Cour d'appel de Besançon, 1ère chambre, 21 novembre 2017, n° 16/02605

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Besançon, 1re ch., 21 nov. 2017, n° 16/02605
Juridiction : Cour d'appel de Besançon
Numéro(s) : 16/02605
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Besançon, 21 novembre 2016, N° 15/01324
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT N°

BUL/DB

COUR D’APPEL DE BESANÇON

— […]

ARRÊT DU 21 NOVEMBRE 2017

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 17 octobre 2017

N° de rôle : 16/02605

S/appel d’une décision

du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BESANCON

en date du 22 novembre 2016 [RG N° 15/01324]

Code affaire : 58G

Demande en paiement de l’indemnité d’assurance dans une assurance de personnes

Société PACIFICA C/ G X, H X, I X, J X épouse X, K X épouse Y, L X, M X, N Z épouse Z

PARTIES EN CAUSE :

Société PACIFICA

dont le siège est sis […]

APPELANTE

Représentée par Me Patrice TERRYN, avocat au barreau de BESANCON

ET :

Madame G X

née le […] à […]

[…]

Madame H X née le […] à […]

[…]

Monsieur I X

né le […] à […]

[…]

Madame J X épouse X

née le […] à […]

[…]

Madame K X épouse Y

née le […] à BESANCON

[…]

Monsieur L X

né le […] à […]

[…]

Monsieur M X

né le […] à […]

[…]

Madame N Z agissant tant en son nom personnel qu’en qualité de représentant légal des enfants mineurs A et O Z

née le […] à […]

[…]

INTIMÉS

Représentés par Me Benoît MAURIN de la SCP MAURIN & ASSOCIES, avocat au barreau de BESANCON

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre.

ASSESSEURS : Mesdames B. V W (magistrat rapporteur) et

A. Q, Conseillers.

GREFFIER : Madame D. BOROWSKI, Greffier.

lors du délibéré :

PRÉSIDENT : Monsieur Edouard MAZARIN, Président de chambre

ASSESSEURS : Mesdames B. V W, et A. Q, Conseillers.

L’affaire, plaidée à l’audience du 17 octobre 2017 a été mise en délibéré au 21 novembre 2017. Les parties ont été avisées qu’à cette date l’arrêt serait rendu par mise à disposition au greffe.

**************

Faits, moyens et prétentions des parties

AA-AB X est décédé le […] au volant de son véhicule, assuré auprès de la société Pacifica, son décès ayant été constaté à la suite d’une collision frontale avec le mur d’un immeuble sis […] à Avoudrey.

L’assureur, considérant que le décès n’était pas d’origine accidentelle, a refusé d’accorder sa garantie.

Mmes G X, H X, J Y épouse X, K X épouse Y et N X épouse Z et MM. I X, L X et R X (ci-après les consorts X), en leur qualité d’ayant-droits de AA-AB X ont, par acte du 28 mai 2015, fait assigner devant le tribunal de grande instance de Besançon la société Pacifica aux fins de la voir condamner à honorer sa garantie.

Par jugement rendu le 22 novembre 2016 ce tribunal a, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :

— dit que les circonstances du décès sont compatibles avec une origine accidentelle et que l’assureur doit appliquer sa garantie,

— condamné la société Pacifica à payer à Mme J X les sommes de 4.575,55 € au titre des frais d’obsèques et de 63.059,63 € au titre de la perte de revenus,

— condamné la société Pacifica à payer au titre du préjudice d’affection à :

* Mme J X : 30.000 €

* N X épouse Z : 12.000 € à titre personnel, 8.000 € en sa qualité de représentant légal de A Z et 8.000 € en cette même qualité pour O Z,

* M. M X : 12.000 €

* Mme G X : 16.000 €

* Mme H X : 20.000 €

* M. L X : 6.000 €

* M. I X : 6.000 €

* Mme K X épouse Y : 6.000 €

— condamné la société Pacifica à payer aux consorts X une indemnité de 2.500 € au titre des frais irrépétibles ainsi qu’aux dépens avec droit pour leur conseil de se prévaloir des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par déclaration d’appel parvenue au greffe le 22 décembre 2016, la société Pacifica a relevé appel de cette décision et aux termes de ses derniers écrits transmis le 27 juin 2017 elle conclut à son infirmation et demandent à la Cour de :

* à titre principal, dire que la preuve d’une cause accidentelle du décès n’est pas rapportée, qu’elle n’est donc pas tenue à garantie, débouter les consorts X de leurs entières prétentions et les condamner à lui verser une indemnité de 2.000 € au titre des frais irrépétibles,

* à titre subsidiaire :

— débouter les consorts X de leurs prétentions au titre des frais de caveau familial, des frais de notaire, des préjudices matériels de l’Earl du Saucet et de l’investissement des ayant-droits et réduire à de plus justes proportions leurs demandes relatives au préjudice d’affection en allouant les sommes suivantes aux ayant-droits :

* 20.000 € à Mme J X,

* 11.000 € pour chacun des quatre enfants,

* 7.000 € pour chacun des deux petits-enfants,

* 6.000 € pour chacun des frères et soeurs,

— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a alloué la somme de 63.059,63 € au titre de la perte de revenus de la veuve,

— réduire à de plus justes proportions les prétentions fondées sur l’article 700 du code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions déposées le 19 mai 2017, les consorts X, appelants incidents, demandent à la Cour de :

— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a admis la mobilisation de la garantie de la société Pacifica mais l’infirmer sur l’indemnisation des préjudices,

— condamner la société Pacifica à payer à Mme J X la somme de 6.575,55 € au titre des frais funéraires,

— condamner la société Pacifica à payer au titre du préjudice d’affection à :

* Mme J X : 30.000 €,

* Mme N X épouse Z : 20.000 € à titre personnel, 10.000 € en sa qualité de représentant légal de A Z et 10.000 € en cette même qualité pour O Z,

* M. M X : 20.000 €,

* Mme G X : 20.000 €,

* Mme H X : 20.000 €,

* M. L X : 10.000 €,

* M. I X : 10.000 €,

* Mme K X épouse Y : 10.000 €,

— condamner la société Pacifica à payer aux ayant-droits (sic) de M. AA-AB X la somme de 10.000 € au titre des frais de notaire et 200.000 € au titre de la perte d’exploitation,

— avant dire droit sur les pertes financières, désigner tel expert judiciaire avec pour mission d’évaluer les pertes financières de l’exploitation agricole,

— en tout état de cause, condamner la société Pacifica à payer aux ayant-droits (sic) de M. AA-AB X les sommes suivantes :

* 6.500 € au titre de la location d’un valet de ferme,

* 16.140 € au titre de l’achat d’un valet de ferme,

* 22.800 € au titre de l’achat d’un tracteur,

* 3.380,41 € au titre du recours aux services de la société Jeanningros,

* 150.265 € au titre du devis de la société Jeanningros,

* 5.181,84 € au titre des dépenses de personnels pour les années 2013 et 2014,

* 274.661,25 € au titre des dépenses de personnels sur une période de cinq années,

* 5.000 € respectivement à Mme J X, Mme G X, Mme H X et Mme N X épouse Z au titre de l’investissement personnel consacré à l’exploitation agricole et 15.000 € à M. R X au même titre,

— à titre subsidiaire, confirmer le jugement entrepris, rejeter toutes autres demandes de la société Pacifica et la condamner à leur verser 8.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens, avec droit pour leur conseil de prévaloir des dispositions de l’article 699 du même code.

Pour l’exposé complet des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

La clôture de l’instruction de l’affaire a été prononcée par ordonnance du 26 septembre 2017.

Discussion

* Sur la mise en 'uvre et la nature de la garantie :

Attendu que M. AA-AB X avait souscrit auprès de Crédit Agricole Assurance (Pacifica) une police d’assurance « formule mini » à effet au 10 septembre 2012 portant sur son véhicule professionnel Renault express immatriculé CK-727-DZ stipulant une protection corporelle du conducteur selon un plafond d’indemnisation de 1.000.000 €, sans franchise ;

Qu’en vertu des conditions générales de ladite police, est garanti le conducteur blessé ou décédé dans le cadre d’un accident, le document rappelant à cet effet que « l’accident est une atteinte corporelle non intentionnelle de la part de la victime provenant de l’action soudaine d’une cause extérieure et exclusivement liée à l’usage comme moyen de transport du véhicule assuré » ; qu’il en résulte, sans qu’il y ait lieu à une quelconque interprétation, que seul le décès résultant de l’accident lui-même relève de la garantie, à l’exclusion d’un décès qui serait survenu, alors que le conducteur était au volant du véhicule, antérieurement à l’accident ;

Attendu qu’il n’est pas contesté que M. AA-AB X a été victime d’un accident de la voie publique à Avoudrey le […] alors qu’il se trouvait à bord du véhicule assuré par la société Pacifica, lequel a fini sa course par un choc frontal contre le mur d’un immeuble d’habitation situé au n° 3 de la rue du Gymnase, et que son décès a été constaté à cette occasion ;

Qu’il est tout autant incontestable qu’il incombe à celui qui se prévaut de l’application des garanties d’un contrat d’assurance de rapporter la preuve que le sinistre ou l’événement survenu au détriment de l’assuré entre dans le champ d’application de la garantie souscrite ;

Attendu qu’en l’espèce, la société Pacifica déniant sa garantie au motif que le caractère accidentel du décès n’est pas rapporté par ses contradicteurs, il y a lieu d’examiner si les consorts X produisent les éléments de fait de nature à établir que le décès de AA-AB X est consécutif à l’accident de la voie publique et qu’il n’était pas décédé avant le choc frontal ultime ;

Qu’il est admis que lorsque cette preuve s’avère particulièrement difficile à administrer, compte tenu de la chronologie des faits et des circonstances du décès, elle peut résulter de présomptions graves précises et concordantes, dans la mesure où il ne peut être imposé au bénéficiaire de la garantie la preuve directe d’un fait négatif, en l’occurrence que le décès n’est pas intervenu avant le choc frontal ;

Attendu que c’est tout d’abord à juste titre que le premier juge a écarté l’hypothèse d’un acte délibéré du conducteur du véhicule destiné à attenter à sa vie, dans la mesure où aucun élément du dossier, en particulier les témoignages de ses proches, n’évoque un terrain favorable à une telle issue, l’assureur s’étant d’ailleurs abstenu lui-même d’invoquer cette possibilité ; qu’il en est de même d’une défaillance dans la conduite consécutive à une consommation d’alcool dès lors que l’analyse sanguine a conclu à l’absence d’alcool dans le sang du conducteur ;

Que le docteur E, appelé sur les lieux à 16 heures 50 par le SAMU, relate qu’à son arrivée les sapeurs-pompiers avaient entamé un massage cardiaque sur M. AA-AB X, qu’il a lui-même entrepris à 17 heures une réanimation cardio-vasculaire poursuivie par l’équipe du SAMU dès son arrivée sur les lieux à 17 heures 20 et ce, jusqu’à 17 heures 30, avant de constater le décès ; que le docteur E indique avoir observé une plaie superficielle au niveau de l’arcade sourcilière droite ainsi que des plaies au niveau du genou ; que les parties s’accordent à considérer que ces contusions n’ont pu être létales, étant observé que l’intéressé était porteur de sa ceinture de sécurité, qui a absorbé une partie du choc ;

Qu’aucune trace de freinage qui aurait pu témoigner d’une man’uvre d’évitement n’a été constatée sur la trajectoire du véhicule, celui-ci ayant d’ailleurs percuté un panneau indicateur, situé à hauteur du carrefour, avant de s’encastrer dans le mur d’une maison d’habitation ; qu’intervenu sans délai sur les lieux, M. S T, locataire de celle-ci, a relevé que M. AA-AB X ne respirait plus et que sa tête était penchée en direction du volant mais que les airbags ne s’étaient pas déclenchés ; qu’à cet égard les clichés photographiques ne font pas apparaître une dénivellation particulière entre le point d’impact et la rue du Tennis d’où provenait M. AA-AB X, ce qui explique que le choc frontal ait été insuffisant pour un déclenchement des organes de sécurité ; que cela apporte en outre une indication précieuse sur l’importance de l’impact et ses conséquences sur le conducteur ; que M. S T indique que son regard a été détourné par une masse sombre qui lui masquait la lumière mais n’évoque pas avoir été averti par un bruit de moteur particulier ni ne donne d’indication sur la vitesse à laquelle le véhicule est arrivé en direction de son habitation ;

Attendu que le docteur F, médecin au SAMU 25, a constaté le décès à 17 heures 30 et a conclu son formulaire d’intervention en indiquant « probable ACR (accident cardio-respiratoire) au volant d’étiologie indéterminée responsable d’un AVP (accident de la voie publique) » ; qu’il a confirmé dans un certificat du 6 septembre 2013 que AA-AB X était décédé d’un arrêt cardio-respiratoire ; qu’enfin l’épouse et le frère de l’intéressée ont indiqué qu’il ne souffrait d’aucune pathologie et ne prenait aucun traitement médicamenteux dans la période qui a précédé son décès ;

Attendu que des indices factuels qui précèdent il ressort une forte probabilité permettant à la Cour de considérer que la cause du décès, que le médecin du SAMU lui-même qualifie d’indéterminée, n’est pas le choc frontal subi par le véhicule lors de son encastrement contre le mur de l’immeuble situé au n° 3 de la rue du Gymnase ; qu’en tout état de cause le caractère accidentel du décès n’est pas rapporté par les intimés auxquels incombe la charge de cette preuve ; que c’est donc à tort que le premier juge a considéré, par des motifs au demeurant hypothétiques, que la preuve du caractère accidentel du décès, au sens de la police d’assurance, était établie et que la société Pacifica était tenue à garantie ;

Qu’il s’ensuit que le jugement déféré sera infirmé en toutes ses dispositions et que les consorts X devront être déboutés de leurs entières prétentions ;

* Sur les demandes accessoires :

Attendu que les consorts X, qui succombent, supporteront la charge des dépens de première instance et d’appel ; que l’équité commande de rejeter les demandes formées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement rendu le 22 novembre 2016 par le tribunal de grande instance de Besançon en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

Déboute Mmes G X, H X, J Y épouse X, K X épouse Y et N X épouse Z et MM. I X, L X et R X de leurs demandes et les condamne in solidum aux dépens de première instance et d’appel.

Rejette les demandes formées en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Ledit arrêt a été signé par M. Edouard Mazarin, président de chambre, magistrat ayant participé au délibéré, et par Mme Dominique Borowski, greffier.

Le Greffier, le Président de chambre



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