Cour d'appel de Basse-Terre, 22 février 2021, 18/015961

  • Guadeloupe·
  • Meubles·
  • Mobilier·
  • Sécurité sociale·
  • Faute inexcusable·
  • Maladie professionnelle·
  • Travail·
  • Soulever·
  • Employeur·
  • Faute

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
CA Basse-Terre, 04, 22 févr. 2021, n° 18/01596
Juridiction : Cour d'appel de Basse-Terre
Numéro(s) : 18/015961
Importance : Inédit
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 15 septembre 2022
Identifiant Légifrance : JURITEXT000043711375
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT No 97 DU VINGT DEUX FEVRIER DEUX MILLE VINGT ET UN

AFFAIRE No : No RG 18/01596 – No Portalis DBV7-V-B7C-DBHH

Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal des Affaires de Sécurié Sociale de la Guadeloupe en date du 21 août 2018

APPELANTE

S.A.S. GUADELOUPE MOBILIER

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Maître Elsa KAMMERER (Toque 102) substituée par Maître SUVIERI, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

INTIMÉS

Monsieur [U] [I]

[Adresse 2]

[Localité 2]

Représenté par Maître Frédérique LAHAUT de la SELARL FILAO AVOCATS (Toque 127), avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

CAISSE GENERALE DE SECURITE SOCIALE DE LA GUADELOUPE

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 3]

Représentée par Mme [N], munie d’un pouvoir.

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 4 janvier 2021, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Rozenn Le Goff, conseiller, présidente,

Mme Gaëlle Buseine, conseiller,

Mme Annabelle Clédat, conseiller,

Les parties ont été avisées à l’issue des débats de ce que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 22 février 2021

GREFFIER Lors des débats : Mme Lucile Pommier, greffier principal.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l’article 450 al 2 du CPC. Signé par Mme Rozenn Le Goff,conseiller, présidente et par Mme Souriant Valérie, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

M. [I] [U] [I] a été embauché suivant contrat de travail à durée indéterminé à temps complet en qualité de vendeur par la société Soguamo à compter du 18 janvier 1993, puis par avenant à ce contrat de travail à compter du 1er août 1999 par la Société Guadeloupe Mobilier sous l’enseigne Conforama ; il a alors occupé le poste de Responsable de surface adjoint du rayon meubles/chef de rayon. À compter du 1er juillet 2014, la SAS Guadeloupe Mobilier à exercer sous l’enseigne Darty.

Le 16 janvier 2014, M. [I] a été victime d’un accident du travail alors qu’il transportait un lit avec un collègue ; il a percuté avec la jambe gauche un chevet qui se trouvait sur son chemin, et a chuté de tout son poids sur ses deux mains avec le lit ; le salarié a été placé en arrêts de travail du 21 janvier 2014 au 9 mai 2015.

La Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Guadeloupe (CGSS) a reconnu le caractère professionnel de l’accident par courrier en date du 24 octobre 2014.

A la suite d’une rechute, M. [Y] [U] [I] a été placé en arrêt de travail sans discontinuité du 31 juillet 2015 au 15 janvier 2016, date de la notification de son licenciement pour motif économique.

Par décision du 23 novembre 2015 la commission de droit et de l’autonomie des personnes handicapées lui a reconnu la qualité de travailleur handicapé pour une période de cinq ans, du 9 septembre 2015 au 22 septembre 2020.

Le 22 décembre 2015, la SAS Guadeloupe Mobilier a reçu de la caisse générale de sécurité sociale une notification de prise en charge de la maladie professionnelle de M. [I] concernant les affections suivantes :

— Rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule gauche inscrite au tableau no 57

— Rupture de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite inscrite au tableau no 57

Par requête reçue le 25 juillet 2017, M. [I] [U] [I] a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de la Guadeloupe aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, la SAS Guadeloupe Mobilier, à l’origine de sa maladie professionnelle reconnue le 22 décembre 2015.

Par jugement du 21 août 2018, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale a :

— Déclaré recevable et bien fondée la requête présentée par Mr [Y] [U] [I] ;

— Dit que la SAS Guadeloupe Mobilier, prise en la personne de son représentant légal, a commis une faute inexcusable à l’origine

de sa maladie professionnelle reconnue le 22 décembre 2015

— Dit que Mr [Y] [U] [I] a le droit de bénéficier d’une rente majorée à son maximum ;

— Déclaré le jugement opposable à la CGSS de la Guadeloupe ;

— Dit qu’en application des dispositions de l’article L 452-3 dernier alinéa du Code de la Sécurité Sociale (CSS), la CGSS de la Guadeloupe formera l’avance des indemnités susceptibles d’être allouées à Mr [I], à charge pour elle de récupérer le montant auprès de l’employeur ;

— Ordonné, en application des articles L 141-1 et R 141-1 du code de la sécurité sociale, une mesure d’expertise technique de M [I] ;

— Dit qu’il sera, en conséquence, fait application des articles R 141-1 et suivants du code de la sécurité sociale ;

— Désigné à cet effet, le Dr [D] [L], demeurant [Adresse 4], médecin-expert régulièrement choisi sur la liste des experts en matière de sécurité sociale ;

— Enjoint à la victime ou à ses conseils de fournir à l’expert toutes pièces médicales nécessaires à l’accomplissement de sa mission (notamment : certificat médical initial, certificat de consolidation, autres certificats, radiologies, comptes rendus d’opérations et d’examens ….) ;

— Dit qu’à défaut l’expert pourra déposer son rapport en l’état ;

— Dit que l’expert aura pour mission de :

*préciser l’état de santé de M [I] [I] [U] au jour de la demande ;

* déterminer le préjudice causé par les souffrances physiques et morales/ psychologiques que M [I] a endurées suite à la maladie professionnelle reconnue le 22 décembre 2015 (article L 452-3 du CSS) ;

*déterminer le préjudice esthétique et d’agrément ;

*déterminer le préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle ;

* déterminer la date de consolidation des lésions physiques et psychologiques ;

— Dit que, le cas échéant, l’expert pourra se faire communiquer le dossier médical de la victime, avec l’accord de celle-ci ou de ses ayant droits et en tant que de besoin, se faire communiquer par tout tiers détenteur les pièces médicales nécessaires à l’expertise avec l’accord susvisé ;

— Dit que l’expert déposera son rapport au Secrétariat du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale (TASS) dans le délai de trois mois à compter du jour où il aura été saisi de sa mission ;

— Dit que conformément aux dispositions de l’article 173 du Code de Procédure Civile, l’expert remettra son rapport à chacune des parties ou de leur représentant, en le mentionnant sur l’original qui devra être adressée au Magistrat mandant.

Par déclaration reçue le 12 décembre 2018, la SAS Guadeloupe Mobilier a interjeté appel de ce jugement dont la date de notification n’est pas établie au dossier.

Les parties ont conclu, à l’exception de la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Guadeloupe qui a déclaré s’en rapporter à l’appréciation de la cour, et l’affaire a été retenue à l’audience du 4 janvier 2021.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 décembre 2020, auxquelles il a été fait référence lors de l’audience des débats, la SAS Guadeloupe Mobilier demande à la cour de :

DÉCLARER RECEVABLE l’appel qu’elle a interjeté le 12 décembre 2018,

INFIRMER le jugement rendu le 21 août 2018 par le Tribunal des affaires de sécurité sociale en ce qu’il a :

dit que la SAS Guadeloupe Mobilier a commis une faute inexcusable à l’origine de la maladie professionnelle de M. [Y]-[U] [I] reconnue le 22 décembre 2015,

— dit que M. [Y]-[U] [I] a le droit de bénéficier d’une rente majorée à son maximum.

Et, statuant à nouveau :

JUGER qu’aucune faute inexcusable de ne peut être relevée à son encontre ;

DÉCLARER OPPOSABLE à la Caisse Générale de Sécurité Sociale de la Guadeloupe la décision à intervenir,

CONDAMNER M. [Y]-[U] [I] à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

CONDAMNER M. [Y]-[U] [I] aux entiers dépens.

La SAS Guadeloupe Mobilier expose, en substance, que :

— le contentieux de la faute inexcusable oppose l’employeur au salarié et la caisse générale de sécurité sociale qui intervient en la cause ne saurait être qualifiée de partie ; en tout état de cause, elle a été appelée à la procédure ; son appel est donc recevable ;

— la maladie de M. [I] [U] [I] n’est pas d’origine professionnelle ;

— la décision de la caisse générale de sécurité sociale s’agissant de la prise en charge d’une maladie professionnelle est sans incidence sur l’action reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur ;

— les fonctions de M. [Y] [U] [I] ne l’amenaient pas à transporter des meubles ou de l’électroménager, car la société embauchait des agents spécifiquement affectés à cet effet.

Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 30 septembre 2020, auxquelles il a été fait référence lors de l’audience des débats, M. [Y] [U] [I] demande à la cour de :

— DIRE ET JUGER l’appel irrecevable,

— DIRE ET JUGER les conclusions de l’appelant irrecevables,

Sur le fond,

— CONFIRMER le jugement rendu le 21 août 2018 par Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale de la Guadeloupe en toutes ses dispositions ;

— CONDAMNER la SAS Guadeloupe Mobilier à verser la somme de 3.000 euros à M. [I] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

M. [Y] [U] [I] expose, en substance, que :

— la SAS Guadeloupe Mobilier n’a dirigé son appel que contre lui alors que la caisse générale de sécurité sociale est également partie à l’affaire ; s’agissant d’un litige indivisible, l’appel – est irrecevable à l’égard de tous s’il manque une partie à l’acte d’appel ;

— en sa qualité de chef de rayon, il était très régulièrement amené à changer certains meubles de place dans son espace de vente ;

— suite à son accident du travail, la SAS Guadeloupe Mobilier a manqué à son obligation de reclassement.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se reporter aux conclusions des parties pour plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I / Sur la recevabilité de l’appel et des conclusions de l’appelante

L’article 553 du code de procédure civile dispose qu'« En cas d’indivisibilité à l’égard de plusieurs parties, l’appel de l’une produit effet à l’égard des autres même si celles-ci ne se sont pas jointes à l’instance ; l’appel formé contre l’une n’est recevable que si toutes sont appelées à l’instance. ».

En l’espèce, la caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe a été assignée en intervention forcée par acte du 30 septembre 2020.

Il s’ensuit que toutes les parties sont appelées à l’instance et que l’appel est donc recevable.

M. [Y] [U] [I] ne précise pas le fondement juridique de sa demande tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions de l’appelante.

Le moyen sera donc rejeté.

II / Sur le fond

A / S’agissant de la reconnaissance de la maladie professionnelle

Le tableau « maladie professionnelle » no 57 vise, s’agissant des affections péri-articulaires de l’épaule provoquées par certains gestes et postures de travail, les travaux comportant des mouvements ou le maintien de l’épaule son soutien en abduction :

— avec un angle supérieur ou égal à 60o pendant au moins deux heures par jour en cumulé

ou

— avec un angle supérieur ou égal à 90o pendant au moins une heure par jour en cumulé.

La SAS Guadeloupe Mobilier soutient que s’il devait arriver à M. [Y] [U] [I] de déplacer un meuble dans le cadre de ses missions, cette tâche revêtait un caractère ponctuel et était rattaché à sa mission principale de responsabilité d’une surface de vente ; que pour le déplacement régulier des meubles et du gros électroménager, de la mise en place du rayon, la société ne faisait pas appel aux chefs de rayons, mais à une équipe de manutentionnaires, qui disposait elle-même d’outils (matériel de manutention, chariots élévateurs, clarks …) pour soulever les objets les plus volumineux, à savoir : M. [A] [H], salarié de la SAS Guadeloupe Mobilier, monteur de meubles, et M. [M] [P] réalisait des prestations de montage de meubles sur la surface de vente.

M. [Y] [U] [I] produit cependant des attestations en sens contraire, ainsi :

— M. [S] [B], atteste en ces termes :« Je soussigné M. [R] [S] [J] né le [Date naissance 1]1960. Mon statut professionnel était contrôleur de sortie marchandises au sein de la société Guadeloupe mobilier SAS. J’habite actuellement en haut du [Localité 4]. Déclare que M. [Y] [U] [I], dans le cadre de son travail était forcément amené à soulever de la marchandise. Son travail en surface de vente était d’assuré l’ambiance, l’animation de son rayon. Alors, il devait au quotidien soulever, déplacer des meubles parfois très lourds sans de véritables moyens ; Il arrivait souvent en l’absence des monteurs qu’on vient lui prêter main-forte pour soulever et déplacer des meubles".

— M. [P] atteste : « En tant que sous traitant au sein de la société Guadeloupe Mobilier SAS franchisé CONFORAMA. J’accepte de témoigner en faveur de M. [Y] [U] [I], avec qui j’ai eu plaisir à travailler. Le travail de M. [I] était aussi de s’occuper de l’animation de son rayon et mettre en place les produits (meubles). En ma qualité de monteur de meubles, je travaillais tout le temps avec qui quand il fallait déplacer (soulever) les meubles souvent très lourds. ».

— Mme [W] [X] atteste : « Je soussigné Mme [X] [W], demeurant à [Adresse 5], exerçant la profession de comptable, n’ayant aucun lien de parenté ou d’alliance avec [I] [U] [I], de subordination à son égard, de collaboration ou de communauté, d’intérêts avec lui _ certifie que même si je travaillais dans les bureaux au sein de la société Guadeloupe Mobilier, je voyais Mr [I] [I] [U] déplacer des meubles, ranger la surface de vente en tant que chef de rayon. Mr [I] veillait à la bonne présentation, donc à l’installation des produites et à l’animation pour augmenter les ventes de son secteur.

Il était en relation directe avec les vendeurs et le chef du dépôt. Il animait et agençait son secteur: chef de rayon meuble. ».

— M. [X] [G] atteste :« Je soussigné Mr [G] [X], travaille dans le groupe depuis bientôt vingt ans. Jai d’abord été vendeur, ma compétence et ma responsabilité mon permis d’etre nommé chef de rayon puis cadre. Des années durant Mr [I] responsable meuble sous l’enseigne CONFORAMA et moi-même responsable menager, avont partagé le même bureau. L’une de nos taches consistait à veiller à ce que les nouveaux produits soient en magasin. Pour ce faire, nous passions nos commandes au dépôt. Une fois ces produits en surface, il fallait les mettre en ambiance, donc beaucoup de manutention. Je confirme et je signe que mr [I] et moimême n’avons jamais cessé de soulever des charges lourdes et encore plus sous l’enseigne DARTY en ce qui me concerne.».

— M. [H] atteste : « M. [I] [U] [I] était le responsable de la surface de meubles, mon collègue [M] [P] et moi-même, on lui donnait des coups de main pour déplacer des meubles, des armoires, des chambres à coucher etc… pour nous faire de la place pour les nouveaux produits, le plus souvent M. [I] [U] [I] déplaçait seul les meubles parce qu’on ne pouvait pas le faire avec lui, il fallait speeder pour la nouvelle pub. ».

— M. [F] atteste : « Je viens porter à votre connaissance que M. [I] est entré en tant que monteur de meuble à Conforama, donc il montait et déplaçait ceux-ci pour les placer. Ensuite, une opportunité s’est présentée, il manquait des vendeurs donc après le montage, il vendait. Puis après opportunité de chef de rayon et là M. [I] manageait l’équipe et plaçait les meubles dans les différents box, et ce pratiquement en permanence, car le rayon changeait de look à chaque arrivée. Après Conforma est devenu Darty et le déplacement des meubles a toujours été de mise et là sur une grande surface à [Localité 1]. Je peux dire qu’il était toujours en train de déplacer d’aller chercher au dépôt ce qui lui avait été préparé (salon, salle à manger, chambre à coucher, armoire de rangement, rayons cuisine, salon de jardin, meuble de bureau). C’est un travail de manipulation avant tout pour que la marchandise soit vendue et mis en valeur avant paperasse.».

Il est ainsi établi au dossier que, dans le cadre de ses fonctions, M. [Y] [U] [I] manipulait très fréquemment des objets lourds et que, contrairement à ce que soutient l’employeur, c’est à bon droit que ses affections des épaules ont été retenues comme maladie professionnelle.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il a dit que M. [Y] [U] [I] devait bénéficier d’une rente majorée.

B / Sur la faute inexcusable de l’employeur

Si le Code de la sécurité sociale ne définit pas la faute inexcusable, il est de jurisprudence constante qu’en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers celui-ci d’une obligation de sécurité de résultat et de protection de la santé, notamment en ce qui concerne les accidents du travail, et que le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable, au sens de l’article L. 452-1, lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

M. [Y] [U] [I] soutient que la rechute qui lui a valu des arrêts de travail continus du 31 juillet 2015 jusqu’à son licenciement résulte d’une aggravation considérable de son état de santé en raison des manquements de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat ; que selon les conclusions d’une expertise du 24 août 2015, il aurait dû bénéficier d’un reclassement professionnel sur un poste n’exigeant pas de sollicitations excessives.

Toutefois, la SAS Guadeloupe Mobilier affirme n’avoir jamais eu connaissance du rapport d’expertise du 24 août 2015 rédigé alors que M. [Y] [U] [I] était en arrêt de travail par le Dr [M] qui n’est pas médecin du travail.

M. [Y] [U] [I] ne prouve pas le contraire.

Certes, il résulte des deux visites du médecin du travail en 2015 que M. [Y] [U] [I] ne devait pas porter de charges lourdes de plus de 10 kilos, mais le poste de l’intéressé en qualité de responsable de rayon, prévoyait les obligations suivantes :

— gérer son rayon

— manager son équipe de vente

— assurer le suivi des relations fournisseurs.

Il s’ensuit que l’employeur n’exigeait aucunement de M. [I] [U] [I] des travaux de manutention.

La cour relève que M. [Y] [U] [I], à qui incombe la charge de la preuve, ne précise pas comment l’employeur aurait pu avoir conscience du risque auquel il était exposé lorsqu’a été victime de son accident du travail le 16 janvier 2014 et n’indique pas de quel reclassement il aurait pu bénéficier pour éviter la rechute dont il a été victime en juillet 2015, alors que le poste auquel il était affecté ne lui imposait qu’un travail administratif et d’animation.

Dans ces conditions, la faute inexcusable de l’employeur ne peut être retenue et le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a décidé du contraire.

III / Sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile

Il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la SAS Guadeloupe Mobilier les frais qu’elle a engagés et qui ne seront pas compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,

Déclare recevables l’appel et les conclusions de l’appelante ;

Confirme le jugement rendu le 21 août 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Guadeloupe en ce qu’il a dit que M. [Y] [U] [I] devait bénéficier d’une rente majorée en raison d’une maladie professionnelle ;

Infirme le dit jugement en ce qu’il a dit que la SAS Guadeloupe Mobilier a commis une faute inexcusable à l’origine de la maladie professionnelle de M. [Y] [U] [I] reconnue par la caisse générale de sécurité sociale le 22 décembre 2015 et ordonné une expertise médicale ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [Y] [U] [I] aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions régissant l’aide juridictionnelle.

Le greffier, La présidente,

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Basse-Terre, 22 février 2021, 18/015961