Cour d'appel de Grenoble, 1ere chambre, 16 juin 2020, n° 17/02269

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, 1re ch., 16 juin 2020, n° 17/02269
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 17/02269
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Grenoble, 1er janvier 2017, N° 13/05121
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 17/02269 – N° Portalis DBVM-V-B7B-JAFS

DJ

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

la SELARL CABINET A FAVET

Me Arnaud DOLLET

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

1ERE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 16 JUIN 2020

Appel d’un Jugement (N° R.G. 13/05121)

rendu par le Tribunal de Grande Instance de GRENOBLE

en date du 02 janvier 2017

suivant déclaration d’appel du 02 Mai 2017

APPELANTS :

Monsieur B X

né le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

Représenté par Me A FAVET de la SELARL CABINET A FAVET, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et Me Jean-Philippe DELSOL, avocat au barreau de LYON

C D :

Monsieur A X, es-qualité d’héritier de madame Y J-K épouse X, décédée LE 26/01/2019

né le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

Monsieur E X, es-qualité d’héritier de madame Y J-K épouse X, décédée LE 26/01/2019

né le […] à […]

de nationalité Française

[…]

[…]

Représentés par Me A FAVET de la SELARL CABINET A FAVET, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et Me Jean-Philippe DELSOL, avocat au barreau de LYON

INTIMÉ :

M. LE DIRECTEUR DÉPARTEMENTAL DES FINANCES PUBLIQUES DE L’ISÈRE

représenté par M. Le DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES DE PACA ET DU DÉPARTEMENT DES BOUCHES DU RHÔNE,

[…]

[…]

Représenté par Me Arnaud DOLLET, de la LEXWAY AVOCAT, avocat au barreau de GRENOBLE

Affaire initialement fixée à l’audience de plaidoiries du 30 mars 2020 non tenue en raison de l’état d’urgence sanitaire.

Arrêt rendu en application de l’article 8 de l’ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière non pénale.

En l’absence de refus des parties pour l’application des dispositions sus-visées, l’affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour.

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Hélène COMBES, Président de chambre,

Mme Dominique JACOB, Conseiller,

Mme Joëlle BLATRY, Conseiller,

***

EXPOSE DU LITIGE

Le 12 avril 2005, le groupe familial J-K composé de A J-K, de son épouse, F G et de leurs deux filles, Y et O J-K, a cédé à la société américaine Quiksilver sa participation dans la société Skis Rossignol et ses filiales, dont la société H I L P dont il a conservé 36,37 % du capital.

Le 1er août 2005, les consorts J-K ont créé la société en commandite par actions 'Services Expansion International’ (SCA SEI) dont l’objet est la prise de participation dans les entreprises industrielles et commerciales.

Ils ont apporté au capital de cette société 34,04 % d’actions de la société H I L P.

En contrepartie de cet apport, ils ont reçu des titres de la SCA SEI.

En 2010, Y J-K et son époux, B X, ont fait l’objet d’un contrôle fiscal portant sur l’impôt de solidarité sur la fortune des années 2006 et 2007.

Une proposition de rectification du 7 septembre 2012 leur a été adressée, l’administration fiscale considérant que les actions de la SCA SEI ne pouvaient pas bénéficier de l’exonération applicables aux biens professionnels.

Ils ont formulé une réclamation en date du 1er mars 2013 qui a été rejetée le 5 septembre 2013.

Par acte du 15 octobre 2013, ils ont assigné le directeur régional des finances publiques de Provence, Alpes, Côte d’Azur et des Bouches du Rhône devant le tribunal de grande instance de Grenoble.

Par jugement du 2 janvier 2017, le tribunal les a déboutés de leurs demandes et condamnés aux dépens.

Les époux X ont relevé appel le 2 mai 2017.

Y J-K épouse X est décédée le […].

Ses deux enfants, A et E X, sont intervenus volontairement à l’instance en qualité d’uniques héritiers.

Dans leurs dernières conclusions du 26 novembre 2019, ils demandent à la cour d’infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de :

— dire que la décision de rejet en date du 5 septembre 2013 est infondée,

— prononcer la décharge des rappels d’impôt de solidarité sur la fortune au titre des années 2006 et 2007 à raison de la participation de Y X dans la SCA SEI, aux motifs de l’exonération prévue pour les biens professionnels et de la prescription abrégée de trois ans,

— condamner l’Etat à leur verser la somme de 15.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Ils soutiennent que les titres de la SCA SEI qu’ils ont reçus en contrepartie de l’apport des titres de la société H I sont des biens professionnels qui bénéficient de l’exonération prévue par l’article 885 O quater du code général des impôts et ne doivent pas être assujettis à l’impôt de solidarité sur la fortune.

A l’appui de leur appel, ils font valoir que la SCA SEI participe de façon active à la conduite et au contrôle de la société H I L en ce que :

— un contrat de prestations de services du 14 décembre 2005 lie les deux sociétés,

— A J-K, co-gérant de la SCA SEI, joue un rôle déterminant au sein de la société H I en sa qualité de 'Chairman of the Board', étant le seul à disposer des compétences et de la vision stratégique de la société.

Ils relèvent que la circonstance que la SCA SEI n’était pas l’actionnaire majoritaire de la société H I L ne saurait faire obstacle à ce qu’elle puisse être qualifiée de société animatrice, dès lors qu’elle participe activement à la détermination de la politique du groupe et exerce une influence sur les décisions de sa filiale.

Ils soutiennent par ailleurs que le délai de reprise de l’administration était celui de la prescription agrégée de trois ans, puisque l’exigibilité possible des droits avait été révélée à l’administration par les déclarations d’impôt de solidarité sur la fortune souscrites au titre des années 2006 et 2007 qui mentionnaient expressément, dans le cadre réservé aux biens professionnels exonérés, la participation familiale détenue dans la société SDI, avec la mention 'en attente de la décision de l’administration'.

Dans ses dernières conclusions du 8 août 2017, le directeur régional des finances publiques demande à la cour de confirmer le jugement, confirmer que les époux X sont redevables des impositions et pénalités demandées pour un montant de 194.755 euros et les condamner à lui verser la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Il rappelle que les parts ou actions de sociétés ayant pour activité la gestion de leur propre patrimoine immobilier ne sont pas considérées comme des biens professionnels, sauf si la société holding est l’animatrice effective de son groupe, c’est-à-dire qu’elle participe activement à la politique du groupe ainsi qu’au contrôle des filiales ou lui rend des services spécifiques.

Il indique que la SCA SEI n’exerce pas un rôle d’animatrice à l’égard de sa filiale, la société H I L ; que, même si elle lui fournit des conseils et des services, elle n’a qu’un pouvoir d’incitation ou d’opposition, mais pas de pouvoir décisionnel.

Sur le délai de prescription, il fait valoir que le contrôle de la qualification de biens professionnels déclarés nécessite des recherches qui justifient un délai de reprise de longue durée ;

qu’en l’espèce, la déclaration n’établissait pas de manière complète l’exigibilité des droits omis et la mention 'en attente décision conférant exonération' n’a pas pour effet de substituer la prescription abrégée à la prescription de longue durée.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 19 mai 2020.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

Sur les actions de la SCA SEI

Les parts ou actions des sociétés holding peuvent bénéficier de l’exonération d’impôt de solidarité sur la fortune accordée aux biens professionnels, si la société holding est l’animatrice effective de son

groupe et si ses parts ou actions remplissent par ailleurs les conditions posées à l’article 885 O bis du code général des impôts, ce qui n’est en l’occurrence pas contesté.

Il incombe aux consorts X d’établir que la société SEI exerce au sein du groupe qu’elle forme avec sa filiale un rôle d’animation effective, c’est-à-dire qu’elle participe à la direction de la société I en prenant des décisions de politique commerciale ou d’orientation stratégique qui s’imposent.

Les consorts X invoquent le rôle tenu par la société SEI dans le cadre du contrat de prestations de service qui la lie à la société I.

Il ressort de ce contrat en date du 14 décembre 2005, que la société H I L P souhaitant 'accroître sa connaissance du marché du L dans lequel elle opère, en vue de continuer à développer ses activités de manière sûre et pérenne', a conclu avec la société SEI un contrat de prestations de services aux termes duquel la société SEI assurera (article 1) 'des conseils et prestations dans le domaine de la stratégie de développement de la société, de l’organisation, du marketing, de la promotion et/ou de la communication'.

Le contrat prévoit que les conseils et l’assistance visent 'une aide à la décision dans le cadre du développement stratégique et commercial de la société'.

Il est toutefois précisé (article 3) que la société SEI 'ne pourra prendre aucune position au nom de la société I, sauf à en avoir reçu préalablement l’accord de la société I et que la position ait été préalablement discutée et approuvée par la société I'.

Si le rôle de conseil et d’assistance de la société SEI ressort des courriers, notes de travail et procès-verbaux des réunions des gérants et du conseil de surveillance de la société SEI versés aux débats, il n’est pas démontré que les analyses et conseils ainsi prodigués ont eu pour effet de modifier ou infléchir les décisions prises par les dirigeants de la société I, ni que la position de 'Chairman of the Board' occupée par A J-K au sein de la société I lui ait conféré un pouvoir décisionnel.

En effet, A J-K a exprimé à plusieurs reprises sa déception des 'résultats provenant de mauvaises décisions'(réunion des gérants du 6 janvier 2006), son inquiétude 'quant à la dégradation des résultats'(réunion des gérants du 19 décembre 2006), ses interrogations sur 'la fiabilité des prévisions de l’exercice qui semblent beaucoup trop élevées '(réunion des gérants du 16 janvier 2007).

Il a constaté, lors du conseil de surveillance du 11 avril 2006, que plusieurs mesures qui avaient considérablement affecté le résultat 2005, avaient été 'prises chez I, sans l’avoir consulté'.

Pour autant, ainsi que cela ressort de l’analyse du rapport de l’audit décidé en réunion des gérants du 19 décembre 2006, qui pointe notamment 'la recherche à tout prix de résultats financiers par Quiksilver chaque fin de trimestre' qui a 'bouleversé l’entreprise et sa culture', et des termes mêmes de l’article 3 du contrat susvisé, le pouvoir décisionnel n’était pas entre les mains de la société SEI.

C’est donc par une exacte appréciation des faits de la cause que le tribunal a jugé que la SCA SEI n’avait pas exercé un rôle de holding animatrice lui permettant de bénéficier de l’exonération au titre des biens professionnels.

En cause d’appel, les consorts X ne reprennent pas leur argumentation sur l’exercice, par la société SEI, d’une activité industrielle, commerciale ou libérale.

Le jugement sera donc confirmé.

Sur les titres de la société SDI Société de Service et Développement

Le droit de reprise décennal n’est ramené à un délai de trois ans que si l’exigibilité des droits a été suffisamment révélée à l’administration par le document enregistré, sans qu’il soit nécessaire de procéder à des recherches ultérieures.

La mention manuscrite apposée sur les déclarations d’impôt de solidarité sur la fortune 2006 et 2007 dans le cadre réservé aux biens professionnels exonérés : 'SDI Service et Développement SA : dossier en attente d’examen par l’Administration', n’est pas suffisante pour révéler à l’administration l’exigibilité des droits, sans que celle-ci ait à procéder à des recherches.

C’est dès lors à bon droit que le tribunal a dit n’y avoir lieu à application du délai de prescription abrégée.

Le jugement sera intégralement confirmé.

Aucune considération d’équité ne commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, contradictoirement,

— Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

— Dit n’y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— Condamne les consorts X aux dépens d’appel.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

Signé par Madame COMBES, Président, et par Madame PELLEGRINO, faisant fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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