Cour d'appel de Colmar, Chambre 4 sb, 22 avril 2010, n° 08/01357

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Colmar, ch. 4 sb, 22 avr. 2010, n° 08/01357
Juridiction : Cour d'appel de Colmar
Numéro(s) : 08/01357
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Haut-Rhin, 12 décembre 2007
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

JPS/DG

MINUTE N° 506/2010

NOTIFICATION :

Copie aux parties

— DRASS

Clause exécutoire aux :

— avocats

— parties non représentées

Le

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

CHAMBRE SOCIALE – SECTION SB

ARRET DU 22 Avril 2010

Numéro d’inscription au répertoire général : 4 SB 08/01357

Décision déférée à la Cour : 13 Décembre 2007 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du HAUT-RHIN

APPELANTE :

SA Z, représentée par son Président la SARL YOUL, elle-même représentée par son gérant M. Y Z

6 rue Alfred Z

XXX

Représentée par Maître Nicolas JANDER, avocat au barreau de MULHOUSE

INTIME ET APPELANT INCIDENT :

Monsieur A X, non comparant

XXX

XXX

Représenté par Maître Ange BUJOLI, avocat au barreau de MULHOUSE substitué par Maître SPIESER, avocat au barreau de COLMAR

INTIMEE :

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU HAUT-RHIN venant aux droits de la C.P.A.M. de MULHOUSE, prise en la personne de son Directeur, non comparant

XXX

XXX

Représentée par Madame NEANT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 Juin 2009, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant M. SCHILLI, Conseiller faisant fonction de Président et M. DIE, Conseiller, chargés d’instruire l’affaire.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. VALLENS, Président de Chambre

M. SCHILLI, Conseiller

M. DIE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme DETTWEILER, faisant fonction

ARRET :

— contradictoire

— prononcé par mise à disposition au greffe par Jean-Pierre SCHILLI, conseiller faisant fonction de président

— signé par Jean-Pierre SCHILLI, conseiller faisant fonction de président et Doris DETTWEILER, f.f. de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * *

M. X A engagé à compter du 1er août 1995 par la société Z en qualité d’ouvrier spécialisé, a été licencié pour faute grave le 29 septembre 2004.

Il lui était reproché des actes de harcèlement sexuel envers le personnel féminin de la société.

Après l’entretien préalable de licenciement du 14 septembre 2004 il a été hospitalisé du 16 au 29 septembre 2004 sur demande du Dr B C pour 'réaction anxieuse majeure'.

M. X a adressé à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Mulhouse le 20 octobre 2004 une déclaration d’accident du travail.

L’employeur n’a pas émis de réserves.

La Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Mulhouse a, par courrier du 14 janvier 2005, informé M. X de son refus de prendre en charge l’accident du 14 septembre 2004 au titre de la législation professionnelle.

La commission de recours amiable de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Mulhouse a confirmé ce refus de prise en charge.

M. X a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale du Haut-Rhin d’un recours à l’encontre de cette décision.

Par jugement rendu le 22 février 2007, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Haut-Rhin a ordonné la mise en cause de l’employeur, la société Z et a enjoint à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Mulhouse de produire des justificatifs permettant au Tribunal de vérifier qu’elle s’est bien conformé aux dispositions de l’article R.441-14 du code de la sécurité sociale.

Par jugement rendu le 13 décembre 2007, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Haut-Rhin a ordonné une expertise médicale de M. X sur protocole aux fins, notamment, de dire si les lésions psychiques constatées le 16 septembre 2004 sont en rapport avec l’accident du même jour.

Ce jugement a été notifié à la société Z le 25 janvier 2008, laquelle en a interjeté appel le 22 février 2008.

M; X a interjeté appel incident le 25 avril 2008.

Se référant oralement à ses conclusions visées le 25 février 2008, la société Z SAS demande que la Cour infirme le jugement déféré, déboute M. X de l’intégralité de ses fins, moyens et conclusions, et le condamne au paiement de la somme de 850 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de son appel, elle fait valoir qu’un entretien préalable constitue un des droits de tout salarié, dont l’employeur envisage le licenciement et qu’il ne saurait être constitutif d’un accident du travail.

Elle précise que l’accident se caractérise par la soudaineté de la lésion apparaissant au temps et sur le lieu du travail.

La soudaineté de la lésion permet de lui donner une date certaine qui fait présumer l’intervention d’un facteur traumatisant lié au travail.

D’autre part M. X ne peut à la fois soutenir que la dépression nerveuse est la conséquence d’un accident du travail, nécessairement soudain, et la conséquence d’agissements répétés constitutifs du harcèlement moral dont il s’estime victime et qu’il invoque devant le Conseil de Prud’hommes.

M. X n’a formé une déclaration d’accident du travail que le 20 octobre 2004, soit plus d’un mois après l’entretien préalable du 14 septembre 2004.

La seule affirmation de la victime étayée par un certificat médical ne suffit pas à établir le caractère professionnel de l’accident.

Se référant oralement à ses conclusions visées le 15 janvier 2009, M. A X demande que la Cour infirme le jugement déféré et reconnaisse le caractère professionnel de l’accident dont il a été victime le 14 septembre 2004 et condamne la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Mulhouse à lui verser la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de son appel, il fait valoir que la Caisse n’a procédé à aucune instruction complémentaire du dossier pendant le délai légal, et que le tribunal des affaires de sécurité sociale ne peut faire diligenter l’enquête que la Caisse Primaire d’Assurance Maladie n’a pas diligenté dans le délai légal.

En conséquence l’accident du travail dont il a été victime doit être reconnu.

Le rapport d’enquête émis par l’agent assermenté de la Caisse n’a été contesté par aucune des parties et aucun avis médical contraire n’est intervenu pendant le délai légal d’instruction.

Sur le fond, la décision de rejet est en contradiction totale avec les éléments mis en évidence par l’enquête effectuée par un agent assermenté de la Caisse.

L’accident s’est produit à la date et à l’heure de l’entretien préalable de licenciement, ce qui prouve bien que l’hospitalisation pour état anxieux et dépressif est directement liée au licenciement pour faute grave de M. X.

Cette situation correspond à celle d’une dépression nerveuse apparue soudainement à la suite d’un entretien du salarié avec sa hiérarchie qui, selon la jurisprudence de la Cour de Cassation, constitue en accident du travail (Cass.civi.2è – 1/7/2003).

Il produit des éléments objectifs permettant de dire que la dépression nerveuse survenue après son entretien préalable constitue un accident du travail.

Se référant oralement à ses conclusions visées le 14 octobre 2008, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de Mulhouse demande que la Cour se prononce sur la demande d’expertise et confirme le jugement déféré en ce qu’il déclare que le caractère contradictoire de la procédure n’a pas été méconnu par la Caisse.

Elle s’en remet à la sagesse de la Cour quant à la mise en oeuvre de l’expertise médicale.

En ce qui concerne le caractère contradictoire de la procédure, le délai complémentaire était nécessité par la mise en oeuvre d’une enquête.

M. X a été entendu par l’agent enquêteur le 17 novembre 2004.

L’enquête s’est déroulée en partie après la fin du délai de 30 jours, imparti par l’article R.441-10 du code de la sécurité sociale.

La procédure d’instruction ne prévoit pas que l’assuré soit convoqué par le médecin-conseil dans un quelconque délai.

Elle estime avoir respecté la procédure d’instruction prévue par les article R.441-10 à R.441-16 du code de la sécurité sociale.

SUR QUOI, LA COUR :

Vu l’ensemble de la procédure et les pièces ;

Vu l’avis d’audience à la DRASS ;

I. Sur la régularité de la procédure d’instruction de la demande de reconnaissance d’accident du travail.

L’article R.441-10 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction issue du Décret n° 99-323 du 27 avril 1999 dispose que la Caisse dispose d’un délai de 30 jours à compter de la date à laquelle elle a eu connaissance de la déclaration de l’accident pour statuer sur le caractère professionnel de l’accident.

L’article R.441-14 du même code dans sa rédaction issue du Décret susvisé dispose que lorsqu’il y a nécessité d’examen ou d’enquête complémentaire, la Caisse doit en informer la victime ou les ayants droit et l’employeur avant l’expiration du délai prévu au premier alinéa de l’article R.441-10 par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

A l’expiration d’un nouveau délai qui ne peut excéder deux mois en matière d’accident du travail à compter de la date de cette notification et en l’absence de décision de la Caisse le caractère professionnel de l’accident est reconnu.

En l’espèce, la Caisse a reçu la déclaration d’accident du travail le 21 octobre 2004 et a informé M. X de la nécessité de recourir au délai complémentaire d’instruction par lettre recommandée dont l’avis de réception fut signé le 16 novembre 2004.

L’enquête s’est déroulée du 25 octobre 2004 au 7 janvier 2005.

M. X a été entendu par l’agent enquêteur le 17 novembre 2004.

Le 17 novembre 2004, également, l’agent enquêteur s’est rendu à la gendarmerie d’Altkirch où il avait été établi un rapport suite au dépôt de plainte de M. X pour dénonciation calomnieuse et licenciement abusif.

Le rapport ayant été adressé au Tribunal de grande instance de Mulhouse l’agent enquêteur s’y est rendu le 5 janvier 2005 afin de pouvoir le consulter.

L’enquête complémentaire s’est déroulée en partie après la fin du délai de trente jours imparti par l’article R.441-10 du code de la sécurité sociale .

La mise en oeuvre du délai complémentaire était nécessaire.

La procédure d’instruction ne prévoit pas que l’assuré soit convoqué par le médecin-conseil dans un quelconque délai.

La Caisse a parfaitement respecté la procédure d’instruction prévue par les articles R.441-10 et suivants du code de la sécurité sociale .

II. Sur la demande de reconnaissance d’un accident au travail.

L’article L.411-1 du code de la sécurité sociale dispose qu’est considéré comme accident du travail quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant à quelque titre que ce soit ou en quelque lieu que ce soit pour un ou plusieurs employeurs ou chef d’entreprise.

Ce texte édicte une présomption d’imputabilité de l’accident d’un salarié dont la lésion est apparue au lieu et au temps du travail.

Il est également de jurisprudence constante que la preuve que l’accident a eu lieu au temps et sur le lieu de travail, appartient à l’assuré et que la présomption d’imputabilité ne s’applique pas lorsque la lésion a été déclarée tardivement.

Le salarié doit établir la réalité d’un fait précis survenu soudainement au cours du travail et ayant causé un traumatisme.

La preuve de la matérialité de l’accident ainsi mise à la charge du salarié ne peut être établie sur la base des seules déclarations de l’intéressé reprises ou non par des tiers.

M. X fait valoir que sa dépression nerveuse dont il demande la prise en charge au titre de la législation professionnelle serait apparue soudainement lors de l’entretien préalable à son licenciement qui a eu lieu le 14 septembre 2004.

Mais la survenance d’une telle lésion au temps et au lieu du travail n’est pas corroborée par des éléments objectifs.

La déclaration d’accident du travail a été faite le 20 octobre 2004, soit plus d’un mois après les faits allégués.

Les affirmations de M. X ne sont corroborées par aucun témoignage précis sur les faits du 14 septembre 2004.

Aucun élément du dossier ne vient établir une corrélation entre l’entretien du 14 septembre 2004 et l’hospitalisation de M. X en milieu psychiatrique du 16 au 28 septembre 2004.

Les certificats médicaux établis les 4 Octobre 2004, 4 janvier 2005 et 7 juin 2006, qui ne font que reprendre les déclarations de M. X sont insuffisants à rapporter la preuve du lien de causalité entre la dépression nerveuse de M. X et l’entretien préalable du 14 septembre 2004.

C’est donc à tort que les premiers juges ont ordonné une expertise médicale de M. X.

Il convient d’infirmer le jugement déféré et de dire qu’il n’y a pas lieu d’ordonner l’expertise médicale.

P A R C E S M O T I F S

LA COUR, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en dernier ressort après en avoir délibéré conformément à la loi,

En la forme,

Déclare les appels réguliers et recevables ;

Au fond,

Infirme le jugement déféré ;

Statuant à nouveau :

Dit n’y avoir lieu d’ordonner une expertise médicale de M. X ;

Déboute M. X de sa demande de reconnaissance d’accident du travail ;

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rappelle que la procédure est gratuite et sans frais.

Et le présent arrêt a été signé par Jean-Pierre SCHILLI, Conseiller faisant fonction de Président, et Doris DETTWEILER, f.f. de Greffier.

Le Greffier, Le Président,

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