Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 15 mai 2019, n° 17/01246

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Colmar, ch. 1 a, 15 mai 2019, n° 17/01246
Juridiction : Cour d'appel de Colmar
Numéro(s) : 17/01246
Décision précédente : Tribunal de grande instance, 17 novembre 2016
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

PR/SD

MINUTE N°

Copie exécutoire à

—  Me Dominique D’AMBRA

— la SCP CAHN G./CAHN T./BORGHI

Le 15.05.2019

Le Greffier

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION A

ARRET DU 15 Mai 2019

Numéro d’inscription au répertoire général : 1 A N° RG 17/01246 – N° Portalis DBVW-V-B7B-GNI7

Décision déférée à la Cour : 18 Novembre 2016 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE A COMPETENCE COMMERCIALE DE STRASBOURG

APPELANTE – INTIMEE INCIDEMMENT :

SARL ORDI PME

prise en la personne de son représentant légal

[…]

[…]

Représentée par Me Dominique D’AMBRA, avocat à la Cour

Avocat plaidant : Me WEYGANG, avocat à STRASBOURG

INTIMEE – APPELANTE INCIDEMMENT :

SARL Y EQUIPEMENT

prise en la personne de son représentant légal

[…]

[…]

Représentée par Me Marion BORGHI de la SCP CAHN G./CAHN T./BORGHI, avocate à la Cour

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 11 Mars 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme PANETTA, Présidente de chambre

M. ROUBLOT, Conseiller, entendu en son rapport

Mme HARRIVELLE, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme B-C

ARRET :

— Contradictoire

— rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

— signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Christiane MUNCH-SCHEBACHER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La SARL Ordi PME est intervenue auprès de la SARL Y équipement, en vertu de devis signés le 18 septembre 2012, aux fins de :

— fournir, installer et déployer, à échéance prévue en novembre 2012, un logiciel de gestion, et ce pour un montant de 22 383,96 euros TTC,

— assurer la formation des salariés sur deux sites, initialement en décembre 2012, et ce pour un montant de 5 920,20 euros TTC,

Sur requête en injonction de payer de la SARL Ordi PME à l’encontre de la SARL Y équipement, réclamant le paiement de factures à hauteur de la somme de 5 718,44 euros, correspondant à la formation finalement dispensée en avril 2013, outre les frais, le tribunal d’instance de Schiltigheim a, par ordonnance en date du 28 avril 2014, fait droit à cette demande et condamné le défendeur aux dépens.

Par jugement du 16 juillet 2015, le tribunal d’instance de Schiltigheim, saisi d’une opposition formée par la SARL Y équipement à l’encontre de l’ordonnance d’injonction de payer, s’est déclaré incompétent au profit de la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Strasbourg.

Par jugement rendu le 18 décembre 2016 le tribunal de grande instance de Strasbourg a :

— déclaré l’opposition à l’ordonnance d’injonction de payer entreprise recevable en la forme,

— constaté la mise à néant de l’ordonnance d’injonction de payer entreprise n° 6744 7/21/l 4/000299 rendue par le tribunal d’instance de Schiltigheim,

statuant å nouveau au fond,

— débouté la SARL Ordi PME de ses fins prétentions et moyens,

Reconventionnellement,

— condamné la SARL Ordi PME à payer à la SARL Y équipement la somme de 2 922,03 euros au titre de son préjudice 'nancier,

— condamné la SARL Ordi PME à payer à la SARL Y équipement la somme de 10 000 euros (dix mille euros) à titre de dommages et intérêts,

— condamné la SARL Ordi PME aux entiers frais et dépens,

— condamné la SARL Ordi PME à payer à la SARL Y équipement la somme de 1000 euros au titre de 1'article 700 du code de procédure civile,

— ordonné l’exécution provisoire du jugement,

— débouté les parties pour le surplus.

Le premier juge a retenu que la SARL Y équipement était bien fondée à soulever l’exception d’inexécution qu’elle démontrait, dès lors que, au-delà du retard pris dans l’installation du logiciel et son paramétrage, que la SARL Ordi PME imputait à la corruption des données à transmettre dans le nouveau logiciel, des dysfonctionnements étaient apparus après l’installation du logiciel, démontrés par la réalisation de deux audits, et que ces circonstances étaient imputables à la SARL Ordi PME, qui d’une part, en application du cahier des charges, devait analyser la qualité des données à transférer et proposer un planning adéquat qu’elle devait respecter, et d’autre part aurait dû anticiper, en vertu de son obligation de conseil, la nécessité qu’elle a eu de faire intervenir l’un de ses sous-traitants pour régler des problèmes techniques comptables.

Il a également relevé qu’il n’était pas démontré que l’intervention des salariés, qui avaient reçu une formation hasardeuse ou celle des prestataires extérieurs sollicités, qui avaient permis de régler les difficultés intervenues, seraient à l’origine des reproches faits à la SARL Ordi PME. Il a également considéré que les audits réalisés, bien que non contradictoirement, avaient été soumis à la contradiction et revêtaient une valeur probante.

S’agissant des préjudices invoqués, il a mis en compte les frais liés à l’audit de la société CRIC et à l’intervention du sous-traitant Solutis durant la période du contrat de maintenance liant la SARL Y équipement à la SARL Ordi PME, tout en déduisant le montant de la formation dont la SARL Y équipement avait été remboursé par l’organisme AFEDIM. Il a également retenu un préjudice lié à la désorganisation de l’entreprise. Il a en revanche écarté la demande en remboursement des montants payés par la SARL Ordi PME à la SARL Y équipement, estimant que cela reviendrait à faire payer à la SARL Ordi PME le prix d’une installation informatique dont la SARL Y équipement a eu, malgré des difficultés, l’usage, outre celui d’une nouvelle installation informatique, sans compter le remboursement reconnu de la somme exposée au titre de la formation.

La SARL Ordi PME a interjeté appel de cette décision par déclaration déposée le 16 mars 2017.

Dans ses dernières conclusions en date du 20 avril 2018, elle demande à la cour de :

— la déclarer recevable en son appel,

— l’y dire bien fondée,

En conséquence,

— confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande reconventionnelle de la SARL Y équipement de remboursement de la facture n°FC 15 086 de 22 383,50 euros TTC.

— infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande d’Ordi PME de condamnation de la SARL Y équipement à régler la facture n°FC 15 874 de 5.718,45 euros TTC.

— infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a conclu que la SARL Y équipement était fondée à se prévaloir de l’exception d’inexécution,

— infirmer le jugement entrepris en ce qu’il n’a pas relevé les manquements de la SARL Y équipement à ses obligations contractuelles.

— infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société Ordi PME à rembourser plusieurs factures de prestataires auxquels la SARL Y équipement a fait appel pour pallier les prétendues inexécutions d’Ordi PME.

Et statuant à nouveau de :

— déclarer les demandes reconventionnelles de la SARL Y équipement irrecevables et en tout cas mal fondées,

— la débouter en ses 'ns, moyens et conclusions,

En conséquence,

— écarter des débats les annexes 7, 24, 25, 26 et 27 de la SARL Y équipement, nul ne pouvant se constituer de preuves à soi-même,

— donner acte à la SARL Y équipement de son aveu judiciaire contenu dans ses conclusions d’intimée du 23 juin 2017 en page 2 relatif à l’installation par la société Ordi PME du serveur Windows en novembre 2012,

— constater, au besoin dire et juger que la société Ordi PME a réalisé les prestations objet des factures n° FC 15 086 (mise à disposition et installation du logiciel EBP, des licences Windows, du disque dur externe notamment) et FC 15 874 (formation des salariés),

— constater, au besoin dire et juger que la SARL Y équipement manqué à ses obligations d’information et de collaboration vis-à-vis de la SARL Ordi PME,

— condamner l’intimée à lui payer la facture n° 15874 d’un montant de 5 718,45 euros TTC, majorée au titre de la clause pénale, soit 1,5 fois le taux de l’intérêt légal,

— condamner la SARL Y équipement aux dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’au paiement à la concluante d’une indemnité de procédure de 6 000 euros,

— déclarer la SARL Y équipement irrecevable et en tout cas mal fondée en son appel incident,

— en tout cas, condamner la SARL Y équipement aux dépens de première instance et d’appel, ainsi qu’au paiement à la concluante d’une indemnité de procédure de 8 000 euros.

Elle fait ainsi valoir avoir exécuté les obligations qui lui incombaient en installant le logiciel, contestant les attestations adverses et rappelant être intervenue comme simple installateur, alors même qu’il revenait à l’éditeur EBP ou à son sous-traitant la société Solutis de répondre aux demandes spécifiques de la SARL Y équipement correspondant à des fonctionnalités nouvelles du logiciel. Elle ajoute avoir également procédé à l’installation de plusieurs éléments informatiques dont la livraison n’a pas été contestée, ce qui exclut en tout état de cause tout remboursement de cette part de la prestation, la totalité de cette dernière ayant du reste été payée, ce qui atteste, selon elle, de l’exécution des prestations. Elle conteste en outre que le matériel se soit révélé inutilisable, et met en cause dans la survenance des dysfonctionnements l’utilisation du logiciel et les paramétrages liés aux données corrompues extraites de l’ancien logiciel de comptabilité de la SARL Y équipement.

Elle affirme également avoir dispensée l’action de formation dans les délais prévus par la convention de formation professionnelle, malgré des reports imputables à la SARL Y équipement, les reproches quant à son inadaptation lui apparaissant subjectifs, et partant infondés, d’autant que la SARL Y équipement s’était engagée à procéder au règlement de la facture correspondante et lui a confié d’autres commandes à l’issue de cette formation.

Elle reproche par ailleurs à la SARL Y équipement d’avoir manqué à l’obligation d’information et au devoir de collaboration qui lui incombait en tant que donneur d’ordre, en procédant à une mauvaise définition de ses besoins auprès de l’éditeur du logiciel, la société EBP, la conduisant ensuite à formuler, oralement et au fil de l’eau, de nouvelles demandes qui n’ont pu toutes être satisfaites et ce en l’absence de cahier des charges établi contradictoirement. Elle impute également à la SARL Y équipement les retards pris dans l’exécution de sa mission, du fait de demandes liées à l’absence de plusieurs salariés et de l’émission de nouvelles demandes, le retard pris dans l’installation du logiciel devant aussi s’expliquer par la corruption des données à transférer, malgré les avertissements donnés, et par l’intervention intempestive de salariés et prestataires dans la manipulation du logiciel, ainsi que de Windows, des pare-feu et de l’anti-virus.

Elle conteste encore être redevable du remboursement des factures des autres prestataires ou des frais d’embauche d’un intérimaire, relevant leur montant disproportionné par rapport à celui de sa propre intervention, et réfutant tout lien entre ces prestations et l’installation du logiciel EBP ainsi que les dysfonctionnements allégués.

Elle rejette enfin toute désorganisation du système, la SARL Y équipement ne démontrant pas avoir affecté exclusivement deux salariés à la résolution des problèmes allégués, et ce alors que l’installation d’un nouveau logiciel impliquait nécessairement un investissement en temps des salariés, outre que la société, qui s’est appuyée jusqu’en juin 2013, sur son ancien logiciel de gestion, avant de bénéficier d’une assistance téléphonique dans la limite des missions d’installateur de la concluante, qui a également procédé à des sauvegardes quotidiennes des données, a connu une progression de son chiffre d’affaires entre 2010 et 2013. Elle qualifie à ce sujet de révélatrices les déclarations faites sur sommation interpellative par l’ancien salarié M. X, qui se trouvait dans l’entreprise à la période litigieuse, ces déclarations étant corroborées par des éléments attestant de ce que le logiciel était opérationnel.

La SARL Y équipement s’est constituée intimée le 23 mars 2017.

Dans ses dernières écritures déposées le 23 janvier 2018, elle conclut à titre principal au rejet de l’appel adverse, et à titre d’appel incident, demande à la cour, statuant à nouveau, de

condamner la SARL Ordi PME à lui payer la somme de 19 833,77 euros au titre des sommes réglées à la suite de l’inexécution par la SARL Ordi PME de ses obligations contractuelles, ainsi que la condamnation de cette dernière à lui payer la somme de 22 393,93 euros au titre des sommes payées sans contrepartie.

À titre subsidiaire, et si l’appel incident devait être rejeté, elle entend voir confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Elle conclut en tout état de cause à la confirmation du jugement en ce qu’il a condamné la SARL Ordi PME à lui payer 10 000 euros à titre de dommages-intérêts, et sollicite en outre la condamnation de la SARL Ordi PME aux dépens de l’appel, ainsi qu’au paiement à son profit d’une indemnité de procédure de 5 000 euros.

Elle expose ainsi reprocher à la SARL Ordi PME d’avoir pris du retard dans l’installation du logiciel et de son paramétrage, et d’avoir été dans l’incapacité d’assurer comme prévu les formations en décembre 2012, non du fait de l’absence de salariés mais en raison de son incapacité d’expliquer le fonctionnement du système, ce qui a conduit la concluante à solliciter directement la société éditrice du logiciel, EBP, et son sous-traitant Solutis pour les dernières formations. Elle affirme en outre avoir été finalement contrainte, en raison des dysfonctionnements de la nouvelle installation, bloquant son activité notamment en rendant impossible la réalisation de pièces commerciales, de recourir directement à la société EBP puis, le contrat de maintenance ayant été dénoncé par l’appelante, à passer commande auprès d’une société CRIC dont l’audit, qu’elle n’a eu d’autre choix que de commander préalablement à la commande, ainsi que celui de la société Eiffage, ont révélé de multiples défauts de conformité de l’infrastructure affectant notamment Windows, les pare-feu et anti-virus, l’emplacement du serveur ou l’archivage des médias de sauvegarde, outre des problèmes de sécurité des données, ce qui l’a contrainte à faire installer un nouveau système informatique. Elle invoque les attestations de plusieurs de ses salariés quant aux dysfonctionnements survenus et à leur gravité, tout en critiquant les déclarations de M. X, dont se prévaut la partie adverse, qu’elle qualifie de peu probantes, tout en précisant qu’il n’était pas particulièrement à même de donner un avis critique sur les prestations informatiques eu égard à ses fonctions et à son absence durant une partie de la période de tentative de déploiement du logiciel.

Elle réfute par ailleurs que son personnel ait perturbé le système, les manipulations invoquées par l’appelante étant intervenues dans un contexte de dysfonctionnement total préexistant, rien n’indiquant qu’elles n’aient pas été faites avec son assistance, sachant que le personnel ne pouvait accéder qu’à des fonctions adossées au logiciel.

Elle estime donc être en droit de solliciter le remboursement des factures réglées à la SARL Ordi PME en l’absence de prestation réalisée et d’ailleurs de toute réception expresse ou tacite du marché, sachant que même le matériel effectivement installé s’est révélé inutilisable. Elle ajoute avoir exprimé en temps utile son mécontentement, bien qu’ayant réglé une facture par égard pour les difficultés financières alors invoquées par l’appelante et avant de pouvoir vérifier le fonctionnement effectif de l’installation informatique.

S’agissant de la nature et de l’étendue de l’obligation de l’appelante, elle fait valoir que le paramétrage était inclus dans la mission de cette société, liée à elle par un contrat de maintenance informatique, avec un devis et un cahier des charges, joint à ce devis et dont la valeur n’a jamais été contestée devant le premier juge, prévoyant la mise en place d’un système de données, l’importation des données clients vers la nouvelle infrastructure, laquelle nécessairement devait être faite de manière opérationnelle en adaptant le logiciel aux données informatiques contenues dans l’ancien logiciel, et les mises à jour du logiciel. Elle précise qu’elle entendait acheter un service « clé en main » à défaut de compétences internes

spécialisées, et qu’elle n’aurait pas passé commande à un simple installateur. Elle conteste par ailleurs avoir sollicité la société Solutis en raison des défaillances de l’appelante et non au titre de demandes nouvelles n’entrant pas dans le champ contractuel. Elle considère également que la société Ordi PME était débitrice à son égard d’une obligation de conseil en tant que professionnel de l’informatique, qui impliquait de lui proposer une installation conforme à la configuration en place et à ses besoins qu’elle connaissait pour être déjà le prestataire informatique de la concluante, et à s’inquiéter, le cas échéant, du défaut de communication du cahier des charges qu’elle invoque et où il lui appartenait d’indiquer les conditions du paramétrage du transfert des données, qui n’étaient par ailleurs pas corrompues, et ce après vérification préalable de la compatibilité de ces données avec le système proposé.

Elle s’estime bien fondée à se voir indemniser du coût financier des désordres qu’elle a dû supporter et qui ont requis l’intervention d’autres sociétés prestataires, lesquelles ont facturé ces interventions en proportion des dysfonctionnements provoqués par celle de la société Ordi PME, pour remettre en état de fonctionnement normal l’installation, sans réaliser de prestations d’amélioration, ou pour assurer des formations. Elle invoque également un dysfonctionnement interne, compte tenu de l’appel qu’elle a dû faire à un intérimaire en raison du temps perdu à cause du dysfonctionnement du logiciel, ainsi que de l’impact de cette perte de temps sur son activité.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens de chacune des parties, il conviendra de se référer à leurs dernières conclusions respectives.

La clôture de la procédure a été prononcée le 9 janvier 2019 et l’affaire renvoyée à l’audience de plaidoirie du 11 mars 2019 puis mise en délibéré à la date du 15 mai 2019, par mise à disposition au greffe.

MOTIFS :

Sur les demandes principale et reconventionnelles :

S’agissant des demandes de la partie appelante tendant à voir écarter certaines pièces des débats, il convient d’observer que sont en cause, d’une part une pièce faisant la synthèse d’éléments censément contenus dans d’autres pièces, et d’autre part d’attestations établies par des salariés de l’appelante, ce qui ne saurait suffire, au regard de la nature du litige, à justifier qu’elles soient écartées, étant au demeurant observé que l’appelante produit elle-même des attestations de ses gérants et de l’un de ses salariés.

Sur le fond, il résulte tout d’abord des éléments versés par les parties que celles-ci ont souscrit une prestation prévue par devis n° DV 6568 en date du 18 septembre 2012 portant la mention « bon pour accord » accompagnée d’une signature et du cachet de la société Y équipement, et de la précision 'financement par crédit bail Crédit mutuel'. Figurent au devis une liste de matériels dont quatre serveurs, une carte-mère, un disque dur, un graveur, notamment, ainsi que les logiciels 'EBP gestion commerciale’ pour 20 postes, et 'EBP comptabilité Open line’ pour 2 postes, outre facturation d’une mise à jour annuelle de ces logiciels. Le devis renvoie par ailleurs à un cahier des charges. À ce titre, si la partie intimée verse aux débats un document qu’elle présente comme ce cahier des charges, outre une version sur laquelle elle recense les points non réalisés, il convient de relever que la pièce produite, qui s’apparente davantage à un document de travail peu formalisé, n’est revêtu d’aucune signature ou élément permettant d’établir qu’il s’agit bien du cahier des charges en cause, ou en tout cas que ce document aurait été établi de manière contradictoire.

Est en outre prévue aux termes du devis n° DV 6574 du même jour, également revêtu de la mention 'bon pour accord', une prestation de formation 'EBP Open line 5 jours’ avec 2 à 3

formateurs pour 20 personnes, le devis renvoyant à un descriptif censément joint mais non produit, ainsi qu’à une convention de formation à transmettre au client, versée en revanche aux débats non signée, et qui renvoie notamment à une action de développement des compétences des stagiaires pour 14 personnes sur 5 jours et deux sites, Colmar et Schiltigheim, avec une durée d’exécution entre le 6 décembre 2012 et le 31 décembre 2013.

Enfin, il apparaît que les parties étaient également liées, à compter du 14 janvier 2013 par un contrat de maintenance, lequel a pris fin à l’échéance du 14 janvier 2014, après que la société prestataire a fait connaître à sa cliente, par courrier en date du 18 novembre 2013, qu’elle n’entendait pas renouveler ce contrat, en raison de l’impayé relatif à la facture litigieuse portant sur la prestation de formation. Quant aux prestations prévues par ce contrat, si aucun document contractuel y afférent n’est versé aux débats, il convient de relever qu’est produite une facture en date du 18 janvier 2013 faisant référence à un devis n° DV 6824 du 14 janvier 2013 et portant sur un contrat de maintenance du 1er janvier au 31 décembre 2013, les prestations facturées correspondant à une maintenance de PC facturée par poste, ainsi que la maintenance de deux serveurs et une prestation de maintenance 'exchange serveur'.

Cela étant précisé, il y a encore lieu de relever que, si aucune prestation de maintenance n’apparaît prévue relativement aux logiciels 'EBP', la société Ordi PME n’en était pas moins tenue de délivrer à sa cliente un logiciel conforme à ses attentes, et en tout état de cause en bon état de fonctionnement, outre qu’elle se devait, en vertu de son devoir de conseil, de s’informer sur les besoins de sa cliente et de lui indiquer les limites de sa prestation, en lui indiquant, au besoin, s’il était nécessaire pour elle de compléter les fonctionnalités proposées par la souscription d’un autre contrat avec elle-même ou un tiers. Dans ce contexte, si la cliente était tenue d’une obligation de collaboration de bonne foi, celle-ci n’impliquait pas pour autant qu’elle soit seule tenue de définir seule ses besoins alors même que, sans être totalement dépourvue de compétence en la matière, elle sollicitait un professionnel de l’informatique qui se devait d’initiative de s’enquérir des besoins en question.

Dans ces conditions, il convient d’observer que, s’agissant tout d’abord de la livraison et de la maintenance du matériel informatique, les audits réalisés par les sociétés CRIC et EIFFAGE ont mis en évidence de multiples dysfonctionnements, relatifs à la sécurité et à la configuration des postes de travail essentiellement, ainsi que des serveurs, dont l’insuffisance de la configuration matérielle est également critiquée, l’audit évoquant des non-conformités majeures. Si l’appelante met en cause le comportement des utilisateurs, ou l’intervention de tiers, il apparaît néanmoins, au vu des dysfonctionnements constatés et en l’absence d’éléments suffisant à établir la responsabilité du personnel de la société Y équipement, que la société Ordi PME a manqué à ses obligations, alors qu’il lui revenait, en tant que prestataire professionnel de l’informatique chargé de la maintenance d’un système informatique de surcroît implanté sur plusieurs sites communiquant entre eux, de faire preuve d’une vigilance particulière à la fois quant à la sécurité et quant à la solidité du système. Il convient encore de préciser, sur ce point, que si c’est la société Ordi PME qui a entendu mettre fin au contrat de maintenance dans les conditions évoquées ci-dessus, c’est préalablement à cette dénonciation, ainsi que l’a justement observé le premier juge, que la société Y équipement a sollicité l’intervention de la société CRIC en vue d’une reprise de maintenance, ce qui permet de conclure que, contrairement à ce que fait valoir l’appelante, elle n’apparaissait pas satisfaite des prestations livrées par cette dernière.

À cela s’ajoute, concernant les logiciels 'EBP', que, comme l’a également retenu à juste titre le premier juge, de multiples dysfonctionnements sont apparus après l’installation des logiciels. Au-delà des attestations précises et concordantes des salariés de la société Y équipement, la société Ordi PME reconnaît elle-même en substance la réalité de dysfonctionnements, mettant cependant en cause la corruption des données du logiciel CIEL précédemment utilisé par sa cliente et les exigences de cette dernière à laquelle elle reproche

de n’avoir pas correctement défini ses besoins à la commande. Il doit néanmoins être retenu, au regard des précisions qui ont été apportées précédemment sur le cadre de l’intervention de la société Ordi PME et notamment l’étendue de ses obligations, qu’il appartenait à cette dernière en sa qualité de professionnel, de s’assurer de la mise en place d’un logiciel en bon état de marche et de la mise à disposition de la société Y équipement des prestations adaptées, notamment en matière comptable, le premier juge ayant à cet égard justement relevé que le recours à la société Solusis aurait pu être prévu dès le devis, de même qu’il a à bon droit retenu qu’il appartenait au prestataire d’assurer le transfert des données client depuis le logiciel d’origine, en s’assurant de leur qualité au besoin par une analyse préalable. Du reste, l’assistance apportée par la société Ordi PME à sa cliente après l’installation du logiciel et dont témoignent notamment les multiples échanges de courriels entre le gérant de la société Ordi PME et le responsable de la société Y équipement, voire certains salariés, atteste de la conception non restrictive qu’avait la société prestataire de son intervention, outre qu’elle se trouvait également en copie des échanges électroniques de sa cliente avec le service d’assistance EBP. Dans ces conditions, il apparaît que la société Ordi PME est en cause dans les retards pris dans la mise en place et le paramétrage des logiciels « EBP ». Quant aux conséquences de ces retards, la société Ordi PME invoque l’absence d’impact sur la santé économique de la société Y équipement, versant notamment aux débats une attestation de l’expert-comptable de cette dernière indiquant que le chiffre d’affaires de la société n’a cessé de progresser entre 2010 et 2013. Cela étant, il n’en demeure pas moins que la société Y équipement a dû, ce qui est reconnu par les deux parties, poursuivre l’utilisation de son ancien logiciel CIEL au moins jusqu’en juin 2013 et solliciter l’intervention de la société Solusis pour, notamment, procéder au reparamétrage des données du logiciel, ce qui atteste de la réalité de dysfonctionnements qui n’ont pas permis de répondre aux attentes qui étaient les siennes lors de la signature du devis.

S’agissant enfin des prestations de formation, il convient de relever que, certes, indépendamment même de la convention de formation, non signée, qui prescrivait un délai d’intervention au plus tard au 31 décembre 2013, aucun délai d’intervention particulier n’était requis à la charge de la société Ordi PME, et ce quand bien même des interventions avaient été envisagées initialement au mois de décembre 2012, et qu’au vu des feuilles d’émargement produites, l’action de formation a été délivrée en avril 2013. À ce titre, douze salariés différents ont été concernés, pour une durée maximale de quatre jours, un seul formateur, M. Z A, par ailleurs gérant de la société Ordi PME, étant mentionné. Par ailleurs, aucune observation n’a été formulée par la société Ordi PME en ce qui concerne la formation délivrée dans le cadre des réclamations faites quant au paiement de la facture correspondante. Pour autant, il apparaît au vu de ce qui précède que les conditions de délivrance de la formation n’étaient pas conformes aux conditions contractuelles, notamment en ce qui concerne le nombre de jours de formation et de formateurs dont il est justifié. Par ailleurs, les attestations de deux des salariés, confirmant que cette intervention n’aurait pas été appropriée, est confirmée par l’intervention à trois reprises en juin, juillet et septembre 2013 de la société Solutis au titre de la formation en entreprise pour une durée totale de cinq jours, correspondant précisément aux besoins sans qu’il ne soit établi, au vu du libellé des factures, que ces formations correspondraient à des nécessités spécifiques ou complémentaires.

Au vu de l’ensemble de ce qui précède, c’est à bon droit que le premier juge a retenu que la société Y équipement était bien fondée à soulever l’exception d’inexécution dont elle se prévalait.

Et compte tenu des conclusions auxquelles la cour est parvenue sur ce point, il y a lieu, concernant les demandes reconventionnelles formées par la société Y équipement, de retenir que, sur cette question, le premier juge a, par des motifs pertinents que la cour adopte, fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société Ordi PME de ses demandes et fait droit aux demandes reconventionnelles en dommages-intérêts de la société Y équipement, à hauteur de 2 922,03 euros au titre du préjudice financier et à hauteur de 10 000 euros au titre du préjudice lié à la désorganisation de l’entreprise.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :

La société Ordi PME succombant pour l’essentiel sera tenue des dépens de l’appel, par application de l’article 696 du code de procédure civile, outre confirmation du jugement déféré sur cette question.

L’équité commande en outre de mettre à la charge de la société Ordi PME une indemnité de procédure pour frais irrépétibles de 1 500 euros au profit de la société Y équipement, tout en disant n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile à l’encontre de cette dernière et en confirmant les dispositions du jugement déféré de ce chef.

P A R C E S M O T I F S

La Cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 18 novembre 2016 par le tribunal de grande instance de Strasbourg,

Y ajoutant,

Condamne la SARL Ordi PME aux dépens,

Condamne la SARL Ordi PME à payer à la SARL Y équipement la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la SARL Ordi PME.

Le Greffier : la Présidente :

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
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Cour d'appel de Colmar, Chambre 1 a, 15 mai 2019, n° 17/01246