Cour d'appel de Chambéry, Chbre sociale prud'hommes, 14 septembre 2017, n° 16/02367

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 14 SEPTEMBRE 2017

RG : 16/02367 NH / NC

Y X

C/ SA […]

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ANNEMASSE en date du 29 Septembre 2016, RG F 15/00227

APPELANT :

Monsieur Y X

[…]

[…]

[…]

comparant et assisté de M. Z A (défenseur syndical) inscrit sur la liste des défenseurs syndicaux établie par la DIRECCTE Auvergne-Rhône-Alpes

INTIMEE :

SA […]

[…]

[…]

représentée par Me Laetitia GAUDIN substituée par Me Marie ALSOUFI (SCP CABINET DENARIE BUTTIN PERRIER GAUDIN), avocat postulant au barreau de CHAMBERY et Me Martine RIVEREAU-TRZMIEL (SCP TUFFAL-NERSON DOUARRE et associés) avocat plaidant au barreau de Paris

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 20 Juin 2017 en audience publique devant la Cour composée de :

Madame Claudine FOURCADE, Président,

Madame Nathalie HACQUARD, Conseiller qui s’est chargée du rapport

Madame Anne DE REGO, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Madame B C,

********

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Y X a été embauché le 1er octobre 1992 par la société LE CRÉDIT LYONNAIS ;

A compter du 19 novembre 1996, il s’est vu confier les fonctions de Directeur d’Agence Particuliers puis, en novembre 2004 celles de Conseiller Clientèle Patrimoniale enfin, à compter de novembre 2014, il a été nommé Conseiller Privé ;

Le 15 juin 2015, il a saisi le conseil de prud’hommes d’Annemasse d’une demande de classification cadre à compter de novembre 1996 et de rappels de salaire afférents outre des dommages et intérêts pour discrimination professionnelle ;

Par jugement en date du 29 septembre 2016, le conseil de prud’hommes a :

— dit que les demandes antérieures au 15 juin 2013 sont prescrites,

— dit que la société LE CRÉDIT LYONNAIS a bien fait application des dispositions successives des conventions collectives des banques de 1952 puis 2000,

— débouté monsieur X de toutes ses demandes,

— débouté LE CRÉDIT LYONNAIS de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la partie qui succombe aux dépens ;

La décision a été notifiée aux parties par lettres recommandées avec demande d’accusé de réception le 30 septembre 2009 ;

Par déclaration faite au greffe par un défenseur syndical dûment mandaté et inscrit sur la liste idoine, le 2 novembre 2016, monsieur X a interjeté appel de la décision en sa globalité ;

Il demande à la cour de :

— réformer la décision déférée,

— constater que la société LCL n’a pas respecté les dispositions de l’article 52 de la convention collective nationale de la banque du 20 août 1952 en ne lui attribuant pas la classification V dès sa nomination comme directeur d’agence en juin 1993,

— condamner la société LCL à lui payer la somme de 1665,70 euros au titre du rappel de salaire de juin 2010 à mai 2015, outre 166,57 euros au titre des congés payés afférents,

— condamner LCL à lui payer une rémunération brute annuelle de 34.791,77 euros soit une rémunération brute mensuelle de 2676,29 euros à compter du 1er juin 2015,

— condamner la société LCL à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination subie en matière de qualification, de préjudice de carrière et de rémunération entraînant une perte de revenus sur ses pensions de retraite,

— condamner la société LCL à lui payer la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonner à LCL de lui remettre des bulletins de paie pour la période de novembre 1996 à décembre 2008 portant mention de la qualification de cadre classe V jusqu’en décembre 1999 puis niveau H jusqu’en décembre 2008, sous astreinte,

— ordonner à la société LCL de régulariser rétroactivement au 1er novembre 1996 son inscription à la caisse des cadres et à payer les cotisations en découlant, sous astreinte,

— condamner LCL aux dépens ;

Il fait valoir :

— que dès novembre 1996 date de sa nomination en qualité de directeur d’agence de Cergy – Saint Christophe, il relevait de la classification Cadres classe V définie par l’article 52 de la convention collective alors applicable qui deviendra niveau H dans la nomenclature de la convention collective nationale de 2000 ;

— que suite à deux arrêts de la cour de cassation ayant validé la classification cadre, en janvier 2009 LCL a, sur intervention de la CGT, nommé cadres tous les salariés ayant été directeur d’agence avant 2000, que lui-même a été nommé cadre niveau H à ce moment ; que la société a cependant refusé de revenir rétroactivement sur les salaires ;

— que les nombreux litiges ayant alors opposé la banque aux salariés concernés ont donné lieu à des transactions judiciaires ou extra judiciaires ;

La société LE CRÉDIT LYONNAIS demande à la cour de :

— confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel,

— déclarer monsieur X irrecevable en ses demandes pour la période antérieure au 15 juin 2013 à raison de la prescription,

— le débouter de l’ensemble de ses demandes,

— subsidiairement, le débouter de ses demandes pour la période prescrite,

— condamner monsieur X à lui payer la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux éventuels dépens ;

Elle fait valoir :

— que les demandes sont en partie prescrites et donc irrecevables, que l’on applique la convention biennale ou la prescription triennale issues de la loi du 14 juin 2013 ;

— que monsieur X ne remplissait pas du seul fait de ses fonctions de directeur d’agence, les conditions posées par l’article 52 de la convention collective de 1952 ; qu’il relevait en fait de la classification de gradé de classe IV qui était bien celle qui lui était appliquée ;

— qu’il en est de même par application de la convention collective nationale de 2000 ;

— que monsieur X ne produit aucun élément de nature à justifier ses prétentions ;

— que la jurisprudence invoquée par le salarié a été rendue au cas d’espèce et ne peut être transposée à la situation de monsieur X qui n’est en tout état de cause pas dispensé de produire les justificatifs propres à établir ses prétentions ;

— que monsieur X ne subit par ailleurs aucun déficit de rémunération, que sa demande de dommages et intérêts n’est formée que pour contourner la prescription opposable à ses demandes salariales et qu’aucune discrimination ne peut être invoquée ; que la perte de droits à retraite n’est qu’aléatoire ;

L’ordonnance de clôture a été rendue le 2 mai 2017 et l’affaire fixée à plaider au 20 juin 2017 ;

Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions régulièrement communiquées ;

SUR QUOI

— Sur le rappel de rémunération :

La loi du 14 juin 2013 a d’une part ramené de 5 à 3 ans la prescription applicable aux demandes de paiement de salaire fixée par l’article L3245-1 du code du travail, d’autre part ramené de 5 à 2 ans la prescription des actions concernant la rupture et l’exécution du contrat de travail fixée à l’article L1471-1 du même code ;

La loi ouvre une période transitoire de 3 ou 5 ans selon le cas et prévoit ainsi que les dispositions nouvelles s’appliquent aux prescriptions en cours au moment de son entrée en vigueur sans que le délai total de prescription puisse excéder la durée prévue par la loi ancienne ;

Monsieur X réclame paiement de rappel de salaire en raison de la reclassification qu’il revendique et qui relève de l’exécution du contrat de travail ; ses demandes pour la période antérieure au 15 juin 2013, étaient soumises à une prescription de 5 ans sans pouvoir être formées, quelque au delà du 15 juin 2015 s’agissant de la reclassification ;

Il a saisi le conseil de prud’hommes le 15 juin 2015 de sorte que toute demande antérieure au 15 juin 2010 est irrecevable comme prescrite ; les demandes portent sur la période juin 2010 à mai 2015 et sont donc recevables sauf en ce qui concerne la première quinzaine du mois de juin 2010 ;

Au fond, l’article 52 de la convention collective nationale de la banque du 20 août 1952, applicable au moment de la nomination comme directeur d’agence, définit comme cadres classe V les 'cadres administratifs , commerciaux ou techniques assurant à l’intérieur de l’entreprise une fonction d’autorité, d’étude, de conseil ou de contrôle, par délégation directe d’un cadre de classe plus élevée ou assurant la gestion d’un établissement distinct du siège de l’entreprise dans lequel sont employées plusieurs personnes dont au moins un gradé' ;

La classification H est ainsi définie par la convention collective de 2000 : ' Emploi comportant ou non l’animation d’une unité et se caractérisant par des responsabilités nécessitant la connaissance de techniques et d’usages complexes et/ou une compétence professionnelle confirmée. Il peut s’agir: de la gestion de tout ou partie d’une activité, d’une unité d’exploitation ou d’administration ou de la réalisation d’études ou de prestations d’assistance, de conseil ou de contrôle.' ;

Par ailleurs l’article 34 de la convention collective de 2000 prévoit que ' la conversion entre les niveaux de la classification de la présente classification et les coefficients de la convention collective nationale de travail du personnel des banques du 20 août 1952 est réalisée au moyen d’une grille de correspondance figurant en annexe IV de la présente convention collective.' ;

Cette annexe précise que le niveau H doit être accordé aux cadres bénéficiant de la classe V coefficient 655/685 CL (ancienne grille) ;

Il appartient à monsieur X qui revendique un positionnement conventionnel différent de celui qui lui était appliqué, de justifier de la réalité des fonctions exercées afin de permettre à la cour de déterminer si elles relèvent de la classification cadre classe V ;

En l’espèce, à l’exclusion de ses bulletins de salaire et du nom de trois salariés énoncés dans ses écritures comme ayant été des salariés gradés placés sous son autorité, sans aucune précision de date, monsieur X ne produit aucune pièce de nature à établir la matérialité de ses fonctions, la qualité des salariés exerçant leurs missions au sein de l’agence qu’il dirigeait, leur nombre à un instant 't',… ; la seule qualité de directeur d’agence sans justificatif du nombre de salariés qui y étaient employés concomitamment, sans démonstration que l’un au moins avait la qualité de 'gradé', est insuffisante pour permettre à la cour de retenir que monsieur X répondait aux exigences de l’article 52 de la convention collective pour le bénéfice du niveau cadre classe V ;

Monsieur X doit dès lors être débouté de ses demandes de repositionnement et de rappel de salaire afférent ainsi que l’a retenu le conseil de prud’hommes ;

— Sur les dommages et intérêts

Monsieur X invoque la discrimination dont il aurait été victime mais forme en réalité ses demandes sur le fondement de l’inégalité de traitement, aucun critère objectif de discrimination n’étant invoqué, seule la classification au regard d’autres collègues placés dans une situation identique étant revendiquée ;

Nonobstant le fait que le préjudice allégué est déterminé par référence à l’écart entre le salaire perçu et le salaire dont il estime qu’il l’aurait perçu s’il avait été classé cadre classe V dès novembre 1996 et qu’aucun préjudice distinct n’étant établi ni clairement énoncé, monsieur X ne peut se prévaloir d’aucune inégalité dès lors qu’il a été retenu qu’il ne relevait pas de la position cadre classe V et n’a subi aucune différence objective avec des collègues placés dans une situation identique – au demeurant sans référence à aucun des dits collègues- ;

Il ne justifie pas davantage d’une faute de la société LCL dans l’exécution du contrat de travail ;

Il sera dès lors et par confirmation, débouté de sa demande de dommages et intérêts ;

— Sur les autres demandes

Monsieur X qui succombe, supportera la charge des dépens ; il n’y a pas lieu, en équité, de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Ajoutant,

Dit n’y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Y X aux dépens.

Ainsi prononcé le 14 Septembre 2017 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Claudine FOURCADE, Présidente, et Madame B C, Greffier.

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