Cour d'appel de Bordeaux, 4ème chambre commerciale, 20 janvier 2020, n° 18/04195

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 4e ch. com., 20 janv. 2020, n° 18/04195
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 18/04195
Décision précédente : Tribunal de commerce de Bordeaux, 30 mai 2018, N° 2017M07422
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE


ARRÊT DU : 20 JANVIER 2020

(Rédacteur : Monsieur Robert CHELLE, Président)

N° RG 18/04195 – N° Portalis DBVJ-V-B7C-KROG

SAS FLAT LEASE GROUP

c/

SAS X

SCP Y Z

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la Cour : ordonnance rendu le 31 mai 2018 (R.G. 2017M07422) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d’appel du 16 juillet 2018

APPELANTE :

SAS FLAT LEASE GROUP prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège […]

représentée par Maître Philippe LECONTE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉES :

SAS X prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social […]

représentée par Maître Marc DUFRANC de la SCP AVOCAGIR, avocat au barreau de BORDEAUX

SCP Y Z es qualité de mandataire judiciaire de la SASU FLAT LEASE GROU prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège […]

représentée par Maître Benjamin BLANC, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 09 décembre 2019 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Robert CHELLE, Président chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Robert CHELLE, Président,

Madame Elisabeth FABRY, Conseiller,

Monsieur Gérard PITTI vice président placé,

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Par ordonnance 2017M7422 du 31 mai 2018, le juge du tribunal de commerce de Bordeaux, commissaire de la sauvegarde judiciaire de la société Flat Lease Group, a admis au passif de la procédure la créance déclarée par la société X pour la somme de 92 700,41 euros à titre privilégié.

Par déclaration du 16 juillet 2018, la société Flat Lease Group a interjeté appel de cette décision en ce qu’elle a admis la créance, intimant la SCP Y-Z en sa qualité de mandataire judiciaire à la sauvegarde, et la société X.

PRETENTIONS DES PARTIES

Par conclusions déposées en dernier lieu le 16 octobre 2018, auxquelles il convient de se reporter pour le détail des moyens et arguments, la société Flat Lease Group demande à la cour de :

A titre principal,

DIRE ET JUGER que la la société X ne justifie pas de sa créance ;

En conséquence,

REJETER la déclaration de créances de la la société X ;

A titre subsidiaire,

DIRE ET JUGER qu’il existe des contestations sérieuses entourant l’exécution du protocole conclu entre la société Flat Lease Group et les sociétés du Groupe 123 VENTURE et donc la prétendue créance de la société X ;

En conséquence,

Renvoyer l’affaire devant le Tribunal de commerce de BORDEAUX, afin qu’il détermine si le protocole conclu entre la société Flat Lease Group et les sociétés du Groupe 123 VENTURE a été bien exécuté et si en conséquence la société X dispose effectivement d’une créance a l’égard de la société Flat Lease Group ;

En tout état de cause,

CONDAMNER la société X à payer la somme de 2.000 euros à la société Flat Lease Group, en application de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

La société appelante fait notamment valoir que la déclaration de créance est irrecevable à défaut de justification du fait du protocole intervenu entre les parties ; A titre subsidiaire, elle demande le renvoi de l’affaire au fond, en faisait état d’une contestation sérieuse en raison de l’inexécution du protocole.

Par conclusions déposées en dernier lieu le 11 janvier 2019, auxquelles il convient de se reporter pour le détail des moyens et arguments, la société X demande à la cour de :

— Confirmer l’ordonnance dont appel,

— Débouter Flat Lease Group de l’ensemble de ses demandes

— Fixer, au passif de la société Flat Lease Group, la créance déclarée par la société X dans les termes de la déclaration de créances, à savoir :

à échoir privilégié : 92 700,41 euros.

La société créancière fait notamment valoir que la débitrice a une interprétation bien à elle du protocole transactionnel signé entre les parties ; qu’elle est bien créancière de Flat Lease Group selon courriers échangés, et selon le protocole transactionnel ; sur la demande de renvoi au fond, que la débitrice ne produit que trois pièces inconsistantes ; que Flat Lease Group a reconnu devoir 2 272 000 euros aux sociétés du groupe 123 Investment Managers qui ont déclaré ce montant à la procédure de sauvegarde.

Par conclusions du 14 février 2019, la SCP Y-Z, en sa qualité de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde, demande la confirmation de l’ordonnance dont appel, et la condamnation de la société Flat Lease Group à lui payer 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Le mandataire judiciaire fait notamment valoir que la société Ytreza ne disposait que d’un mandat limité dans le cadre du protocole, pour collecter les échéances mensuelles, et ne dispose d’aucun mandat ou pouvoir pour déclarer les créances ; que les parties signataires du protocole sont bien les sociétés du groupe 123 Venture, dont X, créancières de la société Flat Lease Group ; sur la demande de renvoi au fond, que le protocole n’a été dénoncé par aucune des parties, de sorte que l’argument de la société Flat Lease Group peut être qualifié de fallacieux.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 novembre 2019.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les relations entre les parties

La société Flat Lease Group est spécialisée dans la location longue durée de matériels à destination des petites et moyennes entreprises. Pour ce faire, elle achète à des fournisseurs du matériel qu’elle donne ensuite en location à ses clients.

Pour financer ces achats, Flat Lease Group mobilise les contrats auprès de sociétés de financement, comme les sociétés du groupe 123 VENTURE, dont la société X fait partie, à charge pour ces dernières de se substituer à Flat Lease Group pendant la durée des locations, Flat Lease Group conservant la relation avec les clients, notamment en encaissant les loyers pour le compte des sociétés de financement. Les sociétés de financement sont propriétaires des matériels, qu’elles ont acheté pour le compte de Flat Lease Group.

A l’issue des locations, les contrats non résiliés sont restitués à Flat Lease Group, qui rachète ensuite le matériel financé aux sociétés du groupe 123 VENTURE pour un prix symbolique.

Les sociétés Ytreza, SYSTEMES DE REFRIGERATION, RUNTRUCK, […], X appartiennent notamment au groupe […], anciennement 123 VENTURE.

Des différents sont nés entre les sociétés de financement et la société Flat Lease Group, dans le cadre de l’exécution des différents contrats qui les liaient, et les sociétés de financement ont résilié leurs engagements, rendant ainsi certaines créances exigibles.

C’est ainsi que par plusieurs ordonnances de référé du tribunal de commerce de Bordeaux rendues les 27 juillet et 13 octobre 2015, la société Flat Lease Group a été condamnée à payer diverses sommes aux sociétés du goupe 123 Venture.

Afin de régler ces difficultés, les protagonistes ont signé un protocole d’accord transactionnel le 6 juillet 2016 (pièce n°1 de Flat Lease Group et n° 2 du créancier), au terme duquel la société Flat Lease s’est engagée à payer une somme définitive et forfaitaire de 2 272 000 euros « au représentant des Sociétés » du groupe 123 Venture (article 1.1.).

En contrepartie, les sociétés du groupe 123 Venture se sont engagées à se désister d’instance et d’action de toutes procédures contre Flat Lease Group, ainsi que sa filiale Aqui’Pme 4, et s’interdisent d’initier toute nouvelle contestation « de quelque nature que ce soit » contre elles (article 4.1.1).

Ce protocole a été homologué et rendu exécutoire le 4 octobre 2016 par le Président du Tribunal de Commerce de Bordeaux (pièce n° 3 du créancier).

Toutefois, les parties s’opposent sur l’exécution du protocole, ce qui a conduit la société Flat Lease Group à solliciter le bénéfice d’une procédure de sauvegarde, qui a été ouverte le 23 novembre 2016.

Sur la créance litigieuse

La créance déclarée par la société X pour la somme de 92 700,41 euros a été contestée par la société Flat Lease Group lors des opérations de vérifications des créances, de sorte que le juge commissaire a été saisi de la contestation.

Aux termes des dispositions de l’article L. 624-2 du code de commerce dans sa rédaction applicable à la cause, au vu des propositions du mandataire judiciaire, le juge commissaire décide de l’admission ou du rejet des créances ou constate soit qu’une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence. En l’absence de contestation sérieuse, le juge commissaire a également compétence, dans la limite de la compétence matérielle de

la juridiction qui l’a désigné, pour statuer sur tout moyen opposé à la demande d’admission.

Et il résulte de l’article R. 624-5 du code de commerce que lorsque le juge-commissaire se déclare incompétent ou constate l’existence d’une contestation sérieuse, il renvoie, par ordonnance spécialement motivée, les parties à mieux se pourvoir et invite, selon le cas, le créancier, le débiteur ou le mandataire judiciaire à saisir la juridiction compétente dans un délai d’un mois à compter de la notification ou de la réception de l’avis délivré à cette fin, à peine de forclusion à moins d’appel dans les cas où cette voie de recours est ouverte.

En l’espèce, la société X soutient détenir une créance sur Flat Lease Group, en vertu du protocole transactionnel.

La société Flat Lease Group oppose à titre principal que la créance n’est pas justifiée en invoquant le protocole qui prévoyait le paiement non pas à la société X, mais à un « représentant du groupe 123 Venture » ; que le choix de cette structuration n’est pas anodin compte tenu du caractère forfaitaire de la créance, regroupant l’intégralité des créances des sociétés du goupe 123 Venture ; que le créancier déclarant ne justifie pas personnellement de sa qualité de créancier et du montant de la créance.

Elle fait aussi valoir l’absence de désistement pourtant prévu au protocole, et donc l’inexécution de celui-ci par la société demanderesse.

Pour autant, ces arguments concernent le fond, c’est à dire l’existence même de la créance, et ne peuvent justifier une irrecevabilité pour défaut de justification.

A titre subsidiaire, la société Flat Lease Group demande le renvoi de l’affaire au fond, en faisait état d’une contestation sérieuse en raison de l’inexécution du protocole.

la société X oppose le protocole d’accord, dont elle ne propose pas la même interprétation que la débitrice quand au débiteur de la créance ni quant à la société chargée de son recouvrement.

Ainsi, la contestation suppose qu’il soit statué sur les conditions de l’inexécution alléguée du protocole d’accord, d’une part, par Flat Lease Group, qui invoque un doute sur l’identité tant du créancier que du débiteur, ainsi que sur le montant de la créance de chaque société composant le groupe 123 Venture, ainsi qu’une absence de désistement, et d’autre part, par le créancier pour défaut de paiement en vertu du protocole, c’est à dire que la contestation porte sur le principe même de la créance.

Aux termes de l’article L. 624-2 du code de commerce, au vu des propositions du mandataire judiciaire, le juge-commissaire décide de l’admission ou du rejet des créances ou constate soit qu’une instance est en cours, soit que la contestation ne relève pas de sa compétence.

Il s’agit donc d’une contestation sérieuse qui excède les pouvoirs du juge commissaire et de la cour statuant à sa suite, et, en application de l’article R. 624-5 du code de commerce, il y a donc lieu, infirmant l’ordonnance attaquée, de renvoyer les parties à mieux se pourvoir sur la demande de fixation de la créance devant le juge du fond compétent, en l’espèce le tribunal de commerce de Bordeaux statuant non plus en référé, mais au fond.

la société X, qui poursuit l’inscription de la créance revendiquée, sera invitée à saisir à cette fin cette juridiction dans le délai d’un mois à compter de la notification ou de la réception de l’avis délivré.

Sur les autres demandes

Il n’y a pas lieu de faire ici application de l’article 700 du code de procédure civile.

Les dépens de première instance et d’appel seront passés en frais privilégiés de la procédure collective.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme l’ordonnance 2017M7422 rendue le 31 mai 2018 par le juge du tribunal de commerce de Bordeaux, commissaire de la sauvegarde judiciaire de la société Flat Lease Group, qui a admis au passif de la procédure la créance déclarée par la société X pour la somme de 92 700,41 euros à titre privilégié,

Et, statuant à nouveau,

Constate l’existence d’une contestation sérieuse, et renvoie les parties à la faire trancher par le juge du fond compétent,

Invite la société X à saisir le tribunal de commerce de Bordeaux statuant au fond de sa demande de fixation de créance au passif de la procédure de sauvegarde de la société Flat Lease Group, dans le délai d’un mois à compter de la notification ou de la réception de l’avis délivré à cette fin,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

Dit que les dépens de première instance et d’appel seront employés en frais privilégiés de la procédure collective de la société Flat Lease Group.

Le présent arrêt a été signé par M. Chelle, président, et par M. Goudot, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

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