'« il est interdit d’utiliser les échelles, escabeaux et marchepieds comme poste de travail. Toutefois, ces équipements peuvent être utilisés en cas d’impossibilité technique de recourir à un équipement assurant la protection collective des travailleurs ou lorsque l’évaluation du risque a établi que ce risque est faible et qu’il s’agit de travaux de courte durée ne présentant pas un caractère répétitif » (article R. 4323-63)

Les chauffeurs sont amenés à utiliser des échelles afin de mettre en place les barres devant recevoir la bâche. Un nombre non négligeable d’entre elles n’ont plus de tampons antidérapants. Certains barreaux sont endommagés. De plus aucun système de fixation n’est prévu pour éviter le basculement de celles-ci. Il est important que l’entreprise fasse les réparations nécessaires, et mette à disposition des moyens de fixation des échelles.

Afin de mettre la bâche en place, les chauffeurs sont amenés à utiliser une échelle fixée qui donne accès à une plateforme. Il a été constaté que 2 plateformes ne comportaient pas de garde-corps. La mise en place de ces gardes corps devait être réalisée dans les jours suivants notre visite de l’entreprise. Il est important que l’entreprise vérifie régulièrement l’état des fixations des échelles et des garde-corps. (')'».

Il a également précisé qu’au cours des douze derniers mois, deux accidents du travail causés par une chute de hauteur depuis une échelle étaient survenus.

Dans la rubrique dédiée aux actions tendant à la réduction des risques, le [9] a notamment préconisé de réparer les échelles avec système de fixation.

La fiche entreprise rédigée le 28 février 2022, soit postérieurement au [7] produit par l’employeur, mentionne':

«'III. Actions tendant à la réduction des risques

Document unique':

Rédigé le (ou «'absent'»)': absent

Une sensibilisation à cette démarche a été faite auprès de Mme [O], secrétaire. Cette démarche de préférence participative avec le(s) salarié(s) doit contribuer à améliorer les conditions de travail et faire prendre conscience des risques professionnels. Elle doit aboutir à une planification et une recherche de solutions pour éliminer ou du moins réduire les risques professionnels.

(')

IV. Fiche synthèse rédigée par votre équipe santé-travail

En résumé, afin d’améliorer votre démarche de prévention des risques professionnels, nous attirons votre attention sur les points suivants':

Risque professionnel

Elaborer le document unique. Proposition d’accompagnement par le [9] (') ».

Il se déduit de l’ensemble de ces éléments que la société [11] n’a pas, antérieurement à l’accident du travail du 6 janvier 2020, évalué les risques alors que le service de santé au travail l’avait, dès 2014, alertée sur l’existence d’un risque de chute de hauteur et que deux accidents du travail impliquant des échelles s’étaient produits, ce dont il résulte qu’elle avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis les chauffeurs.

M. [B] reproche notamment à son employeur de lui avoir mis à disposition une échelle portable ne disposant pas de crochets de maintien, aux tampons antidérapants usés, donc inexistants, de ne pas lui avoir fourni de harnais de sécurité.

Il produit (sa pièce n°24) des photographies d’une échelle ne disposant effectivement d’aucun crochet dans sa partie supérieure et aux tampons antidérapants détériorés.

M. [L] [B], le fils de M. [B], confirme, le 14 janvier 2023 (pièce n°26 de l’intimé), que l’échelle fournie par la société [11] «'ne possédait pas de crochets de maintien, ni de tampon antidérapant'».

M. [D] [R], ancien collègue de travail, indique, le 2 février 2023 (pièce n°27 de l’intimé), que les échelles étaient dépourvues de crochets et de patins antidérapants, que «'la sécurité et le bien-être du chauffeur n[e] [sont] pas la priorité de la gérante (')'».

M. [U] [F], ancien salarié de la société [11] déclare, le 27 février 2022 (pièce n°28 de l’intimé), que le matériel n’est pas adapté au travail demandé, vétuste et en mauvais état, que les échelles ne sont pas munies de crochets, qu’il n’y a pas de harnais de sécurité.

La société [11] conteste la valeur probatoire de ces attestations au motif qu’elles ne sont pas conformes aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile, qu’elles émanent du fils de M. [B] et d’anciens salariés ayant «'nui à la bonne marche de l’entreprise'».

Toutefois, les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile ne sont pas prescrites à peine de nullité, de sorte qu’il appartient à la cour d’apprécier souverainement si l’attestation, bien que non conforme, présente des garanties suffisantes pour emporter sa conviction.

S’il est vrai que l’attestation de M. [B] ne mentionne pas son lieu de naissance, ni sa profession, celle de M. [R], ni sa date et lieu de naissance, ni sa profession, ni son lien de parenté ou de subordination avec M. [B], celle de M. [F], ni sa date et lieu de naissance, ni sa profession, ni son lien de parenté ou de subordination avec M. [B], ni qu’une fausse attestation de sa part l’expose à des sanctions pénales, il n’en demeure pas moins qu’elles sont, chacune, accompagnées d’un document officiel justifiant de l’identité des rédacteurs et comportant leur signature.

En outre, la société [11] ne justifie pas en quoi les irrégularités constatées constituent l’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public qui lui fait grief.

Elle ne justifie pas non plus des faits qu’elle reproche à MM. [R] et [F].

A l’instar de ce qu’ont fait les premiers juges, la cour retient comme éléments de preuve ces trois attestations.

Par ailleurs, le médecin inspecteur du travail a précisé, dans son rapport médical du 16 juillet 2021 (pièce n°19 de l’intimé), que M. [B] devait monter en haut de la benne pour poser le filet ou retirer manuellement les arceaux et que la remorque n’étant pas équipée d’une échelle d’accès, il utilisait une échelle indépendante simplement posée au sol, contre la benne.

Enfin, le document listant le matériel remis à M. [B] lors de sa prise de fonctions mentionne une échelle mais pas de harnais de sécurité.

Il résulte de ce qui précède que la société [11] a commis une faute inexcusable qui constitue une des causes déterminantes de l’accident survenu à M. [B] le 6 janvier 2020.

Sur les conséquences financières de la faute inexcusable de l’employeur

Aux termes de l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l’accident est dû à la faute inexcusable de l’employeur ou de ceux qu’il s’est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles suivants.

Sur la majoration de la rente

Aux termes de l’article L. 452-2, alinéas 1 et 3, du code de la sécurité sociale, en cas de faute inexcusable de l’employeur, la victime qui a obtenu le bénéfice d’une rente reçoit une rente majorée ne pouvant excéder soit la fraction du salaire annuel correspondant à la réduction de capacité, soit le montant de ce salaire dans le cas d’incapacité totale.

Il résulte du texte précité que la majoration de la rente et du capital alloué à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle consécutif à une faute inexcusable de l’employeur est calculée en fonction de la réduction de la capacité dont celle-ci reste atteinte et que dès lors, la majoration doit suivre l’évolution du taux d’incapacité de la victime.

Il résulte également de la combinaison du texte précité et des articles L. 434-2 et L. 453-1 du code de la sécurité sociale que seule la faute inexcusable du salarié est de nature à limiter la majoration de la rente à laquelle il est en droit de prétendre en raison de la faute inexcusable de son employeur et que présente un tel caractère la faute volontaire de la victime d’une exceptionnelle gravité exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience.

En l’espèce, la faute inexcusable de la société [11] ayant été retenue et cette dernière n’invoquant pas et ne démontrant encore moins l’existence d’une faute inexcusable de M. [B], il convient de confirmer les dispositions du jugement déféré fixant au maximum la majoration de la rente attribuée à M. [B], et disant que cette majoration suivra l’évolution éventuelle de son taux d’IPP.

Sur la réparation des préjudices

Aux termes de l’article L. 452-3, alinéa 1, du code de la sécurité sociale, indépendamment de la majoration de rente qu’elle reçoit en vertu de l’article précédent, la victime a le droit de demander à l’employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétique et d’agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle.

Les premiers juges ont ordonné une mesure d’expertise médicale judiciaire confiée à M. [W], docteur.

Ce dernier a déposé son rapport au greffe du tribunal le 20 novembre 2024.

Aucune des parties ne demande à la cour de liquider les préjudices de M. [B], de sorte qu’il appartiendra au tribunal de statuer sur la réparation des préjudices subis par la victime.

Sur l’action récursoire de la caisse

La société [11] étant reconnue comme l’auteur de la faute inexcusable à l’origine de l’accident du travail dont M. [B] a été victime, elle devra supporter les conséquences financières de cette faute.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la société [11] à rembourser à la [6], d’une part, le montant de la majoration de l’indemnité prévue à l’article L. 452-2 du code de la sécurité sociale, laquelle devra toutefois être calculée dans la limite du taux d’IPP de 10 % définitivement notifié à l’employeur, d’autre part, le montant de l’indemnisation des préjudices complémentaires énumérés par l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale et ceux non couverts par les dispositions du livre IV.

Sur les dépens

La société [11] succombant en ses prétentions, il convient de la condamner aux dépens d’appel.

Sur les frais irrépétibles

Les premiers juges ont fait une exacte appréciation de l’équité. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de M. [B] les frais, non compris dans les dépens, qu’il a exposés en appel, ce qui justifie de condamner la société [11] à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Ne supportant pas tout ou partie des dépens, M. [B] ne peut voir mettre à sa charge une indemnité au titre des frais irrépétibles, ce qui justifie que la société [11] soit déboutée de sa demande en ce sens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après débats publics, par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Douai le 11 mars 2024 en toutes ses dispositions';

Y ajoutant,

Condamne la société [11] aux dépens d’appel ;

Condamne la société [11] à verser à M. [M] [B] une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la société [11] de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,

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