Cour d'appel de Bourges, Chambre sociale, 21 mai 2021, n° 20/00083

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Texte intégral

AJ-SD/ABL

N° RG 20/00083 -

N° Portalis DBVD-V-B7E-DHMI

Décision attaquée :

du 17 décembre 2019

Origine :

conseil de prud’hommes – formation paritaire de Bourges

--------------------

UGECAM DU CENTRE

C/

M. Z Y

--------------------

Expéd. – Grosse

Me VERNAY-A. 21.5.21

Mme X

21.5.21

COUR D’APPEL DE BOURGES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 21 MAI 2021

N° 166 – 6 Pages

APPELANTE :

UGECAM DU CENTRE

[…]

Représentée par Mme TOUSSAINT en qualité de responsable paye administration du personnel

Ayant pour avocat postulant Me Pascal VERNAY-AUMEUNIER de la SCP SOREL, du barreau de BOURGES

Et pour avocat plaidant Me Catherine LESIMPLE-COUTELIER de la SELARL LESIMPLE-COUTELIER & PIRES, du barreau de TOURS

INTIMÉ :

Monsieur Z Y

[…]

Représenté par Mme Carole X (défenseur syndical ouvrier)

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Mme BRASSAT-LAPEYRIERE, conseiller rapporteur

en l’absence d’opposition des parties et conformément aux dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme JARSAILLON

Lors du délibéré : Mme D, présidente de chambre

Mme BOISSINOT, conseillère

Mme BRASSAT-LAPEYRIERE, conseillère

DÉBATS : A l’audience publique du 26 mars 2021, la présidente ayant pour plus ample délibéré, renvoyé le prononcé de l’arrêt à l’audience du 21 mai 2021 par mise à disposition au greffe.

21 mai 2021

ARRÊT : contradictoire – Prononcé publiquement le 21 mai 2021 par mise à disposition au greffe.

* * * * *

EXPOSE DU LITIGE

M. Z Y, né le […], a été engagé par l’UGECAM (Union pour la Gestion des Établissements des Caisses d’Assurances Maladie) du Centre en qualité de veilleur de nuit au niveau 2 E aux termes d’un contrat à durée indéterminée de 39h hebdomadaires du 30 janvier 2013.

L’UGECAM du Centre relève de la convention collective du personnel des organismes de sécurité sociale du 8 février 1957.

M. Y est délégué du personnel et délégué syndical.

Sollicitant la requalification de sa prime de nuit en prime de sujétion, M. Z Y a saisi le conseil de prud’hommes de Bourges le 30 avril 2019, lequel, par jugement du 17 décembre 2019, a :

> dit la demande de M. Y recevable,

> dit que la prime de nuit est une prime de sujétion,

> condamné l’UGECAM du Centre à payer à M. Y les sommes de :

—  4.340,05 € à titre de rappel de congés payés,

—  500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

> condamné l’UGECAM du Centre à délivrer à M. Y un bulletin de paie de régularisation,

> débouté M. Y de sa demande de dommages-intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail par l’employeur,

> débouté l’UGECAM du Centre de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

> condamné l’UGECAM du Centre aux dépens.

Vu l’appel régulièrement interjeté par l’UGECAM du Centre le 20 janvier 2020 à l’encontre de la décision prud’homale qui lui a été notifiée le 20 décembre 2019, sauf en ce qu’elle a débouté M. Y de sa demande de dommages-intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail par l’employeur ;

Vu les dernières conclusions transmises au greffe de la cour le 16 avril 2020 et signifiées par acte d’huissier de justice à la même date aux termes desquelles l’UGECAM du Centre demande à la cour de :

> infirmer ou réformer toutes les dispositions du jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de Bourges le 17 décembre 2019 lui faisant grief en ce qu’il a :

— dit la demande de M. Y recevable,

— dit que la prime de nuit est une prime de sujétion,

— condamné l’UGECAM du Centre à payer à M. Y les sommes suivantes : 4.340,05 € à titre de rappel de congés payés et 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— condamné l’UGECAM du Centre à délivrer à M. Y un bulletin de paie de régularisation,

— débouté l’UGECAM du Centre de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné l’UGECAM du Centre aux dépens.

Statuant à nouveau :

> déclarer M. Y irrecevable et mal fondé en toutes ses demandes et l’en débouter,

28 mai 2021

> condamner M. Y à payer la somme de 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

> condamner M. Y aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions transmises au greffe de la cour le 9 juillet 2020 aux termes desquelles M. Y demande à la cour de :

Sur la qualification de prime de sujétion de la prime de nuit :

> confirmer le jugement du conseil des prud’hommes de Bourges en ce qu’il a :

— dit que la prime de nuit est une prime de sujétion

— condamné l’UGECAM du Centre, pour cette raison, à lui payer 4.340,05 € à titre de rappel de salaire au titre de la prime de nuit

Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail

> infirmer le jugement du conseil des prud’hommes de Bourges en ce qu’il l’a débouté de sa demande et condamner en conséquence l’UGECAM du Centre à payer à M. Y 1.000 € au titre de l’exécution de mauvaise foi du contrat de travail,

> dire et juger que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la saisine de la présente juridiction

> confirmer le jugement du conseil des prud’hommes de Bourges en ce qu’il a condamné l’UGECAM du Centre à lui payer :

—  500,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné l’UGECAM du Centre à tous les dépens,

Au surplus

> condamner l’UGECAM du Centre à lui payer 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

> ordonner sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir la remise du bulletin de paie rectificatif afférent aux créances salariales,

> condamner l’UGECAM à tous les dépens qui comprendront les frais éventuels d’exécution.

Vu l’ordonnance de clôture en date du 27 janvier 2021 ;

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux conclusions déposées.

SUR CE

- Sur le rappel de salaire au titre des congés payés

L’article L.3141-24 du code du travail dispose 'I. Le congé annuel prévu à l’article L. 3141-3 ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence.

Pour la détermination de la rémunération brute totale, il est tenu compte :

1° De l’indemnité de congé de l’année précédente ;

2° Des indemnités afférentes à la contrepartie obligatoire sous forme de repos prévues aux articles L. 3121-30, L. 3121-33 et L. 3121-38 ;

3° Des périodes assimilées à un temps de travail par les articles L. 3141-4 et L. 3141-5 qui sont considérées comme ayant donné lieu à rémunération en fonction de l’horaire de travail de l’établissement.

Lorsque la durée du congé est différente de celle prévue à l’article L. 3141-3, l’indemnité est calculée selon les règles fixées au présent I et proportionnellement à la durée du congé effectivement dû.

II. Toutefois, l’indemnité prévue au I du présent article ne peut être inférieure au montant de

28 mai 2021

la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler.

Cette rémunération, sous réserve du respect des dispositions légales, est calculée en fonction :

1° Du salaire gagné dû pour la période précédant le congé ;

2° De la durée du travail effectif de l’établissement.'

L’article L. 3141-25 du code du travail précise que pour la fixation de l’indemnité de congé, il est tenu compte des avantages accessoires et des prestations en nature dont le salarié ne continuerait pas à jouir pendant la durée de son congé. La valeur de ces avantages et prestations ne peut être inférieure à celle fixée par l’autorité administrative

En l’espèce, M. Y soutient que sa prime de nuit, de 1/6 de la valeur du point, ne lui est pas payée pendant ses congés payés et autres absences alors qu’à titre de prime de sujétion, elle devrait lui être versée. Il rappelle à cet égard qu’une prime de sujétion est versée en vertu du contrat de travail, de la convention collective ou de l’usage et est destinée à compenser les sujétions particulières résultant du travail du salarié, comme par exemple les horaires de nuit. Il demande la somme 4.340,05 € à titre de rappel de salaire au titre de la prime de nuit.

L’employeur soulève l’irrecevabilité de la demande dans la mesure où pendant les congés payés, le salarié reçoit un maintien de salaire sous forme d’indemnité de congés payés ; il estime donc que l’intéressé ne peut que demander un rappel d’indemnité de congés payés et non un rappel de salaire au titre de la prime de nuit. Au fond, il soutient que la demande est infondée car la prime de nuit a toujours selon lui été intégrée dans le salaire de référence servant de base de calcul du maintien de salaire pendant les congés payés. Il s’oppose à la requalification de la prime querellée en prime de sujétion s’agissant d’une indemnité horaire, qui n’est due que pour les heures relevant du travail intensif de nuit ; le cas échéant, il fait valoir que les 2 jours de congés supplémentaires cumulés à la règle du 1/6e répareraient la sujétion.

> sur la recevabilité des demandes

Dans la mesure où l’article 12 du code de procédure civile oblige le juge à donner ou à restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux invoqués par les parties, c’est à juste titre que le conseil de prud’hommes a analysé la demande de M. Y comme portant sur un rappel d’indemnité de congés payés au titre des primes de nuit non incluses dans le calcul pour le maintien de salaire appliqué en période de congés payés et a considéré sa demande de rappel de salaire à ce titre recevable.

> sur le rappel de salaire

Au regard des textes précités, il convient d’inclure dans la rémunération annuelle de référence servant au calcul de l’indemnité de congés payés, toutes les sommes ayant la nature d’un salaire à l’exclusion, s’agissant des primes, de celle calculée sur l’année entière, période de congé comprise. Entrent ainsi dans l’assiette de l’indemnité de congés payés de façon générale, les primes qui indemnisent les contraintes liées à l’emploi occupé, dès lors qu’elles ne sont pas maintenues durant les congés payés, comme les primes de nuit, sous réserve qu’elles constituent un élément de salaire correspondant à un droit pour le salarié, qu’elles rémunèrent une servitude

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permanente de l’emploi et non un risque exceptionnel et soient affectées dans son montant ou mode de calcul par la prise du congé. Le distinguo du salarié entre prime de nuit et prime de sujétion apparaît donc inopérant en l’espèce, et ce d’autant que les primes de nuit relèvent nécessairement des primes de sujétion au regard de la

servitude inhérente à l’emploi de veilleur de nuit qu’elles indemnisent.

Selon le protocole d’accord du 11 juin 1982 portant accord-cadre sur les conditions de travail du personnel des organismes de sécurité sociale et leurs établissements, les agents qui assurent totalement ou partiellement leur service normal dans le cadre de la durée hebdomadaire de travail, entre 21 heures et 6 heures du matin, bénéficient :

— soit d’un repos supplémentaire sur la base de 2 journées de congés par an, lorsque le poste de nuit est tenu de façon régulière par l’agent au cours de l’année considérée ;

— soit d’une indemnité horaire équivalente à 1/26e de la valeur du point applicable aux classifications des 17 avril 1974 et 4 mai 1976.

Il est également spécifié que ceux des agents qui effectuent des travaux intensifs de nuit bénéficient :

— de 8 jours de congés supplémentaires par an ;

— ou d’une indemnité horaire équivalente à 1/6e de la valeur du point applicable aux classifications des 17 avril 1974 et 4 mai 1976.

Sont réputés se livrer à un travail intensif de nuit et peuvent à ce titre bénéficier des avantages énoncés ci-dessus, les agents dont la liste suit, lorsqu’ils effectuent pendant la nuit les mêmes travaux effectifs que ce qu’ils accompliraient en service de jour. Sont visés par ces dispositions :

— les personnels d’encadrement et d’exécution des services de pharmacie, de laboratoire et d’électroradiologie ;

— les aides-soignants, auxiliaire de puériculture, élèves aides-soignants, agents des services hospitaliers ;

— le personnel d’encadrement des services médicaux ainsi que le personnel infirmier, les sages femmes, les puéricultrices ;

— l’ensemble des personnels concourant aux soins dans les services d’admission d’urgence et les services mobiles de secours d’urgence ;

— les agents assurant la conduite des chaudières ou des moteurs.

Indépendamment du fait que M. Y, en sa qualité de veilleur de nuit, ne relève pas de la liste des agents effectuant des travaux intensifs de nuit, il n’est pas contesté que le salarié perçoit l’indemnité horaire équivalente à 1/6e de la valeur du point applicable aux classifications des 17 avril 1974 et 4 mai 1976, en sus d’un repos supplémentaire de 2 journées de congés par an. Les plannings en attestent tout comme les bulletins de paye du salarié.

Par ailleurs, l’employeur produit la notification de contrôle du 10e de congés payés pour les exercices 2015/2016, 2016/2017, 2017/2018 et 2018/2019, dont il résulte que le cumul des primes de nuit est inclus dans la rémunération globale brute servant de base au calcul de la règle du 10e de manière totalement transparente et claire, n’en déplaise au salarié, ce étant précisé que contrairement à ce qu’il allègue, les chiffres retenus par l’employeur sont fidèles aux

28 mai 2021

mentions des bulletins de salaire. Il sera donc considéré que M. Y a été rempli de ses droits à congés payés infirmant la décision déférée.

- Sur la mauvaise foi dans l’exécution du contrat de travail

Aux termes de l’article L1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.

Le salarié fait valoir que les élus de l’entreprise ont vainement demandé à trois reprises à leur employeur de leur répondre sur la question des congés payés, ce qui est inexact dans la mesure il leur a été apporté des éléments réponses, qui certes ne les ont pas convaincus mais dont il ne saurait être retiré une mauvaise foi coupable de l’employeur compte tenu des développements précédents.

La décision déférée sera donc confirmée.

- Sur les autres demandes, les dépens et les frais irrépétibles

Partie principalement succombante, M. Y sera condamné aux entiers dépens ainsi qu’à payer à l’UGECAM la somme de 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Réforme la décision déférée sauf en ce qu’elle a dit que la demande de M. Z Y est recevable, que la prime de nuit attribuée à celui-ci est une prime de sujétion, et a débouté le même de sa demande de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail par l’employeur,

Statuant à nouveau et Y ajoutant :

Déboute M. Z Y du surplus de ses demandes,

Condamne M. Z Y aux entiers dépens ainsi qu’à payer à l’UGECAM du Centre une somme complémentaire de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus ;

En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Mme D, présidente de chambre, et Mme B, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

S. B C. D

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