Cour d'appel de Lyon, 30 avril 2015, n° 14/09449

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 30 avr. 2015, n° 14/09449
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 14/09449
Décision précédente : Tribunal de commerce de Lyon, 23 septembre 2014, N° 2014r678

Texte intégral

R.G : 14/09449

Décision du

Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 24 septembre 2014

RG : 2014r678

XXX

X F-P

C/

X F-K

X Y

X H

SAS X

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

3e chambre A

ARRET DU 30 Avril 2015

APPELANT :

Monsieur F-P X dirigeant de sociétés

né le XXX à XXX

XXX

XXX

Représenté par la SCP AGUIRAUD NOUVELLET, avocats au barreau de LYON

Assisté de Me Alexis CHABERT, avocat au barreau de LYON

XXX

INTIMES :

Monsieur F-K X

né le XXX à XXX

XXX

XXX

Représenté par la SCP TUDELA ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

Assisté de la SELARL BALDER, avocats au barreau de PARIS

Monsieur Y X

né le XXX à ROANNE

XXX

XXX

Représenté par la SCP TUDELA ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

Assisté de la SELARL BALDER, avocats au barreau de PARIS

Madame H X

née le XXX à XXX

XXX

XXX

Représentée par la SCP TUDELA ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

Assistée de la SELARL BALDER, avocats au barreau de PARIS

SAS X

immatriculée au RCS de Villefranche-Tarare sous le N° 725 780 498

Représentée par son dirigeant légal

XXX

XXX

Représentée par la SCP TUDELA ET ASSOCIES, avocats au barreau de LYON

Assistée de la SELARL BALDER, avocats au barreau de PARIS

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 05 Mars 2015

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 05 Mars 2015

Date de mise à disposition : 30 Avril 2015

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

— F-M N, président

— Hélène HOMS, conseiller

— Pierre BARDOUX, conseiller

assistés pendant les débats de Jocelyne PITIOT, greffier

en présence de B C Juge consulaire au Tribunal de commerce de LYON

A l’audience, F-M N a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par F-M N, président, et par Jocelyne PITIOT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSE DU LITIGE:

La société X, dont le capital est détenu par les membres de la famille X, détient des participations dans plusieurs filiales. La société LTD, filiale de la société X, est gérée par F-P X qui en détient 68 % des parts.

Suite à des différends intervenus entre F-P X et les autres associés du groupe X, un protocole d’accord a été conclu le 2 août 2012 organisant la sortie du capital de F-P X de toutes les sociétés du groupe, les autres associés s’engageant à lui racheter ses parts selon un prix fixé par deux experts désignés.

Parallèlement à une action engagée par F-P X en exécution du protocole du 2 août 2012, celui-ci a sollicité des associés de la société LTD l’agrément de la société IGECADE, société à laquelle il souhaitait apporter ses titres.

Suite à des différends intervenus au cours d’une assemblée générale extraordinaire du 11 juin 2013, la société IGECADE n’a pas été agrée en qualité de nouvelle associée.

F-P X a alors saisi le Président du tribunal de commerce de Lyon sur requête aux fins de désigner un expert pour fixer le prix de ses parts.

Par ordonnance du 25 février 2014, le Président du tribunal de commerce de Lyon a fait droit à cette demande en désignant un expert et par ordonnance du 24 mars 2014, il a désigné un autre expert aux lieux et place du premier expert désigné.

La société X, F-K X, Y X et D X ont alors formulé devant le président du tribunal de commerce de Lyon une demande de rétractation des ordonnances sur requête.

Par ordonnance du 24 septembre 2014, celui-ci a :

— rejeté la demande d’irrecevabilité formulée par Monsieur F-P X,

— rétracté les deux ordonnances rendues en date du 25 février 2014 et du 24 mars 2014 désignant au final Monsieur F G en qualité d’expert amiable,

— ordonné immédiatement la cessation des fonctions de Monsieur F G,

— débouté Monsieur F-P X de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

— condamné Monsieur F-P X à payer aux demandeurs la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du CPC,

— condamné le même aux entiers dépens d’instance.

Par déclaration du 2 décembre 2014, F-P X a relevé appel de cette décision, intimant F-K X, Y X, D X et la société X.

Dans ses dernières conclusions déposées le 22 janvier 2015, F-P X demande à la cour de :

— constater que l’ordonnance sur requête désignant l’expert aux fins d’évaluation des parts de la société LTD est insusceptible de recours,

— constater que les moyens développés par les intimés pour justifier leur demande de rétractation relèvent exclusivement de la compétence du juge du fond déjà saisi,

— constater que le Président du tribunal de commerce de Lyon a commis un excès de pouvoir,

— réformer l’ordonnance du 24 septembre 2014 en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

— déclarer irrecevable la demande de rétractation de l’ordonnance du 24 mars 2014 désignant Monsieur F G en qualité d’expert,

— rejeter, en toute hypothèse, la demande de rétractation de l’ordonnance du 24 mars 2014 désignant Monsieur F G en qualité d’expert,

— condamner la société X, Messieurs F-K et Y X, et Madame D X à verser à Monsieur F-P X la somme de 10.000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive,

— condamner la société X, Messieurs Y et F-K X et Madame D X, solidairement, à verser à Monsieur F-P X la somme de 7.500€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

— condamner les mêmes aux entiers dépens de l’instance, ceux d’appel distraits au profit de la SCP AGUIRAUD NOUVELLET.

Il fait notamment valoir que :

Le recours en rétractation de l’ordonnance est irrecevable, l’ordonnance du Président du tribunal de commerce n’étant susceptible d’aucun recours conformément aux articles R223-11 al. 2 du code de commerce et 1843-4 du code civil.

Le Président du tribunal de commerce, saisi d’un recours en rétractation, ne pouvait statuer comme il l’a fait sur des arguments échappant à sa compétence, en tranchant de fait le litige au fond en constatant un abus de majorité et en interprétant l’intention des parties. Il a donc commis un excès de pouvoir.

Il n’a commis aucun abus de pouvoir en refusant de modifier le texte de la 7e résolution de l’assemblée générale du 11 juin 2013, la situation de blocage ayant été créée volontairement par les intimés qui ne souhaitaient pas agréer la société IGECAD parce qu’ils refusaient l’exécution du protocole d’accord du 2 août 2012.

Il n’existe aucun conflit d’intérêts entre lui et la société LTD résultant de sa participation au vote de résolution litigieuse et aucune règle ne lui interdisait de participer à ce vote.

Sa requête aux fins de désignation d’un expert était parfaitement justifiée car les associés de la société LTD refusent d’exécuter leur obligation d’acquérir ou de faire acquérir ses titres en violation de l’article L.223-14 du code de commerce et mettent tout en 'uvre pour vider la société LTD de sa substance.

L’ordonnance de désignation de l’expert, en elle-même, n’emporte aucune obligation de rachat et ne fait aucun grief aux associés.

Dans leurs dernières conclusions déposées le 26 février 2015, la société X, F-K X, Y X et D X demandent à la cour de :

— dire et juger recevable l’action en rétractation des ordonnances de référé des 14 et 24 mars 2014,

— dire et juger que Monsieur le Président du Tribunal de commerce de Lyon n’a commis aucun excès de pouvoir dans l’appréciation souveraine de fait permettant d’apprécier l’opportunité et la légitimité de la requête de Monsieur F-P X, faisant sienne la motivation de Monsieur le Président du Tribunal de commerce de Lyon,

— constater la dénaturation des faits présentés dans la requête de Monsieur F-P X,

— confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance du 24 septembre 2014,

— condamner Monsieur F-P X à verser aux demandeurs une somme de 8.000€, sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

— condamner Monsieur F-P X en tous les dépens.

Ils exposent notamment que :

La prohibition des voies de recours de l’article R. 223-11 alinéa 2 du code de commerce ne prévaut pas sur l’article 496 alinéa 2 du code de procédure civile qui prévoit la possibilité de revenir devant le juge ayant prononcé l’ordonnance contestée. Cette faculté de rétractation ne constitue, en effet, pas une voie de recours au sens de l’article R. 223-11 alinéa 2 du code de commerce.

Le Président du tribunal de commerce de Lyon n’a commis aucun excès de pouvoir car, saisi d’une demande de rétractation d’une ordonnance sur requête, il dispose des mêmes pouvoirs d’appréciation qu’il possédait lors de la signature de l’ordonnance sur requête. Il a donc dû nécessairement examiner le fond du litige puisque c’est précisément sur ces éléments que la requête de F-P X avait été présentée à l’origine.

En refusant de reformuler le texte de la 7e résolution, F-P X a commis un abus de pouvoir car en tant que gérant il ne pouvait s’opposer à la volonté des associés de faire modifier la rédaction d’un projet de résolution et il ne pouvait décider du rejet de la proposition de rectification sans un vote préalable.

En sa qualité de président de séance, de gérant majoritaire de la société LTD et de principal intéressé sur l’agrément de la société IGECADE, F-P X s’est placé dans une situation de conflit d’intérêt.

L’ordonnance du 24 mars 2014 génère des conséquences manifestement excessives car ils seraient contraints de racheter la totalité des parts de F-P X.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures devant la cour ci-dessus évoquées auxquelles il est expressément renvoyé pour répondre aux exigences de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION:

Sur la recevabilité de la requête en rétractation:

Attendu que l’appelant considère que le recours en rétractation est irrecevable, l’ordonnance du président du tribunal de commerce n’étant susceptible d’aucun recours conformément aux articles R223-11 al. 2 du code de commerce et 1843-4 du code civil;

Mais attendu que la faculté de rétractation, prévue à l’article 496 alinéa 2 du code de procédure civile, n’est pas une voie de recours mais le moyen de rétablir le débat contradictoire, lorsque l’ordonnance initiale avait été obtenue à la requête d’une seule des parties;

Qu’en l’espèce il ne fait pas de doute que les ordonnances des 25 février 2014 et 24 mars 2014 avaient été prises sur requête de l’appelant sans donner lieu à débat contradictoire; Que les intimés, intéressés par les ordonnances rendues, étaient donc en droit d’en référer au juge qui avait rendu ces ordonnances;

Que leur requête en rétractation est donc recevable;

Sur l’infirmation de la décision entreprise:

Attendu que l’article L223-14 alinéa 3 du code de commerce, en l’espèce reprises par l’article 11.I-4 des statuts de la société LTD, prévoit que « Si la société a refusé de consentir à la cession, les associés sont tenus, dans le délai de trois mois à compter de ce refus, d’acquérir ou de faire acquérir les parts à un prix fixé dans les conditions prévues à l’article 1843-4 du code civil »; Que l’article 1843-4 du code civil dispose que: « Dans tous les cas où sont prévus la cession des droits sociaux d’un associé, ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d’accord entre elles, par ordonnance du président du tribunal statuant en la forme des référés et sans recours possible »;

Attendu que le « procès verbal des délibérations de l’assemblée générale mixte du 11 juin 2013 » de la société LTD mentionne qu’est soumise au vote une septième résolution ainsi libellée : « L’assemblée générale, après avoir entendu la lecture du rapport de la gérance, décide, au regard du protocole d’accord signé le 2 août 2012, et de la demande d’agrément reçue de monsieur F-P X d’agréer la société IGECAD en qualité de nouvel associé » et mentionne: « Cette résolution n’est pas adoptée: 2 488 voix-1 152 voix contre »;

Qu’au regard des textes susvisés, sans qu’il y ait lieu de rechercher les raisons psychologiques ou autres qui ont pu justifier ce vote (et notamment la volonté de faire reformuler la résolution), ce refus de la cession est un fait juridique qui ne laissait aux parties qu’une seule voie procédurale possible; Que faute pour les parties d’avoir acquis ou fait acquérir les parts dans le délai de trois mois, prorogé jusqu’au 11 mars 2014 par ordonnance du 29 août 2013, et faute pour elles de s’être entendues sur leur prix, la désignation d’un expert s’imposait;

Que l’instance en rétractation d’une requête ayant ordonné une expertise n’a pour seul objet que de soumettre à l’examen d’un débat contradictoire la mesure initialement ordonnée à l’initiative d’une partie en l’absence de ses adversaires, la saisine du juge de la rétractation étant limitée à cet objet;

Qu’en conséquence, sans qu’il y ait lieu d’interpréter l’intention des parties à travers les pièces versées aux débats, notamment pour savoir s’il y a eu en l’espèce un « abus de majorité », il convient d’infirmer l’ordonnance entreprise et, statuant à nouveau, de dire n’y avoir lieu à rétractation;

Sur la demande indemnitaire:

Attendu que l’appelant demande la condamnation des intimés à lui payer la somme de de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive;

Mais attendu qu’ester en justice et se défendre en appel sont des droits qui ne dégénèrent en abus qu’en cas de malice, mauvaise foi, erreur équipollente au dol ou circonstances particulières permettant d’en déduire que la procédure a été détournée de sa finalité; Que le fait que les intimés succombent en leurs demande principale ne suffit pas à démontrer que la procédure était abusive; Que l’appelant ne rapporte pas la preuve de ce caractère abusif; Qu’en outre les intimés n’ont pas succombé en toutes leurs demandes puisqu’ils étaient fondés à dire la requête en rétractation recevable;

Que la demande indemnitaire ne peut donc prospérer;

Sur l’article 700:

Attendu que l’équité commande en l’espèce que chacune des parties, qui succombe partiellement en ses demandes, garde la charge des frais irrépétibles qu’elle a du engager dans cette procédure;

Que les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile seront donc rejetées;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant publiquement par arrêt contradictoire,

REJETTE la demande en irrecevabilité de la requête en rétractation,

DIT cette requête recevable,

INFIRME l’ordonnance entreprise,

ET, statuant à nouveau,

DIT n’y avoir lieu à rétractation,

Y AJOUTANT,

DEBOUTE F-P X de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive,

DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile,

DIT que chaque partie conservera la charge de ses frais irrépétibles et de ses dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

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