Cour d'appel de Chambéry, 1ère chambre, 2 juin 2020, n° 18/01457

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Chambéry, 1re ch., 2 juin 2020, n° 18/01457
Juridiction : Cour d'appel de Chambéry
Numéro(s) : 18/01457
Décision précédente : Tribunal de commerce de Chambéry, 12 juin 2018, N° 2017F00174
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

IRS/SL

COUR D’APPEL de CHAMBÉRY

Chambre civile – Première section

Arrêt du Mardi 02 Juin 2020

N° RG 18/01457 – N° Portalis DBVY-V-B7C-GAO6

Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Commerce de CHAMBERY en date du 13 Juin 2018, RG 2017F00174

Appelante

S.A.R.L. WOODSTONE, dont le siège social est situé […]

Représentée par la SAS SR CONSEIL, avocats au barreau de CHAMBERY

Intimée

Société SGC TRAVAUX SPECIAUX, dont le siège social est situé […]

Représentée par la SCP BOLLONJEON ARNAUD BOLLONJEON, avocats postulants au barreau de CHAMBERY

Représentée par la SELARL JURISQUES, avocats plaidants au barreau de LYON

— =-=-=-=-=-=-=-=-

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l’audience publique des débats, tenue en rapporteur, sans opposition des avocats, le 16 mars 2020 par Mme Chantal FERREIRA, Première Présidente en qualité de rapporteur, avec l’assistance de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,

Et lors du délibéré, par :

—  Mme Chantal FERREIRA, Première Présidente,

—  M. Michel FICAGNA, Président,

—  Mme Alyette FOUCHARD, Conseiller,

— =-=-=-=-=-=-=-=-

La société Coval 3 a obtenu un permis de construire en date du 21 janvier 2016 pour la démolition d’un chalet dénommé « La Tapia » et la reconstruction d’un bâtiment de 5 logements sur la commune de Val d’Isère.

La maîtrise d''uvre a été confiée au cabinet ECOGAM (mission OPC, AMO).

Le 25 avril 2016, la SAS SGC Travaux Spéciaux (SGC) a établi à l’intention de la société Coval 3 un devis de prestations concernant la réalisation d’un soutènement provisoire en colonne de jet grouting et profilés type H.

Un marché a ainsi été conclu entre les deux parties sur la base de cette proposition pour un montant global et forfaitaire de 660 000 euros TTC.

La SARL Woodstone a ensuite repris ce chantier en qualité de maître d’ouvrage venant aux droits et obligations de la société Coval 3.

Le 7 février 2017, la SAS SGC a adressé à la SARL Woodstone son décompte général définitif comprenant un solde à percevoir de 118 032,24 euros.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 22 mars, la SAS SGC a mis en demeure la société Woodstone de lui payer cette somme sous peine de poursuite judiciaire.

Par courriel du 13 avril 2017, la SARL Woodstone a indiqué à la SAS SGC que les soldes de plusieurs opérations étaient en cours d’élaboration et a proposé de restituer par anticipation le montant des retenues de garantie sous réserve de l’application d’une remise de 10% sur ce montant.

Par courriel du 18 avril 2017, la SAS SGC a refusé cette proposition et réitéré sa demande en paiement du solde de son marché.

Saisi sur requête de la SAS SGC, le président du tribunal de commerce de Chambéry, par ordonnance en date du 25 avril 2017, a enjoint la SARL Woodstone de payer à la SAS SGC la somme principale de 118 032,24 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 24 mars 2017.

Par courrier recommandé avec accusé de réception expédié le 29 mai 2017, la SARL Woodstone a formé opposition à cette ordonnance qui lui a été signifiée le 14 mai 2017.

Par jugement du 13 juin 2018, le tribunal de commerce de Chambéry a :

• Déclaré régulière et recevable l’opposition de la SARL Woodstone à l’ordonnance du 25 avril 2017,

• Se substituant à ladite ordonnance, a :

• condamné la SARL Woodstone à payer, en deniers ou quittances valables, à la SAS SGC :

— la somme de 104 832,24 euros montant principal des causes sus-énoncées

— les intérêts au taux légal de cette somme à compter du 22 mars 2017

— la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

— les dépens.

La SARL Woodstone a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses conclusions en date du 16 avril 2019 auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé des moyens, la SARL Woodstone demande à la cour de :

Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

Vu les dispositions des articles 1103 et suivants du Code civil,

' Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Chambéry le 13 juin 2018 en toutes ses dispositions,

' Condamner la société SGC à payer à la société Woodstone la somme de 179 324.13 € au titre du trop perçu, outre intérêts au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir,

' Rejeter l’appel incident formé par la société SGC,

' Débouter la société SGC de toutes ses demandes,

' Condamner la société SGC à payer à la société Woodstone la somme de 20 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions en date du 16 janvier 2019, auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé des moyens, la société SGC demande à la cour de :

Vu les anciens articles 1134 et 1147 du Code Civil,

Vu l’article 32-1 et 564 du Code de Procédure Civile,

' Confirmer le jugement rendu le 13 juin 2018 par le tribunal de commerce de Chambéry en ce qu’il a condamné la société Woodstone à payer à la société SGC les sommes de :

o 104 832,24 € au principal,

o les intérêts au taux légal de cette somme à compter du 22 mars 2018

o la somme de 2 000 € à titre d’indemnité en application de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

' Faire droit à l’appel incident de la société concluante,

' Réformer le jugement en ce qu’il n’a pas prononcé de condamnation à titre de dommages et intérêts et en ce qu’il n’a pas intégré la somme de 13 200 €,

' Condamner en outre la société Woodstone à payer à la société SGC la somme de 13 200 € au titre du solde du marché, à défaut de compte prorata,

' Condamner la société Woodstone à payer à la société SGC la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts,

Et y ajoutant,

' Condamner la société Woodstone à payer à la société SGC la somme de 4 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction pour ceux d’appel au profit de la SCP Bollonjeon Arnaud Bollonjeon, avocats associés.

L’ordonnance de clôture est en date du 24 février 2020.

MOTIFS DE LA DECISION

1 ' Sur la nature du marché et les sommes dues à la SAS SGC

' Sur le compte prorata

En l’absence d’éléments nouveaux c’est par une exacte appréciation des faits de l’espèce et une motivation pertinente que la cour adopte expressément, que les premiers juge ont retenu :

'que le devis excluant la participation de la société SGC du compte prorata ne faisait pas partie des pièces contractuelles,

'qu’en revanche le marché qui est visé comme faisant partie intégrante de ces dernières prévoyait la participation de la société SGC à ce dernier,

'qu’il y avait donc lieu d’en faire application en déduisant du montant des sommes facturées par cette société un pourcentage de 2%, ramenant le montant de la créance de cette dernière à la somme de 104 832,24 euros TTC.

En réponse, à l’argumentation de la société SGC il sera ajouté que si le marché n’est pas daté, il fait référence expresse au devis, ce qui signifie qu’il est forcément postérieur à ce dernier et que par ailleurs la clause dans le marché prévoyant la participation de cette société au compte prorata aurait parfaitement pu être rayée si tel avait été l’accord entre les parties.

Le jugement sera confirmé en ce sens.

' Sur les travaux qui n’auraient pas été exécutés

Un marché à forfait tel que prévu par l’article 1793 du code civil, se définit comme un contrat par lequel un entrepreneur s’engage à fournir un ouvrage pour un prix fixe.

Les deux parties acceptent un aléa. Pour le maître de l’ouvrage l’aléa est constitué par le fait que le prix payé peut être supérieur au coût réel des travaux. Pour l’entrepreneur l’aléa résulte d’un coût réel supérieur aux estimations qu’il a fournies.

En l’espèce, les parties ont conclu un marché établi sur la base de la proposition de prix de la SAS SGC pour un montant global et forfaitaire de 660 000 euros.

Ainsi qu’il résulte du devis, cette estimation a porté sur des travaux dont la nature et la consistance étaient nettement définies à partir de documents techniques tels que : notice technique, plan du soutènement, plan projet coupes établis par Secoba, une étude géotechnique AP CEBTP, un avis géotechnique d’Equaterre, un plan topo et des sondages.

Pour soutenir qu’il y aurait lieu de déduire du montant de la facture finale de SGC une somme de 20 072 euros HT la société Woodstone fait valoir que :

' elle a décidé avant de commencer le chantier de supprimer la construction d’une piscine,

' il était prévu que dans le lot de la société SGC que les pieux soient forés et exécutés sur 6 mètres de profondeur en partie normale et 8 m de profondeur à l’endroit de la piscine,

' tous les pieux ayant été réalisés à 6 mètres, il y a lieu de déduire 2m sur la longueur de la piscine soit 20 m2 sur les 548 m2 que représentent la surface des pieux, à déduire du marché global de 550 000 euros HT.

A l’appui de ses allégations elle produit le plan de recollement des poutrelles acier HEB sur lequel elle a surligné en bleu l’emplacement de la piscine.

S’il n’est pas contesté par la société SGC qu’une modification sur la piscine a été demandée tardivement par le maître de l’ouvrage, force est de constater que ce dernier ne produit aucun document, aucun plan établissant qu’une piscine était prévue à l’endroit qu’il désigne, qu’il ne justifie pas de la surface en surprofondeur de la piscine, ni de la modification engendrée par sa suppression quant à la longueur des pieux et des écarts mentionnés.

De la même manière, alors que la société Woodstone soutient que, pour ces pieux, le forage, le bétonnage avec armatures et IPN forés dans le béton des pieux et scellés dans ceux-ci n’ont pas été exécutés, ce que conteste la société SGC, les comptes rendus de chantier produits ne mentionnent rien quant à cette inexécution alléguée et il n’est pas produit le procès-verbal de réception avec les réserves qu’il aurait pu contenir.

Par ailleurs, la société Woodstone effectue son calcul par rapport à la totalité du montant du marché alors que le devis distingue plusieurs postes différents, dont certains ne sont pas concernés par la modification invoquée:

— Amenée, installation, repli des matériels, étude, note de calculs, essais pour 59 000 euros HT

— Soutènement provisoire profilé HEA, profil AB-BC-CD-DA pour 89 500 euros HT

— Soutènement provisoire jet Grouting, profil AB-BC-CD-DA pour 289 000 euros HT

— Butonnage rabotage, gunitage pour 112 500 euros HT.

Enfin, ainsi que l’ont relevé à bon droit les premiers juges, le marché a été conclu de manière forfaitaire et il apparaît que la SAS SGC a exécuté l’ensemble des travaux mis à sa charge.

Il n’y a donc aucune moins-value à appliquer et le jugement qui a fixé à la somme de 104 832,24 euros TTC le montant restant dû à la SAS SGC au titre du marché de travaux, sera confirmé.

2 ' Sur les sommes réclamées par la société Woodstone à titre reconventionnel

A titre liminaire, il sera observé qu’à réception du décompte général définitif de la société SGC, en date du 7 février 2017, et après relance des 6 mars et 22 mars 2017, la société Woodstone s’est contentée d’adresser un courriel à cette dernière le 13 avril 2017, indiquant qu’elle soldait les comptes et qu’il resterait à lui payer les retenues de garantie, proposant de les régler de suite avec une remise de 10%.

Elle n’a formulé aucune réclamation, aucun grief à l’encontre du travail de la SAS SGC et ce n’est que le 25 août 2017, plus de cinq mois après l’établissement du décompte général définitif et postérieurement à l’ordonnance d’injonction de payer du 25 avril 2017, signifiée le 16 mai 2017, que la société Woodstone a adressé par courriel à la SAS SGC un bilan établi par Ecogam, récapitulant les sommes dues par cette dernière.

Il est à noter que ce bilan, dont les termes ont été contestés par le conseil de la société SGC par courrier du 9 octobre 2017, et qui a été écarté par les premiers juges, car ne faisant état que de sommes estimatives et n’étant étayé par aucun autre élément, n’est pas produit en appel.

En revanche, d’autres pièces qui n’avaient pas été produites devant les premiers juges, sont versées au débat par la société Woodstone pour justifier de ses prétentions, sur la base desquelles il convient d’examiner leur bien fondé.

' Sur les pénalités de retard

Selon le planning contractuel l’intervention de la SAS SGC débutait le 17 mai et se terminait le 8 août 2016.

Alors que la société Woodstone réclamait une somme de 4 400 euros au titre des indemnités de retard contractuelles en première instance, elle réclame devant la cour une somme de 25 760 euros faisant valoir que SGC n’a fini ses travaux que dans la semaine du 14 au 21 septembre 2016 par la fin de la préparation des parois en vue de la pose d’une membrane d’étanchéité, permettant le début des travaux de maçonnerie.

Or, il ressort du compte rendu n°12 de la réunion de chantier du 3 août 2016 que l’état de surface du béton projeté par la société SCG respectait les consignes du fabricant Volclay (membrane d’étanchéité), ce qui signifie que la préparation des parois était en cours ou effectuée et que sa mise en 'uvre était conforme.

Dans ce même compte rendu il était précisé, concernant la société Construction Savoyarde en charge du lot terrassement et du lot gros 'uvre, façade et démolition, que le début du béton était prévu pour le 8 août et il était demandé à l’entreprise d’installer le chantier, de mettre en place des sanitaires, de fournir la grue et le grutier. L’intervention gros 'uvre était mentionnée pour deux mois et demi. Enfin s’agissant du terrassement il était demandé à l’entreprise d’avancer le terrassement en évacuant les terres : « Avancer terrassement/évacuation ».

Il ressort du compte rendu n°13 de la réunion du 10 août 2016 qu’il était demandé à la société SGC de retirer et évacuer la pelle et à la société Construction Savoyarde d' « avancer le gros béton + Volclay à partir du 17 août » . Il était également demandé à cette entreprise d’organiser la rotation des camions : « pas de stationnement/ attente devant le chantier »

Aux termes du compte rendu n°14 de la réunion du 17 août 2016, il était demandé à la société Construction Savoyarde de « valider avec votre sous-traitant la mise en place de la membrane et mettre en 'uvre solution adéquate » et « avancer mise en place de la membrane Volclay, traiter préalablement les venues d’eau ».

Ainsi qu’il résulte du compte rendu n°15, il a été demandé à l’entreprise SCG, lors de la réunion du 24 août, d’évacuer son matériel avec un rappel lors de la réunion du 31 août (compte rendu n°16).

Si les différents comptes rendus font apparaître des demandes adressées à la société SCG concernant les finitions de parement, le traitement des suintements, ou des infiltrations d’eau en paroi, il résulte de l’ensemble des éléments exposés ci-dessus, que la préparation des parois par béton projeté en vue de la pose d’une membrane d’étanchéité par le maçon, qui constituait la dernière prestation de l’entreprise SCG (cf planning pièce 3 Woodstone) était effective le 8 août 2016, que le maçon a pu ainsi normalement intervenir à la suite de cette dernière.

Dès lors la demande de la société Woodstone au titre de pénalités de retard a été rejetée à juste titre par les premiers juges.

' Sur le décalage des parois

La société Woodstone fait encore valoir que les parois réalisées par SGC n’ont pas l’épaisseur convenue entre les parties, que les points 1 et 2 figurant en rouge sur le plan de recollement des HEB, qu’elle produit, identifient les zones concernées par une surépaisseur qui a entraîné un surcoût de béton qu’elle chiffre à la somme de 1 125 euros et une perte de surface vendue qu’elle chiffre à la somme de 31 875 euros.

Force est de constater qu’elle ne justifie en aucune manière de l’épaisseur des parois contractuellement prévue, de la surépaisseur alléguée alors que les comptes rendus de chantier n’en

font pas état, et encore moins de la réalité de son préjudice.

' Sur la consommation d’eau et l’utilisation de services communs

La société Woodstone réclame la somme de 1 761 euros au titre de la consommation d’eau faisant valoir qu’elle devait fournir à la société SGC une quantité limitée à 500 mètres cubes d’eau alors que la consommation a représenté 2 588 mètres cubes et sollicite le paiement du surcoût.

La quantité de 500 mètres cubes d’eau qui figure au devis, lequel ne fait pas partie des pièces contractuelles, est manifestement une estimation.

Par ailleurs, le marché de travaux signé entre les parties prévoit :

« Une retenue pour les frais communs nécessaires à la parfaite exécution du chantier mais non compatibles à une seule et unique entreprise (Energie, eau….), sera appliquée et cumulée au titre du compte prorata. Le montant de ce dernier est fixé à 2% du montant HT des sommes facturés. »

Ainsi la consommation d’eau fait partie intégrante du compte prorata qui ne concerne pas le maître de l’ouvrage, étant observé que la facture d’eau produite, du 30 janvier 2017, est adressée à la société Construction Savoyarde, en charge du gros 'uvre, qu’elle concerne l’abonnement du 1er semestre 2017 ainsi que le solde de la consommation pour l’année 2016 suivant relevé du 16 décembre 2016, soit plus de quatre mois après l’intervention de la société SGC.

Par ailleurs, la société Woodstone ne justifie pas avoir assumé le coût de cette facture.

Cette dernière fait encore valoir que la société SGC a travaillé pour son propre compte sur le chantier voisin Ginon (chalet La Ferme d’Anna) jusqu’à la fin de l’année 2016, et que l’utilisation de la grue ainsi que les services généraux ont été payés par le compte prorata du chantier Woodstone.

Le planning de la société SGC montre que cette dernière devait amener et installer le matériel de forage/ profilés et de jet grouting dans un premier temps sur le chantier du chalet Tapia pour le transférer ensuite sur le chantier du chalet La Ferme d’Anna.

Ce matériel très spécifique lui appartient et rien n’établit, par ailleurs, qu’elle ait utilisé après son intervention sur le premier chantier, les services communs de celui-ci, dont la grue qui a été mise en place par le maçon.

Enfin, s’agissant du compte prorata qui concerne les entreprises dans leurs rapports entre elles, le maître de l’ouvrage ne peut se prévaloir d’aucune créance à ce titre.

' Sur la facture Equaterre qui aurait été payée à tort par la société Woodstone

Ainsi que l’indique la société SGC, les missions géotechniques sont strictement nécessaires à l’opération de construction et à ce titre, sont à la charge de la maîtrise d’ouvrage étant précisé que le marché de travaux ne met pas ces dernières à la charge de l’entreprise.

' Sur l’arasée des fers

La société Woodstone sollicite pour la première fois devant la cour, une somme de 15 000 euros HT en faisant valoir que la société CGS a omis d’araser les IPN à la bonne hauteur sur une partie de la limite sud de la parcelle précisant que le travail a finalement été effectué par la société Construction Savoyarde.

Force est de constater que rien sur ce point n’apparait dans les comptes rendus de chantier et qu’elle

ne justifie pas de la facture de cette dernière société relative à ces travaux, se contentant de produire une estimation non datée de la maîtrise d''uvre.

La demande ne peut qu’être rejetée.

' Sur le contentieux avec les copropriétés voisines et les transactions intervenues

Selon l’article 2051 du code civil, la transaction faite par l’un des intéressés ne lie point les autres intéressés et ne peut être opposée par eux.

L’effet relatif de la transaction s’impose pour deux raisons : d’une part en tant que convention elle ne peut produire d’effet qu’à l’égard de ceux qui l’ont conclue, d’autre part, l’autorité de la chose jugée attachée à la transaction n’existe qu’entre les cotransigeants et leurs ayants cause universels à propos d’une action déterminée.

Ainsi le principe de la relativité s’oppose à ce que la transaction fasse naître un droit au profit d’un tiers ou mette une obligation à sa charge.

Par ailleurs, sur le plan factuel, les plans de recollement ainsi que les constats d’huissier montrent que le chantier était entouré de plusieurs autres chalets collectifs situés en limite du chantier de démolition construction de sorte qu’il ne pouvait qu’entrainer des nuisances à l’égard des propriétés voisines (bruits, poussière, empiètement de matériels sur les autres terrains), ce qu’a d’ailleurs reconnu le gérant de la SARL Coval 3 dans un courrier du 26 juillet 2016 adressé au conseil du syndicat des copropriétaires Le Val C’ur, dont les termes sont les suivants :

« J’ai bien reçu votre lettre du 18 juillet 2016.

En effet, j’ai été dépassé par l’ampleur du matériel que l’entreprise de fondations spéciales a amené sur le chantier.

Je ne m’attendais pas à du matériel aussi volumineux et important.

A ce jour nous avons terminé les pieux et les travaux bruyants et polluants.

Les terrassements se terminent pour le début du mois prochain et nous pourrons resserrer l’emprise sur le terrain sans toutefois la supprimer totalement.

Nous avons déjà évacué une bonne partie du matériel. Outre la bande d’accès de 4 m et la grue, il restera un peu de matériel vers le pignon de la copropriété et les Algécos vers le Val village.

J’ai conscience des désagréments que je fais au voisinage et suis disposé à trouver avec le Val Coeur une solution amiable d’indemnisation. »

Il apparaît ainsi que, compte tenu de la nature des travaux, et la configuration des lieux, les nuisances et l’empiètement provisoire des engins et matériels sur les propriétés voisines étaient inéluctables.

' Sur le contentieux avec la copropriété Val C’ur

La société Woodstone sollicite la condamnation de la SAS SCG à lui payer la somme de 27 044,72 euros, montant des sommes qu’elle a réglées en exécution d’un protocole d’accord signé avec le syndicat des copropriétaires Le Val C’ur.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que la SAS SCG, qui avait reçu pour consigne de n’utiliser qu’une partie du terrain de la copropriété, n’a pas respecté les instructions, et a utilisé la

totalité du jardin.

Il résulte des pièces versées au débat que :

' Suivant protocole transactionnel du 18 mars 2016, la copropriété Le Val C’ur a autorisé la SARL Coval 3 à installer sur une bande d’une largeur de 4 mètres sur le terrain de l’Evêché, contigu au chantier, une grue du 2 mai 2016 à fin octobre 2016 dans le cadre des travaux autorisés par le permis de construire.

' Suivant actes des 27 mai et 8 août 2016, le syndicat des copropriétaires Le Val C’ur a fait constater par huissier la dégradation du terrain de l’Evêché, l’utilisation de la quasi-totalité du terrain pour les besoins du chantier outre l’installation de bungalows et de matériels de chantier sur la partie de terrain où seule l’installation d’une grue avait été autorisée.

' Par acte en date du 23 août 2016, le syndicat des copropriétaires Le Val C’ur a fait assigner la SARL Coval 3 et la SARL Woodstone devant le juge des référés du tribunal de grande instance d’Albertville, aux fins d’obtenir leur condamnation à cesser tout empiètement sous astreinte, à remettre dans leur état initial les parcelles outre le paiement d’une indemnité provisionnelle à valoir sur son préjudice d’un montant de 81 600 euros.

' Il n’est pas produit la décision du juge des référés, mais il est versé au débat l’arrêt de la présente cour du 29 juin 2017 constatant le désistement du syndicat des copropriétaires et l’extinction de l’instance. A la lecture de celui-ci, il apparaît que le premier juge avait débouté ce dernier de ses demandes.

En effet, le 27 avril 2017 avait été régularisé un protocole d’accord, aux termes duquel la copropriété autorisait la SARL Woodstone à utiliser la dalle des garages de la copropriété du 2 mai au 30 novembre 2017 pour y stocker du petit matériel.

En contrepartie, la SARL Woodstone s’engageait à prendre en charge :

' Toutes les précautions pour protéger le sol (plancher global) et l’étayage éventuel de la dalle dans le niveau garage sans gêner le stationnement.

' Le remblaiement de la butte située en limite séparative des parcelles AD 89 et AD 90 avec création d’un muret en pierre en limite de propriété en sommet de butte, qu’elle s’engageait à faire dans les meilleurs délais.

Par ailleurs la société Woodstone s’engageait à verser au syndicat des copropriétaires une somme totale de 28 844,72 euros correspondant :

' Aux frais de procédure de la copropriété soit 13 844,72 euros

' A une indemnité de 10 000 euros en dédommagement des nuisances subies lors de la construction du Chalet La Tapia

' A une indemnité de 5 000 euros en dédommagement de l’utilisation de la dalle des garages de la copropriété.

La société Woodstone n’a pas cru devoir appeler en garantie la société SGC dans le cadre de la procédure de référé, et cette transaction lui est inopposable, de sorte que l’appelante n’est pas fondée à se prévaloir de cette dernière pour obtenir le remboursement des sommes qu’elle a réglées à ce titre.

De surcroît, il sera observé que :

' Le protocole porte pour partie sur l’utilisation de la dalle des garages sur une période postérieure à l’intervention de la société SGC et ne la concerne pas, mais démontre que l’empiètement par les entreprises de leur matériel sur les copropriétés voisines était inéluctable compte tenu de la configuration du chantier.

' Compte tenu de la configuration des lieux et de l’importance du matériel employé par les sociétés SGC et Construction de Savoie, l’empiètement sur les terrains voisins était inéluctable et n’a manifestement pas été anticipé, ni par la maîtrise d’ouvrage ni par la maîtrise d''uvre.

Les demandes de limitation de leur emprise par les entreprises et de respect des limites de propriété, qui figurent dans les comptes rendus de chantier n°2, 3, 6, 7, 8, 11, 12, 13, 14, 15 et 16, sont adressées autant à la société SGC qu’à la société Construction Savoyarde, qui étaient, à l’époque, les deux seules entreprises présentes sur le chantier. Par la suite elles ont été adressées à cette dernière entreprise seule.

Les constats d’huissier produits, dont les photos sont peu explicites, ne permettent pas de déterminer quelle entreprise empiète avec ses engins, son matériel, ses algécos sur le terrain de l’Evêché.

La demande de la société Woodstone fondée sur cette transaction ne peut qu’être rejetée.

' Sur le contentieux avec la copropriété Val Village

La société Woodstone sollicite la condamnation de la société SGC à lui payer la somme de 11 274 euros correspondant, selon elle, au total de l’indemnisation versée à cette copropriété ainsi qu’au coûts liés au litige avec la copropriété imputables à la faute de la société SGC.

Elle fait valoir qu’à la suite des constats d’huissier, réalisés à la demande du syndicat des copropriétaires, et de la mise en demeure de son conseil, elle a, pour éviter tout nouveau procès, négocié des contreparties à un accord amiable.

Elle précise qu’en contrepartie de l’empiètement des IPN et du béton sur la copropriété Val Village, elle a revêtu à ses frais le mur béton côté Val Village d’un revêtement pierres d’un coût de 3 780 euros HT.

Elle indique que la société SGC n’ayant pas respecté les consignes consistant à protéger les bâtiments voisins et à arroser pour éviter les poussières, elle a exposé des frais supplémentaires de nettoyage dont elle sollicite la prise en charge par cette dernière.

Il résulte de la lecture du protocole transactionnel du 15 avril 2017, que le syndicat des copropriétaires Val Village, après avoir fait établir deux constats d’huissier et les 21 juillet et 8 août 2016, a mis en demeure la SARL Coval 3, par courrier du 25 août 2016, de :

— Cesser tout empiètement et passage au droit de son terrain, de remettre en état les espaces verts, plantations et l’enrobé détérioré,

— Remédier aux nuisances occasionnées par le chantier en supportant le nettoyage de ses réseaux EP et de ses façades (volets roulants compris),

— L’indemniser du préjudice de jouissance occasionné selon un montant provisionnel de 30 000 euros résultant de l’impossibilité de jouir pendant la saison estivale des appartements et des parties communes occupées de manière illicite.

Aux termes de ce protocole, les SARL Coval 3 et Woodstone se sont engagées à prendre en charge :

' La remise en état des espaces verts et extérieurs détériorés tels que décrits dans les constats des 21 juillet et 8 août 2016,

' La reprise de fissure affectant l’enrobé des parties communes,

' L’habillage en pierres apparentes du mur séparatif entre le terrain de la Tapia et celui de la copropriété .

Par ailleurs, les SARL Coval 3 et Woodstone se sont engagées à verser au syndicat des copropriétaires une somme de 4 848,09 euros correspondant aux frais engagés par la copropriété qui a ainsi renoncé, en contrepartie, à engager toute action en référé à leur encontre pour obtenir ce qu’elle réclamait dans sa lettre de mise en demeure précitée.

Compte tenu de l’inopposabilité de ce protocole à l’égard de la société SGC, la société Woodstone n’est pas fondée à demander sa condamnation au paiement des frais engagés par la copropriété qu’elle s’est engagée à verser.

Sur le coût de l’habillage en pierres

Il résulte des termes de ce protocole que contrairement à ce que soutient la société Woodstone, l’habillage en pierres apparentes n’est pas la contrepartie de l’empiètement des IPN et du béton dont il n’est pas fait mention, mais du préjudice de jouissance subi par la copropriété du fait des nuisances occasionnés par les travaux.

En effet, le problème de l’implantation des IPN et du béton, dont le plan de recollement montre que deux profilés métalliques empiètent de plusieurs centimètres sur la propriété Val Village, a été résolu par la mise en 'uvre par l’entreprise SGC d’une mesure corrective en arasant et découpant ces profilés métalliques sur une hauteur de 80 cm sous terre (comptes rendus de chantier 13, 14 et 15).

En tout état de cause, la société Woodstone, ne produit aucun justificatif du coût du revêtement pierres dont elle réclame le paiement.

Sur les poussières, le nettoyage des abords et la reprise des zones dégradées

Par courrier du 25 juillet 2016, le maître d''uvre demandait à la SAS SGC de procéder immédiatement et dès que nécessaire au nettoyage de la poussière de béton déposée sur une grande partie du terrain, sur la façade et sur les terrasses des copropriétés voisines.

Puis le 1er septembre 2016, il mettait en demeure l’entreprise de procéder au nettoyage et aux reprises visées dans les comptes-rendus de chantier.

En effet, ainsi qu’il résulte des comptes rendus de chantier il a été demandé, à de multiples reprise à la société SCG :

' De protéger ses zones d’intervention (comptes rendus 2, 3, 4, 6, 7, 8,9, 11)

' De maintenir la bâche en place (comptes rendus 9, 10, 11, 12)

' D’arroser pour limiter la poussière (comptes rendus 10, 11)

' De nettoyer à l’avancement (comptes rendus 9, 10, 11, 12, 13)

' De remettre en état le terrain, nettoyer les zones de travail (comptes rendus 16, 17, 18)

' De nettoyer le terrain et le parking Val village (comptes rendus 8, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, […]

' De nettoyer la façade et les baies chez les voisins (compte- rendus 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29). Il était précisé dans ce dernier compte rendu du 7 décembre 2016 que le nettoyage avait été fait pour le compte de l’entreprise.

' De reprendre les zones dégradées, espaces verts, parkings/ enrobés (comptes rendus 17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24,25, 26, 27, 28, 29, 30, 31). Il était précisé dans ce dernier compte rendu du 22 décembre 2016 que le traitement était effectué pour le compte de l’entreprise.

La société Woodstone, au vu de ces éléments, est donc fondée à obtenir le paiement par la société SGC des dépenses qu’elle a assumées pour le compte de cette entreprise au titre du nettoyage et de la reprise des zones dégradées.

Elle fait état d’une facture Ecogam d’un montant de 6 000 euros pour remise en état espace vert, fissure, nettoyage complémentaires sur bâtiments et vise sa pièce 12 bis.

Il s’agit d’ une facture d’Ecogam en date du 15 mai 2017 qui concerne des prestations diverses telles que châssis, peinture, rayonnage, tirage copie et affichage plan etc… sans aucun rapport avec le nettoyage des bâtiments et la remise en état des espaces verts. Elle ne justifie donc pas de la dépense alléguée.

Il est mentionné sur cette même facture un constat d’huissier « empiètement terrain » pour 267 euros, sans autre précision, dont la société Woodstone demande, par ailleurs, le remboursement, constat qui n’est pas produit et dont rien n’indique qu’il concerne la société SGC.

La société Woodstone fait ensuite état du balayage complémentaire effectué par la société Construction Savoyarde pour un montant de 1590 euros et vise sa pièce 12 ter.

Il s’agit de la situation n°1 du compte prorata tenu par cette dernière société comprenant l’état des dépenses du 24 mai 2016 au 31 décembre 2016.

Au paragraphe « Nettoyage de chantier », sont mentionnées des dépenses de camion balayeuse aspiratrice dans les parkings pour un coût de 159 euros et non 1 590 euros comme réclamé.

En tout état de cause, s’agissant d’un compte prorata, donc d’un compte inter entreprises qui ne concerne pas le maître de l’ouvrage, ce dernier n’est pas fondé à solliciter le paiement de sommes mentionnées sur celui-ci.

Ainsi faute par la société Woodstone de justifier des dépenses exposées pour le nettoyage et la reprise des zones dégradées, sa demande ne peut qu’être rejetée.

Dès lors, au vu de l’ensemble de ces éléments le jugement déféré qui a rejeté les demandes reconventionnelles de la société Woodstone, sera, par substitution de motifs, confirmé.

3 ' Sur les demandes accessoires

Ainsi que l’ont relevé les premiers juges la société SGC ne justifiant pas d’un préjudice autre que le retard compensé par les intérêts qui lui sont alloués, il y a lieu de confirmer le jugement qui a rejeté sa demande indemnitaire.

En revanche, l’équité commande de faire application au profit de cette dernière des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société Woodstone à payer à la SAS SGC Travaux Spéciaux la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Woodstone aux dépens d’appel.

Ainsi prononcé publiquement le 02 juin 2020 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Michel FICAGNA, Président et Sylvie LAVAL, Greffier.

Le Greffier, Le Président,

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code civil
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Cour d'appel de Chambéry, 1ère chambre, 2 juin 2020, n° 18/01457