Cour d'appel de Douai, Chambre 2 section 1, 29 novembre 2018, n° 18/03317

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, ch. 2 sect. 1, 29 nov. 2018, n° 18/03317
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 18/03317
Décision précédente : Tribunal de commerce de Lille, 9 octobre 2017, N° 2008/688
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

[…]

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 2 SECTION 1

ARRÊT DU 29/11/2018

***

N° de MINUTE : 18/

N° RG : 18/03317 – N° Portalis DBVT-V-B7C-RTYA

Jugement (N° 2008/688) rendu le 10 octobre 2017 par le tribunal de commerce de Lille Métropole

APPELANT

Me B Z ès qualités de liquidateur de M. C X, fonction à laquelle il a été désigné aux termes d’un jugement rendu par le tribunal de commerce de Lille le 17 novembre 2009

[…]

[…]

représenté et assisté par Me François Deleforge, de la SCP François Deleforge-Bernard Franchi, avocat au barreau de Douai

ayant pour conseil Me Jean-François Fenaert, avocat au barreau de Lille

INTIMÉS

M. C X

de nationalité française

[…]

[…]

assigné à jour fixe le 22 juin 2018 à l’étude

N’ayant pas constitué avocat

Mme D Y

de nationalité française

[…]

[…] assignée à jour fixe le 22 juin 2018 à l’étude

N’ayant pas constitué avocat

SA Procivis Nord anciennement dénommée crédit immobilier de Lille et des Pays du Nord au domicile élu chez Me Bernard, notaire, […]

ayant son […]

[…]

assignée à jour fixe le 21 juin 2018 à personne habilitée

N’ayant pas constitué avocat

[…]

ayant son […]

[…]

assigné à jour fixe le 26 juin 2018 à personne habilitée

N’ayant pas constitué avocat

DÉBATS à l’audience publique du 17 octobre 2018 tenue par Elisabeth Vercruysse magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS :E F

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

I-J K, président de chambre

Elisabeth Vercruysse, conseiller

Anne Molina, conseiller

ARRÊT RENDU PAR DÉFAUT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 29 novembre 2018 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par I-J K, président et G H, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS ET PROCÉDURE

Par jugement, du 30 décembre 2008, le tribunal de commerce de Lille a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de M. C X, et désigné Me B Z en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement, du 17 novembre 2009, le tribunal de commerce de Lille a converti la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire, et désigné Me B Z en qualité de liquidateur.

Il dépend de cette liquidation judiciaire un bien immobilier située […] à Cappele-en-Pévèle ([…], cadastrée […] pour une contenance de 19a 72 ca, constituant le domicile de M. X et de Mme Y épouse X.

Par ordonnance, du 6 avril 2017, le juge commissaire près le tribunal de commerce de Lille a ordonné qu’il soit procédé à la vente selon les formes de la saisie immobilière de l’immeuble visé ci-dessus.

Par déclaration déposée, au greffe du tribunal de commerce de Lille, le 21 avril 2017, M. X et Mme Y ont formé un recours à l’encontre de cette ordonnance.

Par jugement du 10 octobre 2017, le tribunal de commerce de Lille s’est déclaré incompétent pour juger du recours effectué contre l’ordonnance du juge-commissaire du 6 avril 2017.

Par déclaration du 11 juin 2018, Me Z a interjeté appel de la décision, en ce que le tribunal de commerce de Lille s’est déclaré incompétent pour juger du recours relatif à la cession d’actif d’objet de l’ordonnance du juge commissaire du 6 avril 2017.

Par ordonnance du 15 juin 2018, le premier président de la cour d’appel de Douai a autorisé Me Z à assigner à jour fixe M. X et Mme Y, la SA Procivis Nord et l’organisme SIE Lille Seclin.

PRÉTENTIONS

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 11 juin 2018, Me Z, en qualité de liquidateur de M. X, demande à la cour d’appel au visa de l’article R. 621-21 du code de commerce issu de l’article 25 du décret du 27 décembre 1985, de l’article L.661-5 du code de commerce, de l’article 562 alinéa 2 du code de procédure civile, de l’article R.621-21 du code de commerce, des articles L.642-18 et suivants du code de commerce, des articles R. 642-22 et suivants du code de commerce, de :

— juger nul pour excès de pouvoir le jugement du tribunal de commerce de Lille du 10 octobre 2017,

— et, statuant sur les mérites de l’opposition à l’ordonnance du juge commissaire près le tribunal de commerce de Lille du 6 avril 2017, la confirmer,

— dépens comme de droit.

Il soutient principalement :

sur la nullité du jugement

— que le jugement, du 10 octobre 2017, doit être jugé nul, pour excès de pouvoir, que le recours contre l’ordonnance du juge-commissaire du 6 avril 2017 devait être porté devant la cour d’appel, qu’il s’agit d’une fin de non-recevoir tirée du défaut de pouvoir juridictionnel du tribunal de commerce et non d’une difficulté liée à sa compétence, que le tribunal de commerce aurait donc du déclarer le recours irrecevable,

— que les textes applicables, à la procédure collective de M. X, doivent être déterminés en fonction de la date du jugement d’ouverture du redressement judiciaire, et non de celle du jugement

de liquidation judiciaire,

— que le recours, effectué par M. X et Mme Y, a été exercé selon les dispositions applicables et était donc recevable,

— que ce jugement est insusceptible de recours, mais étant constitutif d’un excès de pouvoir négatif il est susceptible d’un appel-nullité dans la mesure où les juges ont refusé d’exercer les compétences que la loi leur attribuait,

sur l’effet dévolutif de l’appel-nullité

— que l’ordonnance du 6 avril 2017 est justifiée au regard du montant du passif,

— que les solutions d’apurement du passif proposées par M. X se sont révélées être juridiquement irréalisables.

La cour d’appel renvoie, pour un plus ample exposé des faits et prétentions des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

En application de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les textes applicables au litige

La procédure collective de M. X a été ouverte le 30 décembre 2008. C’est donc cette date qui détermine la loi applicable au déroulement de cette procédure, y compris la liquidation judiciaire.

Ainsi, s’agissant plus précisément de la réalisation des actifs du débiteur en liquidation judiciaire, s’appliquent les textes antérieurs à l’entrée en vigueur du décret n°2009-160 du 12 février 2009.

En application de l’article R.621-21 du code de commerce, l’ordonnance du juge-commissaire rendue en matière de vente des biens du débiteur en cas de liquidation judiciaire était donc susceptible d’un recours devant le tribunal de commerce, dans les dix jours de sa notification.

En vertu de l’article L.661-5 du code de commerce les jugements statuant sur les recours formés contre les ordonnances du juge-commissaire rendues en application des articles L. 642-18 et L. 642-19 du code de commerce n’étaient susceptibles que d’un appel et d’un pourvoi en cassation de la part du ministère public ; il n’était dérogé à cette règle qu’en cas d’excès de pouvoir, lequel s’il était établi, ouvrait droit à un recours en annulation du jugement formé par la voie de l’appel.

Me Z, ès qualités, a, ainsi, formé un appel-nullité à l’encontre du jugement rendu le 10 octobre 2017, statuant en recours contre l’ordonnance du juge-commissaire du 6 avril 2017.

Sur le recours contre l’ordonnance du juge-commissaire du tribunal de commerce de Lille du 6 avril 2017

L’appel-nullité n’est recevable que si aucun recours n’est ouvert. Il nécessite par l’appelant la démonstration que le juge a commis un excès de pouvoir.

L’excès de pouvoir peut être positif, lorsque le juge use de prérogatives que la loi ne lui a pas

attribuées, ou négatif, quand il refuse d’exercer les compétences que la loi lui attribue.

Sur ce,

En l’espèce, le tribunal de commerce de Lille métropole statuant en recours contre l’ordonnance du juge-commissaire du 6 avril 2017 a appliqué au litige les dispositions des articles R.642-37-1 et R.642-37-3 du code de commerce issues du décret n°2009-160 du 12 février 2009.

Selon ces articles, la voie de recours contre la décision contestée était l’appel, et non le recours devant le tribunal de commerce.

Or compte tenu de la date d’ouverture de la procédure collective de M. X, le tribunal de commerce aurait du appliquer au litige les dispositions antérieures, selon lesquelles l’ordonnance du juge-commissaire ordonnant la vente de l’immeuble pouvait être contestée dans un délai de 10 jours devant le tribunal de commerce. L’appel de la décision du tribunal de commerce n’était pas ouvert, sauf par le ministère public.

Le tribunal de commerce s’est ainsi déclaré incompétent, mais dans la mesure où il était en réalité compétent, et statuait en dernier ressort, il a privé M. et Mme X de la voie de recours qui leur était offerte par la loi contre la décision du juge-commissaire ordonnant la vente de leur immeuble.

En déniant à tort sa compétence, il a commis un excès de pouvoir négatif.

La décision rendue par le tribunal de commerce de Lille métropole le 10 octobre 2017 sera donc annulée.

Sur le fond

L’article 562 du code de procédure civile dispose que l’appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément ou implicitement et de ceux qui en dépendent.

La dévolution s’opère pour le tout lorsque l’appel n’est pas limité à certains chefs, lorsqu’il tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

L’article L. 642-18 du code de commerce dans sa version applicable au litige dispose que les ventes d’immeubles ont lieu suivant les formes prescrites en matière de saisie immobilière. Toutefois, le juge-commissaire fixe, après avoir recueilli les observations des contrôleurs, le débiteur et le liquidateur entendus ou dûment appelés, la mise à prix et les conditions essentielles de la vente et détermine les modalités de la publicité.

Lorsqu’une procédure de saisie immobilière engagée avant l’ouverture de la procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires a été suspendue par l’effet de cette dernière, le liquidateur peut être subrogé dans les droits du créancier saisissant pour les actes que celui-ci a effectués, lesquels sont réputés accomplis pour le compte du liquidateur qui procède à la vente des immeubles. La saisie immobilière peut alors reprendre son cours au stade où le jugement d’ouverture l’avait suspendue.

Dans les mêmes conditions, le juge-commissaire peut, si la consistance des biens, leur emplacement ou les offres reçues sont de nature à permettre une cession amiable dans de meilleures conditions, ordonner la vente par adjudication amiable sur la mise à prix qu’il fixe ou autoriser la vente de gré à gré aux prix et conditions qu’il détermine. En cas d’adjudication amiable, il peut toujours être fait surenchère.

Les adjudications réalisées en application des alinéas qui précèdent emportent purge des

hypothèques.

Le liquidateur répartit le produit des ventes et règle l’ordre entre les créanciers, sous réserve des contestations qui sont portées devant le juge de l’exécution.

En cas de liquidation judiciaire d’un agriculteur, le tribunal peut, en considération de la situation personnelle et familiale du débiteur, lui accorder des délais de grâce dont il détermine la durée pour quitter sa maison d’habitation principale.

Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État.

Sur ce,

L’effet dévolutif de l’appel-nullité, formé par Me Z, saisit la cour d’appel sur le fond du recours exercé par M. et Mme X contre l’ordonnance du juge-commissaire du 6 avril 2017.

Il ressort de l’état du passif arrêté au 11 mai 2017 que le passif admis résiduel s’élève à la somme globale de 117 291,04 euros, outre les frais de la procédure collective d’un montant global de 18 889,96 euros.

M. et Mme X dans leur recours demandaient que Me Z soit autorisé à consentir une hypothèque en second rang au profit de la banque qui leur prêterait les deniers leur permettant d’apurer le passif. Ils proposaient ainsi d’apurer le passif au moyen d’un prêt et faisaient valoir l’accord de principe obtenu de l’établissement bancaire, à condition que ce prêt soit garanti par une hypothèque prise sur l’immeuble litigieux. Ainsi, les créanciers seraient désintéressés, et les époux A leur logement.

Me Z produit une estimation de cet immeuble sur le site Efficity, datée du 23 octobre 2015, pour une valeur de 447 000 euros.

Il n’est pas fait état d’autre élément d’actif de nature à permettre de désintéresser les créanciers.

En application de l’article L.641-9, M. X étant dessaisi de ses biens par la liquidation ne peut pas contracter de prêt.

Il ne peut pas non plus de ce fait consentir à l’inscription d’une hypothèque, quel que soit son rang, sur cet immeuble qui est un immeuble commun.

En tout état de cause, il est admis en vertu des articles L.622-30 et L.641-3 du code de commerce que la communauté répond des dettes de chacun des époux et que pendant sa durée, les droits de l’un ou l’autre des époux ne peuvent être individualisés sur tout ou partie des biens communs ou sur l’un d’entre-eux, de sorte que l’hypothèque constituée sur un immeuble commun ne peut plus faire l’objet d’une inscription postérieurement au jugement d’ouverture.

Par ailleurs, l’inscription d’hypothèque, effectuée après le jugement d’ouverture, est inopposable à la procédure collective, cette inopposabilité produisant effet à l’égard de chacun des époux.

Dans ces conditions, l’apurement du passif au moyen d’un prêt souscrit par les deux époux, comme au moyen d’un prêt souscrit par Madame uniquement, garanti par une hypothèque en second rang sur l’immeuble commun, est impossible.

Il n’existe ainsi aucune autre alternative à la vente aux enchères publiques de l’immeuble.

L’ordonnance du juge-commissaire du tribunal de commerce de Lille du 6 avril 2017 sera ainsi

confirmée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

En application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la partie perdante est, sauf décision contraire motivée par l’équité ou la situation économique de la partie succombante, condamnée aux dépens, et à payer à l’autre partie la somme que le tribunal détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.

PAR CES MOTIFS

—  Prononce la nullité de la décision rendue par le tribunal de commerce de Lille métropole le 10 octobre 2017 ;

Statuant en vertu de l’effet dévolutif, en recours contre l’ordonnance du 6 avril 2017 rendue par le juge-commissaire du tribunal de commerce de Lille Métropole,

—  Confirme l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;

—  Ordonne l’emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective.

Le greffier Le président

G H I-J K

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