Cour d'appel de Besançon, 24 mai 2016, n° 16/00379

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Besançon, 24 mai 2016, n° 16/00379
Juridiction : Cour d'appel de Besançon
Numéro(s) : 16/00379
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Vesoul, 15 janvier 2015

Sur les parties

Texte intégral

ARRET N° 16/379

XXX

COUR D’APPEL DE BESANCON

— XXX

ARRET DU 24 MAI 2016

CHAMBRE SOCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 05 avril 2016

N° de rôle : 15/00339

S/appel d’une décision

du Conseil de prud’hommes – Formation de départage de VESOUL

en date du 16 janvier 2015

Code affaire : 83C

Demande d’indemnités ou de salaires liée à la rupture autorisée ou non d’un contrat de travail d’un salarié protégé

J A

C/

SAS MAUFFREY

PARTIES EN CAUSE :

Monsieur J A, demeurant XXX

APPELANT

Comparant en personne

ET :

SAS MAUFFREY, ayant son siège XXX

INTIMEE

représentée par Me Pascal KNITTEL, avocat au barreau d’EPINAL

COMPOSITION DE LA COUR :

lors des débats du 05 Avril 2016 :

PRESIDENT DE CHAMBRE : Madame Chantal PALPACUER

CONSEILLERS : M. F G et Monsieur H I

GREFFIER : Mme D E

Lors du délibéré :

PRESIDENT DE CHAMBRE : Madame Chantal PALPACUER

CONSEILLERS : M. F G et Monsieur H I

Les parties ont été avisées de ce que l’arrêt sera rendu le 17 Mai 2016 par mise à disposition au greffe, et prorogé au 24 mai 2016.

**************

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES:

M. J A a été engagé selon contrat à durée indéterminée conclu le 30 juin 2008 par la Sas Mauffrey en qualité de conducteur routier, coefficient 108 M, groupe 6, annexe 1 de la convention collective nationale des Transports routiers et des activités auxiliaires du transport, en double poste avec un collègue, sur une ligne Strasbourg/Lyon au profit du client Aldes avec une prise et fin de service dans la zac de Valentin (C).

Suite à la perte du trafic avec le client Aldes, la société Transports Mauffrey lui a notifié à compter du 31 juillet 2009, une nouvelle affectation avec une prise de service à Saint Nabord (88), siège social de la société.

M. A par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 août 2009 a informé son employeur de son refus de ses nouvelles conditions de travail.

La société Mauffrey a alors notifié le 2 novembre 2009 un avertissement à M. A ainsi qu’une mise à pied pour insubordination caractérisée.

M. A bénéficiant du statut de salarié protégé, exerçant depuis le mois de décembre 2002, un mandat de conseiller prud’hommes au Conseil de Prud’hommes de C, mandat renouvelé en décembre 2008, a été convoqué à un entretien préalable fixé au 12 décembre 2009 et entendu dans le cadre d’une enquête contradictoire effectuée par l’Inspection du travail.

Le 24 décembre 2009, M. A est licencié pour faute grave après obtention de l’autorisation de l’inspecteur du travail du 18 décembre 2009 pour avoir refusé à plusieurs reprises de se conformer aux instructions transmises concernant le lieu de stationnement en fin de service de l’ensemble routier et pour l’avoir utilisé à des fins personnelles pour rallier son domicile générant des coûts financiers supplémentaires.

Sur recours hiérarchique formé par M. A le 12 février 2010, le Ministre du travail a par décision du 1er juin 2010, annulé la décision de l’Inspecteur du travail tout en autorisant le licenciement.

Le tribunal administratif de Nancy saisi par M. A a alors par jugement du 10 avril 2012, confirmé par un arrêt de la Cour administrative d’appel de Nancy du 18/03/2013, annulé la décision autorisant le licenciement en considérant comme entachée de nullité la clause de mobilité prévue au contrat de travail dans la mesure où elle ne définissait pas de façon précise une zone géographique d’application.

Par décision du 15 mai 2013, l’inspection du travail a alors refusé l’autorisation de licencier M. A.

M. A a alors demandé sa réintégration dans son poste avec prise et fin de service à C mais la société Mauffrey lui proposait une réintégration avec une prise et fin de service à Saint Nabord.

Devant le refus de M. A, la société a sollicité l’autorisation de le licencier , demande qu’elle a retirée pour lui proposer le 28 novembre 2013, une réintégration sur un poste équivalent avec prise et fin de service à Tavaux.

M. A a refusé cette proposition.

M. A a alors saisi le 03 janvier 2014, Conseil de Prud’hommes de Vesoul d’une demande tendant à voir constatée la nullité du licenciement et au prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat et en réparation du préjudice subi de ce fait mais aussi du fait de la discrimination dont il avait fait l’objet.

Par jugement en date du 16 janvier 2015, le Conseil de Prud’hommes en sa formation de départage a débouté M. A de sa demande en résiliation du contrat de travail et a condamné la société Mauffrey à lui verser:

'11 358,37 euros brut au titre de l’indemnité prévue à l’article L2422-4 du code du travail pour la période du 25/12/2009 au 01/06/2012;

'3936,07 euros en indemnisation du salaire pendant la période de mise à pied conservatoire,

'393,60 euros au titre des congés payés y afférents.

M. A a interjeté appel de la décision et a indiqué qu 'il avait fait l’objet d’un licenciement à la suite de l’obtention d’une nouvelle autorisation de l’inspecteur du travail le 22 septembre 2014.

*

Dans ses conclusions déposées le 03 septembre 2015, M. A a du fait du licenciement intervenu entre temps, abandonné sa demande de résiliation du contrat de travail mais maintenu toutes ses demandes pécuniaires se prévalant de la nullité du licenciement et du refus de réintégration fautif rendant la rupture du contrat de travail abusive.

Il sollicite de dire et juger que le licenciement prononcé le 24 septembre 2009 est nul et de condamner la société Mauffrey au paiement des sommes suivantes:

*4561,28 € brut au titre du rappel de salaire pendant la période de mise à pied conservatoire;

*22 938,31 € net au titre de l’indemnité complément de salaire, congés payés inclus,

*5068,09 € brut au titre de l’indemnité de préavis, congés payés inclus,

*2764,41€ net au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement ;

*13822,08 € net à titre de dommages et intérêts pour non respect de la convention collective,

*113,47€ brut au titre du rappel de salaire CCN, congés payés inclus,

*27 644,16 € net à titre de dommages et intérêts pour discrimination,

*41 466,24 € net pour licenciement nul

*124 398,72€ net pour rupture abusive;

*893,10€ pour frais de déplacement;

*500 € article au titre de l’article 700 du code de procédure civile du code de procédure civile

Dans ses conclusions déposées le 02 mars 2016, la société MAUFFREY demande la confirmation du jugement, le débouté de toutes les demandes de M. A et l’allocation d’une somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile .

En application de l’article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère pour l’exposé des moyens des parties à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l’audience du 5 avril 2016.

MOTIFS DE LA DECISION:

M. A a été licencié par lettre du 24 décembre 2009, après obtention par l’employeur de l’autorisation de l’inspection du travail qui sera par la suite annulée, pour avoir refusé de se conformer aux instructions relatives à la prise et fin de service, utilisant même l’ensemble routier à des fins personnelles pour rejoindre son domicile.

1°) M. A demande dans un premier temps de constater la nullité du licenciement au motif que la clause de mobilité prévue dans son contrat de travail est entachée de nullité dès lors qu’elle ne délimite pas la zone géographique d’une manière précise et qu’ elle ne pouvait pas être étendue unilatéralement par l’employeur.

Il ajoute qu’en lui imposant une prise de service et une fin de service à Saint Nabord, situé à 120 kms de C, l’employeur a étendu unilatéralement la clause.

Cette extension constituait pour lui une modification de son contrat de travail tant au regard de sa situation personnelle résidant à C que de l’exercice de son mandat de conseiller prud’homal à C.

Il considère que son refus n’est pas fautif faisant valoir que l’employeur ne lui a jamais indiqué les moyens par lesquels il pourrait rejoindre son domicile à C lorsqu’il aurait déposé le camion à St Nabord et vice versa le lundi matin.

Enfin, il se réfère aux décisions administratives qui ont annulé l’autorisation de licenciement.

Par ailleurs, il fait observer que l’employeur n’a pas mis en 'uvre d’une manière loyale cette clause de mobilité, ayant recherché un reclassement auprès du nouveau transporteur la société QUIL qui reprenait la ligne de la société Aldès, alors que d’une part, il savait qu’il n’y avait pas comme en matière de nettoyage, une obligation légale de transfert de son contrat de travail au profit de la nouvelle société et d’autre part qu’il n’existait aucune opportunité puisque son collègue qui a accepté la modification proposée, a déménagé à Remiremont, ce qui lui était possible étant célibataire.

Or, d’une part, l’autorité de la chose jugée s’attachant à la décision administrative ne permet pas de revenir sur la nullité de la clause de mobilité, d’autre part la sanction encourue n’est pas la nullité du licenciement, celui-ci devenant sans cause réelle et sérieuse.

Dès lors que M. A n’a pas fait de demande à ce titre, le caractère illicite de la clause comme la mise en 'uvre déloyale de celle-ci invoqués par M. A n’ont pas à être examinés, la cour ne pouvant pas modifier l’objet de la demande.

En revanche, l’annulation de l’autorisation donnée par l’inspection du travail et sur la base de laquelle la société Mauffrey a licencié M. A entraîne l’annulation du licenciement et ouvre pour le salarié un droit à la réintégration et à indemnisation .

En effet, il convient de rappeler qu’en application des dispositions de l’article L2422-1 du code du travail, «Lorsque le ministre compétent annule, sur recours hiérarchique, la décision de l’inspecteur du travail autorisant le licenciement d’un salarié investi de l’un des mandats énumérés ci-après, ou lorsque le juge administratif annule la décision d’autorisation de l’inspecteur du travail ou du ministre compétent, le salarié concerné a le droit, s’il le demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision, d’être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent. Cette disposition s’applique aux salariés investis notamment un mandat de conseiller prud’homal.»

2°) M. A soutenant que son licenciement était nul a formulé une demande d’indemnisation à hauteur de 124 398, 72 euros correspondant à 54 mois de salaire pour la période entre la date du licenciement et la fin de l’année 2015, date d’expiration de son mandat de conseiller prud’homal.

Au soutien de sa demande, M. A explique que du fait de l’annulation ou du retrait de l’autorisation de licenciement, il a droit en qualité de salarié protégé à une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi entre son licenciement et la fin de la période de protection en cours.

Il rappelle que la cour de cassation avait plafonné l’ indemnisation à 30 mois en la calquant sur la durée de protection des élus du personnel. Toutefois, la durée du mandat des délégués du personnel «étant passée de deux ans à 4 ans», il considère que la limite est de 54 mois.

Toutefois, il convient de rappeler que la nullité n’est encourue que si le licenciement est intervenu sans demander l’autorisation de l’inspection du travail ou en passant outre le refus et que dans ce cas, l’employeur est sanctionné pour avoir violé le statut protecteur du salarié et le salarié a vocation à percevoir une indemnité équivalente aux salaires dus entre la date du licenciement et l’expiration du mandat.

Mais tel n’est pas le cas en l’espèce, le licenciement ayant été autorisé régulièrement mais a été annulé postérieurement par suite de l’annulation de l’autorisation de l’inspecteur du travail, de sorte que ne sont applicables que les dispositions de l’article L2422-4 du code du travail qui précisent que «lorsque l’annulation d’une décision d’autorisation est devenue définitive, le salarié investi d’un des mandats mentionnés à l’article L. 2422-1 a droit au paiement d’une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s’il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision.

L’indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l’expiration du délai de deux mois s’il n’a pas demandé sa réintégration.Ce paiement s’accompagne du versement des cotisations afférentes à cette indemnité qui constitue un complément de salaire.»

Il sera donc alloué à M. A une indemnité au titre de l’article L2422-4 du code du travail en réparation du préjudice subi entre la date du licenciement annulé soit le 24/09/2009 et la réintégration du salarié .

Toutefois en l’espèce la réintégration du salarié n’a pas été effective, M. A ayant refusé les propositions formulées et reprochant à la société Mauffrey de ne pas avoir satisfait à son obligation .

Il convient donc d’examiner l’ obligation de réintégration.

3°) Il est constant que M. A a demandé sa réintégration le 21 avril 2014 dans son poste précédent avec prise et fin de service sur le parking de la Zac Valentin à C.

La société Mauffrey justifie avoir proposé le 16 mai 2012, une réintégration dans le poste de conducteur grand Routier au coefficient 138 M annexe 1 de la convention collective avec prise et fin de service à Saint Nabord soutenant ne pas disposer d’affectation possible sur le secteur de C et rappelant que le seul trafic entre C et Aspach le Haut pour le client Coved qu’elle assurait depuis février 2011 sur lequel était affecté un collègue, devait prendre fin en juin 2012.

M. A a refusé cette proposition par courrier du 1er juin 2012 maintenant sans toutefois le démontrer qu’il existait toujours un trafic régional au départ de C.

Le 22 mai 2013, la société Mauffrey renouvellera sa proposition formulée dans les mêmes termes maintenant l’impossibilité d’une prise et fin de service à C rappelant que cette impossibilité avait été reconnue comme objective par l’Inspecteur du travail dans sa décision du 15 mai 2013.

M. A a une nouvelle fois refusé la proposition par courrier du 15 juin 2013.

Enfin, la société Mauffrey a alors qu’une nouvelle demande d’autorisation de licenciement était en cours d’instruction, retiré celle-ci et fait une dernière proposition le 28 octobre 2013 avec une prise de service à Tavaux soit à environ 50kms de C.

M. A par courrier du 05 novembre a fait valoir le peu de temps qui lui était laissé pour se prononcer, a demandé la prise en charge des frais de déplacement et soutenu que cette proposition était tardive, qu’elle était la démonstration que la société disposait de poste et a rappelé qu’entre la fin des relations avec le client Aldès et la rupture du contrat, la société avait accepté qu’il exécute le contrat dans les conditions initiales .

La société répliquait que la proposition faisait suite au départ impromptu du salarié qui l’occupait, rappelait qu’elle n’avait pas autorisé M. A à exécuter son contrat dans les conditions initiales, l’ayant rappelé à l’ordre, sanctionné par un avertissement et retenu cette insubordination comme motif du licenciement.

Après relance du 28 novembre, M. A a refusé la proposition.

Si l’employeur est tenu à une obligation de réintégration et à l’exécution loyale de celle-ci, en l’espèce, la société Mauffrey démontre l’impossibilité matérielle de réintégrer M. A dans le même poste, la société ayant dû faire face à la suppression du contrat avec la société Aldes en juillet 2009 .

La société Mauffrey a légitimement proposé à M. A un poste équivalent tant au regard de sa classification qu’au regard de la rémunération, mais avec une prise et fin de service à Saint Nabord dès lors qu’il est établi et admis par l’Inspection du travail qu’il n’existait plus de trafic en partance de C.

Dans sa lettre du 16 mai 2012 la société Mauffrey précise que «depuis cette date nous n’avons pas récupéré le trafic en question vous permettant de prendre votre service à la ZAC Valentin à l’époque mais en plus le trafic que nous avons assuré au départ de C (rotation entre C et Aspach le Haut pour le client Coved) depuis le mois de février 2011 et sur lequel était affecté l’un de vos collègues, s’arrêtera à la fin du mois de juin prochain.»

Dans un courrier du 07 octobre 2013, la société Mauffrey répondant à la Dirreccte précise avoir un établissement secondaire à Noidans Les Vesoul qui rencontre des difficultés constantes puisque le nombre de chauffeurs est passé de 13 à 6 . Par ailleurs, elle précise que sur les 56 embauches réalisées en 2012 et les 63 en 2013, seuls deux conducteurs (Messieurs Y et C) résidaient en Haute Saône mais qu’ils se sont vus aussi imposer dans leur contrat de travail une prise et fin de service à Saint Nabord.

Il résulte de ces éléments que la société Mauffrey a justifié qu’elle ne pouvait pas matériellement réintégrer M. A dans le poste précédent qui n’existait plus.

La société justifie lui avoir fait une dernière proposition le 28 octobre 2013 d’un poste qui était devenu vacant suite au départ impromptu du salarié l’occupant, équivalent en terme de classification et de rémunération mais avec une prise et fin de service à Tavaux.

Or cette proposition était loyale puisque d’une part elle n’indiquait la date du 4 novembre non comme une date butoir mais comme la date à partir de laquelle le poste était disponible, que d’autre part, la société n’avait pas à prendre en charge les frais de déplacement entre le domicile et le lieu de travail qui ne constituent pas du temps de travail effectif, et enfin que la disponibilité du poste n’était due qu’au départ brutal du salarié l’occupant.

Par ailleurs, la société ne saurait se voir reproché d’avoir proposé un poste à Tavaux alors qu’après avoir justifié de l’impossibilité de le réintégrer dans le poste précédent, elle se devait pour satisfait à son obligation, de proposer un poste disponible dans la zone géographique la plus proche.

Ainsi, la société Mauffrey justifie avoir formulé trois propositions de poste assurant la même classification et la même rémunération, étant observé que de par son contrat de travail, M. A pouvait être affecté aussi bien sur un trafic régional qu’international.

Par ailleurs M. A soutient que le licenciement prononcé et qui a été annulé par la suite reposait en réalité sur une discrimination, étant en lien avec ses fonctions de conseiller prud’homal.

Or la chronologie des faits démontre que le licenciement a trouvé son origine dans la perte en 2009 du client Aldès ce qui a conduit à supprimer la ligne sur laquelle travaillait M. A en binôme et dans le refus de celui-ci d’accepter la nouvelle proposition.

M. A verse aux débats, l’attestation de Mme Z et de M. X conseillers prud’homaux qui déclarent avoir dû remplacer aux audiences des 4, 14 et 29 septembre 2009 et le 26 août 2009 pour le second. Mme Z n’en indique pas les raisons, M. X indiquant que M. A n’avait pas pu se libérer durant son temps de travail.

Pour autant, ces deux témoignages ne permettent pas de caractériser une entrave de l’employeur sur quatre remplacements dont les raisons peuvent être multiples alors que M. A indique être conseiller prud’homal depuis 2002 et avoir été réélu en décembre 2008 et que son embauche date du 30 juin 2008.

Par ailleurs, il ne justifie d’aucun échange, d’aucune lettre, d’ aucun document ni d’aucun fait permettant de laisser présumer l’existence d’une discrimination.

Ce lien supposé ne résulte en réalité que du refus pour M. A de la position de l’employeur qui a changé la prise et fin de service à C alors que ce changement ne se justifiait pas selon lui .

En outre, la date à laquelle l’employeur a pu apprendre l’existence du mandat de M. A, le mail 13/10/2009 adressé à la Direccte qui faisait son enquête dans le cadre de la demande d’autorisation du licenciement permettant de le situer au mieux en juillet 2009, n’est pas de nature à contribuer à apporter la preuve de l’entrave dans l’exercice de celui-ci par l’employeur.

Enfin, il ne présente aucun élément de nature à permettre de retenir que le licenciement aurait un lien avec le mandat exercé alors que l’employeur démontre qu’il ne se justifie que par des éléments totalement étrangers à savoir la perte du client Aldès et le refus de M. A de la proposition e changement des conditions de travail, de sorte que cet éloignement géographique du lieu de prise et de fin de service repose sur des éléments objectifs, étant observé que son binôme a également subi le même sort, exception faite que ce dernier a accepté le changement proposé.

De plus, dans un mail du 27 avril 2010 adressé à l’Inspection du travail, la société indique que le 04 septembre , il n’avait pas travaillé et que le planning des 14/09 et 01/10 commençant à 14h56 et à 23H45 permettaient de se rendre aux audiences du matin.

D’ailleurs l’inspecteur du Travail dans sa décision du 15 mai 2013 ne relève aucun fait caractérisant une entrave indiquant que l’employeur justifiait qu’il avait tenu compte dans les plannings de cette activité n’ayant demandé qu’à être prévenu à l’avance.

Enfin, si la clause de mobilité a été reconnue comme nulle par l’autorité administrative, cette nullité est sans lien avec la discrimination alléguée .

Il résulte de ces éléments que dès lors que l’emploi précédemment occupé par le salarié n’existait plus, le refus de M. A ne se justifiait pas au regard des propositions formulées relatives à des postes équivalents comportant la même qualification et le même niveau de rémunération ainsi que les mêmes perspectives d’évolution de carrière que l’emploi initial et au demeurant aussi compatibles que l’emploi initial avec l’exercice de son mandat de conseiller prud’homal.

En conséquence, M. A a droit à une indemnité au seul titre de l’article L2422-4 du code du travail en réparation du préjudice subi entre la date du licenciement annulé soit le 24/09/2009 et la réintégration du salarié.

Toutefois, en raison du refus de M. A de sa réintégration dès lors qu’il est établi que la société Mauffrey a exécuté loyalement son obligation de réintégration, aucune indemnité n’est due au delà de la date dudit refus soit le 31 mai 2012.

En conséquence et comme l’a fait le Conseil de Prud’hommes, il sera alloué la somme de 11 358,37 euros correspondant aux salaires qu’il aurait dû percevoir chez Mauffrey soit 62 199,36 €, déduction faite des indemnités chômage perçues à compter du 1 er février 2010 soit la somme de 4476€ et des salaires perçus pendant cette période puisqu’il travaillé depuis le 08 juillet 2010 chez la société transports Alloin soit 46 364,99€, ce qui conduit à confirmer la décision du Conseil de Prud’hommes sur ce point.

*

M. A réclame également paiement d’une somme de 41466,24€ en arguant d’un licenciement nul et d’une indemnité minimale de 12 mois de salaire qui sont des dispositions applicables à la rupture illégale du contrat de travail et sanctionnant la violation du statut protecteur, lorsque le salarié ne demande pas sa réintégration.

Tel n’est pas le cas en l’espèce de sorte que la demande doit être rejetée.

*

M. A demande paiement d’une somme de 27 644,16 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination.

Cette demande doit être rejetée, la cour n’ayant pas retenu l’existence d’une discrimination pour les motifs exposés ci-dessus.

Sur la demande de rappel de salaire:

M. A demande paiement d’une somme de 22 938,91 euros au titre d’une indemnité d’éviction réparant le préjudice lié à l’exclusion de l’entreprise et à la perte des salaires du fait de cette éviction.

M. A calcule la différence entre le salaire qu’il percevait et celui perçu au sein de

la société ALLOIN.

Pour autant M. A se fonde sur un article du Lamy social visant les salariés protégés et l’indemnité d’éviction évoquée et ainsi dénommée est celle prévue par les dispositions de l’article L2422-4 du code du travail sur lesquelles la cour a statué ci-dessus de sorte que cette demande est dépourvue de fondement juridique.

Sur la demande de paiement de la mise à pied:

M. A réclame paiement de la somme de 4561,28 euros ayant été mis à pied le 2 novembre 2009 représentant 54 jours calculé sur un salaire mensuel brut de 2303,68 euros.

La société Mauffrey ne s’oppose pas à la demande consécutive à l’annulation de l’autorisation du licenciement .

Il convient de confirmer le montant alloué de 3936,07 euros correspondant au calcul fait par l’employeur et non contesté , sur la base d’un salaire mensuel de 2303,68 euros soit 29/30 pour novembre et 23/31 pour décembre et celle de 393,60 euros au titre des congés payés y afférents .

Sur les frais de déplacement:

M. A réclame paiement d’une somme de 893,10 euros représentant 1596 kms pour les frais nécessités par la procédure et la nécessité de se déplacer au siège social à Saint Nabord pour l’entretien préalable.

M. A n’apporte aucun élément nouveau sur cette demande écartée par le Conseil de Prud’hommes à juste titre dès lors que l’employeur peut fixer l’entretien soit au lieu de travail du salarié, soit au siège social de l’entreprise et que ce n’est que lorsqu’il le fixe dans un autre lieu pour des raisons légitimes, que le salarié a alors droit au remboursement de ses frais de déplacement. En outre les autres déplacements ont été effectués dans le cadre de l’enquête menée par l’inspection du travail et ne peuvent ouvrir droit à remboursement.

Sur l’indemnité de préavis et l’indemnité conventionnelle de licenciement:

M. A estimant que son licenciement ne reposait pas sur une faute grave réclame paiement de la somme de 5068,09 euros au titre de l’indemnité de préavis correspondant à deux mois de salaire augmentés des congés payés y afférents .

Il réclame également la somme de 2764,41 euros net au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement.

Il est exact que l’indemnisation allouée au titre de l’article L2422-4 du code du travail n’est pas exclusive des indemnités de rupture à condition de remplir les conditions pour y prétendre conformément au droit commun.

M. A ne motive pas ses demandes étant observé que la seule annulation de l’autorisation de licenciement ne constitue pas une cause réelle et sérieuse.

Pour autant, il résulte de la décision de la cour d’appel administrative que la clause de mobilité contenue dans le contrat de travail était entachée de nullité et que l’autorité de la chose jugée s’attachant à la décision administrative ne permet pas de revenir sur la nullité de celle-ci.

Dès lors et à la lumière de cette décision, il doit être retenu que le non respect par M. A des consignes les 30 septembre, 09, 23 et 30 octobre 2009, en rentrant à C avec le camion de la société certes sans autorisation, et en contrevenant les instructions de déposer le camion à Saint Nabord pour le week end, ne peut être constitutif d’une faute grave .

Dès lors, M. A est en droit d’obtenir paiement des indemnités de préavis et de licenciement .

Il convient donc d’infirmer la décision du Conseil de Prud’hommes sur ce point et de faire droit à la demande, étant observé que les montants ne sont pas contestés dans leur quantum.

Sur le non respect des dispositions de la convention collective:

M. A soutient que conformément à la convention collective nationale des Transports routiers de marchandises il aurait dû depuis le 1er août 2009 se voir attribué le coefficient 150M groupe 7 totalisant plus des 55 points prévus par la convention et réclame la somme de 113, 47 euros plus les congés payés y afférents pour les mois d’août à octobre 2009.

Conduisant des véhicules de plus de 19T et effectuant des services de plus de 250 kms, il totalisait déjà plus de 50 points auxquels s’ajoutent 15 points pour les repos quotidiens hors du domicile et les services internationaux et 10 points pour la conduite de véhicules articulés.

Comme l’indique le Conseil de Prud’hommes M. A ne présente aucune pièce permettant de procéder au calcul des points qu’il fait pour justifier la classification qu’il réclame, les trois bulletins de paye attestant de frais de déplacement restent insuffisants pour prouver qu’il occupait un poste de conducteur grand routier.

Sa demande doit être rejetée ainsi que les dommages et intérêts réclamés au titre du préjudice subi de ce fait et qu’il ne précise pas au demeurant.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement du Conseil de Prud’hommes sur ce point.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile:

M. A qui succombe partiellement dans la présente procédure, sera condamné au paiement des dépens de la procédure d’appel, à raison des 2/3 ce qui entraîne le rejet de sa demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité ne commande pas d’allouer à la Sas Mauffrey une quelconque somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe et après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

DÉCLARE l’appel de M. J A partiellement bien fondé ;

DONNE acte à M. A de l’abandon de sa demande de résiliation judiciaire,

DIT que l’annulation de l’autorisation administrative de licenciement a entraîné l’annulation du licenciement prononcé le 24/12/2009,

DIT que la société MAUFFREY a satisfait à son obligation de réintégration,

CONFIRME le jugement du Conseil de Prud’hommes de C du18 novembre 2014 en ce qu’il a alloué à M. A les sommes de 11 358,37 euros brut au titre de l’indemnité prévue à l’article L2422-4 du code du travail pour la période du 25/12/2009 au 01/06/2012, celle de 3936,07 euros en indemnisation du salaire pendant la période de mise à pied conservatoire et celle de 393,60 euros au titre des congés payés y afférents

INFIRME le jugement en ce qu’il a débouté M. A de ses demandes relatives aux indemnités de préavis et de licenciement ;

Statuant à nouveau:

CONDAMNE la société MAUFFREY à verser à M. J A la somme de 5068,09 euros au titre de l’indemnité de préavis augmentée des congés payés y afférents et celle de 2764,41 euros net au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement,

DEBOUTE M. A de ses autres demandes,

Y ajoutant:

FAIT MASSE des dépens de la procédure d’appel et les met à la charge de M. J A à hauteur des 2/3;

REJETTE les demandes des parties formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile ,

LEDIT ARRÊT a été prononcé par mise à disposition le 24 mai 2016 et signé par Mme Chantal PALPACUER, Présidente de Chambre, Magistrat et par Mme D E, Greffier.

LE GREFFIER LE PRESIDENT DE CHAMBRE

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Cour d'appel de Besançon, 24 mai 2016, n° 16/00379