Cour d'appel de Lyon, 9 septembre 2016, n° 15/04050

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carole-vercheyre-grard.fr · 7 mars 2017

mise à jour le 3 janvier 2018 La modalité 2 de l'accord cadre du 22 juin 1999 prévoit la possibilité de conclure avec un salarié dépendant de la convention collective SYNTEC, un forfait de temps de travail de 38h30 par semaine sur 218 jours annuels (article 3 de l'accord). Ce forfait d'heures repose sur une condition d'éligibilité : les ingénieurs ou cadres doivent percevoir au moins un salaire au plafond de la sécurité sociale de chaque année. Dans les sociétés qui ont choisi de retenir cette modalité, il est constant de nombreux salariés se voient appliquer la modalité 2 de l'accord …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 9 sept. 2016, n° 15/04050
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 15/04050
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lyon, 8 avril 2015, N° F13/03831

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE

X

R.G : 15/04050

SAS AKKA I & S

C/

Y

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON

du 09 Avril 2015

RG : F 13/03831

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 09 SEPTEMBRE 2016

APPELANTE :

SAS AKKA I&S

XXX

XXX

Représentée par Me Amandine GONCALVES de l’AARPI FIDERE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉ :

Z Y

né le XXX à XXX

XXX

XXX

Comparant en personne, assisté de Me Mélanie CHABANOL de la SCP ANTIGONE AVOCATS, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 26 Mai 2016

Présidée par Natacha LAVILLE, Conseiller magistrat X, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Gaétan PILLIE, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

— Michel SORNAY, président

— Didier JOLY, conseiller

— Natacha LAVILLE, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 09 Septembre 2016 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Michel SORNAY, Président et par Gaétan PILLIE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Suivant lettre d’embauche du 11 janvier 2008, la société COFRAMI a engagé Z Y en qualité d’ingénieur, statut cadre, position 1, échelon 2, coefficient 100 à durée indéterminée à compter du 4 février 2008 moyennant un salaire mensuel brut de 2 167 euros pour une durée forfaitaire de travail de 38h30 par semaine.

Il a en outre été précisé que le salarié relevait de la catégorie 'réalisation de mission’ et que sa rémunération incluait les heures supplémentaires effectuées dans la limite de la durée du travail prévue, les heures effectuées au-delà de 38h30 étant compensées au moyen d’une demi-journée de repos par tranche exceptionnelle d’activité entière de 3h30.

La relation de travail était régie par la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils dite convention SYNTEC.

En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute de Z Y s’établissait à la somme de 2 340.22 euros.

Par courrier du 1er juin 2012, Z Y a sollicité de la société AKKA I&S, qui vient aux droits de la société COFRAMI, un rappel de salaires en faisant valoir que son salaire d’embauche était inférieur au plafond mensuel de la sécurité sociale fixé à 2 773 euros pour l’année 2008 et ce en méconnaissance de la convention collective.

Par courrier du 3 août 2012, la société AKKA I&S a rejeté la demande de Z Y au motif que selon la Fédération SYNTEC, le fait que la rémunération dans le cadre d’une convention de forfait en heures sur la semaine doit être égale au plafond de la sécurité sociale constitue non pas une condition d’exécution de la convention de forfait en heures mais une condition de la clause de forfait. L’employeur a ajouté que la rémunération annuelle majorée de Z Y était au moins égale à 115 % de la rémunération minimale conventionnelle de sa catégorie et que le salarié ne subissait dès lors aucun préjudice.

Par courrier du 26 mars 2013, Z Y a donné sa démission avec effet au 25 juin 2013 tenant compte de la durée du préavis de trois mois et a demandé à pouvoir être libéré de tout engagement contractuel dès le 29 mars 2013.

Le 25 juillet 2013, Z Y a saisi le conseil de prud’hommes de LYON aux fins d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, un rappel de salaires et les congés payés afférents, la délivrance des bulletins de salaire conformes sous astreinte et le paiement de dommages et intérêts pour violation des dispositions conventionnelles, outre le paiement d’une indemnité de procédure.

Par jugement rendu le 9 avril 2015, le conseil de prud’hommes a

— condamné la société AKKA I&S à payer à Z Y les sommes suivantes:

* 29 594.30 euros à titre de rappel de salaire de février 2008 à mars 2013 au visa de l’accord national du 22 juin 1999, et 2 959.43 euros au titre des congés payés afférents, le tout avec intérêts au taux légal à compter du 29 juillet 2013, date de la convocation de la société AKKA I&S devant le conseil de prud’hommes,

* 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour violation des dispositions conventionnelles,

* 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonné la délivrance des bulletins de salaire rectifiés dans un délai d’un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard au-delà de ce délai et dit que le conseil se réservait le droit de liquider l’astreinte,

— ordonné l’exécution provisoire du jugement,

— condamné la société AKKA I&S aux dépens.

La cour est saisie de l’appel interjeté le 6 mai 2016 par la société AKKA I&S.

Par conclusions régulièrement communiquées, visées par le greffier et développées oralement à l’audience du 26 mai 2016, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, la société AKKA I&S demande à la cour:

— à titre principal de débouter Z Y de sa demande de rappel de salaires et de le condamner au remboursement des sommes indûment versées en première instance, aux motifs que le non-respect du plafond de sécurité sociale ne peut pas conduire au paiement de la différence entre le salaire de base et le plafond de la sécurité sociale, et que le calcul de Z Y est erroné pour être fondé sur le seul salaire de base,

— à titre subsidiaire de limiter le rappel de salaires à la somme de 16 552.16 euros et les congés payés afférents à celle de 1 655.21 euros et de condamner Z Y au remboursement des sommes indûment versées en première instance,

— en tout état de cause de condamner Z Y au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

En outre oralement sur la demande de rappel de salaires de Z Y présentée à titre subsidiaire, la société AKKA I&S a soulevé une fin de non-recevoir tirée la prescription et sur le fond a reproché à Z Y de ne pas avoir intégré les réductions du temps de travail dans son décompte et d’avoir établi un calcul annuellement au lieu de l’établir par semaine.

Par conclusions régulièrement communiquées, visées par le greffier et développées oralement à l’audience du 26 mai 2016, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, Z Y demande à la cour:

— de confirmer le jugement entrepris,

— à titre subsidiaire si la cour retient l’argumentation adverse et déclare en conséquence nulle la convention de forfait, de condamner la société AKKA I&S au paiement de la somme de 3 798.22 euros à titre de rappel de salaires correspondant aux 3h50 hebdomadaires qui auraient du lui être payées avec 25% de majoration et 379.82 euros au titre des congés payés afférents,

— enfin de condamner la société AKKA I&S au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais d’appel.

MOTIFS

1 – sur le rappel de salaires

1.1. sur le principe de la demande

Attendu qu’en vertu des articles L 3121-38 et suivants du code du travail, la durée du travail de tout salarié peut faire l’objet d’une convention individuelle de forfait en heures sur la semaine ou sur le mois; que des convention individuelles de forfait en heures ou en jours sur l’année peuvent être conclues par des catégories de salariés déterminées par une convention ou un accord collectif de travail, ou par une convention ou un accord d’entreprise.

Attendu que l’accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail pris pour l’application de la loi du 13 juin 1998 et rattaché à la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils, désignée ci-après 'convention SYNTEC', prévoit à l’égard des cadres au sein des entreprises de l’ingénierie, de l’informatique et du conseil, compte tenu de la nature des fonctions et responsabilités confiées à ce personnel, une mesure de temps exprimé en nombre de journées ou demi-journées de travail en lieu et place d’un calcul en heures; que trois types de modalités de gestion des horaires sont a priori distingués à l’initiative de l’entreprise :

— modalités standard,

— modalités de réalisation de missions,

— modalités de réalisation de missions avec autonomie complète.

Que des conventions de forfait en heures sur la semaine peuvent être conclues par des ingénieurs et cadres lorsqu’ils relèvent de la catégorie 'réalisation de missions’ pour la gestion de leurs horaires; qu’en effet, l’article 3 de l’accord précité dispose que:

'Ces modalités s’appliquent aux salariés non concernés par les modalités standard ou les réalisations de missions avec autonomie complète.

Tous les ingénieurs et cadres sont a priori concernés, à condition que leur rémunération soit au moins égale au plafond de la sécurité sociale. De plus, en fonction de l’activité de l’entreprise, un accord d’entreprise doit préciser les conditions dans lesquelles d’autres catégories de personnel peuvent disposer de ces modalités de gestion.

Compte tenu de la nature des tâches accomplies (responsabilités particulières d’expertise technique ou de gestion qui ne peuvent s’arrêter à heure fixe, utilisation d’outils de haute technologie mis en commun, coordination de travaux effectués par des collaborateurs travaillant aux mêmes tâches…), le personnel concerné, tout en disposant d’une autonomie moindre par rapport aux collaborateurs définis à l’article 3, ne peut suivre strictement un horaire prédéfini. La comptabilisation du temps de travail de ces collaborateurs dans le respect des dispositions légales se fera également en jours, avec un contrôle du temps de travail opéré annuellement (chapitre III).

Les appointements de ces salariés englobent les variations horaires éventuellement accomplies dans une limite dont la valeur est au maximum de 10 % pour un horaire hebdomadaire de 35 heures.

La rémunération mensuelle du salarié n’est pas affectée par ces variations.

Les dépassements significatifs du temps de travail, commandés par l’employeur, au-delà de cette limite, représentant des tranches exceptionnelles d’activité de 3,5 heures, sont enregistrés en suractivité. Le compte de temps disponible peut être utilisé pour enregistrer ces suractivités qui ont vocation à être compensées par des sous-activités (récupérations, intercontrats…) par demi-journée dans le cadre de la gestion annuelle retenue.

Ces salariés ne peuvent travailler plus de 219 jours pour l’entreprise, compte non tenu des éventuels jours d’ancienneté conventionnels. Le compte de temps disponible peut être utilisé pour enregistrer les jours accordés aux salariés concernés par ces modalités. Toutefois, ce chiffre de 219 jours pourra être abaissé par accord d’entreprise ou d’établissement, négocié dans le cadre de l’article L. 132-19 du code du travail.

Le personnel ainsi autorisé à dépasser l’horaire habituel dans la limite de 10 % doit bénéficier d’une rémunération annuelle au moins égale à 115 % du minimum conventionnel de sa catégorie.'

Attendu qu’il résulte de l’ensemble de ces dispositions que le dispositif du forfait en heures 'réalisation de mission’ suppose une double condition, à savoir que la rémunération minimale de l’ingénieur ou du cadre est d’une part au moins égale au plafond de la sécurité sociale et d’autre part au moins égale à 115 % du minimum conventionnel de sa catégorie.

Attendu qu’en l’espèce, il est constant que Z Y a été embauché à compter du 4 février 2008 en qualité d’ingénieur statut cadre moyennant un salaire mensuel brut de 2 167 euros pour une durée forfaitaire de travail de 38h30 par semaine; qu’il appartenait à la catégorie 'réalisation de mission'; que Z Y a été soumis à une convention de forfait en heures correspondant à cette catégorie de gestion des horaires.

Attendu que dans le cadre de ce forfait en heures conclu conformément à l’article 3 de l’accord de branche précité, il apparaît que Z Y a perçu durant toute sa collaboration auprès de son employeur, soit jusqu’au 29 mars 2013, une rémunération d’un montant de 2 167 euros à son embauche et de 2 340.22 euros en fin d’activité.

Attendu qu’il est constant que durant la totalité de la période d’activité de Z Y, le plafond de la sécurité sociale a été fixé à 2 773 euros par mois;

Que la rémunération de Z Y a donc été inférieure à ce plafond.

Attendu que pour contester la demande Z Y visant à obtenir un rappel de salaires correspondant à la différence entre les salaires perçus et le plafond de la sécurité sociale, la société AKKA I&S fait valoir que la condition relative au plafond de la sécurité sociale constitue une condition d’entrée dans le dispositif de la convention de forfait; que Z Y a bénéficié d’une convention de forfait en heures 'réalisation de mission’ alors que sa rémunération n’était pas au moins égale au plafond de la sécurité sociale; que la convention de forfait conclue par Z Y ne respecte donc pas les conditions conventionnelles; que la convention de forfait a donc été indûment conclue et se trouve nulle ; que la demande de rappel de salaires constitue une modalité d’exécution de la convention de forfait indûment conclue de sorte que cette demande n’est pas fondée; que Z Y se retrouve dans la situation initiale où il se trouvait avant la conclusion de convention de forfait; qu’il est ainsi soumis au droit commun et ne peut agir qu’en paiement d’heures supplémentaires dont il a la charge de rapporter l’existence et le nombre.

Mais attendu qu’il n’est pas discutable que la société AKKA I&S, anciennement la société COFRAMI, a fait signer à Z Y une convention de forfait en heures 'réalisation de mission’ en n’ignorant pas que ce salarié ne satisfaisait pas à la condition relative au plafond de la sécurité sociale; que la seule circonstance que la rémunération de Z Y n’était pas au moment de la conclusion de la convention de forfait en heures au moins égale au plafond de la sécurité sociale ne permet pas de dire que cette convention de forfait a été conclue 'indûment';

Qu’il appartenait à la société AKKA I&S, en concluant la convention de forfait en heures, d’assurer à Z Y la rémunération minimum prévue pour ce type de convention de forfait, à savoir une rémunération au moins égale à 115 % du minimum conventionnel de sa catégorie, ce qui a été incontestablement respecté, mais aussi de lui fournir une rémunération au moins égale au plafond de la sécurité sociale; que ces deux éléments relatifs à la rémunération constituent des conditions de formation d’une convention de forfait en heures 'réalisation de mission';

Que Z Y est donc bien fondé à solliciter un rappel de salaires correspondant à la différence entre les salaires qu’il a réellement perçus et le plafond de la sécurité sociale;

Qu’il ne saurait d’ailleurs être admis que la société AKKA I&S puisse se prévaloir de sa propre défaillance pour obtenir l’annulation de la convention de forfait de Z Y et imposer à ce dernier, en vertu des règles de droit commun sur la durée du travail, de rapporter la preuve d’heures supplémentaires au-delà de 35 heures hebdomadaires;

Que la cour relève que la société AKKA I&S a évidemment intérêt à se prévaloir du droit commun de la durée du travail puisque Z Y n’est bien sûr pas en capacité de rapporter cette preuve; qu’en effet, dans la mesure où il a conclu avec son employeur une convention de forfait en heures qui retient 38h30 par semaine, Z Y ne peut disposer d’aucun moyen pour justifier qu’il a travaillé au-delà de 35 heures par semaine;

Attendu qu’il s’ensuit qu’à l’égard de Z Y, la société AKKA I&S n’a pas respecté l’une des conditions prévues par l’article 3 de l’accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail pris pour l’application de la loi du 13 juin 1998 et rattaché à la convention collective SYNTEC, à savoir la condition relative au plafond de la sécurité sociale;

Que la société AKKA I&S se trouve donc redevable d’un rappel de salaires au visa de ces dispositions; que la demande de Z Y est donc fondée en son principe.

1.2. sur le montant de la demande

1.2.1 sur la prescription

Attendu que l’article L 3245-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi promulguée le 17 juin 2013, dispose que:

'L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.'

Attendu que le délai court à compter de la date à laquelle la somme est exigible, soit la date du paiement des salaires habituelle et en vigueur dans l’entreprise.

Attendu que ces nouvelles dispositions ont réduit le délai de prescription de l’action en paiement ou en répétition du salaire qui était antérieurement fixé à cinq ans.

Attendu qu’il convient de rappeler au conseil de l’appelant que la loi précitée intègre des dispositions transitoires issues de l’article 21 selon lesquelles la prescription triennale s’applique aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure;

Que la durée totale de la prescription ne peut donc pas excéder 5 ans.

Attendu que pour la première fois en cause d’appel, et au visa de ce texte, la société AKKA I&S expose que Z Y a quitté la société AKKA I&S le 29 mars 2013 puis a saisi le conseil de prud’hommes de sa demande de rappel de salaires le 25 juillet 2013; que l’appelante invoque l’application de la prescription triennale à la demande de rappel de salaires à compter de la rupture du contrat de travail soit les 3 années précédant le 29 mars 2013, et soutient en conséquence que les sommes allouées à Z Y doivent être réduites à la période d’avril 2010 à mars 2013 qui correspond aux trois années qui ont procédé la rupture de son contrat de travail.

Mais attendu qu’il résulte de ce qui précède que le contrat de travail de Z Y a été rompu le 29 mars 2013; que la prescription de 5 ans était alors applicable de sorte que ce salarié était recevable, en agissant sous ce régime de prescription le 25 juillet 2013, à revendiquer un rappel de salaires pour la période à compter du1er août 2008, puisque le point de départ de l’action en paiement de chacun de ces salaires était la date de son exigibilité;

Attendu qu’il convient donc de déclarer la société AKKA I&S mal fondée en sa fin de non-recevoir tirée de la prescription partielle de la demande en rappel de salaires ici présentée, et de déclarer Z Y recevable en sa demande de rappel de salaires portant sur la période d’août 2008 à mars 2013.

2.2.2. sur les sommes dues

Attendu qu’en vertu de l’article 3 de l’accord de branche du 22 juin 1999, le rappel de salaires dont se trouve redevable la société AKKA I&S correspond à la différence entre les rémunérations réellement perçues par Z Y et le plafond de la sécurité sociale.

Attendu que s’agissant du calcul des rémunérations perçues par Z Y, il est constant que l’article 3 de l’accord de branche du 22 juin 1999 ne précise pas les éléments qu’il convient d’y intégrer;

Que le règlement d’application de la réduction du temps de travail au sein de la société AKKA I&S prévoit que les personnels relevant de la catégorie 'réalisation de mission’ sont '… a priori tous les ingénieurs et cadres à condition que leur rémunération globale soit au moins égale au plafond de la sécurité sociale…';

Que ce document qui évoque une globalité de rémunérations doit toutefois être écarté au profit des dispositions de la convention collective SYNTEC et précisément de son article 32 qui dispose que:

'Dans les barèmes des appointements minimaux garantis afférents aux positions définies, sont inclus les avantages en nature évalués d’un commun accord et mentionnés dans la lettre d’engagement ainsi que les rémunérations accessoires en espèces, mensuelles ou non, fixées par la lettre d’engagement (ou par la lettre de régularisation d’engagement ou par un accord ou une décision ultérieure).

Pour établir si l’E.T.A.M. reçoit au moins le minimum le concernant, les avantages prévus ci-dessus doivent être intégrés dans la rémunération annuelle dont le douzième ne doit, en aucun cas, être inférieur à ce minimum.

Par contre, les primes d’assiduité et d’intéressement, si elles sont pratiquées dans l’entreprise, les primes et gratifications de caractère exceptionnel et non garanties ne sont pas comprises dans le calcul des appointements minimaux, non plus que les remboursements de frais, les indemnités en cas de déplacement ou détachement, la rémunération des heures supplémentaires…'.

Attendu qu’il résulte de ces dispositions que le calcul du salaire minimum des cadres ne doit pas intégrer les primes, qui sont des accessoires du salaire, lorsque elles-ci ont un caractère exceptionnel.

Attendu qu’en appliquant ces principes à la situation de Z Y pour la période de référence soit du mois d’août 2008 au mois de mars 2013, la cour relève à l’analyse de l’intégralité des fiches de paie versées aux débats que la rémunération mensuelle brute de Z Y se composait d’un salaire de base qui a évolué comme suit:

—  2 167 euros du 1er août 2008 au 31 mars 2009,

—  2 167.93 du 1er avril 2009 au 30 avril 2010,

—  2 211.28 euros du 1er mai au 30 novembre 2010,

—  2 211.62 euros du 1er décembre 2010 au 28 février 2011,

—  2 256 euros du 1er au 31 mars 2011,

—  2 305.63 euros du 1er avril 2011 au 28 février 2012,

—  2 340.22 euros du 1er mars 2012 au 31 mars 2013,

soit au total la somme de 125 673.70 euros ;

que Z Y a en outre perçu, toujours sur la période de référence des primes de vacances comme suit:

—  42.82 euros en décembre 2008,

—  128.07 euros en juin 2009,

—  128.07 euros en décembre 2009,

—  132.10 euros en juin 2010,

—  132.10 euros en décembre 2010,

—  134.17 euros en juin 2011,

—  134.17 euros en décembre 2011,

—  138.96 euros en juin 2012,

—  138.96 euros en décembre 2012,

—  235.77 euros en mars 2013,

soit la somme totale de 1 345.19 euros;

Que ces primes de vacances ont été versées périodiquement conformément aux dispositions de l’art 31 de la convention collective SYNTEC qui prévoit que l’ensemble des salariés bénéficie d’une prime de vacances d’un montant au moins égal à 10 % de la masse globale des indemnités de congés payés prévus par la convention collective;

Qu’il convient dès lors d’ajouter les primes de vacances aux salaires de base pour déterminer les sommes réellement perçues par Z Y; que ces sommes s’établissent pour la période de référence à la somme totale de 127 018.89 euros (125 673.70 + 1 345.19);

Qu’en revanche, la prime exceptionnelle de 300 euros perçue en avril 2010 et les primes de partage des profits, perçues en novembre 2011 pour la somme de 160 euros et celle de 10 euros perçue en novembre 2012, n’ont pas à être intégrées dans la rémunération de Z Y compte tenu de leur caractère exceptionnel; qu’aucun élément n’établit en effet l’existence d’une obligation pesant sur la société AKKA I&S pour le paiement de ces accessoires du salaires; que ces sommes seront donc écartées du calcul des rémunérations qui s’établissent en définitive à la somme de 127 018.89 euros.

Attendu que s’agissant du plafond de la sécurité sociale, il convient de retenir le plafond fixé mensuellement, soit la somme de 2 773 euros, en l’état du versement mensuel du salaire de Z Y;que le plafond s’établit à la somme totale de 155 288 euros pour la période de référence.

Attendu que la différence entre les rémunérations réellement perçues par Z Y et le plafond de la sécurité sociale, qui constitue les salaires non perçus, se présente donc comme suit:

155 288 – 127 018.89 = 28 269.11 euros.

Attendu qu’il s’ensuit que la société AKKA I&S est redevable envers Z Y de la somme de 28 269.11 euros euros au titre du rappel de salaires du 1er août 2008 au 31 mars 2013 et de celle de 2 826.91 euros au titre des congés payés afférents;

Que le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il a condamné la société AKKA I&S au paiement des sommes 29 594.30 euros à titre de rappel de salaire de février 2008 à mars 2013 au visa de l’accord national du 22 juin 1999 et de 2 959.43 euros au titre des congés payés afférents, le tout avec intérêts au taux légal à compter du 29 juillet 2013, date de la convocation de la société AKKA I&S devant le conseil de prud’hommes;

Que la société AKKA I&S sera condamnée au paiement de la somme de 28 269.11 euros au titre du rappel de salaires du 1er août 2008 au 31 mars 2013 et de celle de 2 826.91 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 29 juillet 2013, date de convocation de la société AKKA I&S devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes.

Attendu qu’il résulte de ce qui précède que la convention de forfait applicable à Z Y est valable; qu’il n’y a donc pas lieu d’examiner les demandes du chef de son annulation.

2 – sur les dommages et intérêts

Attendu que Z Y a subi un préjudice caractérisé par le fait de ne pas avoir perçu de son employeur l’intégralité de la rémunération à laquelle il avait droit en vertu des dispositions de la convention collective applicable à la relation de travail; que ce préjudice a justement été apprécié par le conseil de prud’hommes qui lui a alloué la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts; que le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

3 – sur les bulletins de salaires

Attendu que le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a ordonné la délivrance des bulletins de salaire rectifiés.

Attendu qu’au vu des circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu d’assortir cette condamnation d’une astreinte; que le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu’il a prononcé une astreinte de 50 euros par jour de retard au-delà de ce délai et en ce que le conseil de prud’hommes s’est réservé le droit de liquider l’astreinte.

4 – sur les demandes accessoires

Attendu qu’il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a mis à la charge de la société AKKA I&S les dépens de première instance et en ce qu’il a alloué à Z Y une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Attendu que la société AKKA I&S sera condamnée aux dépens d’appel.

Attendu que l’équité et les situations économiques respectives des parties justifient qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais en cause d’appel dans la mesure énoncée au dispositif.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

DECLARE la société AKKA I&S mal fondée en sa fin de non-recevoir tirée de l’application de la prescription triennale à la demande de rappel de salaires,

DECLARE Z Y recevable en sa demande de rappel de salaires portant sur la période d’août 2008 à mars 2013,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf:

— en ce qu’il a condamné la société AKKA I&S au paiement des sommes 29 594.30 euros à titre de rappel de salaire de février 2008 à mars 2013 au visa de l’accord national du 22 juin 1999 et de 2 959.43 euros au titre des congés payés afférents, le tout avec intérêts au taux légal à compter du 29 juillet 2013,

— en ce qui concerne l’astreinte prononcée pour la remise des bulletins de paie rectifiés,

STATUANT sur les chef infirmés et Y AJOUTANT,

CONDAMNE la société AKKA I&S à payer à Z Y la somme de 28 269.11 euros au titre du rappel de salaires du 1er août 2008 au 31 mars 2013 et de celle de 2 826.91 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 29 juillet 2013,

DIT n’y avoir lieu à astreinte pour la délivrance des bulletins de paie rectifiés,

CONDAMNE la société AKKA I&S aux dépens d’appel,

CONDAMNE la société AKKA I&S à payer à Z Y la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais en cause d’appel.

Le Greffier Le Président

Gaétan PILLIE Michel SORNAY

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Cour d'appel de Lyon, 9 septembre 2016, n° 15/04050