Cour d'appel de Lyon, Protection sociale, 15 décembre 2020, n° 19/05422

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, protection soc., 15 déc. 2020, n° 19/05422
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 19/05422
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Villefranche-sur-Saône, 17 juin 2019, N° 16/00322
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE

RAPPORTEUR

R.G : N° RG 19/05422 – N° Portalis DBVX-V-B7D-MQQT

X

C/

URSSAF

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Tribunal de Grande Instance de VILLEFRANCHE-SUR-SAONE

du 18 Juin 2019

RG : 16/00322

COUR D’APPEL DE LYON

Protection sociale

ARRÊT DU 15 DECEMBRE 2020

APPELANT :

Y X

[…]

[…]

représenté par Me Francois MORABITO de la SCP GOBERT & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMEE :

URSSAF RHONE ALPES

[…]

[…]

représenté par Me Nicolas ROGNERUD de la SELARL AXIOME AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Abdessamad BENAMMOU, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 15 Octobre 2020

Présidée par B C, Présidente, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Elsa SANCHEZ, Greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

— B C, présidente

— Bénédicte LECHARNY, conseiller

— Marie CHATELAIN, vice présidente placée auprès de monsieur le premier président de la Cour d’Appel de Lyon

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 15 Décembre 2020 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par B C, Présidente, et par Z A, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par lettre recommandée en date du 16 novembre 2016, Monsieur Y X a formé opposition devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Villefranche sur Saône à une contrainte émise à son encontre le 14 octobre 2016 et signifiée le 3 novembre 2016 par le Régime social des Indépendants (RSI) d’un montant de 4 275 euros correspondant aux cotisations et majorations de retard dues au titre du 2e trimestre 2016.

Par jugement en date du 18 juin 2019, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Villefranche sur Saône, devenu pôle social du tribunal de grande instance de Villefranche sur Saône a :

— validé la contrainte décernée le 14 octobre 2016 et signifiée le 3 novembre 2016 à Monsieur X pour le recouvrement des cotisations dues au titre du 2e trimestre 2016, outre les majorations de retard complémentaires éventuelles à parfaire jusqu’à complet règlement des cotisations qui les génèrent

— condamné Monsieur X à payer à l’URSSAF-Sécurité sociale des indépendants la somme de 4.358,01 euros

— condamné Monsieur X au paiement des frais de signification de la contrainte et de tous les actes de procédure nécessaires à son exécution

— débouté Monsieur X de ses demandes.

Monsieur X a régulièrement relevé appel de ce jugement, le 23 juillet 2019.

Dans ses conclusions développées oralement à l’audience du 15 octobre 2020 par son avocat, Monsieur X demande à la cour :

— d’infirmer le jugement du 18 juin 2019

— de dire que le RSI – URSSAF a commis des fautes dans la gestion de son dossier

— d’annuler la contrainte du 14 octobre 2016 comme étant insuffisamment motivée et mal fondée

— de condamner l’URSSAF à lui payer la somme de 1500 euros à titre de dommages intérêts pour le préjudice moral subi

— de condamner l’URSSAF à lui payer la somme de 1500 euros au titre des frais irrépétibles et aux entiers dépens

Monsieur X invoque en premier lieu le défaut de motivation de la contrainte litigieuse, faisant valoir que si la contrainte mentionne les périodes, montants réclamés et majorations de retard, elle ne précise pas la nature des cotisations, qu’elle présente au surplus des incohérences avec la mise en demeure au vu des montant réclamés et que la mise en demeure qui lui a été adressée ne dispensait pas le RSI de motiver la contrainte ensuite décernée, de sorte que celle-ci doit être annulée.

Il conteste ensuite le bien fondé de la créance réclamée, exposant qu’il a adressé trois chèques au RSI pour un total de 8465 euros correspondant au montant des cotisations sociales de l’année 2016 tel que calculé par le RSI dans l’échéancier du 10 septembre qu’il lui avait transmis, mais que l’organisme social a imputé une partie de ce montant sur des périodes de 2014 et 2015 au titre de régularisations sans l’en informer alors même qu’il avait expressément demandé au RSI de l’imputer aux cotisations de l’année 2016. Il ajoute qu’en effet, il avait formé opposition le 16 janvier 2016 à la contrainte délivrée le 23 décembre 2015 par le RSI portant sur les cotisations des années 2013 et 2014.

Il affirme que l’URSSAF a méconnu les dispositions de l’article 1342-1 du code civil (volonté manifestée par le débiteur) et a ainsi commis des fauts dans la gestion de son dossier l’empêchant d’établir un suivi précis de l’affectation de ses cotisations, ce qui lui a causé un préjudice moral.

L’URSSAF, venant aux droits du RSI, dans ses conclusions soutenues oralement à l’audience par son avocat, demande à la cour de :

— confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions

— valider la contrainte du 14 octobre 2016 signifiée le 3 novembre 2016 pour la somme de 4358.01 euros au titre du 2e trimestre 2016, outre les majorations de retard et frais de procédure

— rejeter l’ensemble des prétentions du débiteur

— condamner le débiteur aux dépens de l’instance.

L’URSSAF expose que la mise en demeure a détaillé la nature de l’obligation en précisant les différentes cotisations dues par le requérant, leur montant et la période concernée, que la différence de montant entre la mise en demeure et la contrainte, s’explique par un ajustement opéré à la suite du recalcul des cotisations en tenant compte du revenu 2015, puis du revenu estimé 2016 et que la contrainte est suffisamment motivée puisqu’elle mentionne la période concernée, le montant des cotisations réclamées et leur nature et qu’elle se réfère à la mise en demeure préalable à laquelle elle renvoie expressément.

Elle explique qu’elle a bien encaissé les trois chèques mais que ceux-ci n’ont pas été affectés à la période litigieuse du 2e trimestre 2016 dont l’échéance était fixée au 5 mai, qu’en effet, une partie des règlements a permis de solder les échéances des 3e trimestre 2016, 4e trimestre 2016 et période de régularisation 2016 et que la différence a été imputée sur l’arriéré de cotisations des échéances 2014 et 2015 dont M. X était débiteur.

Elle précise que les périodes régularisation 2014, régularisation 2015 et 3e trimestre 2016 ont fait l’objet d’un jugement du 18 juin 2017 validant la contrainte du 4 juillet 2017 signifiée le 17 juillet 2017 et condamnant M. X à régler la somme de 17.411 euros restant dûe.

Elle rappelle que la juridiction n’est pas compétente pour accorder de remise des majorations de retard et s’oppose à la demande de dommages intérêts, soutenant que Monsieur X ne rapporte pas la preuve d’une faute commise par l’organisme social qui lui aurait causé un préjudice.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est référé pour le surplus aux écritures déposées par les parties à l’appui de leurs explications orales devant la cour.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la validité de la contrainte:

L’article L 244-9 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, dispose que "la contrainte décernée par le directeur de l’organisme de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations ou les majorations de retard comporte, à défaut d’opposition du débiteur devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, tous les effets d’un jugement et confère notamment le bénéfice de l’hypothèque provisoire.

La motivation de la mise en demeure adressée au cotisant ne dispense pas l’organisme social de motiver la contrainte qu’il décerne ensuite pour le recouvrement des cotisations mentionnées dans la mise en demeure.

En l’espèce, le RSI a adressé à Monsieur X une mise en demeure datée du 8 juin 2016, reçue le 4 juillet 2016 2016, laquelle mentionne la somme totale dûe par le débiteur, en l’espèce 6 175 euros, la période concernée, soit le deuxième trimestre 2016, la nature et le montant des sommes dues au titre de chacune cotisations, ainsi que le montant des majorations de retard (316 euros)

La contrainte émise le 14 octobre 2016 et signifiée le 3 novembre 2016 par le RSI à Monsieur X se réfère à la mise en demeure du 6 juin 2016 et mentionne la somme dûe au titre des cotisations et contributions (5.859 euros) et la somme dûe au titre des majorations (316 euros) dont le total correspond à celui qui figure dans la mise en demeure, précision faite qu’ il est déduit une somme de 1.450 euros, de sorte que la somme restant dûe s’élève à 4725 euros, pour la période du 2e trimestre 2016.

L’assuré était dès lors en mesure de connaître la nature, la cause et l’étendue de son obligation, si bien que la contrainte apparaît suffisamment motivée et n’encourt aucune nullité de ce chef.

Le jugement déféré sera dès lors confirmé sur ce point.

Sur le principe et le montant de la créance

Il appartient à l’opposant à contrainte de rapporter la preuve que les cotisations qui lui sont réclamées ne sont pas dues.

Celui qui se prétend libéré d’une obligation doit justifier du paiement.

En vertu de l’article 1342-10 du code civil, le débiteur de plusieurs dettes peut indiquer, lorsqu’il paie, celle qu’il entend acquitter. A défaut d’indication par le débiteur, l’imputation a lieu comme suit : d’abord sur les dettes échues ; parmi celles-ci, sur les dettes que le débiteur avait le plus d’intérêt d’acquitter. A égalité d’intérêt, l’imputation se fait sur la plus ancienne; toutes choses égales, elle se fait proportionnellement.

Il appartient à l’opposant à contrainte de rapporter la preuve que les cotisations qui lui sont réclamées ne sont pas dues.

Celui qui se prétend libéré d’une obligation doit justifier du paiement.

En vertu de l’article 1342-10 du code civil, le débiteur de plusieurs dettes peut indiquer, lorsqu’il paie, celle qu’il entend acquitter. A défaut d’indication par le débiteur, l’imputation a lieu comme suit : d’abord sur les dettes échues ; parmi celles-ci, sur les dettes que le débiteur avait le plus d’intérêt d’acquitter. A égalité d’intérêt, l’imputation se fait sur la plus ancienne; toutes choses égales, elle se fait proportionnellement.

En l’espèce, Monsieur X a adressé trois chèques au RSI, leurs copies étant versées au dossier:

— le 29 septembre 2016, un chèque n°1864328 d’un montant de 4 238 euros

Ce chèque fait suite à l’appel de cotisations du 3e trimestre 2016 adressé par le RSI le 12 juillet 2016 pour un montant de 4 238 euros, il était accompagné d’un courrier de Monsieur X précisant 'je vous transmets la somme due pour une partie des cotisations 2016".

— le 4 novembre 2016, deux chèques datés du 7 novembre 2016, pour des montants respectifs de 433 euros (n° 5554311) et de 3 794 euros (n° 27 32748)

Ces deux chèques étaient adressés au RSI avec un courrier mentionnant que celui de 433 euros devait être affecté au 4e trimestre 2016, et celui de 3 794 euros au solde des cotisations de l’année 2016, comprenant ainsi celles exigées au titre du 2e trimestre de cette année.

Dans un dernier courrier en date du 7 novembre 2016, rédigé après avoir pris connaissance de la contrainte émise par le RSI, Monsieur X récapitule les versements qu’il a effectués, manifestant de nouveau sa volonté expresse de les affecter au règlement des cotisations de l’année 2016 qu’il considère ainsi soldées.

Les deux derniers chèques étant postérieurs à la signification à Monsieur X de la contrainte le 3 novembre 2016, il ne peut être reproché au RSI de ne pas avoir imputé ces versement au règlement des cotisations et majorations dues au titre du 2e trimestre faisant l’objet de la contrainte litigieuse de sorte que celle-ci était fondée à sa date d’émission.

C’est à tort que l’URSSAF a imputé les règlements effectués par Monsieur X au règlement du solde d’autres échéances, la volonté du cotisant d’affecter son règlement au solde de l’année 2016 et donc au 2e trimestre 2016 étant sans équivoque.

Si la contrainte ne peut être annulée, il y a cependant lieu constater que Monsieur X s’est ensuite acquitté des causes de celle-ci à concurrence de la somme de 3794 euros versée le 7 novembre 2016, de sorte qu’il reste dû la somme de 481 euros.

Il résulte de ce qui précède que la contrainte émise par le RSI doit être validée à hauteur de ladite somme de 481 euros.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Toutefois, le règlement des cotisations dues par Monsieur X n’étant intervenu que postérieurement à la signification de la contrainte, les frais de signification seront laissés à la charge de l’opposant, en application de l’article R.133-6 du code de la sécurité sociale.

Sur la demande de dommages et intérêts

Au vu des éléments communiqués par Monsieur X, ce dernier ne démontre pas que la

gestion de son dossier par le RSI est constitutive d’une faute au sens de l’article 1240 du code civil lui ayant causé un préjudice moral dont il ne justifie pas au demeurant.

Sa demande de dommages et intérêts sera donc rejetée.

Dépens et frais irrépétibles

L’équité ne commande pas de faire droit à la demande formée par Monsieur X au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

Il convient par ailleurs de statuer sur les dépens, conformément à l’article 696 du code de procédure civile, l’article R 144-10 du code de la sécurité sociale, prévoyant la gratuité en la matière ayant en effet été abrogé à compter du 1er janvier 2019, par le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018.

L’URSSAF qui succombe pour l’essentiel sera dès lors condamnée aux dépens d’appel

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement:

INFIRME le jugement,

STATUANT à nouveau,

VALIDE la contrainte à hauteur de la somme de 481 euros

CONDAMNE Monsieur Y X au paiement des frais de signification de la contrainte

DEBOUTE Monsieur Y X de sa demande de dommages-intérêts,

REJETTE la demande de Monsieur Y X fondée sur l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

CONDAMNE l’URSSAF RHÔNE -ALPES aux dépens d’appel.

LA GREFFIÈRE LA PRESIDENTE

Z A B C



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