Confirmation 21 janvier 2020
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Sur la décision
| Référence : | CA Limoges, ch. soc., 21 janv. 2020, n° 18/00818 |
|---|---|
| Juridiction : | Cour d'appel de Limoges |
| Numéro(s) : | 18/00818 |
| Décision précédente : | Tribunal de commerce de Limoges, 22 juillet 2018 |
| Dispositif : | Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours |
Sur les parties
| Président : | Véronique LEBRETON, président |
|---|---|
| Avocat(s) : | |
| Parties : | SA AUTOMOBILES CHATENET c/ SARL CAR VEN, Compagnie d'assurances AXA FRANCE IARD |
Texte intégral
ARRÊT N° .
N° RG 18/00818 – N° Portalis DBV6-V-B7C-BH26L
AFFAIRE :
SA AUTOMOBILES CHATENET prise en la personne de son Président
C/
Compagnie d’assurances AXA FRANCE IARD, SARL CAR VEN
VL/MLM
Indemnisation de préjudice résultant à la livraison de produit défaillant
G à Me Debernard-Dauriac et Me Dauriac, le 21/01/2020
COUR D’APPEL DE LIMOGES
CHAMBRE ECONOMIQUE ET SOCIALE
------------
ARRÊT DU 21 JANVIER 2020
-------------
A l’audience publique de la Chambre économique et sociale de la cour d’appel de LIMOGES, le vingt et un Janvier deux mille vingt a été rendu l’arrêt dont la teneur suit ;
ENTRE :
SA AUTOMOBILES CHATENET prise en la personne de son Président, dont le siège social est […]
représentée par Me Anne DEBERNARD-DAURIAC avocat postulant du barreau de LIMOGES et par Me François BILLEBEAU, avocat plaidant, du barreau de PARIS
APPELANTE d’un jugement rendu le 23 Juillet 2018 par le Tribunal de Commerce de Limoges
ET :
1.- Compagnie d’assurances AXA FRANCE IARD, dont le siège social est […]
2.- SARL CAR VEN, dont le siège social est […]
représentée par Me Laetitia DAURIAC, avocat postulant, du barreau de LIMOGES, et par Me NETTER-ADLER, avocat plaidant, du barreau de PARIS
INTIMEES
---==oO§Oo==---
L’affaire a été fixée à l’audience du 03 Décembre 2019, après ordonnance de clôture rendue le 27 novembre 2019, la Cour étant composée de Madame A B, Présidente de Chambre, de Monsieur Jean-Pierre COLOMER, Conseiller et de Madame Mireille VALLEIX, Conseiller, assistés de Monsieur Y Z, Greffier, Madame A B, Présidente de Chambre, a été entendue en son rapport oral, les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients.
Puis, Madame A B, Présidente de Chambre a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 21 Janvier 2020, par mise à disposition au greffe de la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.
LA COUR
EXPOSE DU LITIGE :
La SA Automobiles Chatenet, constructeur de véhicules sans permis, est en relation d’affaire avec la SARL Car Ven qui fabrique et lui livre une pièce nommée « berceau moteur » (pièce fixée sur le moteur et au chassis du véhicule qui a pour fonction de maintenir le moteur en place et de supporter son poids).
En mai 2009, la société Automobiles Chatenet a créé un nouveau modèle nommé « CH26 » équipé de ce berceau moteur.
À la fin de l’année 2009, elle a informé la société Car Ven de l’existence de défaillances dans la conception des berceaux au niveau des tubes arrières, problème pouvant être à l’origine de ruptures. Ce problème a concerné environ 100 véhicules pour partie encore en concession et pour partie déjà vendus.
La société Car Ven a fait intervenir des soudeurs en concession, a proposé de livrer 99 berceaux de remplacement ainsi qu’une remise commerciale.
Au mois de septembre 2012, la société Automobiles Chatenet a été informée de nouvelles ruptures au niveau du berceau moteur dont l’origine a été identifiée comme étant un défaut de soudure de la patte avant-droite. Elle a alors fait une déclaration auprès de son assureur, la compagnie AXA France IARD, cette compagnie étant également l’assureur de la société Car Ven.
Un rapprochement entre les deux sociétés a eu lieu, une expertise amiable ayant été organisée par la compagnie d’assurance.
Suite aux rapports d’expertise des deux experts convoqués par la compagnie d’assurance AXA, la société Automobiles Chatenet s’est vue indemnisée de ses frais de rappel au titre de la garantie « retrait » à hauteur de 14 881 €. Au titre de la responsabilité civile de la société Car Ven, la compagnie d’assurance a également pris à sa charge les frais de réparation, versant 80 000 € à la société Automobiles Chatenet sous forme de quittance provisionnelle.
***
Suite au refus de la société Car Ven et de son assureur de prendre en charge le préjudice financier allégué par la société Automobiles Chatenet au titre des frais occasionnés par la procédure de rappel des véhicules défectueux et du préjudice commercial engendré par la baisse corrélative des commandes, par actes d’huissier de justice séparés en date des 11 et 18 mai 2018, elle a fait assigner la société Car Ven et la compagnie AXA France aux fins de les entendre condamnées in solidum à lui payer la somme de 1 970 007 € en réparation du préjudice subit.
Par jugement en date du 23 juillet 2018, le tribunal de commerce de Limoges :
— s’est déclaré territorialement compétent pour connaître du présent litige ;
— a débouté la société Automobiles Chatenet de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
— débouté la société Car Ven et la compagnie AXA France de leurs demandes, fins et conclusions ;
— dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
— fait masse des entiers dépens qui seront supportés par moitié par chacune des parties, le coût de la présente décision liquidé à la somme de 88,93 € dont 14,82 € de TVA.
La société Automobiles Chatenet a régulièrement interjeté appel de cette décision le 10 août 2018, son recours portant sur les chefs du jugement la déboutant de ses demandes et la condamnant à la moitié des dépens.
***
Aux termes de ses écritures du 26 novembre 2019, la société Automobiles Chatenet demande à la Cour de la recevoir en son appel, infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :
— condamner in solidum la compagnie AXA France IARD et son assuré Car Ven à lui payer la somme de 1 970 007 € en réparation du préjudice résultant de la livraison de berceaux moteur affectés d’un défaut de soudure, ayant impacté les ventes en 2012, 2013 et 2014, avec intérêts légaux à compter de la date de l’assignation avec capitalisation ;
— condamner in solidum la compagnie AXA France IARD et son assuré Car Ven à lui payer la somme de 100 000 € résultant de la mobilisation de ses dirigeants et salariés pour remédier au sinistre sériel ;
— dire et juger que les conditions générales non signées par la société Car Ven ne peuvent être valablement opposées par la compagnie AXA France IARD ;
— dire et juger, en tout état de cause, que le plafond de garantie s’il était opposable s’appliquerait par années d’assurance, soit 3 fois 305 000 = 915 000 € ;
— dans l’hypothèse où la Cour s’estimerait insuffisamment informée par le rapport du cabinet Price Waterhouse Cooper, de désigner tel expert qu’il plaira avec pour mission d’examiner les préjudices de la société Automobiles Chatenet résultant de la livraison par la société Car Ven de berceaux moteur affectés d’un défaut de soudure, ayant impacté les ventes en 2012, 2013 et 2014, à partir de cette note et des pièces produites par la société Automobiles Chatenet ;
— rejeter l’ensemble des demandes de la société Car Ven et de la compagnie AXA France IARD ;
— la compagnie AXA France IARD et son assurée la société Car Ven seront condamnées in solidum à lui payer la somme de 100 000 €, eu égard « au temps et à l’énergie consacrés au traitement de procédures contentieuses au détriment de ses autres tâches de gestion et de développement de l’activité de la société qui cause un préjudice à cette dernière » (Com, 16 avril 2016, pourvoi n° 14-29.483) et au temps passé par ses salariés au titre du litige;
— les condamner à lui payer chacune la somme de 50 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
— les condamner aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Debernard-Dauriac, avocat.
À l’appui de son recours, la société Automobiles Chatenet soutient qu’elle est fondée à demander l’indemnisation de l’intégralité de son préjudice né de la défaillance des berceaux moteur fournis par la société Car Ven.
En effet, elle explique que le modèle CH26 concerné par ledit berceau était l’unique modèle fabriqué et commercialisé à partir du mois de mai 2009 et que les conséquences des désordres sur son image auprès des concessionnaires ont eu des répercussions importantes sur ses ventes. Des problèmes étant apparus une première fois en décembre 2009 sur les berceaux, des interventions ont été mises en place à titre gracieux, parfois avec beaucoup de retard, la société Car Ven ayant reconnu le défaut lié au dysfonctionnement de son robot. Face à de nouveaux problèmes affectant une seconde fois la sécurité des véhicules, la société indique avoir mis en place une opération de rappel en juin 2014 qui a concerné 1073 véhicules, la révélation de ces problèmes, qui concernaient toute sa production, et la campagne de rappel étant quasi immédiatement corrélées à une baisse significative des ventes. Elle explique que ce préjudice, estimé par le cabinet Price Waterhouse Coopers, est en réalité bien plus important que l’estimation fournie, notamment à raison du temps mobilisé à la résolution de ce problème. La société appelante ajoute que la désignation d’un expert judiciaire aux fins de déterminer son préjudice est nécessaire dans le cas où l’estimation réalisée par le cabinet Price Waterhouse Coopers ne serait pas jugée suffisante, les intimées ne proposant aucun calcul alternatif.
Enfin, elle conclut au rejet de l’appel incident formé par la société Car Ven et la compagnie AXA France IARD, exposant que la demande relative à l’incompétence du tribunal de commerce de Limoges est purement dilatoire, les conditions générales de vente, inexistantes lors de la livraison des berceaux litigieux, ne pouvant en tout état de cause lui être opposées, puisqu’elles ont été rédigées postérieurement et n’ont jamais été soumises à son acceptation. De même, elle indique que les notes du cabinet Ciblexperts relatives notamment au rappel de véhicules sont erronées, n’ayant que pour but de justifier l’absence d’indemnisation de son préjudice par la compagnie d’assurance, qui était au courant de l’importance de la campagne de rappel et qui se trouvait être également celle de la société Car Ven. Enfin, la société indique que la prétendue limite de garantie ne lui est opposable en l’absence de production du contrat d’assurance actuel de la société Car Ven.
Aux termes de leurs écritures du 12 novembre 2019, la société Car Ven et la compagnie AXA France Iard demandent à la Cour :
In limíne litis :
— d’infirmer le jugement dont appel du chef de la compétence territoriale ;
— constater la stipulation d’une clause attributive de juridiction dans les conditions générales de vente liant la société Car Ven et la société Automobiles Chatenet ;
— constater l’incompétence du tribunal de commerce de Limoges pour connaître du litige opposant les sociétés Car Ven, Automobiles Chatenet et AXA France Iard ;
— constater la compétence du tribunal de commerce de La-Roche-sur-Yon ;
En conséquence, de :
— déclarer le tribunal de commerce de Limoges incompétent pour connaître du litige opposant les sociétés Car Ven, Automobiles Chatenet et AXA France Iard ;
— renvoyer le litige devant le tribunal de commerce de La-Roche-sur-Yon ;
A titre principal, de :
— confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a constaté que la société Automobiles Chatenet ne démontre et ne rapporte ni la preuve des préjudices allégués, ni leur lien de causalité ;
En conséquence, de :
— confirmer le jugement du tribunal de commerce de Limoges du 23 juillet 2018 et ;
— débouter la société Automobiles Chatenet de ses demandes en réparation de son préjudice ;
Sur la demande subsidiaire d’expertise formulée par la société Automobiles Chatenet :
— préalablement à toute expertise, faire sommation et ordonner la communication sous astreinte des numéros de série des véhicules concernés par les procédures « TUBI » d’une part et « STARPLAST » d’autre part et enfin, ceux des véhicules concernés par le présent litige ;
Toutefois, si la Cour venait à considérer qu’un expert judiciaire devait être nommé, de :
— prendre acte des plus expresses protestations et réserves de la société Car Ven et d’AXA sur la mesure sollicitée ;
— modifier la mission impartie à l’expert proposée par la société Automobiles Chatenet ainsi :
« Désigner tel expert qu’il plaira avec pour mission :
— se faire remettre tout document utile à la justification du préjudice allégué par la société Automobiles Chatenet ;
— déterminer si la société Automobiles Chatenet a subi un préjudice économique lié aux berceaux moteur affecté d’un défaut de soudure de la patte avant-droite du berceau moteur ;
— se faire remettre par la société Automobiles Chatenet la justification des autres sinistres survenus entre 2008 et 2014 afin d’identifier leurs impacts financiers respectifs. »
A titre infiniment subsidiaire, de :
— réduire les demandes de la société Automobiles Chatenet au seul préjudice correspondant aux factures induites par les frais de retrait, soit la somme de 59 764 € HT ;
— ordonner le cas échéant, que la provision de 80 000 € versée par la compagnie AXA France IARD viendra en complète déduction de l’éventuelle condamnation de la société Car Ven ou en tout état de cause, ordonner toute condamnation en deniers ou quittances, la provision versée constituant bonne et valable quittance ;
En tout état de cause, de :
— dire et juger que la compagnie AXA France IARD est recevable et fondée à opposer à la société Automobiles Chatenet les conditions et limitations de la police d’assurance souscrite par la société Car Ven, à savoir 305 000 € dont 150 000 € de frais de dépose/repose avec une franchise de 1 525 € par sinistre ;
En conséquence, de :
— dire et juger notamment que la franchise contractuelle de 1 525 € prévue par la police d’assurance AXA France IARD vient en déduction de toute condamnation qui pourrait être mise à la charge d’AXA France IARD ;
— prendre acte que la société Automobiles Chatenet a reçu de la société AXA France IARD en sa qualité d’assureur de la société Car Ven la somme de 80 000 €, somme qui viendra en déduction de toute condamnation qui pourrait être mise à la charge de la compagnie AXA France IARD ;
En tout état de cause :
— d’infirmer le jugement en ce qu’il a été écarté la demande d’article 700 formulée par la compagnie AXA France IARD et Car Ven et, statuant à nouveau ;
— de condamner la société Automobiles Chatenet à payer à la société Car Ven et à la compagnie AXA France IARD, chacune, la somme de 15 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, dont distraction au profit de Maître Dauriac, avocat, laquelle pourra les recouvrer dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile ;
— condamner la société Automobiles Chatenet aux entiers dépens de l’instance.
In limine litis, les sociétés intimées soutiennent qu’en application de la clause d’attribution juridictionnelle contenue à l’article 13 des conditions générales de vente portées à la connaissance de la société Automobiles Chatenet, l’affaire doit nécessairement être renvoyée devant la juridiction compétente en première instance, à savoir le tribunal de commerce de La-Roche-sur-Yon.
A titre principal, les intimées font valoir que la somme réclamée par la société Automobiles Chatenet n’est pas justifiée par des éléments factuels et qu’aucun lien de causalité direct et certain entre les désordres allégués par l’appelante et sa perte d’exploitation n’est prouvé, la baisse des ventes étant en tout état de cause antérieure au sinistre et en lien avec d’autres désordres affectant le système de freinage et les planchers. Elles précisent que le sort d’une grande partie des véhicules concernés par les berceaux de la société Car Ven n’est jamais évoqué par l’appelante, aucun préjudice ne pouvant être invoqué de ce chef, et qu’aucune trace de rappel n’est relevée sur le site de la DGCCRF, ni dans le cadre du système RAPEX comme cela devrait être le cas. Elles ajoutent que la société Automobiles Chatenet provoque volontairement une confusion des sinistres avec ceux issus d’autres fournisseurs concernant les maîtres cylindre et les plaques ABS dont elle ne peut leur faire supporter les conséquences.
Quant à la nouvelle demande d’indemnisation, les sociétés intimées indiquent qu’elle n’est pas recevable, un même préjudice ne pouvant être indemnisé qu’une seule fois et rien ne permettant en tout état de cause de justifier le préjudice allégué.
Concernant leur demande relative aux frais irrépétibles dont elles ont été déboutées, elles exposent que bien qu’AXA soit l’assureur des deux sociétés, les dossiers sont bien traités individuellement, justifiant la nomination de deux experts différents, non pas dans une intention dilatoire mais bien en raison de l’absence de justification de son préjudice par la société Automobiles Chatenet.
A titre subsidiaire, elles font valoir que la demande de désignation d’un expert formée par la société Automobiles Chatenet doit être refusée comme étant purement dilatoire, une telle mesure ne pouvant suppléer la carence d’une des parties dans l’administration de la preuve.
A titre très subsidiaire, les intimées exposent que le préjudice indemnisable doit être limité aux seules factures dûment versées aux débats par la société Automobiles Chatenet, à savoir ses pièces 19, 23 et 25.
Enfin, les sociétés Car Ven et AXA soutient qu’en tout état de cause, les limitations de la police d’assurance souscrite sont opposables à la société Automobiles Chatenet, limitant donc le montant garanti.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 27 novembre 2019.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, et des prétentions et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.
MOTIFS DE LA DECISION
sur l’exception d’incompétence
C’est par des motifs complets et pertinents, qui ne sont pas remis en cause par les débats et les pièces produites en appel et que la cour adopte, qu’au visa des articles 48 du code de procédure civile et L441-6 du code de commerce et après avoir précisément analysé les pièces, le premier juge considérant qu’il n’était pas démontré que la société Automobiles Chatenet avait eu connaissance des conditions générales contenant la clause attributive de compétence, les documents produits étant tous postérieurs à la relation contractuelle litigieuse, a estimé que cette clause était par conséquent inopposable à la société Automobiles Chatenet et a retenu sa compétence.
Le Jugement déféré sera donc confirmé de ce chef.
sur le fond
Selon l’article 1147 du code civil, dans sa version applicable au présent litige, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Il incombe à celui qui invoque l’application de ces dispositions de rapporter la preuve du manquement aux obligations contractuelles et du lien de causalité avec le préjudice invoqué.
En l’espèce, il résulte des écritures et des pièces produites aux débats que la société Automobiles Chatenet a subi deux désordres successifs sur le berceau moteur produit et livré par la société Car Ven et qui équipe son modèle CH26 créé en 2009, un premier à la fin de l’année 2009 atteignant les tubes arrières pouvant être à l’origine de ruptures et ayant concerné 100 véhicules, un second apparu à partir du mois de septembre 2012, affectant cette fois la patte avant-droite du cadre, qui concerne les véhicules fabriqués par la société Automobiles Chatenet entre le 9 février et le 15 octobre 2012.
Le premier désordre a donné lieu à des interventions en concession, une remise de 5 % et la fourniture gratuite de 100 berceaux, cadencés par 9 entre avril 2013 et février 2014, ainsi que l’établissent le courriel du 3 décembre 2010 et le courrier du 27 mars 2013.
En ce qui concerne le second qui est caractérisé, selon les expertises techniques non contestées, par un défaut de soudure de la patte qui est de type collage, sans aucune pénétration dans le métal, est à l’origine des ruptures de soudure pour les sinistres déclarés. La responsabilité de la société Car Ven dans la survenance du sinistre n’est pas contestée contrairement à l’étendue du préjudice qui en découle.
Il ressort des différents rapports d’expertise technique et financière, que les premières réclamations qui y sont relatives se sont échelonnées entre le mois de septembre 2012 et le mois de mars 2014,
qu’elles étaient de l’ordre d’une vingtaine, avant que la société Automobiles Chatenet ne lance, à l’issue du quatrième rapport d’expertise de Saretec, désignée par la compagnie AXA France Iard pour représenter la société Automobiles Chatenet et avec l’accord de la compagnie AXA France Iard, la campagne de rappel de 1073 véhicules au mois de juin 2014, ainsi que la société Automobiles Chatenet en justifie par la production de tous les courriers adressés aux détenteurs de véhicules susceptibles d’être affectés du défaut de soudure de la patte avant-droite du berceau ainsi que les factures afférentes aux réparations. Il n’est pas plus discuté que la campagne de rappel s’est achevée à la fin de l’année 2014.
Si l’analyse des bilans et comptes de résultat de la société Automobiles Chatenet diffère, s’agissant des causes de la baisse du chiffre d’affaires de cette dernière, selon qu’ils émanent de M. X, représentant la société Price waterhouse coopers expert comptable de la société Automobiles Chatenet, ou de la société Ciblexpert, mandatée par la compagnie AXA France Iard pour représenter de la société Car Ven, en revanche les parties ne discutent pas la réalité des chiffres qui en résultent ni celle du nombre de ventes de véhicules sur la période écoulée entre 2009 et 2016.
A cet égard, entre le quatrième trimestre 2009 et la fin l’année 2016, il en ressort un infléchissement du chiffre d’affaires dès 2011 (CA 2009/17 748 043€ ; CA 2010/19 949 495€ ; CA 2011/17 352 296€), soit ' 13 %, cette baisse s’étant accentuée en 2012 (CA2012/14 028 671€, soit ' 19,2%) puis s’étant maintenue en 2013 (CA 2013/11 621 655€, soit ' 17,2%) et 2014 (CA 2014/10 572 168€, soit ' 9%), pour augmenter à nouveau progressivement en 2015 (CA 2015/12 550 453€) et en 2016 (CA 2016/13 479 805€).
Il en est de même du nombre de ventes de véhicules en France, qui ont subi une forte diminution à compter du quatrième trimestre 2011 (-22,99%), ainsi que du nombre de véhicules vendus à l’export, qui baissent de façon significative à compter du troisième trimestre 2010 (-36%), diminution qui s’est maintenue au moins jusqu’à la fin de l’année 2013, selon les tableaux et graphiques figurant dans la note financière n° 2 du 20 décembre 2017 de Ciblexperts, qui ne sont pas sérieusement contredits par la note d’évaluation de M. X du 23 novembre 2015.
Outre le fait que la baisse d’activité ainsi observée ne peut pas avoir de lien de causalité avec un désordre apparu à compter de septembre 2012, ainsi que l’ont pertinemment relevé les premiers juges, la société Automobiles Chatenet ne rapporte pas la preuve que la perception des produits de la société Automobiles Chatenet par les acteurs du circuit de distribution du véhicule CH26 a été immédiatement impactée par la vingtaine de sinistres qui ont été déclarés entre septembre 2012 et mars 2014 et qui ont concerné la fabrication entre février et octobre 2012, avant la campagne de rappel du deuxième semestre 2014 et que cet impact a été de nature à provoquer ou augmenter la baisse des ventes dès 2012.
La seule hausse des chiffres d’affaires en 2015 et 2016, certes postérieure à la campagne de rappel du millier de véhicules concernés par le désordre touchant la patte avant droite du berceau livré par la société Car Ven, ne peut suffire à caractériser le lien de causalité direct et certain entre le maintien d’une baisse des ventes et du chiffre d’affaires amorcée en 2011 et le désordre dont s’agit.
Il s’en déduit que la société Automobiles Chatenet doit être déboutée de l’ensemble de ses demandes par voie de confirmation.
Compte tenu des motifs qui précédent, il n’y a pas lieu d’ordonner une expertise pour chiffrer le montant du préjudice invoqué par la société Automobiles Chatenet qui sera déboutée de sa demande de ce chef.
sur les dépens et les frais de procédure
La société Automobiles Chatenet qui succombe à l’instance devra en supporter les dépens. Il
n’apparaît pas inéquitable que chaque partie supporte la charge de ses propres frais irrépétibles, la société Automobiles Chatenet, la compagnie AXA France Iard et la société Car Ven seront déboutées de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant en audience publique et par arrêt contradictoire, en dernier ressort, par mise à disposition au greffe, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Déboute la société Automobiles Chatenet de sa demande d’expertise,
Déboute la société Automobiles Chatenet, la compagnie AXA France Iard et la société Car Ven de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Automobiles Chatenet aux dépens.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Y Z. A B
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