Cour d'appel de Lyon, 14 décembre 2012, n° 12/02656

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 14 déc. 2012, n° 12/02656
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 12/02656
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lyon, 5 mars 2012, N° F10/01267

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLÉGIALE

R.G : 12/02656

SA X

C/

C

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON

du 06 Mars 2012

RG : F 10/01267

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 14 DECEMBRE 2012

APPELANTE :

SA RHONE ALPES PALETTES, dite X

XXX

69800 SAINT-PRIEST

représentée par la SELARL REQUET CHABANEL SELARL (Me Lidwine MEYNET), avocats au barreau de LYON

INTIMÉ :

D C

né le XXX à XXX

XXX

XXX

comparant en personne, assisté de M. H I (Délégué syndical ouvrier)

PARTIES CONVOQUÉES LE : 15 Mai 2012

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 26 Octobre 2012

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Nicole BURKEL, Président de chambre

Marie-Claude REVOL, Conseiller

Michèle JAILLET, Conseiller

Assistés pendant les débats de Christine SENTIS, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 14 Décembre 2012, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Nicole BURKEL, Président de chambre, et par Christine SENTIS, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

Attendu que le conseil de prud’hommes de LYON, section industrie, par jugement contradictoire du 6 mars 2012, a :

— au visa des articles L1226-10 à L1226-15 du code du travail, dit et jugé que l’obligation de reclassement de monsieur D C, afférente à la mesure de licenciement prononcée par la SA RHONE ALPES PALETTE

(X 1) et ensuite de la déclaration d’inaptitude de celui-ci par la médecine du travail, n’a pas été exécutée avec suffisamment de sérieux par cette dernière

— condamné la SA RHONE ALPES PALETTE (X 1) à payer à monsieur C :

* 26 453,43 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut de reclassement

* 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— dit que ces sommes porteront intérêts de droit à compter du prononcé du jugement

— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,

— déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

— condamné SA RHONE ALPES PALETTE (X 1) aux entiers dépens d’instance, y compris les éventuels frais d’exécution forcée de la présente décision ;

Attendu que la cour est régulièrement saisie par un appel formé par la SA X ;

Attendu que monsieur D C a été engagé par la SA RHONE ALPES PALETTES (X) suivant contrat à durée indéterminée, en qualité de manutentionnaire, niveau 4, échelon 1H à compter du 24 juin 1991 ;

Que son revenu mensuel moyen brut s’est élevé à 1 321,05 euros pour 151,67 heures ;

Attendu que monsieur C a été victime d’un accident du travail le 7 décembre 2009, son contrat de travail étant suspendu jusqu’au 19 janvier 2010 ;

Attendu que le médecin du travail à l’occasion de la 1re visite de reprise du 19 janvier 2010 a formulé l’avis suivant :

« inapte à la reprise du travail ' avis à confirmer dans 15 jours comme le demande la législation. Reclassement à envisager : peut faire un travail ne sollicitant pas le dos de manière importante c’est-à-dire sans manutention- par exemple travail de surveillance, nettoyage etc’ » ;

Que lors de la seconde visite du 3 février 2010, le médecin du travail a indiqué :

« Après avis médical spécialisé complémentaire, inapte définitif au poste de manutentionnaire dans l’entreprise. Après examen des postes de travail existants dans l’entreprise, aucune solution de reclassement, d’aménagement de poste n’est préconisé, car sa santé lui interdit tout mouvement sollicitant le dos de manière importante et toute posture contraignante, type station debout prolongée » ;

Attendu que par lettre du 29 janvier 2010, l’employeur a informé le médecin du travail de ce qu’elle faisait appel aux services d’une société extérieure pour la sécurité du site et de ce que le nettoyage du site industriel ne nécessite pas un emploi, chaque salarié participant au nettoyage individuel de son poste, lui a adressé « la liste des postes existants au sein de notre société, étant précisé qu’aucun poste n’est actuellement vacant » et lui a demandé s’il existe d’autres possibilités de reclassement et/ou aménagement de postes ;

Qu’à cette lettre était annexée une liste de 7 postes existant sur l’établissement de SAINT PRIEST ( à savoir réparateur de palettes, trieur de palettes, cariste, chauffeur livreur, commercial, secrétaire, comptable ) et une autre de 4 postes existant sur l’établissement d’A BOUTHEON ( à savoir réparateur de palettes, trieur de palettes, cariste, chauffeur ) ;

Attendu que par lettre du 8 février 2010, l’employeur a informé monsieur C de l’impossibilité de le reclasser ;

Attendu que monsieur C a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 19 février 2010, par lettre recommandée avec avis de réception du 10 février 2010 ;

Qu’il a été licencié par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 février 2010 pour impossibilité de reclassement et/ou d’aménagement de poste suite à inaptitude médicale définitive ;

Attendu que monsieur C a déclaré à l’audience être âgé de 55 ans à la date de rupture des relations contractuelles, avoir perçu des allocations chômage depuis son départ de l’entreprise, ses droits expirant en avril 2013 et n’avoir pas retrouvé de travail;

Attendu que la SA X emploie plus de 11 salariés et n’est pas dotée d’institutions représentatives du personnel ;

Que la convention collective applicable est celle du bois et des scieries;

Attendu que la SA X demande à la cour par conclusions écrites, déposées le 6 septembre 2012, visées par le greffier le 26 octobre 2012 et soutenues oralement, de :

— constater qu’elle a rempli son obligation de moyen qui lui incombait dans la recherche d’un poste de reclassement pour monsieur C

— constater qu’aucun poste compatible avec les prescriptions du médecin du travail n’était vacant et susceptible de lui être proposé que ce soit au sein des deux établissements de la société X, la société X G, filiale de la première ou au sein de Y

— dire et juger que le licenciement de monsieur C repose sur une cause réelle et sérieuse

— infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Lyon intervenu

— dire et juger que le montant de l’indemnité spéciale de licenciement versée à monsieur C est conforme aux dispositions légales et conventionnelles

— confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Lyon

— débouter monsieur C de l’ensemble de ses demandes indemnitaires

— condamner monsieur C à lui verser la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;

Attendu que monsieur C demande à la cour par conclusions écrites, déposées le 22 octobre 2012, visées par le greffier le 26 octobre 2012 et soutenues oralement, de :

— constater l’abandon de la demande relative à l’indemnité de licenciement, l’employeur ayant démontré dans ses calculs la justesse de ses éléments

— confirmer les condamnations prononcées par le conseil de prud’hommes de LYON au titre des dommages et intérêts pour défaut de reclassement soit 26.453,43 euros (sic)

— condamner l’employeur à lui payer 1.400 euros au titre des frais supplémentaires engagés par l’appel de l’employeur au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les intérêts légaux sur toutes les demandes en paiement des sommes d’argent à dater du 6 mars 2012 date du 1er jugement

— condamner la SA RHONE ALPES PALETTE (X 1) aux entiers dépens d’instance, y compris les éventuels frais d’exécution forcée de l’arrêt ;

Attendu que pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie en application de l’article 455 du code de procédure civile aux conclusions déposées et soutenues oralement;

MOTIFS DE LA DECISION:

Attendu que monsieur D C a été licencié pour impossibilité de reclassement et/ou d’aménagement de poste suite à inaptitude médicale définitive, par lettre du 24 février 2010 ;

Attendu que la cour n’est plus saisie que du seul litige afférent au licenciement et à l’obligation de reclassement incombant à l’employeur ;

Attendu qu’aux termes des articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail si, à l’issue d’un arrêt de travail consécutif à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre, à l’issue des périodes de suspension, l’emploi qu’il occupait précédemment :

* l’employeur lui propose, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise et après avis des délégués du personnel, un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail,

* lorsque l’employeur est dans l’impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s’opposent au reclassement,

* l’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de l’impossibilité où il se trouve de proposer un emploi dans les conditions prévues ci-dessus, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions,

* s’il prononce le licenciement, l’employeur respecte la procédure prévue applicable au licenciement pour motif personnel ;

Attendu que lorsque l’entreprise fait partie d’un groupe, les possibilités de reclassement doivent être recherchées à l’intérieur du groupe auquel elle appartient, parmi les entreprises dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation permettent la permutation de tout ou partie du personnel ;

Attendu que monsieur C soutient que l’employeur n’a jamais eu volonté réelle de reclassement le concernant, ayant reçu le 8 février 2010, soit seulement quatre jours après la seconde visite du médecin du travail, une lettre de la société X l’informant de l’impossibilité de reclassement, et ayant été licencié par lettre du 24 février 2010, soit cinq jours seulement (comprenant un samedi et un dimanche) après l’entretien préalable à licenciement du 19 février précédent ;

Attendu que la société RHONE ALPES PALETTES, dite X, a pour activité la vente de palettes neuves et d’occasion, récupérées ou recyclées ;

Qu’elle expose et justifie exercer sur deux sites, l’un à SAINT PRIEST, l’autre à A, et employer une vingtaine de salariés au sein de ses deux établissements dénommés X 1 et X 2;

Que la SA X verse régulièrement aux débats notamment :

— son registre entrées/sorties du personnel commun aux deux sites et sa filiale X G

— un dossier de présentation de Y

— les statuts de l’Association Y

— un extrait K bis la concernant

— la lettre de recherche pour monsieur C de reclassement adressée par elle le 4 février 2010 à sa filiale X G

— la lettre que monsieur B, trésorier Y, lui a adressée, lettre datée du 8 février 2010, faisant référence à une conversation téléphonique et à un courrier du 4 février 2010, l’informant qu’ « après contact avec les adhérents Y, 'malheureusement, il n’existe aucun poste vacant pour le reclassement du salarié dont vous nous avez transmis les informations »;

Attendu que préliminairement, l’avis du médecin du travail concluant à l’inaptitude du salarié à tout emploi dans l’entreprise ne dispense pas l’employeur qui a licencié ce dernier d’établir qu’il s’est trouvé dans l’impossibilité de le reclasser, conformément aux prescriptions de l’article L. 1226-10 du code du travail, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutation, transformation de poste ou aménagement du temps de travail ;

Attendu que d’une part, l’employeur démontre avoir effectué en son sein une recherche de reclassement ;

Que le faible délai existant entre la date du second avis du médecin du travail et la lettre adressée le 8 février 2010 à son salarié d’impossibilité de reclassement ne peut suffire à caractériser l’absence de recherche sérieuse menée par l’employeur s’agissant d’une petite structure comprenant principalement des réparateurs de palettes, trieurs de palettes, cariste ou chauffeurs livreurs, pour lesquels le médecin du travail a exclu toute possibilité de reclassement ou d’aménagement ;

Attendu que d’autre part, l’employeur a recherché en vain auprès de sa filiale X G, laquelle pour la période du 01/01/2006 au 30/06/2011, révèle que sur un effectif de 5 chauffeurs et d’un gestionnaire G, seul un chauffeur a quitté l’entreprise le 28 février 2010, sans être remplacé ;

Que monsieur Z, chauffeur au sein de la filiale, par attestation, décrit son poste de travail, lequel est qualifié de « très physique », impliquant de très nombreux travaux de manutention ;

Que par ailleurs, l’employeur démontre que monsieur C, au moment du licenciement, n’était pas titulaire du permis poids lourd ;

Que la formation du salarié était donc insuffisante pour occuper le seul emploi, qui pouvait être considéré comme vacant, de chauffeur, l’obtention du permis poids lourd ne relevant pas de l’obligation d’adaptation de l’employeur ;

Que si l’employeur a l’obligation d’assurer l’adaptation des salariés à l’évolution de leur emploi, en leur donnant au besoin une formation complémentaire, il ne peut lui être imposé de leur délivrer une formation initiale qui leur fait défaut ;

Attendu enfin que monsieur C reproche à la SA X de n’avoir pas recherché sérieusement une solution de reclassement auprès des 27 sites Y, mentionnés sur le papier à entête de son employeur ;

Que Y, situé 1 place de l’Homme de fer à XXX n’est ni une filiale de X ni une entité de son groupe mais une association d’entreprises juridiquement différentes, ayant « pour but de regrouper dans le cadre d’un réseau par secteur ou régions des entreprise ayant les activités de collecte, négoce, gestion, maintenance, valorisation des palettes, tout en conservant l’identité et l’indépendance de chacun des membres adhérents », sans aucune obligation de permutabilité du personnel, ainsi qu’en justifie l’employeur qui en a été l’adhérent jusqu’au 21 mai 2010 ;

Qu’allant au-delà de ses obligations, l’employeur a tenté de rechercher au sein de cette association une solution de reclassement pour monsieur C ;

Attendu que l’employeur a rempli l’obligation de reclassement de son salarié déclaré inapte ;

Que le licenciement de monsieur C repose sur une cause réelle et sérieuse;

Attendu que le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu’il a considéré le licenciement prononcé comme dépourvu de cause réelle et sérieuse ;Qu’il doit l’être également en ses dispositions relatives à l’application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens;

Attendu que monsieur C, succombant en se demandes, doit être condamné aux dépens d’instance et d’appel ;

Qu’aucune considération d’équité ne justifie l’application de l’article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement par arrêt contradictoire, dans la limite de l’appel

Reçoit l’appel

Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a considéré le licenciement prononcé à l’encontre de monsieur C comme dépourvu de cause réelle et sérieuse, en ses dispositions relatives à l’application de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens d’instance

Statuant à nouveau de ces seuls chefs,

Dit que la SA X a satisfait à l’obligation de recherche de reclassement lui incombant

Dit que le licenciement dont monsieur C a été l’objet repose sur une cause réelle et sérieuse

Déboute monsieur C de sa demande de dommages et intérêts pour manquement de son employeur à l’obligation de reclassement

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile

Condamne monsieur C aux entiers dépens d’instance et d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Christine SENTIS Nicole BURKEL

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