Cour d'appel de Grenoble, 12 janvier 2016, n° 15/01279

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Texte intégral

R.G. N° 15/01279

VL

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

la SCP GARNIER – BAELE

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

2EME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 12 JANVIER 2016

Appel d’une Ordonnance de référé (N° R.G. 14/00144)

rendue par le Président du Tribunal de grande instance de D-Y

en date du 13 janvier 2015

suivant déclaration d’appel du 25 Mars 2015

APPELANT :

Monsieur Z X

né le XXX à XXX

de nationalité Française

XXX

XXX

Représenté par Me BAELE de la SCP GARNIER – BAELE, avocat au barreau de D-Y

INTIMEE :

SARL ALPES ENERGIE NOUVELLE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège,

XXX

XXX

Représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et par Me Stéphane MÖLLER, avocat au barreau des ALPES DE HAUTE PROVENCE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE, Président,

Monsieur Jean-Christophe FOURNIER, Conseiller,

Madame Véronique LAMOINE, Conseiller,

Assistés lors des débats de Madame Laetitia MATHIEU, Greffier.

DÉBATS :

A l’audience publique du 16 Novembre 2015,

Madame Véronique LAMOINE, Conseiller, a été entendue en son rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries.

Puis l’affaire a été mise en délibéré pour l’arrêt être rendu à l’audience de ce jour.

Exposé des faits

Selon 'Devis Bon de commande’ du 14 juin 2013, Monsieur Z X a commandé auprès de la SARL ALPES ENERGIES NOUVELLES, pour un prix de 21 000 € TTC la fourniture et la pose d’une installation photovoltaïque comprenant :

* un kit complet autoconsommation en injection directe 4 KWC comprenant notamment 16 modules poylycristallins, un onduleur PR50SB BS /5242 et « un lot » de batteries,

* un XXX,

* une éolienne domestique DOMOS Industries 600 W garantie 3 ans.

Une déclaration préalable de travaux a été déposée en mairie le 20 juin 2013, et un arrêté de non opposition a été rendu le 10 juillet 2013.

Le 5 juillet 2013, la SARL ALPES ENERGIES NOUVELLES a établi un nouveau devis qui n’a pas été signé par le client Monsieur X.

Les travaux ont été réalisés le 23 août 2013, et Monsieur X a signé une fiche de réception de travaux du même jour, avec des réserves concernant la réception du matériel et les documents fournis.

Une déclaration d’achèvement des travaux a été déposée le 6 février 2014.

Le 28 février 2014, Monsieur Z X a écrit à la SARL ALPES ENERGIES NOUVELLES par l’intermédiaire de son conseil en énonçant divers griefs relatifs à l’installation (non conformité de certains éléments à la commande, déchargement trop rapide des batteries, insuffisance de production et de rentabilité), et la SARL ALPES ENERGIES NOUVELLES y a répondu le 12 mars 2014.

Par acte du 21 juillet 2014, Monsieur Z X a fait citer la SARL ALPES ENERGIES NOUVELLES devant le Président du Tribunal de Grande Instance de D-Y statuant en référé, au visa de l’article 808 du Code de Procédure Civile, pour voir ordonner une expertise pour décrire l’installation, constater les désordres, en rechercher l’origine, décrire et chiffrer le coût des travaux propres à y remédier, constater l’existence d’un préjudice de jouissance, estimer la perte de rentabilité de l’installation et le surcoût énergétique ainsi que l’incidence fiscale.

Dans ses conclusions récapitulatives devant le premier juge, Monsieur X s’est prévalu des dispositions de l’article 145 du Code de Procédure Civile à l’appui de sa demande.

Par ordonnance du 13 janvier 2015, le Président du Tribunal de Grande Instance de D-Y statuant en référé :

* a débouté Monsieur Z X de l’intégralité de ses demandes,

* l’a condamné à payer à la SARL ALPES ENERGIES NOUVELLES la somme de 800 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

* l’a condamné aux dépens.

Par déclaration au Greffe en date du 25 mars 2015, Monsieur Z X a interjeté appel de cette décision qui lui avait été signifiée le 17 mars 2015.

Le 29 mai 2015, les avocats des parties ont été avisés que l’affaire était fixée à plaider à l’audience du 16 novembre 2015 en application des dispositions de l’article 905 du Code de Procédure Civile.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 12 juin 2015, Monsieur Z X demande à la Cour de réformer l’ordonnance déférée, et d’ordonner une expertise judiciaire avec pour mission de :

* décrire l’installation,

* constater les désordres,

* préciser si ces désordres sont dus à un défaut de conformité au bon de commande,

* en rechercher l’origine,

* préciser si la SARL ALPES ENERGIES NOUVELLES a respecté les obligations d’information et de conseil,

* préciser si le matériel installé est conforme au bon de commande et si l’installation a été réalisée dans les règles de l’art,

* décrire les travaux propres à y remédier,

* en chiffrer le coût,

* constater l’existence d’un préjudice de jouissance et le décrire,

* estimer la perte de rentabilité de l’installation et le surcoût énergétique ainsi que l’incidence fiscale et la perte de garantie contractuelle de 25 ans.

Il expose que certains matériels livrés n’étaient pas conformes à la commande (modèle de l’onduleur, nombre des batteries fournies, capacité du ballon thermodynamique), que les batteries se déchargent rapidement, que l’installation n’est pas rentable et lui coûte de l’argent alors qu’il doit supporter le remboursement de l’emprunt souscrit pour financer les travaux.

Il fait valoir qu’il dispose d’un intérêt légitime à faire établir, avant tout procès, la preuve de ces faits en application des dispositions de l’article 145 du Code de Procédure Civile, sans que puissent lui être opposées les dispositions de l’article 146 du même code ou encore l’absence de preuve d’un préjudice.

Il demande encore condamnation de la SARL ALPES ENERGIES NOUVELLES à lui payer la somme de 800 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

La SARL ALPES ENERGIES NOUVELLES, dans ses dernières conclusions déposées le 26 juin 2015, demande la confirmation de l’ordonnance déférée, le rejet de toutes prétentions de Monsieur Z X et réclame sa condamnation à lui payer la somme de 1 000 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Elle fait valoir :

* qu’une mesure d’expertise ne peut être ordonnée pour pallier la carence d’une partie dans l’administration de la preuve,

* que Monsieur Z X ne rapporte la preuve d’aucune urgence ni d’un péril imminent, et que sa demande se heurte à des contestations sérieuses,

* qu’il ne justifie d’aucun motif légitime à sa demande d’expertise en ne produisant aucun procès-verbal de constat de désordres.

Elle précise :

* que l’éolienne a bien été livrée, mais que sa pose n’était pas comprise dans les prestations convenues,

* que l’onduleur fourni est celui préconisé par le fabricant ; que la différence avec celui mentionné au bon de commande procède d’une erreur fortuite de son commercial,

* que le ballon livré a effectivement une contenance de 280 litres ; que, si le bon de commande mentionne une contenance de 300 litres c’est par une erreur de son commercial puisque cette contenance n’existe pas chez son fournisseur,

* que Monsieur Z X ne démontre aucun préjudice consécutif à ces non-conformités,

* que les batteries sont effectivement bridées à 30 % de déchargement conformément aux préconisations du constructeur,

* que l’absence de rentabilité alléguée n’est pas établie.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 novembre 2015.

Motifs de la décision

Sur la demande tendant à voir ordonner une expertise

Aux termes de l’article 145 du Code de Procédure Civile, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées, à la demande de tout intéressé, sur requête ont référé, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir , avant tout procès, la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige.

Il ne peut être opposé à Monsieur Z X les dispositions de l’article 146 du Code de Procédure Civile qui ne s’appliquent qu’aux mesures d’instruction ordonnée au cours d’un procès, et non pas lorsque le juge est saisi, comme en l’espèce, avant tout procès.

Par ailleurs ce texte fait dépendre la décision d’ordonner une mesure d’instruction de la seule existence d’un motif légitime, et non pas d’une urgence ou de l’absence de contestation sérieuse.

En l’espèce, la SARL ALPES ENERGIES NOUVELLES reconnaît, dans ses conclusions, que deux des éléments de l’installation fournis et mis en oeuvre par elle ne sont pas conformes à ceux qui, figurant sur le bon de commande, constituent la prestation contractuellement convenue entre les parties ; ainsi :

— le ballon fourni a une contenance de 280 litres au lieu des 300 litres prévus,

— l’onduleur fourni et posé est un modèle 37 B au lieu du modèle 50 B prévu au contrat.

Monsieur Z X fait valoir que l’onduleur fourni est moins performant que celui prévu au contrat et se plaint d’un défaut de rentabilité de l’installation. Il produit en ce sens ses relevés de consommation électrique avant et après l’installation en cause.

Ces éléments rendent légitime la désignation, à la demande de Monsieur Z X et à ses frais avancés, d’un expert seul à même de fournir les éléments techniques propres à déterminer les incidences de la non conformité des matériels fournis par rapport au contrat, et de constater si l’installation présente d’autres non-conformités ou dysfonctionnements.

Sur les demandes accessoires

Aux termes de l’article 491 du Code de Procédure Civile, le juge des référés statue sur les dépens.

L’instance devant le premier juge ne tendant qu’à voir ordonner une mesure d’instruction, la SARL ALPES ENERGIES NOUVELLES ne peut être

considérée comme partie perdante au sens de l’article 696 du code de procédure civile, et les dépens de première instance doivent donc en être laissés à la charge de Monsieur Z X. En revanche, l’appel ayant été rendu nécessaire par l’opposition de la SARL ALPES ENERGIES NOUVELLES à voir ordonner cette mesure d’instruction alors que celle-ci reposait sur un motif légitime, les dépens d’appel doivent être mis à sa charge.

Il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge des parties tout ou partie de leurs frais irrépétibles.

Par ces Motifs

La Cour, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au Greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME en toutes ses dispositions l’ordonnance déférée.

Statuant à nouveau :

ORDONNE une expertise et désigne pour y procéder :

Monsieur B C

XXX

XXX

XXX

avec pour mission de :

— convoquer les parties et se faire remettre tous documents utiles,

— se rendre sur les lieux de l’installation,

— examiner l’installation photovoltaïque fournie et mise en oeuvre par la SARL ALPES ENERGIES NOUVELLES,

— préciser quelles ont été les informations fournies à Monsieur Z X par la SARL ALPES ENERGIES NOUVELLES avant la conclusion du contrat, et indiquer si, à son avis, elles ont été complètes et suffisantes,

— dire si l’ installation est conforme à la commande ; dans la négative, décrire les non-conformités et préciser leurs conséquences éventuelles sur le fonctionnement de l’installation et sur ses performances,

— dire si l’installation a été réalisée conformément aux règles de l’art,

— vérifier la réalité des dysfonctionnements et désordres invoqués par Monsieur Z X, les décrire, en préciser les causes,

— décrire les travaux propres à y remédier, en chiffrer le coût,

— donner tous éléments propres à chiffrer les préjudices qui en sont résultés pour Monsieur Z X notamment quant à la rentabilité de l’installation, le surcoût énergétique et l’incidence fiscale éventuelle, en proposer une estimation,

— fournir tous autres éléments nécessaires à la solution du litige,

— adresser aux parties un pré-rapport en leur donnant un délai pour leurs observations, consigner ces observations et y répondre techniquement dans son rapport définitif.

FIXE à 3 000 € la provision sur la rémunération de l’expert que Monsieur Z X devra consigner au Greffe de la Cour avant le 1er mars 2016.

Rappelle qu’à défaut de consignation dans le délai, la décision ordonnant l’expertise est caduque.

DIT que l’expert devra adresser aux parties et déposer au Greffe de la Cour le rapport définitif de ses opérations avant le 30 juin 2016.

REJETTE toutes les autres demandes.

CONDAMNE Monsieur Z X aux dépens de première instance et CONDAMNE la SARL ALPES ENERGIES NOUVELLES aux dépens d’appel.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par le président Marie-Françoise CLOZEL-TRUCHE et par le Greffier Ingrid ANDRIEUX, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

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