Cour d'appel de Grenoble, 8 janvier 2009, n° 08/01840

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, 8 janv. 2009, n° 08/01840
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 08/01840
Décision précédente : Tribunal des affaires de sécurité sociale de Valence, 20 mars 2008, N° 20070097

Sur les parties

Texte intégral

RG N° 08/01840

N° Minute :

Notifié le :

Grosse délivrée le :

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE SOCIALE

ARRET DU JEUDI 08 JANVIER 2009

Appel d’une décision (N° RG 20070097)

rendue par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de VALENCE

en date du 21 mars 2008

suivant déclaration d’appel du 15 Avril 2008

APPELANTE :

L’URSSAF DE LA DROME prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

XXX

XXX

Représentée par Mme JULIEN, munie d’un pouvoir spécial

INTIMEE :

La Société CLUB MÉDITERRANÉE venant aux droits de la société C.M. X & TOURISMES prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

XXX

XXX

Représentée par Me Delphine PANNETIER (avocat au barreau de NEUILLY SUR SEINE)

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Monsieur Daniel DELPEUCH, Président de Chambre,

Monsieur Eric SEGUY, Conseiller,

Madame Dominique JACOB, Conseiller,

Assistés lors des débats de Mme Corinne FANTIN, Adjoint faisant fonction de Greffier.

DEBATS :

A l’audience publique du 11 Décembre 2008,

Les parties ont été entendues en leurs conclusions et plaidoirie(s).

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 08 Janvier 2009.

L’arrêt a été rendu le 08 Janvier 2009.

A l’issue d’un contrôle effectué en 2005 de l’application de la législation sur les cotisations et contributions sociales pendant la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004, l’URSSAF de Valence a notifié à la société C. M. X & TOURISME SAS, à l’époque filiale de la société CLUB MÉDITERRANÉE, un rappel de cotisations d’un montant total de 99.470 € (lettre d’observations du 6 octobre 2005, mise en demeure du 12 janvier 2006).

Elle a retenu quatre chefs de redressement, dont seul le quatrième, pour un montant en cotisations de 7.681 euros, fait encore en litige.

Il porte sur la réintégration dans l’assiette des cotisations d’un avantage en nature logement consenti à une partie du personnel salarié désigné sous le qualificatif 'gentils organisateurs’ ou 'GO’ employé au village de vacances du domaine de Rejaubert exploité par la société CLUB MÉDITERRANÉE à Dieulefit (Drome), au titre de la fourniture à leur bénéfice d’un hébergement sur place.

Par jugement du 21 mars 2008, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Valence a annulé la décision prise le 16 mai 2006 par la commission de recours amiable portant sur le point n°4 de ce redressement (dont les points n° 2 et 3 ont été payés par le cotisant et dont le point n°1 a été entre temps annulé par le directeur de l’URSSAF le 9 octobre 2007).

Le tribunal a également condamné l’URSSAF à verser à la société 750 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

L’URSSAF de la Drome a relevé appel le 15 avril 2008. Elle demande à la cour d’infirmer ce jugement, de confirmer la décision de la commission de recours amiable, de condamner la société à lui payer les sommes de 7.681 euros en cotisations outre les majorations de retard afférentes dues en application de l’article R.243-18 du code de la sécurité sociale.

Elle invoque l’absence de mobilité des 'GO’ et l’inapplicabilité à leur endroit des dispositions relatives aux grands déplacements, dès lors qu’il ne s’agissait pas de personnel en mission.

Elle considère que la fourniture d’un logement équipé des éléments standards de confort ne pouvait être assimilée à un dortoir, que ces salariés avaient bénéficié d’une économie réelle de frais, l’employeur ne démontrant pas qu’ils engageaient par ailleurs des frais afférents à une résidence principale.

Elle précise que les salariés considérés étant logés durant l’exécution de leur contrat à raison de deux par chambre, elle avait évalué l’avantage en cause selon le barème annexé à la circulaire du 7 janvier 2003, sur la base de deux personnes par pièce principale.

Elle invoque aussi l’absence de contraintes inhérentes au travail ou de nécessité absolue de service.

Elle fait observer que, depuis 2005, la société appliquait désormais l’avantage en nature logement.

La société CLUB MÉDITERRANÉE, venant aux droits de la société C.M. X & TOURISME, demande à la cour de prendre acte de l’annulation du premier chef de redressement, de confirmer le jugement, d’ordonner le remboursement des 7.681 € de cotisations versées à titre conservatoire, de débouter l’URSSAF de ses demandes et de la condamner à verser une indemnité pour frais irrépétibles.

Elle invoque les moyens suivants :

— les GO, qui provenaient de toute la France voire de l’Europe, qui ne pouvaient pas regagner leur domicile personnel le soir, étaient dans une situation assimilable à des salariés en grand déplacement ou astreints à une mobilité permanente ;

— les logements mis à leur disposition ne répondaient pas aux conditions de confort minimal, étaient assimilables à un dortoir, lequel ne constituait pas un avantage en nature selon la jurisprudence, leur valeur locative n’excédait pas 40 euros par jour, ils étaient dépourvus de cuisine et ne constituaient donc pas des logements au sens du code de la construction, il ne s’agissait pas de logements individuels, les sanitaires étaient communs, les chambres pouvaient être redistribuées pendant toute la saison, devaient être libérées en cas d’absence prolongée, il était impossible d’y loger la famille des salariés, ensemble de circonstances dont elle déduit que ces logements n’avaient pas un caractère permanent ;

— il existait une contrainte inhérente au travail : les GO devaient intervenir à tout moment de la journée et de la nuit pour les nécessités de l’accueil des clients et de la maintenance ;

— les GO étaient recrutés par contrat saisonnier, disposaient au moins pour leur famille d’un logement personnel qu’ils continuaient de financer et, ainsi, ne bénéficiaient d’aucune économie réelle.

Sur quoi :

Attendu qu’à la demande formulée par la cour lors de l’audience, le conseil de l’intimée a adressé en délibéré des exemplaires de contrats de travail saisonniers conclus en 2003 et 2004 pour cinq salariés (animateur de golf, adjoint responsable technique, demi-chef de partie, maîtresse de maison, diététicienne employés sur le domaine de Réjaubert à Dieulefit indiquant avoir adressé une copie du courrier à la partie adverse ;

Que par respect du principe du contradictoire, seuls seront pris en compte les contrats de travail, mais non les deux pages de commentaires, non demandées par la cour, envoyés en accompagnement de ces pièces;

Attendu que le premier juge a exactement relevé, à la lecture des listes nominatives du personnel pour 2003 et 2004, à nouveau produites en cause d’appel et comportant les adresses, qu’à l’exception de dix d’entre eux, les cent quatre vingt salariés recrutés par la société CMCT sous contrats à durée déterminée saisonniers pour assurer l’accueil et l’animation dans le village de vacances qu’elle exploitait dans la Drome au cours des années litigieuses 2003 et 2004, désignés par le logiciel de paye de la société sous les codes M4 et M9, résidaient en dehors de ce département de la Drome voire dans d’autres pays de l’Union (Belgique, Royaume Uni, Italie, Allemagne, Pays Bas) ;

Que les contrats de travail à durée déterminée saisonnier correspondant à la période d’été, d’une durée minimale de 25 à 29 semaines (mars à octobre pour les plus longs) mentionnent les adresses des intéressés et indiquent qu’un transport aller-retour entre Paris et le village de vacances était pris en charge par l’employeur et que la lecture des ces contrats permet de comprendre qu’il s’agissait d’un unique transport ;

Que les salariés étaient empêchés de regagner chaque jour leur résidence habituelle durant l’exécution de leur contrat de travail, précisément en raison de cet éloignement ;

Attendu que ces salariés recrutés par contrat de durée brève, qui finançaient nécessairement au lieu indiqué sur ces listings comme étant celui où ils avaient établi leur domicile ou leur résidence, un logement personnel permanent pour eux et, le cas échéant, leur famille, auraient étaient contraints d’engager des dépenses supplémentaires pour se loger pendant l’exécution de ce travail saisonnier, d’une durée moyenne de trois mois, s’ils n’avaient pas disposés de l’hébergement litigieux fourni sur place par leur employeur ;

Attendu que le tribunal des affaires de sécurité sociale a, par ailleurs, exactement considéré que ces hébergements mis à leur disposition par la société ne pouvaient être considérés comme un avantage en nature compte tenu de leurs caractéristiques propres et des restrictions imposées aux salariés par leur employeur pour leur usage ;

Qu’en effet, il n’est pas contesté que ces logements étaient dépourvus de lieu destiné à la préparation des repas (absence de cuisine ou de coin cuisine), qu’ils n’étaient pas destinés à un usage individuel exclusif d’un salarié mais devaient être partagés, y compris les sanitaires et douches, par deux salariés, qu’ils pouvaient être redistribués à tout moment de la saison par l’employeur, que ces logements devaient être libérés en cas d’absence prolongée ;

Que dans ces conditions, ces logements ne pouvaient être utilisés pour l’hébergement de la famille du salarié alors que tel est normalement le cas d’un logement considéré comme constitutif d’un avantage en nature ;

Attendu que l’URSSAF vise dans ses écritures déposées au soutien de ses observations orales, la circulaire ministérielle du 7 janvier 2003 sur la mise en oeuvre de l’arrêté du 20 décembre 2003 et notamment son paragraphe 2-1 selon lequel : 'l’avantage en nature consiste dans la fourniture ou la mise à disposition d’un bien ou service, permettant au salarié de faire l’économie de frais qu’il aurait dû normalement supporter’ ;

Qu’elle ne caractérise pas l’existence d’une économie réelle susceptible d’être réalisée par les salariés concernés par l’attribution gratuite de ces logements dès lors qu’ils avaient conservé simultanément leur logement ou leur résidence personnelle et dès qu’ils auraient été exposés, sans cela, à un doublement engagement de frais ;

Attendu qu’au surplus, même s’il ne s’agissait pas de nécessités absolues de service, la société CLUB MÉDITERRANÉE caractérise l’existence de sujétions professionnelles spéciales ou de contraintes inhérentes au travail des 'GO', appelés à intervenir à bref délai pour l’assistance aux arrivées et aux départs des clients, y compris de nuit, et pour la maintenance des installations du centre de loisirs ;

Attendu que la fourniture gratuite de ces logements pendant la période contrôlée ne constituait donc pas un avantage en nature versé en contrepartie ou à l’occasion du travail au sens de l’article L.242 alinéa premier du code de la sécurité sociale et au sens de l’arrêté du 20 décembre 2002 relatif à l’évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations de sécurité sociale, dans leur version alors en vigueur ;

Que l’existence d’une pratique opposée, qualifiée par l’URSSAF de 'régularisation', mise en oeuvre par l’employeur à partir de 2005, qui réplique avoir seulement agi par précaution, constitue une circonstance indifférente au cas présent qui concerne une période antérieure ;

Attendu que la totalité des cotisations afférentes aux points 1 et 4 alors en litige a été réglée par chèque et par lettre de transmission du 26 février 2007, sous réserve de l’action contentieuse ; qu’il sera en conséquence fait droit à la demande de remboursement de la somme de 7.681 euros ;

Attendu qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de la société intimée ses nouveaux frais irrépétibles ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi :

Confirme le jugement déféré ;

Déboute l’URSSAF de ses prétentions ;

Condamne l’URSSAF de Valence à rembourser à la société anonyme CLUB MÉDITERRANÉE venant aux droits de la société C.M. C.T. SAS la somme de 7.681 euros et à lui payer en outre une somme de 750 euros au titre de ses frais irrépétibles engagés en cause d’appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du nouveau code de procédure civile.

Signé par Monsieur DELPEUCH, président, et par Madame FANTIN, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

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