Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 30 avril 2021, n° 18/04407

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, ch. soc. b, 30 avr. 2021, n° 18/04407
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 18/04407
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Lyon, 23 mai 2018, N° 15/04025
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Texte intégral

AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLÉGIALE

N° RG 18/04407 – N° Portalis DBVX-V-B7C-LYPY

Société ESPACE DECO HABITAT

C/

Y

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de lyon du 24 Mai 2018

RG : 15/04025

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 30 AVRIL 2021

APPELANTE :

Société ESPACE DECO HABITAT

[…]

[…]

Représentée par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER AVOUÉS ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON

Ayant pour avocat plaidant Me Flore PATRIAT de la SCP AGUERA AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

I Y

née le […] à […]

[…]

[…]

Représentée par Me Géraldine HUET de la SELARL SOREL-HUET-LAMBERT MICOUD, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 04 Février 2021

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

AE AF, Président

Sophie NOIR, Conseiller

Q R, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Assistés pendant les débats de AC AD, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 30 Avril 2021, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par AE AF, Président, et par AC AD, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES:

* faits antérieurs à la saisine du conseil des prud’hommes :

La société espace Déco Habitat a pour activité l’achat, la vente et l’installation de tout équipement de cuisine, salle de bains, appareils électroménagers et sanitaire.

Mme I Y a été embauchée par la société Perrin décoration le 6 février 1989, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel pour une durée de 22h30 par semaine, en qualité de télénégociatrice.

Le 1er décembre 1989, elle a été promue au poste de responsable télémarketing, puis a occupé le poste de vendeuse salle de bain à compter du 1er avril 1991, puis de vendeuse cuisine et salle de bain sous l’enseigne Mobalpa le 25 juin 2008.

En mai 2008, à la suite d’une cessions de parts, la société Perrin décoration est devenue Espace déco habitat, société désormais dirigée par Mr X.

Par avenant en date du 1er juillet 2011, les parties ont convenu d’appliquer la convention collective des magasins de cuisine à usage domestique et que la qualification de Mme Y qui était affectée à un poste de vendeuse conceptrice, serait de niveau 3, échelon 3 coefficient 255.

À l’issue des élections professionnelles du 30 décembre 2014, Mme Y a été élue déléguée du personnel titulaire.

À compter du 30 mars 2015, Mme Y a été placée en arrêt maladie et n’a jamais repris le travail.

Par requête du 28 octobre 2015, Mme Y a saisi le conseil de prud’hommes de Lyon afin de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de son employeur, produisant les effets d’un licenciement nul pour harcèlement moral et discrimination, et pour obtenir le paiement de diverses sommes à caractère salarial et indemnitaire, notamment pour harcèlement moral et discrimination.

* faits postérieurs au jugement du conseil des prud’hommes :

L’arrêt maladie de Mme Y est arrivé à son terme le 15 avril 2019.

À l’issue de 2 visites de reprises le 18 avril et le 2 mai 2019, la médecine du travail a déclaré Mme Y inapte en ses termes :

'inapte au poste avec possibilité de reclassement : poste administratif avec saisie'

Le 15 mai 2019, la société Espace Déco Habitat a convoqué Mme Y à un entretien préalable fixé au 24 mai 2019.

Le 1er août 2019, l’inspection du travail a refusé l’autorisation de licencier Mme Y pour inaptitude médicale et impossibilité de reclassement.

Le 23 septembre 2019, cette décision a fait l’objet d’un recours hiérarchique initié par la société Espace Déco Habitat.

Une décision implicite de rejet est née le 26 janvier 2020 en l’absence de réponse de l’administration.

La société Espace Déco Habitat a saisi le tribunal administratif de Lyon d’une requête en excès de pouvoir le 26 mars 2020 et s’est finalement désistée de ce recours.

A compter du 2 juin 2019, la société Espace Déco Habitat a repris le versement des salaires de Mme Y.

La société Espace Déco Habitat a organisé une nouvelle visite médicale fixée au 3 juillet 2020, Mme Y étant en arrêt maladie pour rechute d’une maladie professionnelle.

Le 14 août 2020, la société Espace Déco Habitat a de nouveau convoqué Mme Y à un entretien préalable fixé au 27 août 2020.

Le 3 septembre 2020, la société Espace Déco Habitat a notifié à Mme Y son licenciement pour absence prolongée et nécessité de la remplacer définitivement.

**

*

Par jugement rendu le 24 mai 2018, le conseil de prud’hommes de Lyon en sa formation de départage a :

— prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme Y aux torts de la société Espace Déco Habitat,

— dit que la résiliation judiciaire produit les effets d’un licenciement nul,

— condamné la société Espace Déco Habitat à verser à Mme Y les sommes suivantes :

* avec intérêts au taux légal à compter du 04 novembre 2015, date de réception par 1'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation valant mise en demeure :

—  425,00 € à titre de rappels de salaire concernant les primes mensuelles de novembre 2012 à septembre 2013 non prescrites,

—  42,50 € au titre des congés-payés afférents,

—  27.432,00 € au titre de l’indemnité de licenciement,

—  5.818,00 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

—  581,80 € au titre des congés-payés afférents

—  37.817,00 € à titre de salaire pour la période de juin 2018 (date postérieure à la rupture du contrat prononcée à la date de mise à disposition au greffe de la décision judiciaire, soit le 24 mai 2018) à juin 2019, date de fin de protection du mandat,

—  3.781,70 € au titre des congés-payés afférents,

* avec intérêts au taux légal ci compter de la notification du jugement

—  1.500,00 € à titre de dommages et intérêts pour rupture d’égalité de traitement dans le calcul des primes versées aux salariés à temps partiel et aux salariés à temps plein

—  8.000,00 € à titre de dommages et intérêts au titre de la réparation du préjudice subi pour harcèlement moral,

—  52.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul

— dit que la société Espace Déco Habitat devra transmettre à Mme I Y dans le délai d’un mois suivant la notification de la présente décision un certificat de travail et une attestation Pôle emploi conformes ainsi qu’un bulletin de salaire récapitulatif sous astreinte provisoire de 50€ par jour de retard passé un délai d’un mois suivant la notification du jugement et dit que la présente formation se réserve le droit de liquider cette astreinte,

— débouté les parties du surplus de leurs demandes,

— condamné la société Espace Déco Habitat à verser à Mme Y la somme 1 500,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouté la société Espace Déco Habitat de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire sous réserve des dispositions des articles R1454-14 et 15 du code du travail selon laquelle la condamnation de l’employeur au paiement des sommes visées par les articles R1454-14 et 15 du code du travail est exécutoire de plein droit dans la limite de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire dans les conditions prévues par l’article R l454-28 du code du travail,

— fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 2.903,10 €,

— condamné la société Espace Déco Habitat aux entiers dépens de l’instance.

Par déclaration en date du 15 juin 2018, la société Espace Déco Habitat a interjeté appel de ce jugement.

Mme Y, partie intimée, a sollicité l’autorisation d’assigner la société Espace Déco Habitat à jour fixe et par ordonnance en date du 6 septembre 2018, le président de la chambre a fait droit à cette demande.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 15 janvier 2021, la société Espace Déco Habitat demande à la cour de :

— dire et juger que Mme Y a été remplie de ses droits en termes de maintien de salaire et de sa prime d’ancienneté pendant son arrêt de travail,

en conséquence,

— confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Lyon en ce qu’il a rejeté la demande de rappel de prime d’ancienneté et de maintien de salaire de Mme Y pour la période courant d’avril à août 2015,

à titre principal :

— dire et juger que la différence de modalités de calcul des primes mensuelles et trimestrielles est justifiée,

en conséquence,

— réformer le jugement du conseil des prud’hommes de Lyon en ce qu’il l’a condamnée à verser à Mme Y les sommes suivantes :

—  425,00 € à titre de rappels de salaire concernant les primes mensuelles de novembre 2012 à septembre 2013 non prescrites, outre 42,50 € au titre des congés payés afférents,

-1 500,00 € à titre de dommages et intérêts pour rupture d’égalité de traitement dans les calculs des primes versées aux salariés à temps partiel et aux salariés à temps plein

à titre subsidiaire,

— dire et juger que la demande de dommages intérêts pour rupture d’égalité de traitement d’un montant de 1.500,00 € est prescrite.

— dire et juger que l’annulation de la commission relative à la vente aux époux Z est légitime

— dire et juger que les modalités de calculs des commissions concernant l’électroménager sont licites,

en conséquence,

— confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Lyon en ce qu’il a rejeté les demandes de rappel de commissions sur la vente Z et sur l’électroménager,

— dire et juger que les éléments invoqués par Mme Y ne sont pas établis ou ne peuvent caractériser l’existence d’une situation de harcèlement moral

— dire et juger que les éléments invoqués par Mme Y ne sont pas établis ou ne caractérisent pas un manquement de sa part à son obligation de sécurité

— dire et juger que les éléments invoqués par Mme Y ne sont pas établis ou ne caractérisent pas une exécution déloyale du contrat de travail par elle à son obligation de sécurité,

— dire et juger qu’elle n’a commis aucun manquement suffisamment grave empêchant la poursuite du contrat de travail de Mme Y,

en conséquence,

— réformer le jugement du conseil de prud’hommes de Lyon en ce qu’il l’a condamnée à lui verser les

sommes suivantes :

- 27.432,00 € au titre de l’indemnité de licenciement,

- 5.818,00 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre 581,80 € au titre des congés payés afférents,

- 37.817,00 € à titre de salaire pour la période de juin 2018 (date postérieure à la rupture du contrat prononcée à la date de mise à disposition au greffe de la décision judiciaire, soit le 24 mai 2018) à juin 2019, date de fin de protection du mandat, outre 3 781,70 € au titre des congés payés afférents,

- 8.000,00€ à titre de dommages et intérêts au titre de la réparation du préjudice subi pour harcèlement moral,

- 52.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

- 1.500,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonner la restitution par Mme Y de la somme de 26.127,90 € délivrée au titre de l’exécution provisoire du jugement du conseil de prud’hommes de Lyon sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter du 30e jour suivant le prononcé de l’arrêt à intervenir,

— à tout le moins, prendre acte du versement à titre provisionnel à Mme Y d’une somme de 26.127,90 € au titre de l’indemnité de licenciement ensuite du jugement rendu par le conseil de prud’hommes le 24 mai 2018

— dire et juger que Mme Y n’est pas fondée à solliciter un rappel de salaire au titre du «manque à gagner » qu’elle aurait subi pendant sa période de maladie professionnelle, en rapport avec son salaire habituel

— condamner Mme Y à lui verser la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 27 janvier 2021, Mme Y demande à la cour de :

— juger recevable l’appel interjeté par la société Espace Déco Habitat à l’encontre du jugement rendu par le juge départiteur du conseil de prud’hommes de Lyon le 24/05/18 et le dire non fondé,

— juger recevable et bien fondé son appel incident formé par voie de conclusions,

réformant le jugement querellé en ce qu’il a :

* rejeté :

- le rappel de prime d’ancienneté d’avril à juillet 2015 de 818,92 €,

- le rappel de salaire pour non-maintien de salaire d’avril à août 2015 de 529,77 €,

- les congés payés afférents de 134,87 € (81,89 €+ 52,98 €),

- la demande de dommages-intérêts pour absence de paiement des primes mensuelles et trimestrielles de 2 000 €,

- les commissions indûment déduites sur le dossier Z de 574,40 €,

- les congés payés afférents de 57,44 €,

- le rappel de commissions sur électro-ménager : 4.765,68 €,

- les congés payés afférents : 476,57 €,

- la demande de dommages-intérêts pour discrimination syndicale de 20.000 €,

limité :

- la demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral à hauteur de 8.000 € au lieu des 20.000 € réclamés,

- la demande de dommages-intérêts pour rupture d’égalité de traitement dans le calcul des primes versées aux salariés à temps plein et à ceux à temps partiel à 1.500 €,

- les dommages-intérêts pour licenciement nul à 52.000 € au lieu des 96.000 € réclamés,

- l’indemnité de licenciement à la somme de 27.432 €,

- la somme allouée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à 1.500 €,

— condamner la société Espace Déco Habitat à lui payer les sommes de :

—  818,92 € de rappel de prime d’ancienneté d’avril à juillet 2015,

—  529,77 € de rappel de maintien de salaire d’avril à juillet 2015,

—  134,90 € de congés payés afférents

—  425 € de rappel de primes mensuelles et trimestrielles de novembre 2012 à novembre 2015,

—  2.000 € de dommages-intérêts pour absence de paiement des primes mensuelles et trimestrielles antérieures à novembre 2012,

—  574,40 € de commissions sur le dossier Z,

—  57,44 € de congés payés afférents,

—  4.765,68 € de commissions forfaitaires sur l’électro-ménager non commissionné,

—  476,57 € de congés payés afférents,

outre intérêts au taux légal à compter de la saisine, avec capitalisation des intérêts dûs par année entière

— juger que Espace Déco Habitat a commis des faits de harcèlement moral sur sa personne, subsidiairement de non-respect de l’obligation de sécurité et de résultat et plus subsidiairement d’exécution déloyale du contrat,

par conséquent,

— condamner la société Espace Déco Habitat à lui payer la somme de 20.000 € net à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral, subsidiairement pour non-respect de l’obligation de sécurité et de résultat et plus subsidiairement pour exécution déloyale du contrat de travail,

— condamner la société Espace Déco Habitat à lui payer la somme de 20.000 € net à titre de dommages et intérêts pour discrimination salariale et de déléguée du personnel,

— condamner la société Espace Déco Habitat à lui payer la somme de 19.083,72 € outre congés payés afférents de 1 908,37 € au titre du maintien de salaire pour la période du 24/05/16 au 01/06/19, la caisse primaire d’assurance maladie lui ayant reconnu définitivement le caractère de maladie professionnelle à son arrêt maladie,

— confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat aux torts de l’employeur produisant les effets d’un licenciement nul,

— le réformer concernant la date d’effet de ladite résiliation qui doit être fixée au 7 septembre 2020, date du licenciement, dés lors qu’elle a été victime de harcèlement moral et était au surplus salariée protégée,

par conséquent,

— condamner la société Espace Déco Habitat à lui payer les sommes de :

-51,07 € de solde d’indemnité de préavis (n’ayant pas intégré la prime d’ancienneté pour décembre 2020)

-5,11 € de congés payés afférents,

—  39.765,13 € à titre de solde d’indemnité spéciale de licenciement de l’article L 1226-14 du code du travail,

-7.851,09 € de solde d’indemnité compensatrice de congés payés,

outre intérêts au taux légal à compter de la saisine avec capitalisation des intérêts dûs par année entière.

— condamner la société Espace Déco Habitat à lui payer les sommes de :

au principal :

-137.598 € nette à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

outre intérêts au taux légal à compter du jugement

subsidiairement :

—  96.000 € nette à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,

—  37.817 € de rappel de salaire pour la période de juin 2018 jusqu’au 30/06/2019 correspondant à la fin de la période de protection,

-3.781,70 € de congés payés afférents,

plus subsidiairement,

— juger nul le licenciement notifié le 3/09/20 reçu le 7/09/20,

par conséquent,

— condamner la société Espace Déco Habitat à lui payer :

—  4.679,49 € de solde d’indemnité de licenciement,

—  51,07 € de solde d’indemnité de préavis (n’ayant pas intégré la prime d’ancienneté pour décembre 2020),

—  5,11 € de congés payés afférents,

—  7.851,09 € de solde d’indemnité compensatrice de congés payés,

—  137.598 € de dommages-intérêts pour licenciement nul pour 31 ans et 10 mois d’ancienneté et subsidiairement à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— condamner la société Espace Déco Habitat à lui remettre les bulletins de salaire rectifiés, le certificat de travail et l’attestation pôle emploi rectifiés sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du 8e jour suivant la notification de l’arrêt à intervenir,

— réserver à la juridiction prud’homale la faculté de liquider cette astreinte,

— dire que les créances indemnitaires sont dues nettes de CGS et de CRDS et de toutes charges sociales,

— condamner la société Espace Déco Habitat à lui payer 4 000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure en cause d’appel, en sus de la somme allouée en première instance,

— débouter la société Espace Déco Habitat de toutes exceptions, fins et prétentions,

— condamner la société Espace Déco Habitat aux entiers dépens.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. sur les demandes à caractère salarial :

A sur les demandes de rappels au titre du maintien de la prime d’ancienneté et du maintien de salaire d’avril à juillet 2015 :

Il résulte des dispositions de l’article L 1226-1 du code du travail que tout salarié ayant une année d’ancienneté dans l’entreprise bénéficie, en cas d’absence au travail justifiée par l’incapacité résultant de maladie ou d’accident constaté par certificat médical et contre-visite s’il y a lieu, d’une indemnité complémentaire à l’allocation journalière prévue à l’article L. 321-1 du code de la sécurité sociale, sous réserve qu’il remplisse certaines conditions.

En application de l’article D1226-1 du code du travail et suivants, l’indemnité complémentaire prévue à l’article L.1226-1 du code du travail est calculée selon les modalités suivantes : 1° Pendant les trente premiers jours, 90 % de la rémunération brute que le salarié aurait perçue s’il

avait continué à travailler ; 2° Pendant les trente jours suivants, deux tiers de cette même rémunération.

Les durées d’indemnisation sont augmentées de dix jours par période entière de cinq ans d’ancienneté en plus de la durée d’une année requise à l’article L. 1226-1, sans que chacune d’elle puisse dépasser quatre-vingt-dix jours.

Ces dispositions ne s’appliquent qu’en l’absence de stipulations plus favorables.

Par ailleurs, la convention collective des magasins de cuisine à usage domestique applicable en l’espèce prévoit (art 11.1) que, après un délai de carence de 6 jours, un complément de salaire est versé par l’employeur du 7e au 45e jour pendant 45 jours correspondant à 85 % du salaire de base.

Mme Y revendique le paiement d’une somme de 818,92 € au titre de la prime d’ancienneté et de 529,77 € au titre du non maintien de son salaire d’avril à août 2015 outre les congés payés afférents en faisant valoir que :

— la société espace Déco Habitat lui a indûment prélevé sur son salaire d’août 2015 la somme de 818,92 € de primes d’ancienneté, au motif qu’elle lui avait été réglée par erreur d’avril à juillet, 2015 alors que cette prime n’est pas liée au travail effectif mais à la durée de présence dans l’entreprise et que la convention collective ne prévoit pas l’exclusion de cette prime du salaire garanti en cas de maladie,

— par ailleurs, les calculs allégués par l’employeur sont erronés.

La société Espace Déco Habitat réplique que la prime d’ancienneté a été incluse dans le calcul du maintien de salaire, que ses calculs sont exacts et que Mme Y a été remplie de ses droits.

Les parties s’accordent devant la cour pour considérer que le salaire mensuel moyen de Mme Y était de 2.903,10 € et son salaire journalier de référence de 95,44 € brut, prime d’ancienneté incluse.

Elles s’accordent également pour considérer que l’application du régime légal, complété par le régime de prévoyance est plus favorable que le régime conventionnel et qu’il doit donc être retenu.

Il convient de relever au vu des bulletins de salaire produits que le salaire journalier de référence, soit 95,44 €, calculé sur la base des 12 derniers mois du salaire précédant l’arrêt de travail, soit depuis mars 2014, inclut le montant de la prime d’ancienneté.

En application du régime légal de maintien de salaire et du régime de prévoyance et sur la base du taux journalier de référence de 95,44 €, il était du à Mme Y pour la période du 6 avril 2015 (prise en compte de 6 jours de carence) et jusqu’au 31 août 2015 la somme de 12.388,11 €.

Il ressort des pièces versées aux débats que Mme Y a perçu :

— de la sécurité sociale (indemnités journalières) 34,16 € x 152 jours : 5.192,32 €

— de la société Espace Déco Habitat (incluant les indemnités Caprele) : 8.208,96 €

soit au total : 13.401,28 €

soit un solde positif en faveur de Mme Y de 1.013,17 €.

La société Espace Déco Habitat est fondée dans son calcul à prendre en compte les indemnités Caprele figurant sur le bulletin de salaire de septembre dés lors qu’il ressort des relevés correspondants de cet organisme qu’elles avaient pour vocation d''indemniser la période du 1er au 31 août 2015.

Dans ces conditions, il n’apparaît pas que la régularisation sur prime d’ancienneté pratiquée sur le bulletin de salaire d’août 2015 ait eu pour effet de priver Mme Y d’une partie de sa rémunération.

Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a retenu que malgré des erreurs de vocable dans les bulletins de salaire, Mme Y avait été remplie de ses droits et en ce qu’il l’a déboutée de cette demande.

B sur la demande au titre des primes mensuelles et trimestrielles outre congés payés afférents :

Mme Y revendique le paiement :

— d’un rappel de primes à hauteur de 425 €,

— d’une demande indemnitaire de 2.000 € du fait de l’absence de paiement des dites primes pour la période antérieure à novembre 2012.

A l’appui de ces demandes, elle fait valoir que le montant de la prime sur le chiffre d’affaire de vente versé par la société était moindre pour elle qui travaillait à temps partiel alors qu’elle réalisait un même chiffre d’affaires que les salariés à temps plein, ce qui contrevient au principe d’égalité de traitement entre salariés à temps plein et salariés à temps partiel.

La société Espace Déco Habitat soutient que le régime des primes mensuelles et trimestrielles applicable aux salariés à temps partiel ne leur était pas défavorable et ne relevait pas d’une inégalité de traitement, en ce que :

— le régime des temps partiel imposait un chiffre d’affaire minimum pour l’obtention des primes inférieur à celui imposé aux salariés à temps plein,

— en outre, à compter du mois d’octobre 2013, ces primes ont été modifiées afin de verser un montant de prime identique aux salariés à temps plein et aux salariés à temps partiel dès lors qu’ils atteignaient le chiffre d’affaires minimum exigé pour les salariés à temps plein.

Aux termes de l’article L.3123-11 code du travail dans sa version applicable au litige, la salarié à temps partiel bénéficie des droits reconnus au salarié à temps complet par la loi, les conventions et les accords collectifs d’entreprise ou d’établissement sous réserve, en ce qui concerne les droits conventionnels, de modalités spécifiques prévues par une convention ou un accord collectif de travail.

En outre, il ne peut y avoir des différences de traitement entre salariés d’une même entreprise exerçant un travail égal ou d’égale valeur que si elles reposent sur des raisons objectives dont le juge doit concrètement contrôler la réalité et la pertinence et qui soient étrangères à toute discrimination prohibée.

L’employeur doit pouvoir justifier, en cas de contestation, par des éléments objectifs et vérifiables, les disparités salariales des salariés placés dans la même situation.

Le principe «à travail égal, salaire égal» s’applique également aux accessoires de la rémunération et dans ce cas, l’identité de situation des salariés s’apprécie sur la base des critères d’attribution de ces

avantages.

* sur la demande de rappel de primes :

Cette demande couvre la période de novembre 2012 à novembre 2013.

Il est constant que Mme Y qui était rémunérée à la commission sur le chiffre d’affaires fourni, travaillait 110 heures par mois.

L’employeur a institué le versement de primes mensuelles et trimestrielles.

Pour les salariés à temps complet, il était prévu le versement de 2 primes cumulables :

— mensuelle, en cas de chiffre d’affaire HT, hors pose, hors livraison et hors SAV, au minimum de 30 000 €, calculée en fonction du coefficient :

' 200 € pour un coefficient de 1,84 à 1,88

' 300 € pour un coefficient de 1,89 à 1,92

' 400 € pour un coefficient supérieur à 1,92.

— trimestrielle de 600 € en cas de chiffre d’affaires HT, hors pose, hors livraison, hors SAV, moyen sur les 3 derniers mois de 40 000 € avec coefficient de 1,805 minimum.

Il n’est pas discuté que sur la période considérée, les primes de Mme Y travaillant à temps partiel étaient fixées comme suit :

— mensuelle calculée en fonction du coefficient :

* 150 € pour un coefficient de 1,84 à 1,88

* 225 € en cas de coefficient de 1,89 à 1,92

* 300 € pour un coefficient supérieur à 1,92.

— trimestrielle de 450 € en cas de chiffre d’affaires HT, hors pose, hors livraison, hors SAV, moyen sur les 3 derniers mois de 30 000 € avec coefficient de 1,805 minimum.

Il s’en déduit qu’à chiffre d’affaires égal, Mme Y percevait des primes mensuelles ou trimestrielles d’un montant inférieur aux salariés à temps plein ce qui constitue une rupture d’égalité de traitement, non justifiée par des raisons objectives.

La société Espace Déco Habitat n’est pas fondée en effet à soutenir que les salariés auraient bénéficié d’un régime plus favorable parce qu’ils bénéficiaient du paiement des primes dés qu’il avait atteint un chiffre d’affaire minimum inférieur (22 500 €) à celui imposé aux salariés à temps plein (30.000 €) alors qu’à l’évidence un salarié qui travaille à temps partiel atteint plus difficilement les mêmes objectifs qu’un travailleur à temps plein puisqu’il travaille moins et que l’attribution d’une prime dés la réalisation d’un plafond inférieur n’est que la conséquence logique de la prise en compte de ce temps partiel.

Par ailleurs, le fait que la société Espace Déco Habitat aurait à compter du mois d’octobre 2013 amélioré le dispositif existant, point contesté par la salariée et non justifié par les avenants produits qui concernent d’autres salariés, est en tout état de cause sans pertinence pour apprécier la demande

qui concerne essentiellement la période antérieure à cette date.

Mme Y verse aux débats un tableau détaillé (pièce 64) faisant ressortir mois par mois le montant du chiffre d’affaires réalisé, celui des primes mensuelles et trimestrielles perçues et la différence avec ce qu’elle aurait perçu s’il lui avait été appliqué le régime des salariés à temps plein.

Au vu de ce document qui n’est pas discuté par l’appelante, elle est fondée à solliciter un rappel de primes à hauteur de 425 € outre celle de 42,50 € au titre des congés payés afférents, les dites sommes produisant intérêts au taux légal à compter du 4 novembre 2015, date de réception de la convocation de l’employeur devant le conseil des prud’hommes valant mise en demeure.

Le jugement est confirmé de ce chef.

* sur la demande de dommages et intérêts pour absence de paiement des primes avant novembre 2012 :

La société Espace Déco Habitat soutient que cette demande est prescrite au motif que le manquement lié à l’exécution du contrat est antérieur de plus de deux ans à la saisine du conseil des prud’hommes.

Mme Y conteste cette fin de non recevoir en faisant valoir que la demande de dommages et intérêts est fondée sur une demande en paiement de salaires et en tout état de cause sur l’existence d’une discrimination ou d’un harcèlement moral, ce qui rend non applicable la prescription biennale prévue à l’alinéa 1er de l’article L 1471-1 du code du travail.

Selon l’article L 1471-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, l’ action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.

Le 2e alinéa précise que le 1er alinéa n’est toutefois pas applicable aux actions en réparation d’un dommage corporel causé à l’occasion de l’exécution du contrat de travail, aux actions en paiement ou en répétition du salaire et aux actions exercées en application des articles L. 1132-1, L. 1152-1 et L. 1153-1.

L’action indemnitaire engagée par Mme Y ne constitue ni une action en paiement des salaires, ni une action fondée sur la discrimination relevant des articles L 1132-1 et suivants du code du travail, ni une action fondée sur le harcèlement moral relevant des articles L 1152-1 et suivants du code du travail au titre desquels elle a d’ailleurs présenté des demandes distinctes.

Il s’agit d’une action fondée sur l’inexécution du contrat de travail par l’employeur en raison du non respect du principe de l’égalité de rémunération relevant du régime de la prescription biennale édicté par les dispositions sus visées de l’article L 1471-1 du code du travail.

Mme Y qui réclame l’indemnisation du préjudice découlant du non respect de ce principe de l’égalité des salaires pour la période antérieure à novembre 2012 ne soutient pas avoir eu connaissance de ce manquement postérieurement à cette date.

Elle a engagé son action le 28 octobre 2015.

Son action est donc prescrite et il convient, réformant le jugement, de déclarer cette demande irrecevable.

C sur le rappel de commissions outre congés payés afférents :

* sur la vente Z :

Mme Y sollicite le remboursement d’une commission dont elle estime avoir été indûment privée par réduction du montant de son chiffre d’affaires mensuel en septembre et octobre 2014 en faisant valoir que la vente était ferme et définitive et que son annulation résulte d’un fait volontaire de l’employeur et constitue une sanction pécuniaire illicite.

La société Espace Déco Habitat fait valoir en réplique que l’annulation de la vente a régulièrement donné lieu à une reprise du chiffre d’affaire net HT en ce que :

— cette annulation résulte de l’argumentation juridique tenue Mme Y au client, qui avait déjà acheté sa cuisine chez un concurrent, sur la possibilité de se rétracter en raison de l’absence de métré et à qui elle avait remis un modèle de courrier de rétractation, faculté de rétractation que le client a finalement utilisée sur la commande passée avec elle,

— le contrat de travail de Mme Y et l’usage de la société prévoient une telle pratique et la reprise de commissions dans de telles conditions ne peut être assimilée à une sanction pécuniaire illicite.

Il est stipulé dans le contrat de travail signé par Mme Y une clause rémunération (article 5) ainsi libellée :

'en rémunération de ses ventes, le vendeur recevra, à titre de salaire, des commissions calculées sur le chiffre d’affaire TTC affecté au vendeur pour une vente. (…) .

Le taux de commissionnement accordé au vendeur est fonction de la marge moyenne mensuelle brute dégagée par ses ventes (grille reprise en annexe). Les conditions d’attribution des commissions et des primes éventuelles sont également définies dans ladite annexe, l’ensemble de ces éléments peut être évolutif en fonction des conditions de vente en vigueur déterminées par la direction'.

Il est également prévu à l’article 6 relatif à 'l’acquisition et règlement des commissions' que :

— l’employeur peut, éventuellement, consentir des avances et payer des commission avant encaissement total des ventes, mais que ces mesures ne créent ni novation, ni dérogation à la règle générale énoncée ci-dessus,

— l’employeur se réserve le droit de réclamer le remboursement du trop perçu, le cas échéant (en particulier lorsqu’une vente à tempérament a été financée par un organisme de crédit et quelle qu’en soit la raison, l’employeur est tenu à rembourser tout ou partie du financement à cet organisme), dans les 12 mois qui suivent la date de l’engagement,

— le vendeur ne pourra prétendre à une rémunération sur les commandes non livrées ou non encaissées, pour quelque cause que ce soit, dés lors que le défaut d’exécution ou d’encaissement

ne résultera pas du fait volontaire de l’employeur.

Contrairement à ce que soutient la salariée, cette clause en ce qu’elle prévoit la possibilité pour l’employeur de réclamer le remboursement du trop perçu sur les avances de commissions si la vente n’intervient pas, n’institue aucune sanction pécuniaire illicite car elle ne vient pas sanctionner le comportement du salarié.

Il s’agit simplement d’une clause de bonne fin conditionnant le règlement définitif de la commission à la finalisation complète de la vente et qui ne relève pas des dispositions de l’article L 3251-1 du code du travail invoquées par la salariée.

La société Espace Déco Habitat justifie par ailleurs de l’existence d’un usage dans l’entreprise

notamment par :

— l’attestation d’une autre salariée qui déclare que depuis son embauche en 2008, les ventes qui font l’objet d’une annulation alors qu’elles avaient déjà généré une commission ont toujours fait l’objet d’une 'reprise',

— de bulletins de salaire anciens faisant apparaître des reprises de commissions et dont Mme Y n’établit pas par ses propres pièces, lesquelles ne permettent pas de faire le lien avec les dites commissions, que ces reprises lui ont été remboursées ultérieurement,

— des fiches de calcul de commissions mensuelles de vendeurs, salariés de l’entreprise.

S’agissant du cas particulier de la vente Z, il ressort des pièces produites que :

— le 15 février 2014, un bon de commande pour l’achat d’une cuisine a été signé par les époux A sous l’égide de Mme Y,

— dans un courriel daté du 9 avril 2014, Mr et Mme A ont informé Mme Y de leur impossibilité de poursuivre cet achat en raison de ce qu’un autre contrat les liait avec une entreprise concurrente et qu’ils ne parvenaient pas à obtenir la restitution des chèques qu’ils avaient émis,

— par un courrier du 18 avril 2014, la société Mobalpa (Espace Déco Habitat) a pris acte de leur souhait de repousser l’exécution de leur achat et leur a rappelé le caractère ferme et définitif de cette vente,

— dans un courriel du 7 juillet 2014, les époux A ont manifesté leur volonté d’annuler la commande en raison de problèmes d’ordre personnel et se sont prévalus du caractère non valable de la vente en raison de ce que le métré n’avait pas eu lieu,

— par courrier du 9 juillet 2014, la société Mobalpa a informé les époux A qu’elle prenait en compte cette annulation et leur a restitué le chèque d’acompte.

Il est constant par ailleurs que la commission sur cette vente, soit 787,46 €, a été réglée à Mme Y et qu’en septembre et octobre 2014, la société Espace Déco Habitat a diminué le montant du chiffre d’affaires servant de base de calcul des commissions réglées à la salariée.

Indépendamment du point de savoir si Mme Y a effectivement communiqué aux clients le modèle d’annulation de commande pour non réalisation d’un métré précis dont ils se sont finalement servi pour annuler la commande Mobalpa, il ressort de ce qui précède que la société Espace Déco Habitat n’est pas à l’origine de l’annulation de cette vente et Mme Y n’est dés lors pas fondée à lui reprocher l’acceptation de cette commande qui était fondée sur une motivation juridique précise, la circonstance qu’elle soit intervenue pendant les congés de la salariée n’étant pas non plus imputable à la société Espace Déco Habitat.

La cour relève enfin qu’il n’est pas justifié d’une retenue de salaire de plus de 10 % et les dispositions de l’article L 3251-3 du code du travail invoquées par la salariée sont sans application en l’espèce.

Le jugement est confirmé en ce qu’il a débouté Mme Y de cette demande.

* sur l’absence de commission sur l’électro-ménager :

L’avenant au contrat signé par les parties le 1er avril 2000 prévoit qu’il est convenu un taux de commissionnement sur les 'soldes et hors marge' de 4,78 %.

Mme Y sollicite le versement d’un rappel de salaire sur 3 ans à hauteur de 4.765,68 €, outre les congés payés afférents en faisant valoir que son employeur a cessé d’inclure à compter de 2008, la vente de l’électroménager dans le chiffre d’affaire de vente, que cela a impacté son commissionnement et qu’elle a ainsi été privée de commissions sur les ventes sur 'solde et hors marge'.

La société Espace Déco Habitat fait valoir en réplique que les commissionnements sont calculés sur les ventes hors électroménager vendu à prix cassé ainsi qu’il résulte d’un usage dans l’entreprise et que l’exclusion de la vente de l’électroménager à prix cassé permettait d’ailleurs à la salariée d’éviter une baisse de son coefficient mensuel de rentabilité.

Mme Y se prévaut :

— des mentions sur d’anciens bulletins de salaire antérieurs à 2009 fixant un taux de 4,78 %,

— d’un mail du 19 février 2015 par lequel elle demande la régularisation de l’omission de paiement sur l’électroménager en expo,

— d’échanges intervenus lors d’une réunion des délégués du personnel du 22 mai 2015 au cours desquels l’employeur a reconnu que le chiffre d’affaires du 'ménagé à prix cassé' n’a jamais fait l’objet d’aucune rémunération,

— de la tentative de l’employeur de lui faire signer en juin 2015 un avenant ayant pour objet d’exclure contractuellement ces éléments de la base de calcul de la commission.

Ainsi que l’a justement relevé le premier juge, le contrat de travail de Mme Y, et notamment l’avenant signé le 1er avril 2000 qui prévoit un commissionnement sur les 'soldes et hors marges' ne précise pas ce qui relève du hors marges ou ce qui n’en relève pas.

Pour établir l’existence d’un usage consistant à exclure le 'ménager vendu à prix cassé du commissionnement hors marge, la société Espace Déco Habitat verse aux débats :

— l’attestation d’une ancienne salariée, Mme B, selon laquelle les règles en vigueur concernant les 'divers’ et le 'hors marge’ n’ont pas été modifiés lors de l’arrivée de Mr X,

— des tableaux mensuels de suivi du 'hors marge’ et des bulletins de salaire d’un salarié témoignant de ce que l’électroménager vendu à prix cassé, noté MEN, est ôté du chiffre d’affaires pris en considération pour le calcul du taux de rentabilité et des commissions, et cela même avant l’arrivée de Mr X.

En réponse à l’interrogation posée lors de la réunion des délégués du personnel sur les commissionnements pour les ventes en hors marges, la direction a répondu que les 'divers' constitués principalement des chiffres du 'ménager à prix cassé’ négocié pour parvenir à conclure une vente difficile ne relèvent pas des 'ventes hors marges' visés au contrat dés lors que s’ils ne devraient pas en principe être séparé du chiffre d’affaires de la vente en intégralité, leur intégration dans ce chiffre d’affaires aurait un impact négatif sur le coefficient de rentabilité global du mois et donc sur la commission perçue par le commercial.

En l’état de ces éléments versés par l’employeur, suffisants pour établir l’existence d’un usage dans l’entreprise qui n’est pas contredit par les quelques pièces anciennes produites par la salariée, la cour constate que la preuve de ce que les ventes d’électro ménager étaient inclues dans les ventes 'hors marge' susceptibles de donner lieu à un taux de commissionnement de 4,78 % n’est pas rapportée.

La cour confirme en conséquence le jugement en ce qu’il a débouté Mme Y de cette demande.

2. sur le harcèlement moral

En application des dispositions des articles L.1152-1 et L.1154-1 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, et l’employeur est tenu de prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.

Toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance de ces dispositions, toute disposition ou tout acte contraire est nul.

En cas de litige reposant sur des faits de harcèlement moral, le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral ; il incombe ensuite à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement; le juge forme alors sa conviction.

Un acte isolé et unique ne peut pas constituer un harcèlement moral, quand bien même cet acte se serait maintenu dans le temps.

A l’appui d’une demande indemnitaire de 20.000 €, Mme Y fait valoir qu’elle a été victime de harcèlement moral et fait état de :

— d’agressivité et d’humiliation à son encontre,

— d’un empêchement de s’exprimer,

— d’une mise à l’écart,

— de l’absence de formation,

— de refus de congé,

— d’absence d’entretien individuel annuel,

— d’un manque de clarté sur le mode de calcul de commissions,

— de l’entrave à l’exercice de son mandat de délégué du personnel.

Elle soutient que tous ses agissements sont à l’origine de la reconnaissance du caractère professionnel de son arrêt maladie par la caisse primaire d’assurance maladie.

La société Espace Déco Habitat qui fait valoir que l’appréciation par le comité de reconnaissance des maladies professionnelles ayant conduit à la reconnaissance d’une maladie professionnelle ne lie pas la cour et que par décision du 10 février 2020, la commission de recours amiable lui a déclaré inopposable la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l’affection de Mme Y, conteste sur le fond tout comportement fautif susceptible de caractériser l’existence d’une situation de harcèlement moral.

* sur l’agressivité et l’humiliation à l’encontre de Mme Y :

Mme Y soutient que Mr X, dirigeant de l’entreprise, et Mr S T, responsable du magasin, ont eu régulièrement des comportements agressifs, grossiers et humiliants à son encontre et

elle fait état plus particulièrement d’une agressivité notamment lors de réunions et l’utilisation d’un langage grossier, violent et humiliant à son encontre.

Elle verse aux débats diverses attestations.

Mme C, ancienne commerciale, atteste avoir vu Mr X s’emporter en hurlant à l’encontre de Mr D, lui avoir demandé de sortir et avoir demandé à Mme Y de revenir car elle avait suivi Mr D.

Selon Mr E, Mr S T, responsable du magasin, avait un langage grossier et humiliant vis à vis de lui et de certains commerciaux et il s’est adressé à Mme Y en ces termes 't’as tes ragnagnas ou quoi' sans que Mme Y ait une attitude énervée et ce témoin ajoute dans un courriel adressé à Mme Y que Mr S T a eu des propos très déplacés à son encontre en lui disant qu'elle fait un métier de pute',

Mr F témoigne de son côté de l’agressivité de Mr X et de Mr S T vis à vis de Mme Y indiquant notamment qu’ils lui coupaient systématiquement la parole lors de réunions pour l’empêcher de s’exprimer et qu’en leur absence, Mr X dénigrait Mme Y et Mr D disant notamment que 's’il y a des problèmes,, c’est à cause des deux anciens' ou bien 'les anciens vendeurs sont au bout de leur carrière, il faut du sang neuf'.

Mr G évoque quant à lui une mise à l’écart de Mme Y, notamment le fait que lorsqu’il est entré dans l’entreprise, il lui a été demandé de ne pas parler à trois vendeurs dont Mme Y et avoir constaté chez celle-ci une difficulté à pouvoir s’exprimer face aux agissements agressifs de la direction et du responsable du magasin qui faisait comme si elle n’était pas présente.

Les autres attestations auxquelles Mme Y se réfère (attestations U V et W AA) sont sans intérêt pour caractériser d’éventuels faits de harcèlement moral à l’encontre de Mme Y dés lors qu’elles se contentent de faire état de leur situation personnelle.

Il ressort de ces témoignages que même si le comportement grossier ou agressif évoqué par les témoins concernant le directeur de l’entreprise ou le responsable du magasin n’était pas exclusivement dirigé à l’encontre de Mme Y, il n’en reste pas moins établi qu’à plusieurs reprises, Mr S T a tenu des propos déplacés à l’encontre de cette dernière et que celui-ci, ou Mr X, n’hésitaient pas à lui couper la parole lors de réunions, ce qui caractérise incontestablement un comportement grossier et de nature à humilier la salariée.

* sur l’empêchement de s’exprimer

Mme Y soutient que Mr X et Mr H l’empêcher de s’exprimer lors de réunions, et fait état de :

— de parasitages pendant sa prise de parole ou de coupures systématiques,

— de l’envoi volontaire à une mauvaise adresse d’une convocation à la réunion des délégués du personnel, pour l’empêcher de s’exprimer.

Mme Y se prévaut d’une attestation de Mr D qui déclare que lors de la réunion des délégués du personnel du 27 février 2015, lorsque Mme Y a pris la parole, Mr X s’est alors 'mis à siffloter' puis alors qu’elle lui faisait la remarque, il a constaté qu’il s’est alors 'mis à chantonner tout bas lorsque I s’exprimait à nouveau'.

Même si le témoignage de Mr D qui a également introduit une action similaire à celle de Mme Y devant le conseil de prud’hommes à l’encontre de la société Espace Déco Habitat peut

être sujet à caution, il n’en reste pas moins qu’il est corroboré par les témoignages ci-dessus décrits de MM G et F lesquels déclarent :

— que Mr X et Mr S T lui coupaient systématiquement la parole lors de réunions pour l’empêcher de s’exprimer (témoignage F),

— avoir constaté chez Mme Y une difficulté à pouvoir s’exprimer face aux agissements agressifs de la direction et du responsable du magasin qui faisait comme si elle n’était pas présente (témoignage G).

La cour estime par contre que l’envoi d’une convocation à la réunion des délégués du personnel à une adresse mail erronée (ajout d’un w devant Y), erreur qui s’est d’ailleurs répétée sur l’envoi d’autres courriels ne concernant pas l’invitation à participer à une réunion, ne suffit pas à établir le caractère volontaire de cette erreur.

* sur la mise à l’écart

Mme Y soutient que l’employeur l’a volontairement mise à l’écart en ce qu’elle ignorait sa présence et dévalorisait son image, notamment en interdisant aux autres salariés de lui parler au prétexte qu’elle était néfaste ou en veillant à orienter les clients qu’elle devait voir vers d’autres commerciaux.

Ce dernier point n’est étayé par aucun élément au dossier ainsi que l’a justement retenu le premier juge.

Par contre, en se fondant sur les attestations sus rappelées de Mr G lequel évoque le fait 'qu’il lui a été demandé, lorsqu’il est entré dans l’entreprise, de ne pas parler à trois vendeurs dont Mme Y' et celui de Mr F qui indique 'avoir vu Mme Y isolée seule dans son bureau et que le responsable disait 'de ne pas lui parler, elle est néfaste pour l’entreprise' ou bien 'qu’il disait s’il y a encore des problèmes, c’est à cause des deux anciens' ou bien encore que Mr X lui a dit que 'les anciens vendeurs sont au bout de leur carrière, il faut du sang neuf, le premier juge a justement retenu l’existence d’un comportement de l’employeur s’apparentant à une mise à l’écart.

La cour retient également à ce titre que ces témoignages sont corroborés par celui de Mr J qui déclare avoir été 'témoin de la mise à l’écart des deux anciens salariés de l’entreprise, Sergio D et I Y, et que par exemple, la direction évitait soigneusement de venir les saluer à leur bureau, que Mr X ne leur adressait pas la parole voire très rarement'.

Ces déclarations ne sont pas utilement contredites par les attestations produites par l’employeur tendant à établir que ce seraient Mme Y et Mr D qui se seraient eux même mis à l’écart de l’entreprise en ne participant pas à des événements ou des festivités organisés par l’entreprise dés lors que l’un n’empêche pas l’autre et qu’il ne peut être écarté l’hypothèse que l’isolement volontaire de la salariée d’une partie de la vie de l’entreprise est la conséquence de la mise à l’écart dont elle faisait l’objet.

En outre, les affirmations de l’employeur sur le comportement d’exclusion de la salariée ne sont pas de nature à expliquer pour quelles raisons il était demandé aux nouveaux arrivants dans l’entreprise de ne pas parler à Mme Y.

* sur l’absence de formation :

Il ressort des dispositions de l’article L 6321-1 du code du travail que l’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail et veille au respect de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations.

Le fait qu’un salarié n’ait bénéficié d’aucune formation continue pendant toute la durée de son emploi dans l’entreprise établit le manquement de l’employeur à son obligation.

Mme Y soutient qu’elle n’a jamais pu effectuer la moindre formation malgré ses demandes.

Au soutien de sa prétention elle fait état :

— de ce que sa demande en décembre 2013 de formation en vue d’une évolution de son poste actuel a été refusée et que lors de la 2e demande, Mr X lui a ordonné de sortir de son bureau en lui disant que ses propos lui donnaient envie de vomir,

— de ce qu’elle n’a pas été destinataire de convocations à des réunions d’information en mai 2014, à une formation prévue en septembre 2013, à un congrès Mobalpa et à une formation en février 2015.

Ainsi que rappelé plus haut, l’envoi de courriels à une adresse mail erronée ne suffit pas à établir le caractère volontaire de cette erreur et la société Espace Déco Habitat justifie d’ailleurs avoir immédiatement rectifié l’erreur par l’envoi d’un nouveau courriel à la bonne adresse.

Mme Y indique en outre avoir participé aux trois premiers événements, informée par ses collègues.

Pour le surplus, la cour constate que Mme Y ne verse aux débats aucun élément de nature à confirmer le refus agressif qu’aurait manifesté son directeur à sa demande de formation en décembre 2013.

Elle ne justifie pas davantage des demandes de formation qu’elle aurait présentées et qui lui auraient été refusées par son employeur et même si ce dernier ne justifie pas avoir rempli son obligation de formation vis à vis de sa salariée, cet élément n’est pas de nature en soi à caractériser un fait de harcèlement moral.

* sur le refus de congés

Mme Y fait valoir que :

— elle s’est vue refuser la prise de congés payés la première semaine de mai 2014 alors que conformément aux règles de l’entreprise sur la prise de congés, trois autres vendeurs étaient présents,

— l’employeur a instauré à son détriment une compétition entre les salariés pour déterminer l’ordre de départ en congés en priorisant le premier qui en fait la demande sans prendre en compte l’ancienneté et la situation familiale des salariés.

Il ressort des pièces produites que par courrier du 7 avril 2014 la société Espace Déco Habitat a refusé à Mme Y sa demande de congés pour la semaine du 28 avril au 3 mai 2014 au motif que son absence entrainerait un dépassement du quota d’absences simultanées sur un même poste, trois des salariés occupant la même fonction ayant déjà fait une demande de congés payés sur la même période.

Par ailleurs, selon une attestation de Mme K, Mr X l’a mis en compétition avec Mme Y pour les congés d’été en annonçant en l’absence de celle-ci que 'le premier qui pose des vacances les aura' et qu’à son retour, Mme Y a posé les mêmes congés qu’elle que Mr X lui a refusé et que celle-ci n’avait pas compris pourquoi, l’ordre des départs selon l’ancienneté et la situation familiale n’avait pas été respecté.

Force toutefois est de constater que le témoin n’est pas précis sur les périodes de congés refusés à

Mme Y et que celle-ci ne justifie nullement qu’une demande de congés pour l’été 2013 lui a été refusée, la société Espace Déco Habitat versant au contraire aux débats une demande de congés du 15 juillet au 3 août 2013 qui a été acceptée par l’employeur.

Il est donc seulement établi qu’à une reprise, en 2014, Mr X a refusé à Mme Y ses demandes de congés.

* sur l’absence d’entretien professionnel

L’article L.6315-1 du code du travail, dans sa version applicable depuis le 26 novembre 2009 dispose qu’à l’occasion de son embauche, le salarié est informé que, dès lors qu’il dispose de deux ans d’ancienneté dans la même entreprise, il bénéficie à sa demande d’un bilan d’étape professionnel et que toujours à sa demande, ce bilan peut être renouvelé tous les cinq ans.

Le même article L.6315-1 du code du travail, dans sa version applicable à compter du 7 mars 2014 précise qu’à l’occasion de son embauche, le salarié est informé qu’il bénéficie tous les deux ans d’un entretien professionnel avec son employeur consacré à ses perspectives d’évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d’emploi. Cet entretien ne porte pas sur l’évaluation du travail du salarié

Mme Y soutient que depuis 2010, en guise d’entretien individuel, l’employeur demandait aux salariés de venir à son bureau pour les informer que la prime annuelle était prolongée et qu’en 2013, elle a été la seule à ne pas être appelée au bureau.

Elle verse aux débats une fiche d’appréciation datant du 3 juillet 2009 dont elle soutient qu’elle a fait suite au dernier entretien dont elle a bénéficié.

L’employeur fait valoir en réplique que :

— Mme Y ne verse aux débats aucun élément probant laissant présumer qu’elle aurait été la seule dans cette situation et reconnaît elle même que cette pratique a été stoppée pour tous les salariés de l’entreprise,

— elle n’a pas fait l’objet d’un traitement spécifique et elle n’établit pas qu’elle aurait été la seule en 2013 à ne pas être informée de la reconduite de sa prime annuelle lors d’un entretien personnel avec le directeur.

Il ressort des dispositions légales sus rappelées qu’avant le 7 mars 2014, le bilan d’étape professionnel ne s’imposait qu’en cas de demande du salarié, cette demande ne devenant systématique qu’à compter du 7 mars 2014.

Mme Y ne justifiant, ni ne soutenant, avoir sollicité avant 2014 la tenue de cet entretien professionnel, n’est pas fondée à reprocher ce fait à son employeur.

Quant à l’abandon de la pratique antérieure d’un entretien d’évaluation annuel, Mme Y ne se prévaut que de l’absence d’entretien au cours de l’année 2013 ce qui fait présumer qu’elle en a bénéficié au cours des années antérieure et elle reconnaît avoir bénéficié d’un tel entretien 2014 au cours duquel elle a été informée de la reconduite de sa prime annuelle 2013, ainsi que deux autres salariés.

Au regard de ces éléments, la cour ne retient pas ce grief comme un fait laissant présumer une attitude de harcèlement moral.

* sur le manque de clarté et de transparence

Mme Y fait valoir que les modalités de calcul des commissions étaient impossible à connaître et la société Espace Déco Habitat soutient qu’un tel fait n’est pas constitutif d’un agissement de harcèlement moral, dés lors que la salariée était parfaitement informée des modes de calcul de sa rémunération et de ses commissions, qu’elle a formulé plusieurs demandes à ce titre et que par plusieurs courriers, elle a répondu précisément à toutes ses interrogations.

Si les éléments produits aux débats, particulièrement les échanges intervenus lors de la réunion des délégués du personnel du 22 mai 2015 tendent à établir un certain flou au sein de l’entreprise sur les modalités de calcul des commissions, force est de constater que ce point ne concerne pas spécifiquement la situation de Mme Y et que la société Espace Déco Habitat apporté des réponses précises aux interrogations soulevées lors de cette réunion.

La cour ne retient donc à ce titre aucun fait laissant présumer une attitude de harcèlement moral.

* sur l’entrave à l’exercice de son mandat de déléguée du personnel titulaire

Il est constant qu’à l’issue des élections professionnelles du 30 décembre 2014, Mme Y a été élue déléguée du personnel titulaire.

La salariée soutient que l’employeur a entravé l’exercice de son mandat de délégué du personnel et fait valoir notamment que :

- il n’a pas communiqué le texte intégral de la convention collective aux délégués malgré leurs demandes :

Mme Y produit un courriel du 4 mars 2015 adressé à Mr X indiquant que l’exemplaire de la convention collective transmis était incomplet car il manquait les avenants et un autre de Mr D, autre délégué du personnel, en date du 18 avril 2015 indiquant qu’il manque toujours l’avenant N° 9 du 20 février 2013..

Ce point n’est pas discuté par l’employeur.

- il n’a mis aucun local à la disposition des délégués du personnel :

Il ressort des pièces produites que :

— dans un courriel daté du 20 février 2015, Mme Y a, entre autres réclamations, exprimé auprès de Mr X son souhait d’ 'avoir les affichages des documents obligatoires dans un autre endroit afin que les salariés puissent les consulter en toute discrétion' ce qui sous tend l’idée de solliciter un local spécifique,

— dans un courriel daté du 18 avril 2015, Mr D mentionne à l’employeur qu’il n’a toujours pas mis à disposition les autres moyens alloués aux délégués du personnel,

Ce fait n’est pas matériellement discuté par la société Espace Déco Habitat qui se contente de répliquer que le magasin de St Priest disposait d’une salle de réunion et qu’elle n’a jamais refusé son accès aux deux délégués du personnel s’il en avaient besoin ce qui ne saurait suffire à répondre aux exigences légales sur l’attribution d’un local spécifique aux délégué du personnel.

- il conservait le registre des délégués du personnel dans le bureau de la direction qui était fermé avant le départ des salariés et des délégués du personnel :

Dans sa version applicable au litige, l’article L 1315-12 du code du travail dispose que :

'Sauf circonstances exceptionnelles, les délégués du personnel remettent à l’employeur une note écrite exposant l’objet des demandes présentées, deux jours ouvrables avant la date à laquelle ils doivent être reçus.

L’employeur répond par écrit à ces demandes, au plus tard dans les six jours ouvrables suivant la réunion

Les demandes des délégués du personnel et les réponses motivées de l’employeur sont, soit transcrites sur un registre spécial, soit annexées à ce registre.

Ce registre, ainsi que les documents annexés, sont tenus à la disposition des salariés de l’établissement désirant en prendre connaissance, pendant un jour ouvrable par quinzaine et en dehors de leur temps de travail.

Ils sont également tenus à la disposition de l’inspecteur du travail et des délégués du personnel.

Mme Y soutient que ce registre n’était accessible que pendant les heures de travail.

Il ressort des pièces produites qu’à la question posée lors de la réunion du 22 mai 2015, l’employeur a répondu que le registre des délégués du personnel était conservé dans le bureau de Mme X et que les salariés pourraient consulter ce registre sur demande et à leur convenance, en dehors de leurs horaires de travail, le 1er et le 3e jeudi de chaque mois, répondant ainsi aux exigences légale sus rappelées.

Le grief reproché n’est donc pas établi.

- il n’a pas créé de tableau spécifique pour les délégués du personnel, pour la diffusion d’information :

Mme Y soutient qu’il n’a pas été créé de tableau spécifique pour les délégués du personnel.

Ce point n’est pas discuté par l’employeur qui fait valoir toutefois que le tableau des affichages obligatoires de l’entreprise a été installé, ainsi qu’il ressort en effet du compte-rendu de la réunion du 27 février 2015 où il est mentionné qu’il est placé dans un lieu de passage dédié au personnel et qu’il a été validé par l’inspection du travail, mais qu’elle n’avait pas conscience qu’elle devait installer un autre tableau.

Ce fait d’ailleurs retenu par l’inspecteur du travail dans son refus d’autoriser le licenciement de Mme Y peut être retenu comme un fait d’entrave à l’exercice de son mandat de délégué du personnel.

- n’a pas respecté le crédit de délégation ni payé les heures de délégation :

Mme Y ne justifie d’aucun refus de lui payer ses heures de délégations.

Le courriel du 2 mars 2015 (pièce 21 salariée) dans lequel l’employeur a pris bonne note de ses deux rendez-vous à compenser par un temps égal sur un jour de congé et lui a rappelé que cela devait rester exceptionnel et soumis à son accord, dés lors que son activité doit être effectuée pendant les heures de travail, est manifestement sans rapport avec des heures de délégation.

Mme Y se prévaut par ailleurs d’un échange de mails par lesquels le 25 juin 2015, elle a sollicité le paiement de ses heures de délégation de janvier et février 2015 et la réponse apportée à ce courrier le 29 juin 2015 selon laquelle les heures de délégation n’ont pas été payées car aucune déclaration d’heure n’a été remise à la direction.

La cour confirme le jugement sur ce point qui a justement retenu que Mme Y n’apportait aucune justification sur la déclaration de ces heures et n’a donc pas retenu à ce titre un fait d’entrave à l’exercice du mandat de délégué du personnel.

- ne l’a pas régulièrement convoquée aux réunions des délégués du personnel pendant son arrêt maladie :

Il est exact et reconnu par l’employeur que, alors que Mme Y était en arrêt de travail depuis le 30 mars 2015, des échanges sont intervenus entre la direction et seulement le délégué du personnel suppléant, Mr D, sur la fixation de la prochaine date de réunion mais il apparaît que suite à la remarque de ce dernier sur ce point (pièce 122 salarié), une convocation a bien été adressée à Mme Y pour la réunion du 22 mai et du 19 juin 2015.

Pour le surplus, ainsi que rappelé plus haut, le fait pour la société Espace Déco Habitat d’avoir adressé à Mme Y des convocation aux réunions du 22 mai 2015 et du 19 juin 2015 à une adresse mail erronée (ajout d’un w devant Y) ne permet pas d’établir le caractère volontaire de cette erreur.

- ne l’a plus convoquée aux réunions depuis que le jugement prud’homal a été rendu :

Cette assertion de la salariée n’est pas établie par le récapitulatif des convocations à réunion des délégués du personnel (pièce 121) qui ne mentionne aucun nom et est contesté par l’employeur qui soutient au contraire avoir convoqué Mme Y à toutes les réunions des délégués du personnel entre janvier 2016 et décembre 2018, soit 18 réunions et que l’intéressée n’a participé à aucune de ces réunions ce dont il justifie par divers échanges entre les parties, dont notamment les réponses de Mme Y informant Mr X qu’elle ne participera pas aux réunions.

- a contraint les salariés à signer un document attestant de l’absence de consultation des salariés par les délégués du personnel avant les réunions :

Il est versé aux débats de part et d’autre une pétition difficilement lisible comprenant des mentions pré-imprimées selon lesquelles 'suite à la réunion du 18 mai 2015, il semblerait que les questions posées par le délégué du personnel aient été demandées par plusieurs salariés mais qu’en faisant le tour, personne ne semble avoir été consulté et que les personnes non consultées sont invitées à le faire savoir avec leur nom et signature'.

Ce document comporte le nom d’une dizaine de salariés et quelques signatures, dont celle de Mr AB G.

Mme Y verse encore une attestation de Mr G qui indique avoir signé cette feuille sous la pression de son responsable commercial et sous l’oeil de la direction.

Force toutefois est de constater que la société Espace Déco Habitat déclare n’être en rien intervenue dans la rédaction et la consultation de ce document qui résulterait selon elle d’une réaction spontanée de salariés sans aucune intervention de sa part et que la seule attestation de Mr G, non établie dans les formes prescrites par l’article 202 du code de procédure civile et non corroborée par d’autres éléments ne suffit pas à rapporter la preuve que la société Espace Déco Habitat en soit l’auteur ou même qu’elle en soit l’instigatrice.

- a lui même affiché les comptes rendus de deux réunions :

Mme Y soutient que la société Espace Déco Habitat a elle même affiché les compte-rendus des deux réunions dont la présentation démontre l’absence de dialogue, ainsi que les seules questions et réponses sans discussion lors des dites réunions.

La salariée n’explicite pas clairement en quoi cet affichage serait constitutif d’une entrave à ses fonctions de délégué du personnel et la société Espace Déco Habitat reconnaît avoir affiché un compte-rendu de cette consultation, qui contient seulement la réponse favorable ou non des délégués du personnel après cette consultation, à laquelle Mme Y n’assistait au demeurant pas, portant sur les congés payés (fixation des périodes et ordre de départ en congés), les jours fériés et chômés, nouveaux horaires collectifs de l’équipe commercial et la fixation de la journée de solidarité.

La cour ne retient pas à ce titre une entrave à ses fonctions de délégué du personnel.

- a cessé de lui envoyer tout courriel important :

La salariée soutient sans apporter de plus amples explications ni justifications qu’elle n’est plus destinataire de courriels importants et se prévaut à ce titre d’un seul courriel adressé aux salariés concernant ce qui a été dit à une réunion commerciale du jour, réunion à laquelle elle ne conteste pas avoir assisté, mais qui lui a été adressé à une adresse mail erronée.

Ainsi que rappelé plus haut, il n’est pas justifié du caractère volontaire de cette erreur et ce fait n’est pas retenu.

- l’a soumise à autorisation préalable pour venir exceptionnellement au magasin le lundi, mardi et mercredi après son élection en qualité de délégués du personnel :

Mme Y verse aux débats un courriel adressé à Mr X le 4 mars 2015 par lequel elle déclare avoir pris note de son souhait de soumettre à son accord préalable et de façon exceptionnelle sa présence les lundi, mardi et mercredi, un autre mail destiné à Mr S T lui demandant de voir, suite à un mail d’un client, si elle doit venir le lundi 23 mars pour faire le retour du métré ou s’il s’en occupe, mail resté sans réponses.

Ce point n’est pas contesté dans sa matérialité par la société Espace Déco Habitat qui réplique que Mme Y travaillait en principe du jeudi au samedi, qu’il n’était donc pas prévu qu’elle puisse travailler du lundi au mercredi, même si cela s’est ponctuellement produit, et qu’à l’issue de la réunion de délégués du personnel du 22 mai 2015 contenant de très nombreuses questions et 'rappels à la loi', elle craignait que la salariée lui reproche de l’avoir fait travailler en dehors de ses heures de travail.

Il convient de relever toutefois que Mme Y stigmatise ce fait au titre d’une entrave à ses fonctions de délégué du personnel alors que l’employeur fait valoir à juste titre que ses consignes ne concernent uniquement que son temps de travail et non pas l’exercice de son mandat de délégué du personnel.

La cour ne retient donc pas à ce titre une entrave à ses fonctions de délégué du personnel.

- entraves retenues par l’inspection du travail :

Mme Y se prévaut enfin pour la première fois en cause d’appel des motivations de l’inspection du travail pour refuser l’autorisation de son licenciement (pièce 153), sans pour autant les développer plus avant, et de celle du ministre confirmant ce refus (pièces 154) qu’elle liste de façon succincte en page 61 de ses écritures.

La cour relève que certains faits retenus par le ministre du travail, tels que l’absence de sérieux dans les recherches de reclassement de Mme Y suite à sa demande d’autorisation de licenciement en 2009 ou la radiation de la mutuelle sans portabilité après le prononcé du jugement du conseil des prud’hommes en 2018 qui n’était pas revêtu de l’exécution provisoire, sont postérieurs à la date d’introduction de l’instance et ne peuvent à l’évidence justifier une demande de résiliation présentée

en 2015.

Pour le surplus, il apparaît que le ministre a retenu, soit des faits déjà évoqués plus haut, soit d’autres faits tels que les erreurs commises dans la déclaration des salaires à la caisse primaire d’assurance maladie ou le fait d’avoir demandé à un salarié de jeter les affaires de Mme Y se trouvant dans son bureau pendant son absence pour arrêt maladie, pour lesquels il n’est apporté aucune justification, la cour ne pouvant à cet égard se contenter de se référer à la motivation de la décision du ministre, ou qui sont sans rapport avec des faits d’entrave aux fonctions de délégué du personnel.

* répercussion sur l’état de santé :

Mme Y soutient que les agissements de l’employeur ont entrainé une dégradation de ses conditions de travail relevant d’un harcèlement moral ont eu pour effet d’altérer sa santé physique et mentale et compromis son avenir professionnel.

Il ressort des pièces produites que :

— Mme Y a été placée en arrêt de travail à compter du 30 mars 2015 au titre d’un syndrome d’épuisement professionnel et n’a jamais repris le travail,

— dans un certificat médical du 11 août 2015, le docteur L, médecin généraliste, indique que Mme Y présente une véritable souffrance au travail avec forte baisse de l’estime de soi, des crises d’angoisse et une somatisation clairement en lien avec le travail et dans un autre certificat daté du 5 avril 2016, ce même médecin précise qu’elle n’est pas prête pour un retour à une activité professionnelle,

— le docteur M dans un certificat médical daté du 13 juillet de la même année confirme cette analyse en faisant état d’un syndrome de souffrance au travail,

— Mme Y a été suivie par une psychologue dans le cadre d’une psychothérapie en lien avec une dépression réactionnelle,

— selon le docteur N, spécialisé en médecine du travail, Mme Y n’a pas réussi à identifier les risques que présentait pour sa santé la violation d’une organisation de travail qui s’est progressivement installée ce qui a entrainé des conséquences psychologiques sévères,

— le 12 septembre 2018, la caisse primaire d’assurance maladie a notifié à Mme Y l’avis favorable du CRRMP et la prise en charge de sa maladie 'hors tableau’ au titre de la législation professionnelle.

Ces éléments médicaux qui concordent tous, suffisent à établir l’existence d’une dégradation de l’état de santé de Mme Y en lien avec son activité professionnelle, notamment ce qu’elle a ressenti comme étant une dégradation de ses conditions de travail, peu important par ailleurs que la commission ait déclaré la décision de reconnaissance d’une maladie professionnelle inopposable à l’employeur pour des motifs d’ailleurs de forme liés au non respect du principe du contradictoire, ainsi qu’il ressort de l’examen de la décision de cette commission.

Il résulte ainsi des développements qui précèdent que :

— Mme Y a été à plusieurs reprises victime d’un comportement grossier, agressif ou de nature à l’humilier de la part du directeur de l’entreprise ou du responsable du magasin,

— ces derniers n’hésitaient pas à lui couper la parole lors de réunions et à l’empêcher de s’exprimer lors de réunions,

— elle a fait l’objet d’une mise à l’écart de la part de la direction,

— en 2014, Mr X lui a refusé ses demandes de congés,

— l’employeur a entravé l’exercice de son mandat de délégué du personnel, entrave caractérisée par une communication incomplète de la convention collective et de ses avenants, l’absence de mise à disposition d’un local spécifique aux délégué du personnel et l’absence d’installation d’un tableau d’affichage spécifique aux communications des délégués du personnel,

— Mme Y a subi une dégradation de son état de santé en lien avec son activité professionnelle.

La cour relève en conséquence que Mme Y établit la matérialité de faits précis et concordants lesquels pris dans leur ensemble permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral.

Il appartient dés lors à l’employeur de rapporter la preuve que les agissements reprochés dont la matérialité est établie ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ces faits étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

S’agissant des congés, la société Espace Déco Habitat soutient que son refus d’accorder des congés en avril/mai 2014 était légitime car il correspondait aux règles antérieurement énoncées, à savoir la présence de 4 personnes en surface de vente, y compris le chef des ventes.

Ce point résulte en effet d’un document d’organisations des congés produit par la salariée elle même et n’est pas discuté par celle-ci.

Même si le planning produit est illisible comme l’a relevé le premier juge, les parties s’accordent pour considérer que lors de la semaine demandée par Mme Y, soit du 28 avril au 3 mai 2014, étaient présents Mr F, Mr O et Mr J, soit donc seulement trois personnes.

Par ailleurs, le caractère illisible du planning produit ne permet pas de vérifier comme le soutient Mme Y qu’il restait seulement 2 vendeurs au cours de la semaine du 27 juillet au 2 août 2014 étant constaté par ailleurs que la période particulièrement creuse de cette période à cheval sur les mois de juillet et d’août pouvait sans doute expliquer un allégement de la règle préconisant un effectif d’au moins 4 personnes.

Il peut donc être considéré que le refus de la société Espace Déco Habitat d’accorder à Mme Y ces congés cette semaine était justifié par le bon fonctionnement de l’entreprise et donc par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Pour le surplus, la cour constate que la société Espace Déco Habitat ne verse aux débats aucun élément matériel de nature à démontrer que les mesures prises étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, alors que notamment ses explications selon lesquelles elle n’était pas rompue aux multiples obligations pesant sur elle en matière de représentation du personnel, ne peuvent être retenues à titre de justification.

Dans ces conditions, il y a lieu de considérer comme établi l’existence d’un harcèlement moral commis par la société Espace Déco Habitat sur la personne de Mme Y, le jugement étant confirmé de ce chef.

Il est suffisamment justifié par les éléments médicaux ci-dessus décrits d’un préjudice de santé mais également moral résultant des faits de harcèlement dont la salariée a fait l’objet et qui a été justement indemnisé par le premier juge par l’allocation d’une somme de 8.000 €.

Le jugement est confirmé de ce chef.

3. sur la discrimination salariale et de délégué du personnel

Par application de l’article L.1132-1 du code du travail, dans sa version applicable au litige, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

La discrimination d’un salarié est illicite dès lors qu’elle repose sur un des motifs prohibés énumérés ci-dessus.

Il résulte de l’article L.2141-5 du code du travail, il est interdit à l’employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d’avancement, de rémunération et d’octroi d’avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail.

Cet article dispose en son 2e alinéa qu’un accord détermine les mesures à mettre en 'uvre pour concilier la vie professionnelle avec la carrière syndicale et pour prendre en compte l’expérience acquise, dans le cadre de l’exercice de mandats, par les représentants du personnel désignés ou élus dans leur évolution professionnelle.

En outre, au terme de l’article L 1134-1 du code du travail dans sa rédaction alors applicable, en cas de litige reposant sur les principes précités, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte; il appartient ensuite au juge d’apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte et dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme alors sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Mme Y fait valoir qu’elle a été victime d’une discrimination syndicale et fait état de :

— l’absence d’entretien individuel et d’accord permettant de concilier la vie professionnelle et la carrière syndicale,

— l’absence de convocation aux réunions du personnel,

— une discrimination salariale,

— l’absence de formation ou l’envoi à une adresse mail erronée des informations concernant les formations.

La société Espace Déco Habitat fait valoir en réplique que Mme Y n’a fait l’objet d’aucun

traitement discriminatoire.

* sur l’absence d’entretien individuel :

Mme Y soutient que l’accord visé à l’article L 2141-5 du code du travail n’a jamais été mis en oeuvre.

Elle ne précise pas toutefois en quoi l’absence de mise en place de cet accord entre le 30 décembre 2014, date de sa désignation en qualité de délégué du personnel, et le 30 mars 2015, date de son arrêt maladie dans une entreprise qui instituait pour la première fois la mise en place de délégués du personnel serait constitutif d’un fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte à son détriment.

Elle se prévaut par ailleurs, de l’absence d’entretien individuel au cours desquels il aurait pu être évoqué ses désirs d’évolution et ses besoins en formation.

Il ressort toutefois de ce qui précède que :

— Mme Y ne justifie pas ni ne soutient avoir sollicité la tenue d’entretien professionnel avant 2014,

— elle n’a été désignée comme délégué du personnel qu’en décembre 2014,

— elle reconnaît avoir bénéficié d’un entretien en 2014 au cours duquel elle a été informée de la reconduite de sa prime annuelle 2013,

— elle ne soutient pas ni ne justifie qu’elle ait été soumise à ce titre à un régime différent des autres salariés,

— elle a été en arrêt maladie ininterrompu à compter du 30 mars 2015.

Les faits allégués ne sont pas de nature à laisser supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte.

* sur l’absence de convocation aux réunions des délégués du personnel :

Mme Y soutient que depuis qu’elle est en arrêt maladie, elle n’est plus convoquée aux réunions des délégués du personnel, les convocations étant adressées par mails à une adresse erronée et qu’elle n’a plus été convoquée entre novembre 2015 et avril 2016 puis après septembre 2018.

Or, il résulte de ce qui précède que :

— Mme Y a été convoquée à la première réunion des délégué du personnel du 27 février 2015 à laquelle elle était présente,

— il n’est pas établi que l’erreur commise sur la convocation par mail(ajout d’un w devant Y) à la réunion du 22 mai 2015 soit volontaire,

— elle a par la suite été convoquée à toutes les réunions des délégués du personnel entre janvier 2016 et décembre 2018, soit 18 réunions et n’a participé à aucune de ces réunions,

— son mandat de délégué du personnel s’est achevé le 30 décembre 2018 et elle n’est pas fondée à se prévaloir de l’absence de convocation aux réunions postérieures à cette date.

* sur la discrimination quant à sa rémunération :

Mme Y se prévaut d’une double discrimination de rémunération portant sur le chiffre d’affaire de vente entre les salariés à temps et les salariés à temps partiel et sur le non paiement de ses crédits de délégation,

Il résulte de ce qui précède qu’il a été reconnu que l’employeur n’avait pas respecté le principe de l’égalité de rémunération entre les travailleurs à temps plein et les travailleurs à temps partiel.

Mme Y a toutefois été indemnisée à ce titre de sa demande de rappels de rémunération pour la période non prescrite de novembre 2012 à novembre 2013 et sa demande antérieure a été déclarée irrecevable comme étant prescrite.

Elle ne verse aux débats aucun élément de nature à démontrer que la situation se soit prolongée postérieurement à novembre 2014 et ne chiffre à ce titre aucune demande.

En outre, un tel fait n’est pas de nature à constituer un fait de discrimination entrant dans les prévisions de l’article L.1132-1 du code du travail.

Mme Y déclare encore que son employeur n’a pas respecté son crédit de délégation.

Il résulte toutefois des pièces produites que l’acceptation par l’employeur en mars 2015 de compenser deux rendez-vous par un temps égal sur un jour de congés (pièce 21) mais lui rappelant que son activité doit être effectuée pendant ses jours de travail les jeudi, vendredi et samedi n’est que la réponse à un précédent courriel par lequel Mme Y demandait de bien vouloir noter qu’elle était au travail les lundi 9 février et mardi 17 février, et elle est donc sans rapport avec un refus de lui payer ses heures de délégation.

Pour le surplus, il résulte de ce qui précède que Mme Y ne justifie pas avoir déclaré des heures de délégation et n’est donc pas fondée à se prévaloir d’un refus de l’employeur à ce titre.

Les faits allégués ne sont pas de nature à laisser supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte.

* sur l’absence de formation :

Il a été jugé plus haut que :

— l’envoi de courriels de convocation à des réunions d’information en mai 2014, à une formation en septembre 2013, à un congrès Mobalpa et à une formation en février 2015 à une adresse mail erronée ne suffit pas à établir le caractère volontaire de cette erreur et la société Espace Déco Habitat a justifié avoir rectifié l’erreur par l’envoi d’un nouveau courriel à la bonne adresse,

— Mme Y a reconnu avoir participé aux trois premiers événements,

— elle n’a versé aux débats aucun élément de nature à confirmer le refus agressif qu’aurait manifesté son directeur à sa demande de formation en décembre 2013,

— elle n’a pas non plus justifié des demandes de formation qu’elle aurait présentées et qui lui auraient été refusées par son employeur.

La cour constate à nouveau que les faits allégués ne sont pas de nature à laisser supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte au détriment de Mme Y.

Le jugement est donc confirmé en ce qu’il l’a déboutée de sa demande indemnitaire au titre d’une discrimination syndicale.

4. sur la résiliation judiciaire du contrat de travail

Sur le fondement de l’article 1184 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, il relève du pouvoir souverain des juges du fond d’apprécier si l’inexécution de certaines des dispositions résultant d’un contrat synallagmatique présentent une gravité suffisante pour en justifier la résiliation.

Le manquement suffisamment grave de l’employeur est de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.

La résiliation judiciaire du contrat de travail prononcée par le juge produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d’un licenciement nul si les manquements reprochés à l’employeur sont de nature à entraîner la nullité du licenciement, ce qui est le cas lorsque le manquement procède d’un harcèlement moral.

Lorsqu’un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d’autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, le juge doit d’abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail était justifiée; c’est seulement dans le cas contraire qu’il doit se prononcer sur le licenciement notifié par l’employeur.

A l’appui de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, Mme Y invoque l’ensemble des faits allégués au titre des manquements de l’employeur à ses obligations, y compris donc au titre du harcèlement moral.

Il résulte de ce qui précède que les faits de harcèlement moral sur la personne de Mme Y sont établis et que par ailleurs, l’employeur n’a pas respecté le principe de l’égalité de rémunération dans le versement des primes mensuelles et trimestrielles versées à la salariée.

Ces faits sont suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail et justifient la résiliation du contrat de travail ainsi que l’a justement retenu le premier juge.

Dés lors que les manquements reprochés à l’employeur sont de nature à entraîner la nullité du licenciement, s’agissant de faits harcèlement moral cette résiliation produit les effets d’un licenciement nul.

Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail et en ce qu’il a dit que cette résiliation judiciaire produit les effets d’un licenciement nul.

Dans la mesure où le contrat de travail s’est poursuivi et que la société Espace Déco Habitat a repris le paiement des salaires à compter du 1er juin 2019, il y a lieu, ainsi que le sollicite Mme Y, de fixer au 7 septembre 2020, date de son licenciement, la date d’effet de cette résiliation.

5. sur la demande de maintien du salaire après reconnaissance du caractère professionnel de l’arrêt maladie

Mme Y soutient qu’elle n’a pas été entièrement remplie de ses droits suite à la reconnaissance du caractère professionnel de son arrêt maladie et fait état d’un manque à gagner pour les périodes du :

—  24 mai 2016 au 29 mars 2018,

-30 mars 2018 au 1er avril 2019,

-15 avril 2019 au 1er juin 2019.

Elle réclame à ce titre le paiement d’une somme de 19.083,72 € correspondant à la différence entre les sommes perçues par elle de la caisse primaire d’assurance maladie ou de l’organisme de prévoyance avec le salaire mensuel moyen calculé sur les 12 derniers mois d’activité.

La société Espace Déco Habitat réplique que sa demande de réévaluation de son maintien de salaire après la reconnaissance du caractère professionnel de son arrêt maladie ne repose sur aucun fondement.

La cour constate que Mme Y ne précise pas le fondement juridique de sa demande et ne fournit pas de pièces justificatives, notamment un décompte détaillé et des décomptes précis de versement des indemnités journalières ou des compléments de salaire par la prévoyance.

Il convient, ajoutant au jugement, de débouter Mme Y de cette demande.

6. sur les demandes de Mme Y au titre de la rupture du contrat de travail :

Le salarié victime d’un licenciement nul et dont la réintégration est impossible ou qui ne la demande pas a droit, quelles que soient son ancienneté et la taille de l’entreprise :

— à une indemnité compensatrice de préavis avec les congés payés afférents si la rupture n’a pas été précédée d’un préavis,

— à une indemnité conventionnelle ou légale de licenciement,

Mme Y sollicite le paiement :

— d’un solde d’indemnité de préavis et les congés payés afférents,

— d’une indemnité spéciale de licenciement,

— du solde de l’indemnité compensatrice de congés payés,

— de dommages et intérêts pour licenciement nul,

— d’un rappel de salaire de juin 2018 au 30 juin 2019 et les congés payés afférents.

* solde indemnité de préavis et congés payés :

Mme Y réclame à ce titre la somme de 51,07 €, outre 5,11 € de congés payés afférents en faisant valoir que l’indemnité de préavis qu’elle a reçue n’a pas intégré sa prime d’ancienneté.

En l’absence de discussions spécifiques sur ce point, il convient, ajoutant au jugement, de lui allouer cette somme.

* indemnité de licenciement :

Mme Y sollicite l’allocation de l’indemnité spéciale de licenciement prévue à l’article L 1226-14 du code du travail.

La société Espace Déco Habitat fait toutefois observer à juste titre que son licenciement n’est pas

fondé sur une inaptitude d’origine professionnelle mais que le contrat a été rompu pour absence prolongée et nécessité de la remplacer définitivement et que cette disposition n’est donc pas applicable.

Pour le surplus, la cour retient le calcul opéré pour la salariée pour fixer le montant de son indemnité de licenciement, soit la somme de 35.085,64 € dont il convient de déduire la somme perçue au titre du solde de tout compte (30.406,15 €), soit un solde revenant à Mme Y de 4.679,49 €.

Le jugement est réformé de ce chef.

* solde indemnité compensatrice de congés payés :

L’article 8.2 de la convention collective applicable dispose que les salariés bénéficient de jours de congés payés supplémentaires aux congés annuels légaux, rémunérés comme tels, dans les conditions suivantes (…) 3 jours pour les salariés ayant plus de 25 ans d’ancienneté.

Ces congés, dont il n’est pas tenu compte pour l’application des dispositions relatives au fractionnement prévues dans le nouveau code du travail, sont fixés après accord entre l’employeur et le salarié suivant les mêmes modalités que celles applicables aux congés légaux.

Mme Y expose qu’à la date de son arrêt maladie le 29 mars 2015, il lui restait 16 jours de congés à prendre avant le 31 mai 2015, ce qui résulte en effet de la mention portée sur son bulletin de salaire, et que par la suite, elle n’a pas été en mesure de solder ses congés payés pour cause d’arrêt maladie d’origine professionnelle.

Elle chiffre comme suit sa demande :

— congés payés acquis du 1er juin 2013 au 31 mai 2014 (16 jours) : 1.590,07 €

— congés payés acquis du 1er juin 2014 au 31 mai 2015 ( 27,5 + 3 jours) : 2.860,26 €

—  3 jours d’ancienneté au titre de l’année 2015 : 310,97 €

— congés payés acquis du 1er juin 2016 au 31 mai 2017 (33 jours) : 3.420,69 €

— congés payés acquis du 1er juin 2019 au 31 mai 2020 (33 jours) : 3.420,69 €

— congés payés acquis du 1er juin 2020 au 6 septembre 2020 (8 jours) : 829,26 €

— congés payés acquis du 6 septembre 2020 au 6 décembre 2020 (7,5jours) : 777,43 €

— sur prime d’ancienneté au prorata des 6 mois (1,5 jours) : 155,49 €

soit un total de : 13.364,86 €

La cour valide ce calcul qui ne fait l’objet d’aucune discussion particulière par la société Espace Déco Habitat.

Après déduction de la somme perçue au titre du solde de tout compte (5.513,77 €) il revient à Mme Y de 7.851,09 €.

Le jugement est réformé de ce chef.

* dommages et intérêts pour licenciement nul :

Par ailleurs, le salarié dont le licenciement est nul a droit à une indemnité réparant l’intégralité du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins égale à celle prévue par l’article L. 1235-3 du code du travail, soit le total des salaires perçus au cours de ses 6 derniers mois de travail effectif.

En l’espèce, compte tenu des circonstances précitées de la rupture, du montant de la rémunération versée à Mme Y (3.109,72 €), de son ancienneté au jour de la rupture du contrat (environ 30 ans), de son âge à la date de la rupture du contrat, et au vu des justificatifs produits étant observé que Mme Y a bénéficié jusqu’en mars 2018 du versement d’indemnités journalières ou de compléments compensant une part importante de son salaire et qu’à compter du 1er juin 2019, elle a perçu de nouveau son salaire, il y a lieu de lui allouer, en application de l’article L.1235-3 du code du travail, la somme de 60.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né de la nullité du licenciement pour faute.

Le jugement est également confirmé en ce qu’il ordonné la remise des documents de rupture rectifiés sauf à préciser que cette remise devra intervenir dans les deux mois suivant le prononcé de l’arrêt sans qu’il y ait lieu d’assortir cette injonction du prononcé d’une astreinte, aucun élément en l’espèce ne permettant de penser que l’employeur va se soustraire à cette injonction.

Il convient enfin, conformément à la demande de la salariée de dire que les créances indemnitaires sont dues nettes de CSG et de CRDS.

* sur la demande de rappel de salaire de juin 2018 au 30 juin 2019 et les congés payés afférent :

Contrairement à ce que soutient la société Espace Déco Habitat dans ses écritures (page 141), il n’apparaît pas que Mme Y ait renoncé à cette demande et il n’y a donc pas lieu de lui en donner acte.

Il ressort en effet du dispositif de ses conclusions qu’elle sollicite la condamnation de l’employeur à lui payer la somme de 37.817 € de rappel de salaire de juin 2018 à juin 2019 correspondant à la fin de la période de protection, sans expliciter d’ailleurs plus avant le fondement de sa demande.

La société Espace Déco Habitat fait observer à juste titre que la période de protection de Mme Y du fait de ses fonctions de délégué du personnel a expiré le 30 juin 2019.

Ainsi, au jour du licenciement, date retenue pour la prise d’effet de la résiliation du contrat, Mme Y ne bénéficiait plus du statut protecteur.

Il convient, réformant le jugement, de débouter Mme Y de cette demande.

7. sur le remboursement Pôle Emploi :

S’agissant d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, il y a lieu d’ordonner, d’office et par application de l’article L 1235'4 du code du travail, le remboursement par la société Espace Déco Habitat à Pôle Emploi des indemnités de chômage payées à Mme Y à la suite de son licenciement, dans la limite de six mois de prestations.

8. sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives à l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

La cour estime que l’équité commande de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de Mme Y en cause d’appel et il convient de lui allouer à ce titre la somme de

2.000 €.

Les dépens d’appel sont mis à la charge de la société Espace Déco Habitat qui succombe pour l’essentiel dans sa tentative de remise en cause du jugement.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf :

— en ce qu’il a alloué à Mme Y une somme de 1.500 € à titre de dommages et intérêts pour rupture d’égalité de traitement,

— en ce qu’il a alloué à Mme Y une somme de 37.817 € à titre de salaires pour la période de juin 2018 à juin 2019 au titre de la violation du statut protecteur,

— sur le montant du solde de l’indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, de l’indemnité de licenciement et des dommages et intérêts pour licenciement nul

statuant de nouveau sur les points infirmés et y ajoutant :

Déclare irrecevable la demande de Mme Y en paiement de dommages et intérêts pour absence de paiement des primes mensuelles et trimestrielles antérieures à novembre 2002.

Fixe au 7 septembre 2020 la date d’effet de la résiliation.

Déboute Mme Y de sa demande en paiement au titre de maintien du salaire après reconnaissance du caractère professionnel de l’arrêt maladie et des congés payés afférents.

Condamne la société Espace Déco Habitat à payer à Mme I Y la somme de 51,07 €, outre 5,11 € de congés payés afférents au titre du solde de l’indemnité de préavis outre les congés payés afférents.

Condamne la société Espace Déco Habitat à payer à Mme I Y la somme de 4.679,49 € au titre du solde de l’indemnité de licenciement.

Condamne la société Espace Déco Habitat à payer à Mme I Y la somme de 7.851,09 € au titre du solde de l’indemnité compensatrice de congés payés;

Condamne la société Espace Déco Habitat à payer à Mme I Y la somme de 60.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul.

Déboute Mme I Y de sa demande en paiement de rappel de salaire pour la période de juin 2018 à juin 2019 au titre de la violation du statut protecteur;

Condamne la société Espace Déco Habitat à rembourser à Pôle Emploi les sommes que cet organisme a été amené à verser à Mme Y en suite de son licenciement, dans la limite de 6 mois de prestations;

Ordonne à la société Espace Déco Habitat de remettre à Mme I Y les bulletins de salaire rectifiés, le certificat de travail et l’attestation Pôle Emploi, conformes au présent arrêt dans un délai de deux mois à compter de son prononcé;

Dit n’y avoir lieu d’assortir cette injonction du prononcé d’une astreinte,

Dit que les sommes allouées par le présent arrêt supporteront, s’il y a lieu, les cotisations et contributions prévues par le code de la sécurité sociale;

Dit toutefois que les créances indemnitaires allouées sont dues nettes de CSG et de CRDS.

Condamne la société Espace Déco Habitat à payer à Mme I Y la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

Déboute les parties de toutes demandes plus amples ou contraires ;

Condamne la société Espace Déco Habitat aux dépens d’appel.

Le Greffier Le Président

AC AD AE AF

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Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 30 avril 2021, n° 18/04407