Cour d'appel de Fort-de-France, 30 mai 2014, n° 14/00125

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Fort-de-France, 30 mai 2014, n° 14/00125
Juridiction : Cour d'appel de Fort-de-France
Numéro(s) : 14/00125
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Fort-de-France, 6 juin 2012, N° F10/00685

Sur les parties

Texte intégral

ARRET N° 14/125

R.G : 12/00210

Du 30/05/2014

Z

C/

SARL ECOFIP

COUR D’APPEL DE FORT DE FRANCE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU 30 MAI 2014

Décision déférée à la cour Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de FORT DE FRANCE, en date du 07 Juin 2012, enregistrée sous le n° F10/00685

APPELANT :

Monsieur F Z

XXX

XXX

XXX

Représenté par Me Isabelle OLLIVIER de la SELARL AGORALEX, avocat au barreau de MARTINIQUE

INTIMEE :

SARL ECOFIP

XXX

XXX

Représentée par Me Pascale BERTE de la SELARL BERTE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARTINIQUE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE

Madame Dominique HAYOT, présidente,

Madame Isabelle MARTINEZ, conseillère,

Madame Vanessa PERREE, conseillère,

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame Q R S

DEBATS : A l’audience publique du 27 Mars 2014,

A l’issue des débats, le président a avisé les parties que la décision sera prononcée le 30 mai 2014 par sa mise à disposition au greffe de la Cour conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du nouveau code de procédure civile.

ARRET : contradictoire et en dernier ressort

**********

EXPOSE DU LITIGE

M. F Z était engagé avec un statut cadre par la sarl ECOFIP (la société), à compter du 10 janvier 2005, dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée, en qualité de responsable administratif et financier.

A compter de 2006, ses fonctions évoluaient comme ingénieur financier, moyennant une rémunération mensuelle de 5 207 €.

En 2007, la société lui confiait en outre des fonctions commerciales, avec une augmentation significative de sa rémunération, comprenant en plus de son salaire fixe, des commissions et une prime sur objectif.

M. Z faisait l’objet d’un avertissement en décembre 2009 et la société lui notifiait son licenciement le 29 juin 2010, en ces termes :

' Notification de licenciement pour faute grave

…/…

En effet, ainsi que nous vous l’avons exposé lors de l’entretien, les motifs de ce licenciement sont liés à la mauvaise qualité de votre management, à la gravité de votre comportement et à ses très lourdes conséquences.

Enfin, nous déplorons votre mauvaise foi et l’inadmissible déloyauté dont vous avez fait preuve notamment, depuis votre convocation à un entretien préalable.

L’ensemble de ces faits, pour lesquels , votre responsabilité est clairement engagée, est constitutif de graves perturbations dans l’entreprise et ne saurait être toléré.

Vous avez été recruté en janvier 2005 en qualité de responsable administratif et financier.

Ayant acquis une bonne connaissance de l’entreprise et une certaine expérience dans le domaine commercial, depuis le 1er janvier 2008, vous occupez le poste d’ingénieur financier et directeur commercial.

Cette évolution professionnelle progressive vous a permis d’acquérir les capacités et les compétences nécessaires à l’exercice du poste de directeur commercial.

Dans un premier temps, vous avez exercé cette fonction au siège de la société, aux côtés du chef d’entreprise qui, par un encadrement intensif et la tenue régulière de réunions de travail, a veillé à ce que vous soyez parfaitement formé à ce poste.

Puis, vous avez été muté au sein de l’agence commerciale de Martinique, avec pleine autonomie de gestion de vos équipes.

Votre comportement s’est alors totalement éloigné de toutes les connaissances managériales que vous aviez acquises.

Le 31 décembre 2009, vous aviez fait l’objet d’un avertissement suite au non -respect de certaines consignes données par la Direction et compte tenu de l’insubordination et l’agressivité dont vous aviez fait preuve.

Cet avertissement , dûment réceptionné , n’a pas permis le redressement de la situation tel que demandé.

En effet, alors que nous venions d’être destinataires de courriers de démission et/ou menaces de démissions en cascade, principalement au sein de votre équipe commerciale, mettant en péril la continuité d’activité au sein de l’agence commerciale, nous avons été amenés à diligenter plusieurs investigations pour comprendre les difficultés rencontrées par les salariés.

Il est ressorti que vous faîtes preuve d’un comportement qualifié de >, >, > et >, créant une souffrance au travail et générateur de stress.

Nous attendions d’un Directeur commercial qu’il anime et motive son équipe, qu’il assiste les commerciaux dans leur mission et veille au bon déroulement de leurs dossiers, les aidant au mieux à résoudre leurs difficultés.

Il s’agissait de diriger une équipe et de la faire progresser collectivement vers le haut, c’est en ce sens que nous vous avions formé.

Ce travail requérait de la cohérence, de la pédagogie, de l’intégrité et le sens du bien commun.

Pourtant la quasi-totalité de vos collaborateurs vous définit comme un concurrent et non comme un manager !

De nombreux agissements et propos ont été portés à notre connaissance qui témoignent du fait que vous dévalorisez et démotivez votre équipe.

A plusieurs reprises dans les dossiers, vous avez porté des accusations envers vos collègues et subordonnés sous entendant la perte de document, le manque de compétences, remettant systématiquement en cause le travail de certain etc ..

Enfin, vous avez proféré de nombreuses menaces à leur encontre, menaces de licenciement, de sanctions.

Vous transmettez des informations erronées dans le but de vous décharger de vos responsabilités et/ou de vos tâches.

En effet, nous avons fortement été alertés sur le fait que vous n’assumiez pas vos responsabilités et que vous reportiez la faute sur vos collaborateurs et qu’en outre, certains assumaient une lourde charge de travail qui n’était pas la leur.

Les commerciaux de votre équipe se sentent soumis à une pression psychologique très forte, sans aucun soutien de votre part, bien au contraire.

Il vous arrive de relancer dix fois dans la journée un même collaborateur pour une même tâche au motif qu’il >, fin de citation, cela sans aucun motif légitime.

Plusieurs commerciaux et salariés de l’entreprise dénoncent des propos, messages et consignes contradictoires, des changements d’humeur brutaux, de la manipulation , de la fourberie dans la gestion des dossiers.

En définitive, il ressort de votre management, une grande souffrance psychologique qui n’est malheureusement pas limitée à votre équipe.

En effet, vous avez eu des conflits avec une grande partie de notre personnel , au siège social comme auprès des autres équipes causant un préjudice dans le bon fonctionnement de l’ensemble de l’entreprise.

Par ailleurs, ce management n’est pas sans conséquence sur les dossiers et les clients.

Nous relevons dans plusieurs dossiers des irrégularités et contradictions.

Plusieurs de vos dossiers sont incomplets ou ne respectent pas les procédures internes.

Nous avons donc pris la décision de vous convoquer à un entretien préalable afin de vous entendre sur les faits qui vous étaient reprochés, et éventuellement de trouver une solution.

Dans l’attente de la prise de notre décision, tenant compte de la gravité des faits qui vous étaient reprochés, nous avons décidé de suspendre l’exécution de vos fonctions.

Or, une fois votre convocation à entretien préalable reçue le 14/05/2010, nous avons eu à déplorer la déloyauté de votre comportement.

En effet, vous avez cherché par tous moyens à avoir accès à des documents strictement confidentiels et professionnels dans l’entreprise.

A cette fin, vous avez ,utilisé votre matériel professionnel (téléphone, réseau de la société, etc ) et vous avez tenté d’utiliser un de vos collaborateurs afin de détourner des biens de l’entreprise en pénétrant dans l’enceinte de l’entreprise.

Ces informations et documents sont directement liés à des dossiers dont vous aviez la responsabilité;

Rien professionnellement ne justifiait cette tentative de sorties de documents de l’entreprise et seule la malveillance, sciemment perpétrée, motivait cette tentative.

Vous avez également envoyé un mail à l’ensemble de nos partenaires, fournisseurs , clients … sous-entendant que vous seriez appelé à les revoir professionnellement une fois que vous auriez quitté la société.

Vous leur avez également indiqué votre numéro de téléphone personnel.

L’ensemble de ces agissements a provoqué une grande confusion et fortement perturbé le bon fonctionnement de l’entreprise et la sérénité de l’équipe commerciale causant un préjudice certain à l’entreprise qui a reçu de nombreux appels des clients et fournisseurs, ,inquiets quant à la gestion de leur dossier et désorientés quant à vos propos.

Informés de cette désinformation volontaire, nous avons été contraints, alors que vous étiez en dispense d’activité professionnelle, de suspendre votre accès au réseau ECOFIP et ECOFICE et à désactiver votre ligne téléphonique , afin de sauvegarder les intérêts légitimes de l’entreprise, auxquels vous aviez tenté de porter préjudice.

Vous avez considéré pouvoir nous en faire le reproche, aux termes d’un courrier du 20 mai 2010 auquel nous avons répondu le 7 juin.

Ces faits, en renfort des graves accusations qui ont été portées à votre management et à votre comportement avec l’ensemble de vos collaborateurs, subordonnés ou non, mettant en péril la continuité d’activité au sein de l’agence commerciale, ne permettent plus votre maintien au sein de l’entreprise …/…

En conséquence, la présente notification de licenciement, pour faute grave …/…'

S’estimant lésé, M. Z saisissait le conseil de prud’hommes de Fort de France le 1er septembre 2010, lequel, par jugement du 7 juin 2012, le déboutait de l’intégralité de ses demandes.

Par déclaration en date du 23 juillet 2012, M. Z relevait appel de cette décision qui lui avait été notifiée le 24 juin 2012.

Il demande à la cour de réformer en tous points le jugement querellé, de constater qu’il n’avait pas la qualité de cadre dirigeant et de condamner la société à lui payer les sommes de :

170 177,88 € à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires,

17 017,79 € à titre de congés payés sur rappel de salaire pour heures supplémentaires,

48 737,10 € à titre de dommages-intérêts pour perte de repos compensateur,

12 327 € à titre de rappel de commissions,

1237,70 € à titre de congés payés sur rappel de commissions.

Il sollicite de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et vexatoire et la condamnation de la société à lui payer les sommes de :

170 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

60 000 € à titre de dommages-intérêts pour rupture vexatoire,

72 539,43 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

7 253,94 € à titre de congés payés afférents,

1 383,19 € à titre de prorata de treizième mois sur préavis,

44 329,65 € à titre d’indemnité de licenciement,

4 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur son statut et le refus de prendre en compte les heures supplémentaires, il expose qu’à la simple lecture de son contrat de travail, il apparaît qu’il ne disposait d’aucun pouvoir de direction dans la société, ne participait pas à l’élaboration de la politique de gestion de l’entreprise, n’avait que 6 personnes sous sa responsabilité, (la société ayant un effectif de 55 personnes) et recevait, à l’instar des autres salariés de la société, des directives relatives à l’organisation et au fonctionnement de l’entreprise.

Il fait observer que son contrat de travail et ses avenants, ainsi que ses bulletins de salaire, font tous référence à la durée légale de travail.

Il estime avoir effectué en moyenne 15 heures supplémentaires par semaine et produit des pièces.

Sur le licenciement et les griefs qui sont avancés, il soutient n’avoir eu aucun problème relationnel avec les membres de son équipe. Il indique que les salariés ont été convoqués par l’employeur pour recopier des déclarations, afin de monter un dossier contre lui.

Il produit des attestations de membres de son équipe et de clients.

Il indique que la véritable motivation de son licenciement, provient du fait qu’il avait refusé de signer un avenant réduisant de près de 50 % sa rémunération et que , compte tenu de ses bonnes performances, sa rémunération n’a cessé d’augmenter.

M. Z souligne que dès avant son licenciement, son remplaçant était déjà embauché.

La société demande à la cour de confirmer le jugement entrepris et de condamner M. Z à lui payer la somme de 4 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur le licenciement, elle expose que l’ensemble des attestations produites et obtenues sans aucune pression sur leurs auteurs, met en évidence le harcèlement managérial que M. Z pratiquait à l’égard de ses équipes commerciales.

Elle indique qu’en tant qu’employeur, elle se devait de réagir conformément à son obligation de sécurité vis à vis de ses salariés.

Sur le non respect de son obligation de loyauté, elle souligne que M. Z a délibérément envoyé un mail à l’ensemble des partenaires , fournisseurs et clients d’Ecofip, leur indiquant qu’ils seraient amenés à se revoir professionnellement et leur communiquant son numéro de téléphone personnel, et elle fait observer qu’il créait sa propre société concurrente, trois mois après son licenciement.

Sur le prétendu véritable motif du licenciement, elle indique produire l’attestation de l’expert comptable aux termes de laquelle, il s’agissait d’une harmonisation des conditions de rémunération des directeurs d’agence qui n’avait pas entraîné de baisse de la rémunération pour 2010.

Elle ajoute que M. A de L M, a assuré 'l’intérim’et cumulé ses fonctions et celles de M. Z au départ de ce dernier.

Sur le statut de M. Z, elle considère que celui-ci répondait bien à tous les critères cumulatifs exigés par l’article L 3111-2 du code du travail, ainsi qu’il résulte de l’observation de ses conditions réelles d’emploi.

Sur la demande au titre du repos compensateur, elle soutient qu’elle est prescrite car formulée après la loi de sécurisation de l’emploi de juin 2013(laquelle prévoit une prescription de trois ans pour les actions en paiement de salaires) , outre le fait qu’il ne puisse y prétendre du fait de sa qualité de cadre dirigeant.

M. Z, entendu à l’audience, fait observer que les commerciaux travaillant avec lui n’avaient jamais été en arrêt de travail et que la véritable pression provenait de l’impossibilité d’atteindre leurs objectifs.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, la cour se réfère au jugement querellé et aux conclusions des parties, auxquelles celles-ci ont expressément déclaré se rapporter lors de l’audience de plaidoiries.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement

L’employeur qui envisage de rompre le contrat de travail doit énoncer son ou ses motifs dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige.

La faute grave, dont la preuve incombe à l’employeur, est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

Sur le grief de harcèlement 'managérial'

Aux termes de l’article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont eu pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité , d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L’employeur informé de l’existence d’un comportement de l’un de ses salariés de nature à caractériser un harcèlement moral, est tenu, en vertu de son obligation de sécurité à l’égard de ses salariés, de prendre toute mesure utile pour le faire cesser.

Des méthodes de gestion du personnel, assorties de pressions incessantes de directives contradictoires, peuvent , en ce qu’elles dépassent le management classique et en ce qu’elles sont susceptibles de générer un stress pour certains salariés, être considérées comme du harcèlement managérial.

En l’espèce, de nombreuses attestations produites par l’employeur démontrent l’existence de ce harcèlement managérial de la part de M. Z, étant précisé que certains salariés témoignaient en étant accompagnés d’un autre salarié (ce qui fait douter d’une quelconque pression de l’employeur) et particulièrement circonstanciées.

Ainsi Mme N Y P déclare le 11 mai 2010 :

' Suite à notre entretien du 10 mai concernant les motifs de ma démission du 6 mai, veuillez trouver ci-dessus une synthèse de notre échange :

J’ai pris la décision de mettre fin à notre collaboration pour deux raisons :

— …/…

— je ne supporte plus le comportement de mon responsable commercial qui me démotive et qui est contradictoire avec mes principes.

Je considère que son attitude est la cause d’une perte croissante de la crédibilité de la société au regard de vos apporteurs d’affaires et clients et qu’elle provoque fatigue et souffrance psychologique de son entourage professionnel condamné dans la majorité des cas au silence face à sa fabuleuse capacité de rebondissement et habileté à manipuler les faits en frôlant les limites.

Ces deux points sont loin d’être exhaustifs pour traduire les difficultés quotidiennes engendrées par son comportement et sa personnalité lunatique dont voici les grands traits illustrés par des exemples :

Accès d’agressivité

…/..

XXX et calculée

Dévalorisation du travail de ses collaborateurs

…/…

Absence de management et de ligne de conduite

…/..

Pratique de la politique de l’autruche et désengagement en cas de complications

…/…'

Mme D K, indique dans un courrier du 11 mai 2010 :

' …/.. A ce jour, nos relations se sont fortement dégradées pour les raisons suivantes :

— il exerce sur moi une pression psychologique en me menaçant de licenciement lors de notre entretien du 7 mai 2010.

— il dévalorise son équipe puisqu’il a prétendu que seul avec 2 assistantes, il ,pourrait se passer de l’équipe commerciale,

— ../.. Sa présence se fait donc ressentir comme un concurrent plutôt que comme un manager,

…/…

Cette ambiance malsaine de travail et le comportement lunatique et calculateur de M. Z ont entraîné une telle pression, me contraignant ainsi à un arrêt de travail en juin juillet 2009.

C’est avec une forte angoisse et une grande souffrance psychologique que je me présente tous les matins à ECOFIP , craignant de rencontrer dans les couloirs M. Z.

…/…'

Mme B, en présence d’un autre salarié décrit le comportement 'sournois, calculateur, manipulateur, lunatique et de mauvaise foi de M. Z'.

Elle évoque une attitude méprisante et détestable et avoir songé à démissionner en raison de cette 'collaboration insupportable'.

Elle donne des exemples précis.

Mme E, (le 7 juin 2010, en présence d’un autre salarié) évoque le stress habituel que les échanges par mail ou téléphone avec M. Z généraient chez elle. Elle précise ne pas avoir du tout le même rapport avec les autres directeurs commerciaux.

Mme X, dans un entretien du 7 juin 2010, en présence d’un autre salarié, indique que M. Z se posait en concurrent plutôt qu’en manager et que certains commerciaux étaient victimes du stress généré par son comportement.

M. C décrit une relation concurrentielle plutôt que de soutien et confirme l’existence de pressions sur Mme Y et Mme D.

M. Z prétend que les salariés ont agi sous la pression de l’employeur mais il apparaît que, pour certains, ils étaient accompagnés d’un autre salarié, et que leurs déclarations sont particulièrement précises et circonstanciées.

Le fait que d’autres salariés aient témoigné en faveur de M. Z ne saurait jeter un doute sur son comportement , tel que décrit avec précision par d’autres.

Ainsi M. C admettait il que les rapports conflictuels de M. Z pouvaient être 'assimilés à des rapports de Directeur à subordonnés en période économiquement difficile. '

Il précisait ne pas en avoir personnellement souffert, mais ne démentait pas ses propos relatifs aux autres salariés.

Il ressort en conséquence que les agissements reprochés à M. Z s’analysent en un harcèlement moral, de nature managériale. Ils sont répétés et ont été générateurs de stress et de souffrance au travail pour certains salariés.

Ce grief est à lui seul constitutif d’une faute grave justifiant le licenciement.

A titre surabondant, le second grief de comportement déloyal est lui aussi démontré, M. Z ayant par mail adressé à une de ses collaboratrices, tenté de se procurer copie de certains dossiers, alors qu’il faisait l’objet d’une mise à pied conservatoire.

Sur les demandes consécutives à la rupture du contrat

Le licenciement pour faute grave est exclusif de toute indemnité de rupture , qu’il s’agisse de des indemnités de préavis, de congés payés , de licenciement ou de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la demande à titre de dommages-intérêts pour rupture vexatoire, M. Z ne produit aucun élément de nature à établir l’existence de procédés vexatoires ayant accompagné le licenciement et sa demande doit être rejetée.

Sur le statut de M. Z et les demandes subséquentes

Aux termes de l’article L 3111-2 du code du travail, 'Les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux dispositions des titres II et III (relatifs à la durée du travail, répartition et à l’aménagement des horaires , ainsi qu’aux repos et jours fériés)

Sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans l’entreprise.'

Ces trois conditions sont cumulatives et il convient d’examiner la fonction que le salarié occupe réellement au regard de chacun des critères.

En l’espèce, M. Z se définit lui-même comme Directeur de l’agence de la Martinique et il est reconnu comme tel par l’ensemble de ses collaborateurs et par les clients. A ce titre, ainsi qu’il ressort de l’attestation de l’expert comptable, M. Z percevait un salaire parmi les plus élevés de la société et notamment au 31 mai 2010, il percevait le second salaire le plus élevé.

Sur l’organigramme de la société, M. Z est bien identifié, à l’instar des directeurs des autres DOM ou TOM comme le directeur d’Ecofip Martinique.

Ainsi qu’il résulte de la grille de classification de la convention collective applicable, le positionnement de M. Z au niveau 3-2 impliquait de 'très larges initiatives et responsabilités. '

Ces pouvoirs sont d’ailleurs confirmés par la production des pièces par la société, puisqu’il disposait d’initiatives et responsabilités en matière de recrutement, de mise en place des procédures de suivi des dossiers de financement …

Il se déduit de l’absence de directives relatives à ses horaires, que M. Z disposait aussi de la plus large autonomie dans l’organisation de son temps, et il apparaît que ce n’est qu’à l’occasion de la présente procédure qu’il revendiquait le paiement d’heures supplémentaires, alors qu’il exerçait depuis 5 ans au service de la société.

Il doit en conséquence être considéré comme ayant le statut de cadre dirigeant et ses demandes de paiement d’heures supplémentaires et de repos compensateur seront rejetées.

Sur les demandes de rappels de commissions

S 'agissant du dossier SNC DOMINO, la seule pièce produite émanant de la Préfecture est un agrément provisoire et ce document est insuffisant à démontrer qu’une commission devait être versée à M. Z.

S’agissant du dossier FIGUIERE, l’agrément définitif de la préfecture était délivré en avril 2012, soit près de trois ans après le licenciement de M. Z,

Ce dernier ne parvient pas à démontrer le bien fondé de sa demande de commission ni a fortiori son montant.

Ces demandes seront en conséquence rejetées.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 7 juin 2012 par le conseil de prud’hommes de Fort de France (section encadrement) entre M. F Z et la Sarl Ecofip,

Condamne M. F Z à payer à la Sarl ECOFIP la somme de 1 500€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. F Z aux dépens d’appel.

Et ont signé le présent arrêt Mme Dominique Hayot, Président, et Mme Q R S, Greffier

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

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